Alors qu’elle navigue entre les songes à la recherche de frissons, Annie est brusquement aspirée dans un nouveau couloir. Elle ne s'en inquiète pas : à mesure que son pouvoir progresse, des courses inédites lui sont dévoilées régulièrement, comme autant de bonbons colorés. Pourtant, cette fois, c’est différent.
Cette fois, Annie sent quelque chose d’autre que le doux ronronnement des phantasmes qui s’offrent à elle, caressant ses mains architectes autant que son esprit. Quelque chose de grand, de silencieux. Ça ne rôde pas, c’est juste... Là. Elle lance son regard à travers les vrilles nacrées, vers la source de la sensation étrangère qui s’est désormais nichée au creux de son ventre, s’enfonçant toujours plus loin dans la nuit. Filant droit vers son but, flirtant allègrement avec les rubans oniriques, elle semble danser entre les lambeaux des rêves éphémères.
Au détour d’un songe particulièrement attristant, tenant davantage du souvenir que du désir inavoué, Annie sent le bourdonnement muet s’accentuer, se préciser, s’affiner. Elle est toute proche, elle le sait. Redoublant d’efforts, elle avance péniblement dans une nouvelle zone, s’accrochant aux images à défaut de s’y réfugier.
Elle apparaît alors. Une porte rayonnante d’obscurité, trônant au fond de l’allée qui se découvre lentement devant elle. Son bras se tend, son esprit mobilise ses dernières gouttes de volonté pour s’élancer vers le cadre noir. Aussitôt, Annie est violemment expulsée, projetée en arrière comme si une raquette de tennis gigantesque l’avait confondue avec sa balle. La brutalité du choc la tire du demi-sommeil transi dans lequel elle baignait. Elle se redresse, montée sur ressorts par la douleur qui commence à affluer, irradier dans son corps entier. Repoussant la couverture, elle soulève son t-shirt de pyjama, sent la panique s’insinuer en elle à la vue des ecchymoses bleuâtres qui se dessinent sur toute la partie gauche de sa silhouette.
Annie hurle.