Luciana
Luciana attrapa les mèches les plus basses de sa nuque et essaya de les tourner autour de son doigt. Ce vieux réflexe datait de l’époque où ses cheveux tombaient encore sous ses épaules, pourtant elle ne réussissait pas à s’en défaire. Avec un grommellement agacé, la jeune femme abandonna cette distraction et apporta plutôt un annulaire à sa bouche. Seul rescapé d’un stress trop longtemps accumulé, l’ongle ne résista pas et se déchira sous les incisives décidées.
L’Italienne avait renoncé à sa partie de cartes afin de suivre Louise. Elle le regrettait presque à présent. Les conditions n’étaient pas optimales pour avoir une discussion. Luciana jeta discrètement un œil à son amie tandis qu’elles avançaient en silence dans les couloirs de la Pyramide. La Créatrice paraissait tout aussi préoccupée qu’elle ; de petites rides venaient plisser son front, formant des vagues irrégulières sous la frange bouclée par l’humidité.
— Tout va bien ? s’inquiéta Luciana à voix haute.
Louise approuva distraitement, le regard fixé devant elle. D’un geste absent, elle essuya les perles de sueur qui cherchaient un chemin sur ses tempes. Luciana n’ajouta rien et se contenta de soupirer discrètement. Elle apporta de nouveau une main à sa nuque avant de laisser tomber mollement son bras en se souvenant de la longueur de ses cheveux. La tension s’intensifia lorsqu’elle comprit qu’elle n’avait plus d’ongles à ronger ou à faire glisser sur sa peau nue afin de dessiner de longs traits rouges qui la calmaient.
L’Occupante aurait pu profiter de cet instant supplémentaire pour peaufiner son discours et ses arguments, mais ce n’était pas dans ses habitudes de se préparer. D’autant plus que la nervosité face à une énième dispute ne lui laissait aucun répit pour organiser ses idées. Luciana fit alors parcourir ses yeux sur les nombreux dessins et symboles qui habillaient les murs de la galerie.
Pendant ses longues recherches, elle avait souvent côtoyé Ezéchiel et force était de constater qu’ils avaient fini par s’apprivoiser. Pourtant de caractère opposé, Luciana avait malgré tout apprécié le calme de l’historien et ses connaissances qui semblaient illimitées sur l’Égypte ancienne. La curiosité de l’homme avait vite dépassé son animosité pour elle afin d’en savoir plus sur l’Italie du début du XVIIe siècle. En échange, il lui avait appris à lire les hiéroglyphes ou à en comprendre au moins le sens général.
Alors, tandis que l’air se chargeait doucement d’électricité statique autour d’elle, Luciana tenta d’appliquer la théorie à la pratique. Rapidement, afin de ne pas interpeller la ligne sous tension à sa gauche, l’Occupante observa le mur de droite. Elle reconnut le symbole du partage, suivait le sentiment de joie, puis d’inquiétude. À la fin de ce qui semblait être la phrase qu’elle déchiffrait étaient gravés les dessins représentant une rencontre. Difficile à interpréter, d’autant plus que la jeune femme lisait à l’envers, cela pouvait être l’arrivée de la première Âme ou d’un voyageur d’un autre monde.
Luciana haussa les épaules dans son incompréhension, réveillant ainsi Louise. L’atmosphère électrique s’estompa subitement sans que la Créatrice réalisât ce qu’elle avait produit. Engluée dans ses rêveries, cette dernière ne remarqua même pas le jeune garçon qui s’était plaqué contre le mur pour les laisser passer au moment où elles bifurquaient dans un boyau plus large et éclairé abondamment. L’Italienne le remercia d’un signe de tête, peinée pour lui, puis reprit sa distraction qui l’éloignait de ses angoisses. Furtivement, elle se glissa sur la gauche de la dirigeante afin de lire à l’endroit.
Peu de symboles avaient été gravés sur ce mur, mais ils semblaient tous se rejoindre dans leur signification : la solidarité. Il y avait le riche aidant le pauvre, l’homme participant aux tâches de la maison avec son épouse et inversement la femme dans les champs avec son mari, ou encore un enfant sauvant un félin coincé dans un arbre. Mais ce qui attira le plus l’attention de Luciana, ce n’était pas des hiéroglyphes, mais une imposante fresque gravée et peinte qui prenait toute la hauteur de la galerie et mesurait une bonne dizaine de pas.
Sans s’en apercevoir, la jeune femme s’était arrêtée devant l’esquisse, principalement colorée de tons ocre, doré et bleu électrique, le tout encadré de presque toutes les nuances de vert. Elle représentait la fratrie qui dirigeait l’Anti-Chambre dans un ensemble sobre et puissant, innocent et majestueux. L’équilibre était parfait. Ouadjet était entourée de Pakhémetnou et Andjety. Sur une unique banquette d’un bois foncé gravé d’or, le frère aîné tressait la longue chevelure noire de sa sœur, tandis que cette dernière partageait la lecture d’un papyrus avec le cadet.
Un air serein englobait leur visage enfantin, rehaussé par le maquillage céruléen sur leur épiderme brun. Avec ces yeux de chat, Andjety paraissait plus polisson que jamais, tandis que la légère pliure de son front laissait imaginer sa forte concentration pour le travail entamé. Ils arboraient tous les trois de simples vêtements blancs brodés de fils d’or et ornés par endroits de perles colorées. L’aîné portait une longue robe cintrée à la taille, à l’inverse d’Ouadjet qui avait opté pour une culotte bouffante surmontée d’un voile diaphane croisé sur sa poitrine. Quant à Pakhémetnou, il affichait son habituel pagne sous un gilet sans manches qui s’ouvrait sur sa peau bronzée.
Le cadet serrait dans ses bras la couronne rouge de sa sœur, à l’instar d’un enfant qui tiendrait une peluche contre lui. Si ses souvenirs des cours d’Ezéchiel étaient bons, il s’agissait de la Decheret. Couchée sur la banquette à côté du garçon, se trouvait sa jumelle, la couronne blanche Hedjet. D’après l’historien, associées ensembles elles formaient un seul et même couvre-chef dont Luciana ne se souvenait plus le nom et qui n’était rien de plus qu’un symbole de la royauté égyptienne.
— Lu ? entendit la concernée au loin.
Elle remarqua alors qu’elle était restée devant la peinture, tandis que Louise avait poursuivi son chemin. La Créatrice revint sur ses pas et observa l’esquisse à son tour.
— Impressionnant, chuchota-t-elle. Toute cette végétation en arrière-plan les met tellement en valeur. Les nuances de bleu et de vert sur les feuilles, c’est magnifique. Les vêtements sont peut-être un peu trop quelconques à mon goût, ajouta Louise. Mais il y a certaines touches de richesse intéressantes. La couronne d’Ouadjet, le sceptre en forme de crochet et celui qui ressemble à un fouet…
— Il s’agit du sceptre-héqa et du fléau-nekhekh, en fait, précisa Luciana, le regard toujours rivé sur le mur.
— Je me demande pourquoi tous ces objets sont présents et toutefois, ils n’ont pas l’air à leur place, s’interrogea Louise.
En effet, ces attributs étaient fréquemment représentés ensemble, croisés sur la poitrine du pharaon ou sur les statues d’Osiris. Pourtant ici, comme c’était le cas pour les couronnes Decheret et Hedjet, les deux sceptres étaient séparés l’un de l’autre. Le premier gisait près des pieds nus d’Ouadjet, tandis que le second reposait sur l’accoudoir à proximité de son frère aîné.
Un silence s’installa tandis que la Créatrice devait certainement réfléchir à une théorie à son interrogation. Luciana en profita pour l’observer à la dérobée. Sa préoccupation semblait avoir disparu et elle avait cet air concentré adorable. L’Occupante secoua la tête, il était maintenant trop tard pour revenir en arrière, elle avait pris sa décision.
— J’imagine que le pouvoir, la royauté, toutes ces choses-là, répondit l’Italienne malgré tout en indiquant les différents symboles. Ce n’est pas le message important de la fresque.
— Alors quel est-il ? s’étonna Louise en se tournant vers son amie.
Luciana fut surprise d’avoir cette fois été écoutée. Elle tenta de cacher sa gêne en cherchant les mèches dans sa nuque, mais se retrouva une fois encore face à un échec. Tout en reportant son attention sur la peinture, elle déclara :
— Ce que je vois, c’est deux frères et une sœur qui partagent un moment banal de leur vie.
— C’est tout ? s’indigna presque Louise.
— Oui, c’est tout, affirma platement l’Occupante. Leur lien de fraternité est valorisé à l’inverse des pouvoirs qu’ils possèdent. Ils mettent de côté leur puissance pour être eux-mêmes, en famille, insista-t-elle. Personnellement, je trouve cette peinture touchante.
Luciana se retint d’ajouter « Tu devrais prendre exemple sur eux ». Mais elle préféra laisser Louise avec ces mots et reprendre son chemin jusqu’au sommet de la Pyramide. À présent, elle se sentait prête à affronter la Créatrice. Les deux femmes s’installèrent dans un coin à l’écart du salon central afin de ne pas être dérangées pendant leur conversation. Elles s’assirent l’une en face de l’autre alors qu’un nouveau silence gênant planait autour d’elles.
— Je…, commença Louise.
— Tu…, intervint Luciana en même temps.
— Excuse-moi, je t’en prie, l’invita alors la Créatrice.
La jeune femme lâcha un long soupir pour se donner du courage, avant d’accrocher les deux jolies émeraudes au milieu de ce visage qu’elle semblait connaître par cœur. Leur pause dans le couloir avait eu le mérite de rendre attentive Louise qui patientait sagement sur son sofa.
— J’aimerais que tu me laisses parler jusqu’au bout, sans m’interrompre, précisa Luciana.
Son interlocutrice acquiesça en silence, relâchant quelque peu la pression de l’Occupante.
— Bien, souffla l’Italienne. Je ne vais pas tourner autour du vase. Louise, je t’aime et peut-être que toi aussi... ne dis rien s’il te plaît, ajouta Luciana en voyant son amie entrouvrir ses lèvres. J’ai l’impression de t’avoir retrouvée dans l’Anti-Chambre, mais de t’avoir définitivement perdue. En une vingtaine de jours, je crois qu’on s’est fait autant de bien et de mal qu’en quatre siècles.
La rousse reprit son souffle. Une tempête d’émotions s’était levée en elle et Luciana cherchait à tout prix à la calmer afin de ne pas bégayer devant la Créatrice. Ses paroles s’emmêlaient et elle n’était pas certaine de la clarté de son message, mais le besoin de délivrance et d’extériorisation prenait le dessus sur tout le reste.
— Notre relation est toxique, on le sait toutes les deux depuis bien longtemps, depuis trop longtemps. J’attends toujours beaucoup de toi et lorsque je souffre assez pour m’en aller tu reviens, tu me cajoles, tu me laisses l’espoir que tu m’offriras ce que je désire. Je ne rejette pas toute la faute sur toi, précisa rapidement la jeune femme. J’aurais pu dire non, de nombreuses fois, mais je n’y arrivais pas. Qui peut te dire non, à toi, Louise ? s’étrangla-t-elle.
Luciana amena ses mains derrière sa nuque et massa ses omoplates dans un geste inutile pour se détendre. Elle n’osait plus regarder Louise en face, pourtant elle se força à relever les yeux.
— J’ai lu quelque part une phrase qui m’a marquée, reprit-elle en inspirant une goulée d’air. Ça disait « Il est facile d’aimer “parce que”, mais c’est plus difficile d’aimer “malgré tout”. » J’étais un peu sceptique quand je l’ai découverte. Mais à présent, je sais que je t’aimais parce que tu me faisais me sentir aimée, mais pas malgré tous nos défauts.
— Lu…, murmura la Créatrice avant de se taire face au regard noir qu’elle reçut de l’intéressée.
— J’ai envie de penser à moi, j’ai envie de penser à mon bonheur, poursuivit l’Occupante plus que jamais sûre d’elle. J’ai découvert que ma sœur était passée par ici et qu’elle venait d’un des mondes de la Mort. Je vais aller la chercher, annonça-t-elle d’une voix forte, les iris plantés dans ceux de Louise.
Cette dernière semblait retenir son souffle. Elle ne paraissait pas affectionner d’être maintenue ainsi au silence, mais tenait tout de même sa parole. Luciana s’en rendit compte et intervint aussitôt :
— Pardon, j’ai fini de parler, indiqua-t-elle.
Louise expira profondément, puis elle se leva de son sofa. Elle contourna le tapis de fleurs qui les séparait et se posa, toujours aussi silencieusement, sur le canapé où Luciana s’était installée. La Créatrice amorça un geste vers son amie avant de se retenir. Son regard ne semblait plus si certain qu’à son habitude. Elle paraissait hésiter.
— Je suis désolée, peina-t-elle à annoncer de sa voix enrouée.
Louise se racla la gorge afin de poursuivre plus clairement :
— Je n’aurais pas dû…, j’aurais dû…, cherchait-elle ses mots.
— Louise, l’interrompit Luciana en posant une main sur son épaule. Je ne veux pas d’explications. On n’en est plus là toutes les deux, il faut qu’on se laisse partir. Tu dois me laisser partir, répéta-t-elle plus faiblement.
— Je sais, finit par concéder la Créatrice. Je te promets de renoncer à toi au moment même où nous serons de retour dans l’Entre-Deux. Non, même maintenant, si c’est ce que tu souhaites, se reprit-elle en se redressant, comme décidée à fuir la pièce afin d’offrir l’espace demandé.
Luciana dut lui attraper la main pour que son amie ne partît pas sans avoir complètement saisi ce qu’elle lui avait dit.
— Non, Louise, tu n’as pas compris, fit-elle en se levant à son tour. Je ne rentre pas avec vous dans l’Entre-Deux. Je pars à la recherche d’Eudoxie, dans quelques jours, précisa-t-elle.
Le visage de la dirigeante passa par plusieurs émotions : l’interrogation, la déception, la colère, puis le découragement. Elle se laissa tomber dans la banquette avant de prendre sa tête entre ses mains.
— Je…, hésita-t-elle. Je ne sais pas quoi dire. J’ai tant envie de te garder auprès de moi et pourtant, tu as raison, ce n’est pas raisonnable.
Louise releva un regard attristé vers son amie qui s’était assise à son tour.
— Quand tu es là, je te tiens pour acquise et lorsque tu t’éloignes, je me sens si seule, annonça la Créatrice.
Luciana ne réussit pas à cacher sa surprise. Louise ne se confiait jamais aussi sincèrement. C’était une première pour l’Occupante. Elle allait alors enchérir sur le bénéfice lié à la distance, mais la brune la prit de court :
— Peut-être avons-nous besoin d’espace toutes les deux, en effet, admit-elle. Ah, soupira-t-elle bruyamment, je n’avais déjà pas tellement envie de rentrer, mais cela va être encore plus difficile à présent.
Un sourire timide s’installa sur les lèvres de Louise, soulevant plus haut les sourcils de l’Italienne. La Créatrice dut remarquer l’étonnement de son amie, puisqu’elle expliqua :
— Il est vrai que je me sens bien ici. Il n’y a pas longtemps, tu m’as dit que je n’avais pas été aussi heureuse que depuis que je suis dans l’Anti-Chambre et c’est vrai. Je suis souvent occupée, mais par des choses qui me plaisent. Penser à Jeanne est devenu moins douloureux, comme si le deuil était plus facile dans un lieu qui ne me la rappelle pas à chaque endroit où je pose mon regard. Les leçons que je partage avec Ouadjet sont aussi très intéressantes, j’ai l’impression de revivre ma découverte de la Création.
Louise fit une pause dans sa longue liste et ses yeux verts se perdirent dans la contemplation de ses pieds. Luciana remarqua alors que la Créatrice triturait le tissu de sa robe. Elle enroulait le ruban de sa ceinture autour de son index et le serrait fort, puis défaisait et recommençait. Si le doigt ne pouvait subir aucun dégât, l’Occupante était inquiète de voir son amie avoir ce genre de comportement. Elle connaissait trop bien ce sentiment de vouloir créer une douleur physique pour oublier les angoisses du cœur et de l’esprit.
— Qu’y a-t-il, Lou ? murmura Luciana en lui attrapant les mains pour qu’elle arrête.
L’intéressée releva la tête étonnée.
— Cela fait bien longtemps que tu ne m’as pas appelée Lou, s’amusa doucement la Créatrice.
— Désolée, c’est vrai que tu n’aimes pas ce surnom. Mais ne change pas de sujet, reprit l’Italienne. Qu’est-ce qui te tracasse ? Si je souhaite que nous mettions un terme à notre relation sentimentale et sexuelle, je ne veux pas que tu penses avoir perdu mon amitié.
Les paupières mi-closes, Louise apporta les mains de Luciana à son visage et huma ce parfum qu’elle connaissait par cœur. Cela ne dura que quelques secondes, mais ce geste faillit faire replonger l’Occupante envahie d’une chaleur particulière dans chaque parcelle de son corps. Reprenant ses esprits, l’Italienne voulut retirer ses doigts pour garder sa contenance, mais une fois encore Louise la prit de cours. Elle desserra délicatement son emprise avant de la lâcher complètement.
— Ton amitié m’est plus précieuse que tu le penses, avoua-t-elle alors en plongeant son regard émeraude dans celui de Luciana. M’autorises-tu à nous créer un moyen de communiquer, peu importe l’endroit où tu te trouves dans les mondes de la Mort ?
Elle avait posé cette question avec un air timide inhabituel, comme si elle testait les limites de leur éloignement à venir. Luciana pesa le pour et le contre. Devait-elle couper entièrement les ponts afin de guérir plus facilement ? Elle était certainement la seule Occupante à souhaiter rester dans l’Anti-Chambre. Comment le vivra-t-elle sur le long terme d’être loin de tous ceux qu’elle connaissait depuis plusieurs siècles ?
— Je suis d’accord, oui, répondit-elle finalement avec un sourire se voulant rassurant. Au fait, c’était quoi ta bonne nouvelle ? se rappela soudainement Luciana.
Le visage de Louise s’éclaira. Elle se leva précipitamment et sans un mot. L’Italienne suivit alors son amie entre les lianes et les effluves de fleurs tropicales jusqu’au salon central. La Créatrice l’y attendait les mains dans le dos et un large sourire aux lèvres. Elle paraissait aussi fière d’elle qu’une enfant ayant réussi pour la première fois quelque chose de spécial à ses yeux. Luciana se souvint de l’air d’Eudoxie le jour où elle avait attrapé une poule dans le jardin de leurs parents.
C’était la plus vieille de leurs volailles, elle boitait et ne voyait plus vraiment clair, mais Eudoxie avait réussi cet exploit à 6 ans. Malgré un genou écorché et quelques griffures sur les bras, elle avait tendu fièrement sa chasse et tout le monde n’avait pu que la féliciter. C’était cette même expression que Louise arborait, un petit succès pour une grande satisfaction. Sans attendre, elle exposa devant elle sa bonne nouvelle, son visage affichant clairement l’interjection « Tada ! »
Se retenant de rire, Luciana baissa les yeux vers ce qui faisait la fierté de son amie. Dans un pot de terre cuite poussait difficilement une plante rabougrie et peu vigoureuse. En s’approchant, elle aperçut de fines pointes qui ne semblaient pas aussi agressives que celles des imposants cactus de la savane. Louise avait l’air si heureuse que l’Occupante devina rapidement qu’il s’agissait d’une de ses créations.
— Louise, c’est génial ! Tu as réussi à faire apparaître un être vivant ! s’exclama Luciana, plus sincèrement qu’elle l’avait été face à Eudoxie et sa poule.
***
Gaum
Après le départ de Louise et Luciana, l’ambiance n’était plus aux jeux dans la grande salle. Un brouhaha accompagnait la nouvelle de Maleine. Kahsha, Imad et Esther se tapaient dans les mains, euphoriques à l’idée de retourner dans l’Entre-Deux. Ezéchiel notait frénétiquement dans son carnet tout en assaillant la Néerlandaise de questions sur la moniale, sa religion, ses origines et son histoire complète. La femme répondait tant bien que mal tout en essayant de participer aux exclamations des enfants.
Gaum avait l’impression d’être spectateur de la scène, incapable de faire un choix entre la joie et la tristesse. Rentrer, c’était retrouver Gabie et ses amis du groupe de parole. Ils lui manquaient tous tellement. Cette simple idée de les revoir les faisait apparaître devant ses yeux qui se brouillaient de plus en plus. Les larmes de bonheur se mêlaient à un chagrin plus amer. Partir signifiait…
Comme s’il lisait dans ses pensées, Andjety serra ses doigts qu’il n’avait pas lâchés depuis le début des révélations. Gaum sentit quelques mèches chatouiller son épaule tandis que le souffle du Scribe vint frôler son oreille.
— Allons discuter plus loin, murmura-t-il, uniquement à son intention.
L’Occupant hocha la tête en se frottant les yeux. Les deux hommes se levèrent et sortirent discrètement de la pièce. Les exclamations de joie les suivirent jusqu’à ce qu’ils s’isolassent dans un petit salon simplement meublé. Gaum passa un regard distrait sur les peintures modernes intitulées Le pont du Golden Gate (1937), L’opéra de Sydney (1973) ou encore La tour CN de Toronto de nuit (1976). Plusieurs autres bâtiments du XXe siècle avaient été représentés et racontaient sur les murs l’histoire d’un monde que l’ancien vétérinaire n’avait pas connu.
Andjety s’assit en tailleur sur le tapis molletonneux au centre des sièges. Il replaça sa robe ocre et safran sur ses jambes, puis leva ses pupilles grises vers l’Occupant, l’incitant à le rejoindre. Ce dernier avait fini par avoir l’habitude de voir l’Égyptien s’installer un peu partout dans des positions farfelues. Il prit donc place à côté de son amant, peu à son aise.
— Si tu es mieux dans un fauteuil, prends le fauteuil, s’amusa le Scribe en apportant une mèche à sa bouche.
Gaum resta par terre, silencieux. Il allongea ses jambes devant lui et posa le poids de son corps sur ses poignets. Le tableau légendé Le Christ Rédempteur (1931) attrapa son attention, tandis qu’il n’osait pas entamer la conversation.
— Tu vas me stresser à être aussi nerveux, grogna Andjety en apportant une mèche supplémentaire entre ses dents.
— Qui est nerveux ? répliqua Gaum en levant un sourcil. Ce n’est pas moi qui mange mes cheveux.
— Normal, tu n’en as pas assez, s’esclaffa l’adolescent de plusieurs millénaires. Je t’en prête si tu veux, ajouta-t-il en lui tendant des brins noirs.
Le Malgache pouffa face au ridicule de la situation. Il n’attendit pas longtemps avant d’être rejoint par Andjety dans son allégresse. Profitant de l’atmosphère détendue, Gaum se leva pour s’installer derrière le Scribe. Le dos calé contre un buffet dont les effluves de son bois envahissaient toute la pièce, l’Occupant attrapa toutes les mèches de son amant et les coiffa de ses doigts. Ils restèrent ainsi un long moment sans parler. Le plus bavard des deux semblait attendre que l’autre se confie, tandis que l’homme à la peau d’ébène se concentrait sur ses gestes afin de ne pas laisser ses pensées angoissantes prendre le dessus.
— Je reviendrai, finit-il par s’entendre dire. Si nous créons un chemin entre l’Entre-Deux et l’Anti-Chambre, alors je reviendrai.
Les épaules d’Andjety se détendirent, mais il ne répondit pas pour autant. Gaum se demanda si le jeune homme ne s’était pas assoupi avec ses caresses. Sa tête était doucement tombée en avant et le haut de son corps se soulevait régulièrement. À la fois réjoui d’être aussi apaisant et vexé d’avoir perdu l’attention de son ami alors qu’il se confiait à lui, l’Occupant soupira en retirant ses mains des longues mèches plus emmêlées qu’au début.
— Ne t’arrête pas, entendit-il alors. Continue.
Andjety évoquait-il la marque de tendresse ou la conversation ? Ce n’était déjà pas évident de le comprendre en observant les émotions sur son visage, mais en ayant uniquement vu sur la cascade obsidienne, Gaum était incapable de deviner l’état d’esprit de son amant. Décidant de ne pas décevoir le Scribe dans un cas comme dans l’autre, le Malgache reprit ses caresses et la parole :
— Pendant plus d’un siècle, j’ai vécu dans la frayeur, la détresse, l’anxiété, rumina-t-il en essayant de démêler un nœud qu’il avait lui-même créé. La mort pour moi était quelque chose de définitif. Quand j’ai appris que ça ne l’était pas, je n’ai pas réussi à l’accepter tout de suite. Je…
Gaum inspira une grande bouffée d’air pour se donner du courage.
— Grâce à Gabie, et à tous ceux de notre groupe, j’ai pu relativiser un peu, parce que je n’étais plus seul. Mais la peur, celle dans mon ventre, celle qui me crie que tout ça n’est pas normal, que je n’ai rien à faire ici, que je ne devrais plus être, exister… Cette peur me suit partout où je vais. Même maintenant, je sais qu’elle est là quelque part et…
Envahi par ses propres paroles, Gaum s’était mis à trembler sans s’en apercevoir. Il tira un peu trop fort sur le nœud, arrachant quelques cheveux, sans même le défaire.
— Oh, je suis désolé, murmura l’Occupant.
Un silence qui lui sembla interminable s’empara de l’espace autour du Malgache. Ses mains étaient en suspens, les doigts enchevêtrés dans la chevelure emmêlée. Un reniflement attira son attention, puis la cascade noire qui était devenue une avalanche de rochers sombres se mua lentement. Andjety se retourna, un demi-sourire aux lèvres. Ses joues étaient humides et il ne fit rien pour cacher ses yeux rougis.
— Avant que tu ne t’affoles, je ne pleure pas parce que je suis complètement décoiffé.
Le Scribe tenta de passer une main dans la toile de nœuds avant d’abandonner avec un soupir amusé. Toujours dans un mutisme étrange, Andjety porta son regard sur la porte, comme s’il attendait l’arrivée de quelqu’un. Il resta ainsi, dans cette expectative qui laissait Gaum complètement désemparé. Avait-il dit quelque chose de blessant ? Devait-il s’excuser ? L’Occupant ouvrit la bouche plusieurs fois, cherchant ses mots ou la raison de son impair. Un mouvement attira son attention près de la porte. Derrière un fauteuil s’élevait une longue queue beige terminée d’une tache noire.
— Procta ? s’étonna l’ancien vétérinaire. Comment nous as-tu retrouvés ?
Le félin s’approcha des deux hommes et vint se frotter au Scribe. Gaum remarqua alors la respiration plus suffocante de son ami. Des perles de sueur s’écoulaient de son front jusque sur son long nez et ses paupières, mi-closes, tressautaient irrégulièrement. Le fossa s’assit sagement à côté de lui et enfonça ses pupilles mordorées dans le regard brun du Malgache. Ce dernier lui trouvait un air étrange, presque humain. Il ne ressemblait plus au jeune Procta tout excité de découvrir son nouvel environnement.
Cette curieuse allure s’estompa aussi rapidement qu’elle était survenue. L’animal bondit sur l’Occupant et lui lécha allègrement le visage. Gaum entendit un bruit étouffé derrière la langue rugueuse. Il repoussa gentiment Procta et observa Andjety. Ce dernier ne semblait pas avoir bougé et paraissait toujours être sujet à une suée éprouvante.
— Est-ce que tout va bien ? s’inquiéta Gaum en tenant le félin à portée de bras tandis que celui-ci cherchait à exprimer son affection.
Andjety avait l’air épuisé, mais il souriait comme si la situation le comblait. Une sensation d’humidité sur son poignet fit dériver l’attention du Malgache. Procta mordillait un bracelet que le Scribe lui avait offert tout en bavant sur la peau d’ébène.
— Surtout, ne m’oublie pas, d’accord ? gargouilla une voix que Gaum ne reconnut pas.
Il regarda le fossa, puis le jeune homme affaissé contre un fauteuil. Andjety n’avait pas bougé les lèvres.
— Tu aimes mon nouveau tour ? reprit Procta avec un timbre venant de ses entrailles.
— Il va me falloir de l’entraînement, termina le Scribe de sa propre voix. Parler à travers lui est épuisant.
Libéré de l’emprise, le jeune fossa détourna soudainement son attention de l’Occupant pour un scarabée qui était malencontreusement entré par hasard dans le salon. Gaum en profita pour se précipiter sur Andjety.
— Est-ce que tu vas bien ? répéta l’homme, affolé.
Le Scribe essayait de se redresser sans succès. Sa pâleur était glaçante, mais Gaum n’était plus à une frayeur près. Il soutint son ami afin de le placer dans une position qui le fasse moins souffrir. Après plusieurs exercices de respiration, Andjety reprenait déjà des couleurs.
— Merci, prononça l’adolescent du bout des lèvres. Je vais guérir. Ne te tourmente pas, s’il te plaît.
Cependant, Gaum avait toutes les raisons de se tourmenter. Si un Thauma pouvait se retrouver dans un tel état, qu’en était-il pour un simple Occupant ? Le Malgache tenta de cacher son inquiétude en plongeant son visage dans le flot de cheveux de plus en plus emmêlés.
— Hé, je vais bien, chuchota Andjety dans la nuque dégagée de son amant. Je m’entraînerai avant que tu partes, annonça-t-il de nouveau. Grâce à Procta, nous pourrons parler d’un monde à l’autre. Alors, ne m’oublie pas.
Pourquoi l’Égyptien croyait-il que Gaum allait l’oublier ? se demanda l’intéressé en se dégageant de leur étreinte. Cela n’avait aucun sens. Ce fut une autre question qui traversa les lèvres du Malgache :
— Comment as-tu fait ? s’étonna-t-il en désignant le fossa, toujours à la poursuite du scarabée.
Le sourire du Scribe s’élargit. Il semblait avoir récupéré ses forces puisqu’il se releva sur ses pieds et tendit une main pour aider Gaum à le rejoindre. S’enroulant dans un silence mystérieux l’espace de quelques secondes, Andjety contourna les sièges puis souleva le jeune fossa dans ses bras. Âgé d’à peine deux ans pour l’éternité, le petit mâle pesait tout de même cinq bons kilos. Proche de sa taille adulte, il allait conserver la vivacité d’un adolescent.
— Louise nous a appris énormément sur la Création, expliqua Andjety tout en grattant au-dessus du museau de l’animal. J’ai donc voulu mettre en pratique mes nouvelles capacités. Je me suis souvenu de cet enfant qui vient de votre monde, enchaîna-t-il en reportant ses yeux gris sur l’Occupant. Il a donné la parole à Bastet, j’ai souhaité faire de même. Et c’est ainsi que j’ai créé un lien entre Procta et moi.
Gaum hésitait entre l’émerveillement et l’incrédulité. Était-ce si simple que cela, de se partager des connaissances sur son pouvoir entre deux Thaumas ? Louise paraissait avoir bien plus de difficultés à matérialiser des êtres vivants.
— J’ai dû faire plusieurs essais avant de réussir, intervint le Scribe, semblant avoir lu dans les pensées du Malgache. C’est grâce à ta présence que j’y suis parvenu.
Il avait déroulé ces mots comme si c’était une évidence, comme s’il s’agissait du résultat exact d’une équation compliquée. Andjety reposa Procta qui commençait à s’impatienter dans les bras de l’homme, puis il se rapprocha de Gaum en glissant sur le sol.
— Vous partez dans cinq jours, annonça-t-il. Nous avons cinq jours de plus pour nous dire au revoir. J’ai cinq jours pour apprendre à te parler à travers Procta sans m’évanouir. Tu as cinq jours pour me donner une bonne raison d’avoir envie de te revoir.
***
La fresque a l'air magnifique ! Et la conversation qui en découle est top, j'aime bien.
Le côté émotif de Luciana est assez bien réussi (pour une fois que je dis quelque chose de gentil lol), on sent qu'elle se perd dans ce qu'elle essaie de dire. Même si elle prétend ne pas avoir préparer ses arguments, certaines phrases semblent avoir été répétées plusieurs fois dans sa tête, mais pas de façon claire et logique.
Du coup, ça fait un mic mac d'arguments lol. Ce qui va bien avec le fait qu'elle soit sous l'emprise de l'émotion.
En fait, la relation Louisiana se termine "bien" dans le sens où c'est réussi, ça fonctionne, c'est difficile, mais elles se quittent parce que c'est mieux pour elles. La fin OK, le début date d'il y a trop longtemps pour qu'on s'en préoccupe, mais le milieu... (je rejoins pas mal Sorryf sur ce qu'elle t'a mis d'ailleurs sur le fait que tu parles d'une relation toxique, mais ça ne le semble pas tant que ça).
Je ne sais plus si je te l'ai déjà dit à l'oral ou écrit par commentaire, mais cette relation sort un peu de nulle part et c'est dommage parce qu'elle montre un autre aspect de la vie amoureuse de Louise et de Louise elle-même.
Déjà que Louise n'est pas la princesse kitch qui attend son prince charmant *tousse* Conan *tousse* Lucas *tousse*. Qu'elle a eu le temps de tester plusieurs choses pendant toutes ces années. Et puis qu'elle n'est pas si parfaite que ça. On sait qu'elle est insupportable, mais j'imagine qu'avec cette "toxicité" tu veux montrer une part plus sombre encore de Louise et c'est en effet intéressant à développer.
Donc je t'invite à plus le développer encore ;).
PTDR Louise l'enfant avec son cactus, adorable.
Dans la partie avec Gaum et Andjety, à un moment tu répètes apporta une mèche à sa bouche et entre ses dents.
Le ship Gandjety mymy !Ils sont vraiment trop mims comme tu dis. Le lien entre Andjety et Procta me fait un peu peur, j'espère que ça ne va pas le briser le pauvre.
Hein c'est vrai ça, pourquoi Andjety croit que Gaum va l'oublier ? Tu vas faire quoi là ! Mon best ship, je refuse qu'ils se séparent à cause d'un oubli à la con ou un effacement de mémoire ultra cliché là !Tu n'as pas intérêt à faire ça.
Olala la fin, j'ai chaud.
Merci pour ce moment, j'essaie de revenir plus rapidement pour le chap suivant.
See ya'
Olala oui la fresque ! J'aimerai tellement que quelqu'un me la dessine :3 J'imagine un truc tellement beau !!
Ah je suis contente si ça fonctionne pour l'émotivité de Lu :) Je crois que je me serai autant embrouillée qu'elle ahah !
Bon je note pour la relation toxique, faut que je vois comment modifier les choses pour que le lecteur comprenne où je veux en venir. Et oui elle sort trop de nulle part, ça se voit que je l'ai inventée dans le tome 2 lol.
Je voulais que ça se termine de façon "mature" pour montrer l'évolution de Louise.
Merci pour ton invitation mdr ! Je vais faire mieux :D
Je note pour la répétition !
Ton best ship là je vais le détruire MOUAHAHAHAHHAHAHA ! Mdr non je rigole, enfin je dis rien, no spoil (moi aussi je les kiffe trop, ils sont hyper mim's !)
Luciana part de son côté... je suis un peu triste mais je comprends. Pour des personnes dans une relation toxique, je trouve qu'elles ont une façon très saine et d'aborder le sujet. Bon, Luciana se ronge les ongles et se griffe, mais à part ça... je sais pas, je pense que j'aurais aimé voir plus de toxicité dans leur relation, parce que au final je trouve qu'elles étaient pas si horrible que ça, et la manière dont elles reviennent dessus et se montrent compréhensives l'une avec l'autre me parait un peu trop belle, je sais pas.
le ptit cactus <3<3<3<3<3<3<3<3<3<3<3<3<3<3<3<3<3<3<3<3<3<3
Gaum et Andjeti, ils vont se revoir c'est sur ! la vie est longue ici-bas ! Alors Andjeti ne t'épuise pas à faire parler le bestiau hein :O C'est qu'il m'inquiète aussi, avec ses "ne m'oublie pas"
"J’ai l’impression de t’avoir retrouvée dans l’Anti-Chambre, mais de t’avoir définitivement perdue. En une vingtaine de jours, je crois qu’on s’est fait autant de bien et de mal qu’en quatre siècles" un peu bancal, la première phrase de cette citation, il manque pas un mot ? La deuxième phrase je l'ai incluse juste pour signaler que je l'aime trop xD
"— Merci, prononça l’adolescent du bout des lèvres. Je vais guérir. Ne te tourmente pas, s’il te plaît." -> s'il a juste fait un petit malaise suite à l'effort, il s'agit pas de guérir. Je vais me remettre, c'est moins alarmant non ?
Ahhh l'antichambre va me manquer ! mais ils vont en ramener le meilleur ! du savoir, des souvenirs, de nouveaux amis... <3
J'ai lu tes commentaires pendant mes vacances et ça m'a trop fait plaisir :3
Je note pour la relation toxique de Louise et Luciana, j'avoue que c'est pas simple à développer le côté toxique et négatif sachant que j'adore les deux personnages xD
J'avais envie qu'elles se quittent en ayant grandi toutes les deux, mais peut-être que pour que le développement fonctionne il faudrait que j'amorce leur relation plus tôt. Peut-être même dès le tome 1, je vais me pencher sur la question ;)
Je note aussi pour la phrase bancale, en la relisant à chaque fois je l'ai pas trouvée très belle donc faut que je la retravaille dans tous les cas mdr et merci pour la deuxième :D
Oui, bonne idée pour se remettre à la place de guérir !
L'Anti-Chambre va me manquer aussi T_T
Merci beaucoup pour ce commentaire <3