À peine s’étaient-ils tous arrêtés pour leur première pause de la journée que Nesli lui fit signe de venir. Elles s’éloignèrent ensemble du groupe, tacitement pour aller soulager leur vessie plus loin dans les hautes herbes. Domyrade se doutait que Nesli profiterait d’être à l’écart des autres pour parler un peu tranquillement avec elle.
− Qu’est-ce que tu penses d’Enza ?
Elle s’attendait aussi à cette question-là. Elle y avait déjà réfléchi de son côté pendant qu’ils marchaient, et sa réponse vint sans hésitation :
− Je le trouve un peu bizarre, mais il ne m’impressionne pas.
− Il a quand même deux fois ton âge, fit remarquer Nesli. Et il fait presque deux fois ta taille.
Elle haussa les épaules avec une nonchalance délibérée.
− Je crois que moi, je l’impressionne, poursuivit son amie.
− Et ça t’étonne ?
− Pas tellement. Mais ce n’est pas très agréable.
− Si ça peut te réconforter, ce n’est pas que toi. Je crois qu’on lui fait tous un peu peur. Imagine s’il savait en plus que nous avons des pouvoirs spéciaux... Peut-être bien qu’il nous planterait sur place pour aller se terrer tout seul dans sa ville du désert.
− Il n’est quand même pas si trouillard, protesta Nesli. Et puis maintenant que nous sommes alliés, ça devrait le rassurer de savoir que nous avons quelques atouts dans notre manche.
− Alors pourquoi on ne lui dit pas ?
− On lui dira, mais un peu plus tard. Beherzt a raison : il vaut mieux lui laisser d’abord le temps de s’intégrer. De toute façon, on est partis pour plusieurs semaines de voyage ensemble.
Domyrade ne put retenir un soupir. Plusieurs semaines. Encore des jours et des jours à marcher. Au moins, ils avaient un véritable but. Arrêter une guerre, voilà qui leur donnerait la motivation suffisante pour continuer d’avancer. Mais le sérieux de ce périple faisait du même coup peser sur eux une atmosphère étrange que Domyrade n’était pas sûre d’apprécier. Peut-être que cette aura écrasante s’estomperait peu à peu. Après tout, ils venaient juste de quitter l’observatoire. Leur discussion enflammée sur le plan d’Enza et ce voyage en terre inconnue ne datait que de la veille. Si déjà Atkos laissait tomber le masque dur et froid qu’il gardait depuis leur départ, l’ambiance pourrait gagner un peu en légèreté.
Elle ferma rapidement les yeux pour chercher sa présence dans les courants ascendants environnants. Elle dut mobiliser toute l’acuité de son pouvoir pour le percevoir. Il s’était encore éloigné depuis la dernière fois qu’elle avait appelé son Don pour le guetter. Nul doute qu’à l’œil nu, sa silhouette ne devait être plus qu’un point noir dans le ciel.
Lorsqu’elle rouvrit les paupières, Nesli la regardait avec un petit sourire.
− J’ai l’impression que tu ne cesses de t’améliorer.
Domyrade s’en était aussi rendue compte, et elle n’en était pas peu fière. Seulement, bien maîtriser son pouvoir n’était plus son seul objectif désormais. A présent qu’ils s’étaient lancés dans une mission indubitablement périlleuse, il ne s’agissait plus d’impressionner ses amis et leur montrer qu’elle était aussi capable qu’eux. Elle devait apprendre à se battre, ou au moins à se défendre. Et elle avait sa petite idée sur la manière d’y arriver.
Dès qu’ils eurent rejoint les autres, Domyrade se plaça à côté de Fenore et lui demanda avec tout le sérieux du monde de la prendre comme élève. Les joues de la jeune femme s’enflammèrent et elle ramena sa mèche blanche derrière l’oreille. C’était son nouveau geste nerveux depuis que sa frange avait poussé au point de l’empêcher de voir quoi que ce soit.
− Je veux bien essayer, mais je ne te garantis rien, décida-t-elle finalement.
− Génial ! On commence quand ?
− Oh, euh… ce soir ?
Domyrade hocha la tête et ramena son regard droit devant. Elle avait hâte d’y être. Des yeux, elle chercha le soleil pour jauger un peu le temps qu’il lui restait à attendre avant la fin de journée. C’est alors que son regard tomba sur Enza des fossés, qui observait également le soleil, mais en tendant devant lui une de ses grandes mains calleuses.
− Qu’est-ce qui te prends ? s’enquit-elle d’une voix forte en se portant à ses côtés.
Il courba la nuque dans sa direction, mais garda le bras levé.
− Je mesure le temps avec mes doigts.
− C’est possible, ça ?
La voix de Beherzt intervint dans leur dos :
− Oui, à condition de savoir comment interpréter ses observations.
Le cou d’Enza se tordit légèrement vers le nain. Cet homme ressemblait parfois à une tour de garde, une haute construction dont il serait aussi le veilleur, observateur silencieux. Comme tous ses amis, Domyrade guettait le moment où, non content de leur parler depuis son créneau, il viendrait leur ouvrir la porte. Depuis la veille, quelques verrous avaient déjà sauté. Mais il en restait encore, cela sautait aux yeux.
− Je sais le faire, marmonna Enza en courbant de nouveau son échine vers l’horizon.
Il avait une voix plus grave que ses amis. C’était comme ça que Domyrade imaginait celle de son père…
− Apprends-moi.
Enza eut le même air un peu embêté que Fenore. Sa grande main vint frotter l’arrière de sa nuque, mais tout comme l’elfe peu de temps avant, il céda. Domyrade allait finir par y prendre goût. Ce n’était pas plus mal d’avoir des lacunes. Elle allait pouvoir les combler une par une, et un jour elle serait plus experte que tous ses amis réunis.
Tandis qu’Enza lui montrait comment positionner sa main, les doigts bien serrés, juste en-dessous du soleil, Domyrade se refit la réflexion qu’elle imaginait tout à fait son père comme lui. À peu de choses près, l’âge correspondait. Il ne manquait que les yeux bleus dont sa mère lui avait parlé. Peu importe. Elle aimait ce qu’elle lisait dans ceux, si sombres, d’Enza des fossés. Quand sa crainte instinctive s’estompait, on y discernait sans mal une certaine admiration. Sûrement que son père poserait sur elle ce regard-là, si elle se présentait un jour sur le pas de sa porte. Elle ferait en sorte que ce soit le cas.
***
Le soir venu, Domyrade tressa de son mieux ses volumineuses boucles brunes et se positionna en face de Fenore.
− Tu peux me montrer lentement les exercices que tu fais avec ton poignard ?
− Non, non, non, répondit son amie en souriant. Il faut d’abord apprendre à muscler son corps et à l’utiliser. C’est ton arme la plus précieuse, les autres viennent après.
− Bon, d’accord.
Exceptionnellement, Fenore se lança dans son Entraînement en expliquant à voix haute ses différents gestes. Domyrade s’efforça de l’imiter au mieux. On n’aurait pas cru, simplement en regardant Fenore, que ces enchaînements étaient si fatigants. Peu à peu, son amie prit de l’assurance dans son rôle de mentor et se permit de lui donner des conseils, de la corriger par petites réflexions.
− N’oublie pas de respirer.
Pour une Révélée de l’air, c’était un comble de se l’entendre dire. Si Domyrade n’étais pas épuisée par la journée de marche et les exercices, elle aurait pu s’aider de son Don. Dans le cas présent, elle n’avait qu’à obéir à Fenore et se concentrer sur ses poumons. Ce n’était pas désagréable de faire prendre conscience de son corps, de son fonctionnement interne et externe, et d’oublier absolument tout le reste.
Si elle continuait comme ça, elle deviendrait une véritable guerrière. Elle pourrait combattre des elfes en combat singulier, fendant les airs avec force et souplesse, glissant dans le dos de ses adversaires pour les mettre à terre sans difficultés.
− Et voilà, c’est terminé.
Domyrade émergea de son rêve éveillé le souffle court et la tête échevelée. Elle se sentait éreintée mais ravie.
− Je crois que tu as mérité une dispense de veille pour cette nuit, la félicita Beherzt en lui ébouriffant le sommet du crâne lorsqu’elle prit place à ses côtés.
Elle n’eut même la force de répliquer quoi que ce soit. En outre, son estomac allait la dévorer de l’intérieur si elle ne lui donnait pas tout de suite quelque chose à manger.
Pendant qu’elle mangeait, Beherzt se chargea de lui défaire sa tresse le plus délicatement possible. Entre deux bouchées, Fenore leur parlait avec humour de ses premiers Entraînements encadrés par ses parents et les plus âgés de ses frères et sœurs. Domyrade ne lui prêta qu’une oreille distraite, mais elle était contente de la voir aussi à l’aise. En face d’elle, Enza suivait attentivement les discussions, ses bras enveloppant dans un étau de timidité ses longues jambes repliées.
Quand Domyrade fut rassasiée, et que Beherzt eut abandonné l’idée de démêler tout à fait sa tignasse avec les doigts, elle haussa un peu le menton pour apercevoir Atkos. Tout de suite après avoir atterri, il était allé s’allonger un peu plus loin de leur cercle, marmonnant de le réveiller pour le premier quart.
− Tu peux aller l’appeler, dit Beherzt.
Quelques jours plus tôt, Domyrade ne se serait certainement pas donné cette peine. D’ailleurs, Beherzt n’aurait sûrement pas perdu de temps à lui poser la question. Mais alors, ce petit moustachu avait-il déjà remarqué son changement d’attitude depuis la tempête ?
− Tu n’as qu’à y aller, toi, répliqua-t-elle.
Il fit la moue et s’affala un peu plus sur le sac qui lui servait de dossier.
− Je suis trop fatigué, alors que toi tu vas pouvoir dormir toute la nuit.
Malgré l’ombre des petites tresses aux coins de sa bouche, elle vit bien le sourire qui lui étirait les lèvres. Pour la peine, elle prit soin en se levant de rouler exagérément des yeux. Atkos s’était positionné dos à leur feu de camp. Ses plumes blanches hésitaient entre le bleu et l’orangé, entre ombre et lumière. Domyrade contourna les grandes ailes et se pencha pour discerner le visage de l’hybride. Ses traits endormis lui donnaient l’air le plus épanoui qu’elle lui ait jamais vu. Elle connaissait ses mimiques pleines d’indifférence, sa tête d’idiot quand il bavait devant Nesli, le froncement contrarié de ses épais sourcils noirs, l’éclair de concentration dans son regard, mais jamais elle ne l’avait vu aussi apaisé. C’était dérangeant.
Elle tendit la main pour le réveiller d’une légère secousse et aperçut au même moment un infime scintillement sur la peau sombre du faune ailé. Il entrouvrit les paupières et elle vit la larme rouler et disparaître sur sa joue.
Une certaine tristesse l’envahit, mais cela ne dura qu’un instant. Plutôt que de pleurer, Atkos ferait mieux d’oublier sa rancune envers Enza. Leur alliance avec le déserteur restait le meilleur moyen de se venger de ceux qui avaient massacré son clan, et d’éviter de nouvelles victimes. Mais Domyrade tint sa langue. Atkos n’était pas si bête, il savait déjà tout ça.
***
Une fois n’est pas coutume, elle fut sortie du sommeil par une odeur de nourriture. Elle ouvrit un œil pour découvrir Beherzt en train de faire onduler une tranche de lard sous son nez.
− Tu vas lui en mettre dans les cheveux, protesta derrière lui la voix parfaitement réveillée de Nesli.
− Elle n’avait qu’à pas faire la grasse matinée.
Domyrade se redressa tout de suite ; pas question de passer pour une fainéante. Tous les muscles de son corps protestèrent vivement. Sans attendre, elle attrapa le petit-déjeuner que lui tendait Beherzt. Peut-être que cela arrangerait un peu son état. Non, même après avoir avalé viande et morceau de pain, se redresser fut une véritable épreuve. Elle ne put se retenir de grimacer tandis qu’elle déambulait à la recherche d’une gourde. Ses jambes lui semblaient peser deux fois plus lourd que d’ordinaire.
− C’est normal, déclara Fenore en croisant son regard. Ton corps va s’habituer à force, tu verras.
Pour toute réponse, Domyrade s’efforça d’étirer un peu sa nuque et ses épaules tout aussi endolories que le reste. Si s’entraîner le soir la transformait en vieille grand-mère le matin, elle n’était plus si sûre de vouloir continuer…
− Elle a raison.
Accroupi sur ses pattes fléchies, Atkos l’observait.
− Évidemment que j’ai raison, s’offusqua Fenore en balayant ses cheveux derrière son oreille.
Sa réplique fit rire Beherzt qui terminait d’éteindre le feu. Domyrade restait interloquée par l’attitude d’Atkos.
− Tu vas rester avec nous aujourd’hui ? demanda-t-elle.
Il haussa les épaules et déplia ses jambes pour se mettre debout.
− Peut-être bien.
L’attention du faune ailé passa d’elle à Enza des fossés, planté comme un piquet non loin. Visiblement, sa méfiance à l’égard de leur nouvel allié n’avait pas changé au cours de la nuit.
La veille, Atkos avait lourdement insisté sur le fait qu’on ne pouvait en aucun cas confier de tour de garde à Enza. Pour lui, cet homme était aussi dangereux que les troupes d’assassins qui pourraient leur tomber dessus. Pourtant, il faudrait bien qu’il lui accorde un jour sa confiance. Cela viendrait. D’ici qu’ils arrivent à la ville des bannis, la peine qui l’aveuglait se dissiperait. Il verrait bien qu’Enza n’avait rien de menaçant.
Durant cette journée qu’Atkos passa bel et bien avec eux, Domyrade remarqua un net changement d’attitude entre lui et Nesli. Ils parlaient tous les deux à l’arrière du groupe depuis un moment, et l’atmosphère semblait légèrement houleuse.
C’est vrai qu’elle avait déjà noté des comportements étranges à l’observatoire, lors de leur discussion avec Atkos suite aux révélations d’Enza. Apparemment, leur douce complicité s’était bel et bien fissurée. Ce n’était sûrement rien qui ne puisse être réparé. À tous les coups, Nesli avait encore eu un mot maladroit sur le deuil. Rien d’irrémédiable, mais pas quelque chose d’anodin non plus…
Domyrade avait beaucoup d’affection et d’admiration pour elle, mais il fallait avouer que la nymphe ne savait pas ce que c’était de véritablement perdre quelqu’un. Oui, elle avait quitté sa famille et l’amour de sa vie en venant ici, mais ce n’était absolument pas la même chose. De même qu’assister au meurtre d’une foule d’inconnus n’avait rien à voir avec la perte d’un être-cher. C’était différent, voilà tout.
Parfois, Domyrade se disait qu’en n’ayant jamais connu son père, elle s’épargnait peut-être la douleur de le perdre. La même chose valait pour les frères et sœurs. Finalement, ce n’était peut-être pas plus mal de vivre dans une certaine solitude. Se suffire à soi-même. Se préserver des autres et de ses propres sentiments.
− Hé, dites, appela Beherzt. Je suis le seul à trouver le sol étrangement spongieux ?
Dis-donc, il commençait à manquer d’inspiration pour les faire discuter entre eux.
− Je trouve aussi, dit Fenore.
Un pli d’inquiétude se creusa entre ses sourcils quasiment invisibles. L’instant d’après, un cri de surprise les faisait tous pivoter vers Nesli. Elle souleva le tissu de sa jupe et Domyrade aperçut le bas de ses jambes. Ou plutôt elle ne les vit pas : son amie s’était enfoncée dans le sol jusqu’aux chevilles.
Sous ses pieds, la terre se mit aussi à ramollir, de l’eau suintait à la base des herbes. Domyrade recula pour ne pas s’enfoncer. Ses amis pataugeaient tous chacun de leur côté dans la couche d’eau qui remontait du sol à une vitesse effrayante.
− Atkos, appela Nesli d’une voix affolée.
Elle s’agrippait à lui sans cesser de regarder ses pieds où l’eau s’était mise à bouillonner. Atkos ne semblait pas moins paniqué et resta tétanisé. Domyrade comprit ce qu’il se passait en même temps que Beherzt.
− Atkos, fais quelque chose, le héla-t-il.
De son point de vue, le faune ailé était le seul à pouvoir les sortir de là. Ce n’était pas tout à fait vrai.
Domyrade immobilisa ses pieds et se campa bien droit sur ses jambes. Aussitôt ses bottes s’enfoncèrent dans le sol marécageux où l’eau clapotait dans un boucan surréaliste.
− Atkos !
Elle harponna le regard clair du faune ailé. Ce simple échange lui confirma qu’il n’y arriverait pas sans elle. Il avait besoin de son aide. Domyrade n’était pas tellement douée avec les mots, mais elle savait communiquer sa détermination par le regard. Heureusement, Atkos n’était pas si bête. Il dut même comprendre ce qu’elle avait l’intention de faire, car ses ailes se déplièrent maladroitement dans son dos.
Elle ferma les paupières et se força à faire abstraction du bruit et des voix de ses amis. Allez, ça n’avait rien de bien compliqué. Elle pouvait le faire. Tous les hybrides savaient le faire, Atkos le lui avait dit.
− Maintenant !
Ce fut un jeu d’enfant. Dans un même mouvement d’ailes et de courants ascendants, l’hybride s’envola dans le ciel. Domyrade le surveilla un moment. Ouf, il avait l’air d’avoir surmonté sa crise de panique et volait plutôt normalement. Sous leurs pieds, l’eau refluait déjà aussi rapidement qu’elle était venue.
Domyrade songeait maintenant à confronter Nesli pour savoir ce qui avait conduit Atkos à perdre le contrôle de son pouvoir comme ça. C’était peut-être à cause d’Enza, tout compte fait. En tout cas, cela n’augurait rien de bon, et quelqu’un devrait vraiment avoir une discussion avec lui. Quelqu’un qui ne soit pas Nesli, de préférence. On savait désormais ce que ça donnait…
L’attitude de Beherzt la détourna tout à fait de cette idée. Leur ami s’était dirigé vers Enza, et à le regarder se tortiller nerveusement la moustache, il n’était pas difficile de savoir ce dont il comptait parler avec leur nouveau compagnon de route. Finalement, cet incident aurait au moins un avantage : enfin plus personne ne garderait de secrets. Peut-être qu’ils allaient enfin pouvoir construire une relation saine avec Enza, une véritable alliance qui leur permettrait de faire quelque chose de bien.
***
Leur cercle baignait dans une atmosphère particulière ce soir-là. C’était la dernière nuit qu’ils passaient dans la Plaine. Le royaume de Galfinir s’étendait encore au sud-ouest, là où ils se rendaient, mais les hautes herbes allaient céder la place à une plage. Ils dormiraient sur du sable le lendemain.
Pour la suite, Domyrade n’arrivait pas à se l’imaginer, malgré le nombre incalculable de fois où Enza leur en avait parlé. Bien sûr, ils en discutèrent encore au cours du repas.
− Je crois bien que ça s’appelle l’Étendue, rebâchait Beherzt. Je ne suis pas certain, mais il me semble vraiment avoir déjà lu ce nom sur une carte. Ou bien dans un livre de géographie peut-être…
Depuis deux jours il se faisait des nœuds au cerveau à cause de cette dénomination. Enza des fossés, lui, n’était partisan que d’une seule appellation, qui au moins avait le mérite d’être claire : il appelait l’épreuve qui les attendait « la petite mer plate ». Ce ne serait que la première étape de leur périple dans l’inconnu jusqu’à Uh’ak, la ville des bannis construite au cœur du désert. Un endroit qu’aucune carte ni aucun livre de géographie n’avait jamais répertorié, parce que personne, de ce côté du monde, n’en connaissait l’existence.
Enfin, quelles que soient les terres hostiles qui les attendaient là-bas, Domyrade avait déjà assez de souci à se faire pour la traversée de cette Étendue.
De derrière ses boucles en désordre, elle glissa un regard en direction d’Atkos. Depuis l’incident, elle le surveillait discrètement. Il ne faudrait pas que l’hybride laisse encore ses émotions déborder, avec cette fois-ci d’énormes quantités d’eau à proximité. Heureusement, il semblait avoir recouvré ses esprits pour de bon.
Finalement, c’était Fenore qui avait réussi à apaiser son tempérament pour le moins houleux. Non seulement il semblait de nouveau s’entendre avec Nesli, mais il ne montrait plus d’hostilité envers Enza. Pour couronner le tout, son Don ne semblait plus lui poser autant de problème qu’auparavant. Le partage d’expérience de Fenore lui avait été plus profitable que Domyrade ne l’aurait cru. Ils étaient d’ailleurs tous très fiers de leur amie, qui était allée voir Atkos de sa propre initiative.
Domyrade se rappelait le jour où Fenore était venue la tirer de l’incendie au milieu du campement. Elle avait entraperçu plusieurs fois depuis, cette flamme de courage qui pouvait animer son amie. Dernièrement, il lui semblait bien la voir brûler de plus en plus souvent. Cela faisait plaisir à voir.
Comme tant de fois auparavant, Domyrade s’allongea dans les herbes hautes. Cette sensation lui manquerait. Moins que les forces incroyables du vent, mais tout de même.
La Plaine était dorénavant pour elle un lieu chargé de terribles souvenirs. Tant d’hybrides étaient morts. Mais ce voyage leur offrait une perspective plus optimiste. Non pas que le trajet s’annonce merveilleux, mais il redonnait espoir.
Et puis, elle savait que tôt ou tard, ses pas fouleraient à nouveau le sol de la Plaine. Elle repasserait par ce royaume du vent, où le plus infime mouvement de l’air la faisait se sentir vivante, puissante, Révélée.
Ohh, Domy a des soucis d'ego ? 😜
Plus sérieusement, j'ai trouvé qu'en effet elle était beaucoup plus mature dans ce chapitre. Après, si ce n'est pas trop, c'est pas gênant, parce qu'à vivre 24h/24 ensemble comme ils le font, c'est assez "normal" qu'elle évolue un peu ^^
Je n'avais pas du tout compris que c'était à cause d'Atkos ! 😅 Comme Notsil je pensais juste qu'ils traversaient une zone un peu humide x)
Enza... J'arrive pas, à me faire d'opinion sur lui, vraiment xDD Donc je vais attendre :p
Je suis très curieuse de lire la suite <3
Oui, j'avais dans l'idée que les autres, qui sont finalement tous plus âgés, et assez matures chacun à leur manière, finissent quand même par déteindre sur elle... Cela dit je suis bien consciente qu'une évolution trop abrupte bah... c'est même plus une évolution, c'est juste un changement de caractère...
Ah mince, cette péripétie est décidemment plus floue que ce que je croyais XD Faudrait peut-être que je rende le truc plus évident, un peu plus spectaculaire quoi... Je vais y réfléchir ^^
Ah ha, très bien, j'attendrai d'avoir ton opinion sur Enza par la suite alors ;)
Merci pour ton commentaire, et pour ton engouement envers cette histoire, c'est vraiment trop cool <3 <3
Elle grandit, la petite Domy ! J'ai aimé qu'elle soit en train de chercher à apprendre de chaque membre du groupe, dans l'idée de devenir la meilleure et tout :) Peut-être même que tu aurais pu pousser avec des moments où elle apprend de Behertz et Nesli aussi (ou peut-être est-ce prévu plus tard :p).
Je suis très curieuse de ce qui s'est passé entre Atkos et Nesli parce que je n'avais pas du coup compris que c'était un souci de pouvoir, j'ai cru qu'ils s'étaient déroutés / perdus dans un marécage :)
"Ce n’était pas désagréable de faire prendre conscience de son corps, de son fonctionnement interne et externe," -> il me semble que le "faire" est potentiellement inutile ici ?
Fenore gère pas mal de soucis du coup, elle apaise Atkos envers Nesli / Enza. Je ne sais toujours pas quoi penser de ce dernier, tout le groupe semble lui faire confiance (c'est donc le moment idéal pour trahir héhéhé).
J'aime beaucoup la phrase de fin, qui en plus fait écho au titre ;)
J'aurais peut-être aimé avoir la fameuse discussion Domy / Nesli, ou Behertz / Enza, mais c'est mon côté qui veut connaitre tous les détails croustillants ^^
A la prochaine, du coup ;)
Owi, elle grandit <3 Oh bah en soi, elle apprend de Beherzt et Nesli depuis le début, vu qu'elle s'est tout de suite bien entendu avec eux et qu'ils sont assez naturellement pédagogue..
Ah, je comprends que tu n'aie pas compris tout de suite pour le problème de pouvoir, j'ai un peu retardé l'info... Est-ce que ça t'a posé problème? Et pour la raison précise de la dispute, on ne la saura pas, mais on peut deviner un peu ce qu'on veut... De toute façon, en partant du principe qu'Atkos se sentait pas bien et ressassait plein de choses pas ouf à cause d'Enza et du fait qu'il soit un ex-méchant, toussa toussa, bah il en fallait pas beaucoup pour lui faire perdre le contrôle de ses émotions et de son Don qu'il ne sait pas bien gérer...
Merci pour la coquille !
Ah, je suis contente que la phrase t'ait plu ^^
Haha, je te comprends, en plus j'adore écrire les interactions entre les personnages, mais malheureusement il n'y a pas la place pour développer tous les dialogues (ce tome est déjà bien trop gros XD)
A très bientôt, merci d'être toujours au rendez-vous <3
C'est quand même Domryade, la stalkeuse qui fait beaucoup de choses pour se faire remarquer. Pour le coup, je trouve que le type de réflexion qu'elle a eu dans le chapitre correspondrait plus à Nesli.
Ceux que je trouve le plus "naturel" dans ce chapitre c'est Atkos, et bien sûr Behertz. Pour Fenore, je trouve ça bien qu'elle donne du sien pour enseigner à Domryade ses entraînements.
Je pense que globalement, il y a eu une rupture entre le avant-Enza, et le après Enza. Ajouté au fait qu'ils vivent ensemble, je crois qu'il manque juste un : "pendant ce voyage, on a bien changé, tout de même". Un truc du style. Sans cela, ça fait un peu "cassure".
Ceci étant dit, j'ai hâte de suivre leur évolution dans ces terres inconnues. En-avant les Révélés !
C'est vrai que Domyrade fait preuve d'un peu trop de maturité dans ce chapitre, je m'en suis un peu rendue compte en l'écrivant ^^" Je crois que je suis un peu trop pressée de la faire évoluer, oupsi... Mais du coup je vais essayer d'atténuer un peu les choses dans ce chapitre et de rester un peu proche de la Domyrade qu'on connaît !
J'ai pas trop compris ce que tu as dit sur la rupture avant-après, si tu as le temps de me reformuler ton idée je suis preneuse ^^
Merci pour ta présence ici =D
A la semaine prochaine pour la suite ;)
En vrai, cette coupure elle de ce ressentit que Domryade a beaucoup évolué en très peu de temps. En vrai, je pense que c'est possible. C'est juste que comme ce n'est pas nécessairement annoncé, ça donne l'impression d'avoir loupé un chapitre.
Pour résumer ma position : si tu le fais, tu le "justifies". Ce qui peut passer par une introspection du personnage. D'ailleurs, tu commençais à faire cela quand Domryade avouait presque qu'elle ne serait pas allée voir si Atkos était réveillé quelques jours avant. Pour moi, le deal consiste plus à aller jusqu'au bout de la démarche que de laisser le personnage à mi-chemin dans son évolution, bien que ce soit possible de faire ça.
À la semaine prochaine :)
Je vais essayer d'y remédier :)