"Que fais-tu là ?"
Je ne pus retenir un pouffement.
— Je devrais te retourner la question, plutôt.
— Moi, j’erre, au hasard, où le vent me porte. Il était donc logique, et prévisible, que je finisse un jour devant chez toi. Mais toi, Noé, pourquoi restes-tu sur ce balcon, bien confortable, tranquille ?
Sa voix est sereine, posée, moelleuse. Mais j’y sens poindre une flèche acide, un arrière-goût accusateur. Je reste sans voix, un instant. Je relance :
— Qui es-tu, au fond ?
— Tu esquives mes questions, Noé Solian.
L’intonation s’est faite dure. Sans être rude, ni agressive. Elle ne me laisse plus de porte de sortie.
— J’écris. Simplement. Je me laisse inspirer par ce monde qui accélère sans cesse, qui tourne autour de moi. Je me laisse me perdre, rêver.
L’écharpe claque au vent, danse.
— Alors oui, je suis peut-être lâche, je ne me mouille pas, au fond. Mais est-ce vraiment important ?…
Une moue sceptique se dessine sur le visage ridé de l’homme. Je choisis mes mots, soigneusement.
— J’écris pour me trouver moi-même, au creux de mes mots. M’inspecter. Être franc, presque nu. Mais pudique tout de même.
Une bourrasque siffle, ma girouette accélère. Un léger sourire sur ses lèvres.
— Pour transcrire ce vent, aussi. Ses sautes d’humeur, ses caprices, ses étreintes. Le vent est le plus vieux des enfants, je crois. Je le raconte jour après jour, et le découvre au fur et à mesure. On le sent mieux, d’en haut...
Me voilà donc de retour pour lire la suite de ton histoire !
Ce chapitre est court, mais je préfère donner mon envie à chaque lecture. J’aime bien, ça respire la poésie et le choix des mots est bien choisi. Ce n'est pas des mots communs, ils sont un peu plus recherchés, littéraires. On sent une tension douce entre les personnages, un mélange de calme et de piques subtiles. Et le vent est presque un personnage à part entière (elle claque l'écharpe, elle envoie une bourrasque).
On s'imagine très bien la scène comme si on y était ;-)
Petite remarque pour "Sa voix est sereine, posée, moelleuse", tu voulais dire "mielleuse" ? En soit moelleuse est correct également, mais je préfère relever au cas où, parce que ça surprend à la lecture ah ah, j'ai tout de suite eu l'image d'un pain moelleux !
Allez, je passe au chapitre suivant ^^
L’objectif était vraiment d’avoir ce personnage comme catalyseur, élément déclencheur de l’histoire qui bouscule Noé, le fait se remettre en question. C’est donc super cool que cette tension douce fonctionne… Merci pour la remarque sur l’immersion, c’est important pour moi à l’écriture!
Moelleuse était intentionnel(mielleuse ferait renard de la fontaine un peu, je trouve) ça sort de la lecture? Je voulais montrer une voix posée, presque confortable…
Merci pour le commentaire et à bientôt j’espère!