32 - Cache-cache

Sélène se réveilla en sursaut. Ça arrivait souvent, depuis qu’elle avait sauté. Ça faisait trois semaines, cinq jours et trente minutes environ, mais rien n’avait changé. Elle était revenue à l’école, et pourtant. Encore et encore, elle revoyait les visages flous des médecins. Elle apercevait l’espoir qui se frayait un passage sur leur visage, elle distinguait les diagnostics. L’alcool dans son sang. Elle se souvenait des aiguilles qu’elle avait toujours détestées.

Ce n’était qu’un épais brouillard. Tout était devenu flou. Les premières inquiétudes de sa famille. Les questions. Les rendez-vous de contrôle pour son poignet. L’école. Ses amies. Même Léo et Sylane s’étaient effacés, ces trois dernières semaines. Peut-être qu’elle n’était qu’une gomme qui efface, efface, efface.

– N’oublie pas tes affaires de sport !

Heureusement que sa maman était là pour veiller sur elle. Il n’y avait que Célestine qui semblait tangible dans sa tête. Visiblement, elle avait tenu sa promesse : Maïwenn n’avait pas parlé des lettres, et Léo… Léo, elle ne savait pas. Il était brumeux, lui aussi. Il restait à distance. Parfois, elle croyait qu’il l’observait, mais quand elle tournait la tête, il parlait avec quelqu’un. Sans doute était-ce son imagination qui lui jouait des tours. Parfois, elle se demandait si l’alcool pouvait rester aussi longtemps. Elle espérait que la culpabilité avait été effacée, elle aussi. Elle espérait qu’il était heureux.

– Bonne matinée, ma chérie, à tout à l’heure.

Même si Sélène était peut-être une gomme qui efface, efface, efface, la douleur ne voulait pas disparaître, elle. Elle était là, prête à surgir dès que le brouillard s’effilochait. Un monstre de feu qui ne lui laissait jamais beaucoup de répit, avec ses longues griffes et ses dents tranchantes. Mais Sélène ne savait plus comment lui échapper. Tout était devenu si étrange. Avant, elle pouvait écrire, elle pouvait mourir. Sauf que l’écriture ne changeait plus rien, et la mort lui était interdite.

Elle avait oublié comment faire. Elle avait oublié comment vivre.

– Sélène ! Comment ça va ?

Elle tourna la tête. Norelia. C’était facile de répondre à sa mère sans y réfléchir. Sélène était dans un monde, les autres dans le leur. Ça entrait rarement en collision. Mais Noli voulait entrer dans celui de Sélène. Elle voulait peut-être comprendre, même si c’était impossible.

– Coucou Noli. Ça va ?

Elle ne répondait pas à la question. Jamais. La plupart du temps, personne ne le remarquait. Mais Sélène vit bien le froncement de sourcils de son amie.

– Oui ! Tu reviens en cours de sport, c’est trop cool ! On fait du base-ball, aujourd’hui. Ça va être génial ! On joue contre la classe de Julien, et…

Celle de Julien ? Ça voulait aussi dire… celle de Léo. Tant pis. Ça ne changeait rien, de toute façon. Elle n’aurait qu’à faire comme d’habitude. Elle franchit la porte des vestiaires. Se changea. Laça ses chaussures. Attendit Norelia. Marcha mécaniquement jusqu’à la salle de sport. Une bande de garçons se faisait des passes. Éclairs jaunes. Norelia se dirigea vers celui qui avait la balle. Julien.

Le ventre de Sélène se tordit. Ses pieds refusèrent d’avancer. Léo était trop proche. Elle inspira. Non. Tout était brouillard. Elle fit un pas. Puis deux. Elle garda les yeux fixés au sol. C’était plus facile. Elle resta en retrait. Elle voyait les baskets des gars, tantôt vert et noir, tantôt jaune fluo, tantôt bleu électrique. Elle attendit. Enfin, Norelia revint vers elle.

– Bonjour tout le monde ! Aujourd’hui, base-ball. On a vu les règles la semaine passée, vous vous souvenez ? On va faire quatre équipes, deux par classe, et…

Sélène n’écouta pas le reste. Elle s’en fichait. Elle suivit Norelia, fit les mêmes gestes qu’elle. Tout n’était que brouillard. Bientôt, elle se retrouva sur un banc. Son amie lui chuchota :

– Sélène, j’y vais, après c’est à toi. Tu t’en sortiras ?

– Hmmm.

Elle applaudit comme tous les autres quand Norelia arriva à la première base. Elle n’avait pas la moindre idée de ce qu’il s’était passé.

– Sélène ! C’est à toi.

La voix du prof la sortit de sa torpeur. Elle se leva lentement, s’empara de la batte qui traînait par terre. Devant elle, prêt à lui lancer la balle : Julien. Et derrière… Léo. Le catcheur. Elle frissonna. Ce n’était rien. Elle pouvait le faire.

Premier lancer : balle bien trop haute.

Deuxième lancer :

– Foul ball, dead ball ! hurla le prof.

La batte avait tinté, la balle avait rebondi… mais était sortie du terrain.

Troisième lancer : Sélène bougea. Elle n’aurait pas dû. Elle n’était pas concentrée. Elle avait l’impression de se transformer en flammes sous le regard de Léo. Il devait détailler chacun de ses gestes, chacun de ses muscles trop tendus. Petite, elle n’y aurait même pas pensé…

– Allez Sélène ! l’encouragea Maïwenn, en troisième base.

La pression monta encore d’un cran. Elle tremblait si fort que la batte bougeait.

– Respire, Sélène, murmura une voix derrière elle. Tout va bien.

Mais non, tout n’allait pas bien. Comment Léo pouvait comprendre ? Il était juste là, beaucoup, beaucoup trop proche. Elle se rappelait leur baiser. Il était venu par derrière, là aussi. Et s’il l’embrassait là, maintenant ? Devant ses amies, devant Sylane, devant tout le monde. Non. Sa respiration s’accéléra.

Quatrième lancer : elle loupa la balle, mais Léo aussi. Elle courut. De toutes ses forces. Fuir. Il fallait fuir. Enfin, elle toucha la base une. Maïwenn marqua le point. Tout allait bien.

Sélène se replongea dans sa torpeur. Elle trottina vaguement jusqu’à la base suivante, mais de toute façon, le troisième out signa la fin de la manche. Elle s’assit sur le banc, entre Norelia et Chloé. Mais le feu ne s’était pas éteint. Le feu la brûlait, la consumait tout entière, partait de son cœur pour se faufiler dans tous ses vaisseaux sanguins, jusqu’à ses orteils, jusqu’à ses doigts qui fourmillaient.

– Sélène ? Mais qu’est-ce que tu fais ? Viens, on va aux toilettes…

Norelia la prit par le coude et l’emmena dans les vestiaires.

– Mais qu’est-ce qui te prend ? Je sais que c’est normal que tu n’ailles pas super bien, mais ça ? Non, tu ne peux pas… Tu es déjà fragile, alors fais attention, hein ! Et puis…

Mais Sélène ne l’écoutait déjà plus. Elle fixait d’un œil hagard ses ongles rougis par le sang et les minuscules coupures sur le dos de sa main. Qu’avait-elle fait ?

<3

Elle ne savait pas, mais elle avait recommencé. Tout à coup, elle ouvrait les yeux, et elle voyait les marques rouges, parfois cicatrices, parfois piquantes. Le dos de ses mains, surtout, et peu à peu, ses paumes, ses avant-bras. Bizarrement, les gens ne remarquaient rien. C’était comme ça, et puis voilà. Son poignet était guéri, alors personne ne s’approcha trop près. Sélène espérait juste que Léo ne verrait rien non plus, lors de l’après-midi jeux.

– Hello ! Comment ça va ? s’enquit Lauren. Ça fait tellement longtemps !

Abu sautillait autour d’eux en aboyant. Il semblait toujours heureux, lui. Sélène cacha ses mains dans les manches de son pull. Léo remarquerait sûrement les marques, sinon. James s’approcha.

– Hey ! Tu vas bien ? Loïc nous a racontés ta chute… Mais tu t’es bien remise, non ?

Elle le rassura, tout sourire. Parfois, au-dedans, tout au fond, elle avait honte. Honte de leur mentir comme une arracheuse de dents. Ils étaient si proches d’elle… et ils la connaissaient à peine. Ici, seul Léo pouvait en deviner un peu plus.

Elle s’avança jusqu’à la cuisine. Léo lui tournait le dos, affairé aux fourneaux. Petites crêpes. Elle ne dit rien, mais il sentit sa présence. Il mit la pâte sur la plaque, déposa la spatule. Il se retourna. Le tourbillon de feuilles mortes avala Sélène tout entière. Plus agité que d’habitude. Elle le connaissait. Hésitation. Inquiétude. Pourquoi ? Il était censé avoir oublié. Oublié la raison de sa chute. Elle vérifia que ses mains étaient bien cachées, et s’échappa du tourbillon qui menaçait de la noyer.

Elle n’avait pas le droit de rentrer avec de nouvelles marques. Pas ici.

– On commence un grand jeu, déclara Adeline.

– Ça vous va, Monopoly ? suggéra Mathéo.

– Oui ! se réjouit Coralie.

Nice[1]. Venez, on s’installe au salon.

Les six enfants s’installèrent autour de la table basse, moitié sur le canapé, moitié par terre.

– Mais Sélène, je veux pas jouer toute seule ! pleurnicha Maëlys.

Sa grande sœur ouvrit la bouche pour parler mais Léo fut plus rapide.

– Joue avec Bruno, alors, comme ça vous serez trop forts !

Clin d’œil. Ça rappela à Sélène pourquoi elle l’aimait tant.

On distribua l’argent et les pions – Sélène gagna le petit chat à feuille caillou ciseaux. Bruno lança le dé. Puis Coralie, puis Léo, puis Mathéo, puis Sélène. Et ainsi de suite. On se disputa les terrains. Mais plus on jouait, plus Sélène partait… ailleurs. Ailleurs loin de Léo et de son inquiétude, ailleurs loin du vide qui l’engloutissait et des cendres de son cœur.

– C’est à qui ?

– Sélène.

Ça la ramena brutalement sur terre. Elle tendit la main vers le dé. Léo aussi. Son cœur s’affola. Il eut un mouvement de recul. Il les avait vues. Les marques. Les cicatrices brunâtres. Les cicatrices rouge vif. Il soutint son regard. Question silencieuse. Mais comment lui expliquer ? Elle n’était qu’à moitié consciente. Et puis elle revenait, et ses ongles étaient rouges.

– Il faut qu’on parle, murmura Léo.

Les autres n’écoutaient pas. Ils débattaient sur un film à l’affiche, ou une sortie de classe, ou de la physique quantique, ou peu importe. Sélène inclina la tête. C’était trop tard, de toute façon, mais elle avait besoin de savoir. Jusqu’où Léo avait oublié ? Qu’avait pris Célestine ?

– Mais non ! Je t’ai déjà expliqué… Tu comprends vraiment rien, et puis…

– Laissez tomber, non ? proposa Léo, qui s’était détourné de Sélène.

– Mais elle a jamais vu Shrek ! explosa Mathéo.

Léo éclata de rire, suivi par Sélène, une demie seconde en retard. Ça sonnait faux, mais personne ne s’en rendit compte. Peut-être qu’elle n’était pas la seule à jouer un rôle.

Léo

– Bah, on n’a qu’à faire un cache-cache en attendant, non ?

Je n’en peux plus. Je dois lui parler. Maintenant. C’est quoi, toutes ces marques ? J’ai peur de comprendre. J’ai peur de savoir.

Les autres acquiescent, mais je ne regarde que Sélène. J’entends vaguement que Mathéo est désigné pour compter. Je m’en fous, tant que c’est ni elle, ni moi.

– On se cache jusqu’où ?

– En bas, je réponds. C’est plus facile pour Mat, vu qu’il râle tout le temps.

Ça nous laissera surtout plus de temps pour discuter. Au fond, une petite voix me rappelle qu’il y a Sylane. Qu’on s’est rapprochés, depuis la chute de Sélène. Mais ça ne suffit pas. Il y a encore un immense gouffre entre nous, qu’on n’arrive pas à combler. Et Sélène est ma meilleure amie… Sylane me pardonnera.

– Suis-moi, je lui chuchote quand Mat commence à compter.

Elle incline la tête, on dirait qu’elle va poser une question, mais non. Elle me suit dans l’escalier, dans le couloir. Impression de déjà-vu, mais maintenant, c’est l’inverse. Elle s’arrête sur le seuil de ma chambre.

– Ah, oui. Ne fais pas attention, c’est… peu importe.

Les cartons sont encore là, après toutes ces semaines. Un peu défaits, mais pas beaucoup. Ma penderie est encore vide. Ça fera une cachette parfaite.

– Installe-toi.

Je lui montre l’armoire. On sera à l’étroit, mais c’est pas grave. Comme quand on était petits. Elle s’assied, ses jambes repliées contre elle. Elle est minuscule, comme ça. Comme une petite souris qui essaie d’échapper au chat. Et le chat, c’est moi.

Je me contorsionne pour rentrer dans la penderie. Nos jambes s’effleurent, je vois bien qu’elle aimerait reculer mais c’est impossible, elle est prise au piège. Depuis quand c’est devenu comme ça ? Je referme les battants, il n’y a qu’un maigre filet de lumière. Le noir nous engloutit. Puis mes yeux s’habituent, et je la vois de nouveau.

Elle enfonce ses ongles dans ses paumes, puis s’arrête. Je ne dis rien. Je n’ai pas vu.

– On sera tranquilles un moment. Mat n’est pas censé nous chercher ici…

Elle garde le silence. Ses mains sont bien à plat sur ses genoux. Peut-être pour éviter de trembler. Mais Sélène expose toutes les entailles. J’ai tellement envie de la prendre dans mes bras pour la réconforter.

– Ça va ?

– Oui.

Elle ment. Sa voix qui tremblote, et puis ses mains, toutes les cicatrices qu’elle… qu’elle s’est infligées. Tout la trahit. C’est évident. Et… tout est ma faute. Encore.

<3

C’était un piètre oui. Il savait, bien sûr. Que c’était faux. Mais que pouvait-elle dire d’autre, n’est-ce pas ? Il voyait tout, savait tout d’elle. Ils se connaissaient depuis tellement longtemps… Elle n’était qu’un livre ouvert, devant lui. Il était si bon lecteur.

Hésitant, Léo s’empara prudemment de sa main, entremêla ses doigts aux siens. Dans le filet de lumière qui filtrait par l’interstice, Sélène observa leurs mains jointes. Son cœur battait la chamade.

– Léo… l’avertit-elle.

Ils n’avaient pas le droit. Il y avait Sylane. Elle s’en était tellement voulu après leur baiser. Elle ne pouvait pas recommencer. Mais Léo n’écouta pas. Il passa son pouce sur toutes les traces du dos de sa main, blessure après blessure. Tellement lentement. Sélène s’était figée, incapable de bouger, incapable de parler. Léo la faisait espérer. Et elle n’en avait pas le droit. Malgré la douceur de ses gestes, malgré leur bienveillance, il enfreignait la règle.

– Sylane… finit-elle par murmurer.

Infime hésitation. Sélène en profita pour retirer sa main. Un blanc s’installa. Au loin, dans un autre monde, on entendait Mathéo les appeler. Mais ça ne semblait par réel, contrairement à leurs souffles emmêlés, à la chaleur de leur proximité, au silence pesant. Le nom de Sylane flottait entre eux.

– Sélène… Comment tu vas ?

Pas bien. Mais elle ne pouvait pas le dire. Elle préférait l’ironie, ces derniers temps.

– C’est pas comme si je venais de tomber d’une falaise, de toute façon.

Elle préférait aussi détourner la conversation, le plus souvent.

– Et toi, avec Sylane ?

Elle aimait se faire du mal, aussi. Ça l’apaisait, d’une certaine manière.

– Je sais pas… Elle est sympa. On s’est rapproché depuis que… que t’es tombée. Enfin bref. Tu sais que tu peux pas voler, hein ? Dis-moi que ça n’arrivera plus jamais.

Non… C’était impossible. Elle ne pouvait pas promettre. Pas quand il ne restait qu’un mois environ avant de pouvoir définitivement disparaître. Pour de vrai, cette fois. Elle aimait tellement Léo, mais ça ne suffisait pas. Ça ne suffisait plus.

– Hey.

Il tendit la main, comme pour attirer son attention, ou pour lui caresser la joue. Mais son attention, il l’avait déjà. Il avait hésité sur « tomber ». Comme s’il n’était pas sûr. Comme s’il savait. Mais c’était impossible.

– Tu ne peux pas mourir. Pas maintenant. Écoute, Sélène… Tu m’inquiètes. Toutes ces marques, sur tes mains… Je ne sais plus quoi faire, soupira-t-il. Je tiens tellement à toi, et… enfin, tu peux même pas imaginer à quel point.

Une larme roula sur la joue de Sélène. Traîtresse. Elle voulut l’essuyer avec sa main, mais Léo fut plus rapide. Il l’écrasa doucement, comme s’il craignait une tempête ou le déferlement d’un ouragan salé. Comme s’il craignait de se couper sur le verre éclaté qu’elle était devenue. Ça lui faisait tellement mal… Mais elle était incapable de le repousser.

Elle savait qu’elle le regretterait, après. Qu’elle se blesserait encore plus. Elle sortirait de la penderie, et la lumière la brûlerait. Léo ne serait pas là pour lui offrir une place. Sélène avait fait une immense erreur. Il avait pu voir son cœur blessé, il voudrait le réparer, mais il… elle mourrait avant. Un instant, elle avait pensé que sa vie pourrait changer. Elle avait écouté Célestine, mais Léo ne l’aimait pas. Elle avait honte d’avoir cédé à l’espoir.

L’armoire s’ouvrit en grand.

– Ah, enfin ! On avait dit pas à l’étage, Léo ! Qu’est-ce que tu fais ici ? Et Sélène ? Vous vous foutez de nous ? Ça fait des siècles qu’on vous cherche partout. Et nous répondre, c’était en option ?

Le déferlement de mots s’interrompit. Mathéo fronça les sourcils.

– Qu’est-ce que vous faisiez ensemble, franchement ? Je croyais qu’il y avait Sy…

Mathéo se tut quand Léo se releva d’un bond, cachant Sélène derrière lui. Il semblait prêt à bondir sur son frère.

– Tais-toi ! le coupa-t-il froidement.

– Mais…

– J’ai dit : tais-toi ! Ça te regarde pas ! T’as pas à fouiner comme ça, tout le temps, dans ma putain de vie…

Sélène n’avait jamais vu Léo aussi furieux. Elle se remit debout, tirant sur ses manches. Ses mains étaient camouflées. Elle devait faire quelque chose. Léo n’était que rage. Épaules crispées. Poings serrés. Elle posa des doigts tremblants sur son bras. Il tressaillit, reporta son attention sur elle. Sélène ne vit qu’un éclat de sa fureur. Le tourbillon de feuilles mortes tournoyait vite, très vite, trop vite. Mais aussitôt, il ralentit. Il s’adoucit. Les feuilles mortes s’apaisèrent.

– Goûter ! hurla Lauren depuis le rez-de-chaussée.

Coralie jeta un dernier coup d’œil à Léo et Sélène, et s’éloigna dans le couloir en fredonnant. Maëlys et Bruno la suivirent. Mathéo soupira, et leur emboîta le pas aussi. Sélène laissa tomber sa main. Elle et Léo descendirent à leur tour. Cinq minutes plus tard, autour de madeleines au beurre, tout était oublié.

Sous la table, les ongles de Sélène grignotèrent encore un peu de sa peau. Elle était persuadée que Léo l’avait remarquée, mais il ne dit rien. Pas devant les autres.

 

[1] Chouette ! en anglais.

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