34 : Le choix

Judy crut tout d’abord que ses pieds ne bougeraient pas et resteraient enfoncés dans la glaise, mais son instinct de survie était trop fort pour cet acte de bravoure ou bien de complète folie.

Affronter ou fuir. Même sans issue, fuir était souvent le choix vers ce quoi tout convergeait.

Sans réfléchir, elle emboîta le pas de course de Lunaé et Pierre. Kateline l’éclaboussait à son côté. Lunaé se laissa glisser sur la pente d’un étang, comme si elle avait fait ça toute sa vie, un pied rendu en avant, l’autre plié sous elle, lui évitant de salir son pantalon. Pierre trébucha sur les fesses, et Judy tenta de glisser comme Lunaé mais ses pieds s’embourbèrent et elle se rattrapa sur les mains.

— Pas le temps pour les exploits, Blyton, dit Kateline en la remettant debout par le bras.

Judy serra les dents. Si seulement elle avait la force de faire marche arrière… La colère montait en elle, mais la précipitation, le sérieux dans les yeux de Kateline, lui coupait l’herbe sous le pied. Lunaé grimpait déjà la butte qui séparait cet étang du suivant.

Les cris pleuvaient en haut. On aurait pu croire à un rêve, à des sons sans queue ni tête qui pouvaient appartenir à autre chose qu’à un champ de bataille. Judy empoigna les racines à pleine main pour se hisser au-dessus de la butte. Alors qu’elle émergeait du trou de l’étang, elle se retourna pour voir ce qu’ils avaient lâchement laissé derrière eux.

Le costume bleu foncé de M. Olivertown facilement reconnaissable parmi la dizaine de formes moulées de noir avait pris une teinte grise. De multiples cratères l’entouraient, et les blocs de terre jaillissaient devant lui à un rythme effréné, créant de nouvelles tranchées. Il se séparait de ses assaillants, évitait le corps à corps fatal. Les coups de feu fusaient chaotiquement. À chaque détonation, les poils de Judy se dressaient. 

Eustache, non loin de là, dansait. Mais il ne dansait pas dans le vide. Ses gestes coordonnés n’avaient qu’un seul but : faire mouvoir la colonne de boue qui ondulait devant lui, serpent indifférent au danger. Des pics de terre acérés fondirent sur l’un des quatre Lombrics qui l’encerclaient. Il s’effondra.

Encore neuf.

Les Lombrics ne tardèrent pas à répliquer. PAN !

M. Olivertown s’agrippa l’abdomen et s’agenouilla. Les blocs de terre s’écroulèrent au sol d’un mouvement synchrone et Aster en profita pour franchir les tranchées qui l’entouraient. Il s’accroupit, pour se mettre à sa hauteur. D’adulte à enfant.

— Non, murmura Judy.

— Putain, Judy, qu’est-ce que tu fous ?

Pierre revenait sur ses pas, remontait la butte.

— Ils ont eu monsieur Olivertown, dit Judy.

Elle ne savait pas trop ce qu’elle ressentait. Elle devrait être contente, non ? Il avait provoqué la mort de sa mère, non ?

— Passe-moi ta main. Judy ! Descends ! Ils vont finir par te voir. S’ils te voient, on est morts !

— On finira bien par mourir, non ? Nous aussi.

— Judy.

L’avertissement final. L’exaspération.

— Je n’ai pas besoin qu’on m’aide à descendre.

Judy laissa la gravité l’emporter. Elle dévala la bosse de terre et de sable en trois enjambées.

À chaque sommet, bordure de marais, Judy se retournait pour voir comment la situation évoluait. Mémé avait disparu. Apparemment, la lâcheté n’avait pas de camp. Eustache se battait seul contre sept Lombrics. C’était perdu d’avance. Leurs silhouettes se transformaient peu à peu en points de couleur ; la cabane bleuissait à l’horizon.

Soudain, les sept points noirs restants s’immobilisèrent ; la scène se figea dans un tableau pittoresque. Un point noir venait de surgir de la cabane, agitant ses bras, aussi fins que des aiguilles au-dessus de lui. Oleska ? Damassieu ? Elle ne saurait le dire.

Les graviers roulèrent sous ses pieds. Elle baissa la tête : Lunaé la fixait, trois buttes plus loin, réprobatrice. Judy grommela dans sa barbe.

Ne voyaient-ils donc pas ce qu’il se passait là-bas ?

Judy courut rejoindre Lunaé, Kateline et Pierre qui avançaient, leurs chaussures s’enfonçant presque jusqu’aux chevilles dans la glaise. Le terrain redevenait plat, et les pins se dressaient devant eux, bien plus imposants à cette distance.

— M. Olivertown s’est fait tirer dessus, dit Judy en arrivant à la hauteur de Lunaé. Dans le ventre. Il n’y a plus qu’Eustache qui se batte encore.

Lunaé resta de marbre.

— Mais ce n’est pas tout. La bataille s’est figée. Les Lombrics ne bougent plus.

Lunaé soupira. Pierre évitait soigneusement son regard. Kateline la contemplait sans révéler la moindre once de sympathie ou de soutien.

— Personne ne comprend jamais rien, c’est fou, s’exclama Judy. Pourquoi on n’arrive pas à se comprendre ?

— C’est maintenant que tu t’en rends compte, marmonna Pierre.

Judy se retint de frapper un tronc d’arbre du poing.

— Elle est où cette fichue montgolfière ? demanda-t-elle.

Si elle restait encore une minute de plus en leur compagnie, elle imploserait de rage.

— Tu suis les traces de pas. Tout droit.

— Merci.

Judy s’élança sur les ornières creusées dans les aiguilles de pins brunâtres, et ne ralentit que lorsque son souffle ne put lui permettre d’accélérer davantage.

Enfin, un ballon bleu se dessina parmi les branches touffues et une silhouette aux cheveux blonds attendait, assise sur le rebord du panier. Son sifflotement s’envolait dans l’air avec le vol insouciant des bécasseaux, lentement avec le vol des hérons entre les marais. Nathanaël était assis, chevilles croisées, comme si rien dans le monde ne pouvait affecter sa tranquillité de vivre.

— Nathanaël ! cria Judy.

Il sursauta et un instant plus tard, il était au sol, marchant dans sa direction. Un sourire de soulagement étirait son visage.

— Vous voilà enfin. J’avais vraiment peur pour vous, tu sais. Ils n’ont rien voulu me dire, mais ça se voyait qu’y avait un truc qui allait pas.

— Nathanaël, faut que j’y retourne. Faut que tu m’aides. Ces idiots ne veulent rien entendre.

Il fronça les sourcils sous le coup de l’incompréhension.

— Mais on peut pas rester. Quels idiots, d’ailleurs ?

— Lunaé, Kateline, Pierre. M. Olivertown s’est fait tirer dessus, et Eustache est tout seul. Les autres, quels qu’ils soient… morts, je crois.

— Ah. Et tu…

— Ça fait du bien de te voir, tu sais, dit Judy.

Des larmes qu’elle n’attendait pas montaient dans ses yeux.

— Les Lombrics ont cessé le combat alors qu’ils étaient en force. Y a quelque chose qui a changé. On ne peut pas fuir. Ils reviendront. Plus forts, plus nombreux. Que je fuie aujourd’hui ou demain, ça revient au même. Comme ça, je fuirais toute ma vie et le problème se déplacera dans le temps. Ça fait des années qu’ils nous cherchent. Ils ont tué ma mère… tu sais, la… la vraie. J’avais une maman.

Nathanaël serrait les lèvres pour ne pas laisser les émotions déborder de lui.

— Tu veux y retourner ? Tu veux que je t’accompagne ?

Un petit rire la secoua.

— Non. Tu fais ce que tu veux, Nat. Je voulais te le dire.

Judy renifla, s’essuya le nez du plat de la manche.

— Judy ? s’écria la voix de Pierre à travers les pins.

— Oh non. Au revoir, Nat. Je dois y aller.

Nathanaël lui sourit en secouant la tête. Le devoir t’appelle, huh ? Sauver le monde, tout ça, tout ça.

— T’as intérêt à revenir, Jude.

Judy abandonna la montgolfière et courut dans l’autre sens, cette fois. Certainement le mauvais sens selon Lunaé, Pierre et Kateline. Mais c’était le bon sens pour elle.

— Judy, ça va pas la tête !

La voix ténue de Pierre retentit à ses oreilles malgré les quatre cents pas qui devaient les séparer. Il savait crier pour qu’on l’entende. Ou avait-elle appris à entendre depuis quelques mois ? Pas le moindre doute, elle les avait à nouveau à ses trousses. Elle n’avait besoin que de Pierre cela dit. Pour ouvrir ce maudit portail, et qu’enfin les porteurs d’Anti-lumière aient la paix.

— Pierre, attends ! criait celle de Nathanaël en filigrane derrière le vent.

La cabane se rapprochait à vive allure. Du moins, en comparant sa progression avec celle de ce matin. Elle s’engagea directement sur la crête qui bordait les marais. Qu’on la voit, et vite ! Il fallait qu’Aster, Mémé ou bien les Lombrics la trouvent.

On lui faucha les jambes. La vitesse de sa course la propulsa en avant et elle se rattrapa sur les mains qui s’égratignèrent sur la roche.

— Ne bouge plus, souffla Mémé à son oreille.

La joue collée contre la terre, Judy referma ses poings sur ses paumes brûlantes.

— T’inquiètes pas Mémé, je te cherchais. Sinon pourquoi je serais revenue ?

Mémé l’aida à se relever, bloquant ses bras derrière son dos et l’entraîna dans le creux d’un marais. Elle la plaqua contre un renfoncement dans la pente. À présent, Judy se demandait s’il restait une partie de ses vêtements encore épargnée par la boue.

— Où est Pierre ? demanda Mémé.

— Il arrive.

Mémé la lâcha, ses yeux bruns – qui lui avaient paru, un jour lointain, être l’un des endroits les plus chaleureux au monde – l’étudiant avec circonspection. Judy avait toujours négligé l’éclat d’intelligence froide qui les habitait. Cette capacité dangereuse à lire à travers les émotions.

— Les Lombrics n’obéissent plus à Aster ? C’est pas très bons pour tes plans. Mais je comprends pas, Mémé. Je retourne sans cesse le problème dans ma tête : qu’est-ce qu’une Connectée comme toi, aussi douée en plus, capable de concevoir des lettres de braise, a à gagner à pactiser avec Aster ?

Mémé sourit.

— Qui t’a dit que j’étais connectée ?

Judy eut l’impression de rater une marche en pleine ascension d’un escalier et de retomber dix marches plus bas.

— Qu’est-ce que tu racontes ? Bien sûr que si tu es connectée. Je l’ai vu.

— Tu l’as vu. Vraiment vu ?

Judy fouilla dans ses souvenirs. Avec une surprise glaçant se rendit compte qu’elle disait vraie. Elle ne l’avait jamais vue utiliser sa connexion d’une manière qui ne laissait aucune place au doute. Oui, elle l’avait vu allumer un feu sous une casserole par la pensée. Était-ce seulement sa pensée ? Manipuler dans sa main des flammes. Étaient-elles des feu-follets ?

— Tu es sur la bonne voie, acquiesça Mémé.

Elle continuait de donner l’impression déroutante de lire dans ses pensées. Elle n’arrêterait jamais de faire ça, parce qu’elle savait à quel point cela pouvait la déstabiliser.

Judy ne l’avait jamais vue faire naître une flamme sur sa peau à proprement parler. Comme elle ne l’avait jamais vue fabriquer une lettre de braise. Les seules fois où elle l’avait vu initier un feu, il y avait quelqu’un d’autre dans la pièce, ou bien des feu-follets à portée de main.

— Papa, murmura Judy.

Évident.

Le sourire de Mémé s’élargit.

— C’est lui le Connecté. Quel…

— C’est moi qui t’aie amenée à lui. C’était ma condition. S’il l’enfreignait, alors je te livrais à Aster. S’il obéissait, alors vous seriez protégés. Tu n’as pas à lui en vouloir. Il n’est qu’un pion dans un jeu qui le dépasse.

— Et ce jeu ne te dépasse pas, toi ? T’es la cheffe d’orchestre ? Tu crois pouvoir trahir tout le monde sans qu’on te rende tes coups ? Tu vas le regretter. Ton plan, il va foirer à un moment. On regrette toujours de jouer aux Esprits.

Mémé se mit à rire.

— Qu’est-ce qu’il y a de drôle ?

Mémé cessa de rire.

— Tu le sauras bien assez tôt.

Mue par une énergie venue des tréfonds de son être, Judy repoussa Mémé contre la butte. Mémé tomba les fesses dans la boue.

— Qu’est-ce que tu comptes faire ?

— Te tuer, dit Judy.

La surprise passa sur les traits de Mémé. Judy secoua la tête. Même la plus maligne d’entre elles savait être prise au dépourvu.

— Où est Aster ? continua Judy.

— Les Lombrics en font leur affaire.

— Ce n’est pas une rép…

— Judy !

La voix de Pierre retentit. Beaucoup trop près.

— Pierre, il faut que tu m’écoutes, tenta de le raisonner Nathanaël. Ça sert à rien de risquer ta vie en plus de la sienne. Elle ne nous écoutera pas, tu comprends ?

Un coup d’œil à Mémé, et Judy comprit qu’elle l’avait anticipé. En fait, ce n’était pas Aster qui avait tout prévu. C’était Mémé qui tirait toutes les ficelles. Judy grimpa au-dessus de la butte.

— Je suis là, dit-elle en cherchant la silhouette de Lunaé, de loin l’une des personnes les plus à même d’ébranler ses plans.

Mais elle n’était pas là.

— Où est Lunaé ?

— Oh, dit Nathanaël, elle ne va pas tarder à arriver. Je ne sais pas ce qu’a décidé de faire Kateline mais ça a l’air de marcher.

— Suivez-moi, dit Mémé.

Pierre et Nathanaël sursautèrent au son de sa voix et reculèrent en l’apercevant s’extirper de la pente du marais.

— Les Lombrics ne vont pas tarder à vous trouver.

Elle haussa les épaules. Elle se dirigeait droit vers la cabane. Elle les emmenait aux Lombrics. Qu’est-ce qu’elle racontait ?

— Salades, dit Judy.

— Choux d’Audal, proposa Nathanaël.

— Non plus, répondit Mémé. Vous voulez vous débarrassez de l’Anti-lumière, oui ou non ?

Elle n’attendit pas leur réponse.

— Alors suivez-moi.

— On retrouvera nos connexions ? demanda Pierre. Aster dit des sottises, hein ? Comme vous, j’imagine ? Tous des traîtres ?

Mémé se retourna et plongea ses yeux d’une dureté à couper en deux un glacier dans ceux de Pierre.

— C’est lui ou moi.

— Pff, vous ne valez pas mieux que lui. Il y a un quart d’heure à peine vous lui léchiez les bottes. Et je dois croire que vous avez retourné votre veste ?

Il marmonna « foutaises » plus bas.

— C’est quoi votre vérité à vous ? On retrouvera nos connexions ? Oui ou non ?

— Tu sauras la vérité seulement si tu me suis.

Mémé continua de marcher. Judy connaissait ce pan de sa personnalité. Mémé n’en démordrait pas. Alors qu’ils se rapprochaient de la cabane, les Lombrics émergeaient des buissons et des marais ; la porte de la bicoque s’ouvrit, révélant la tunique noire de Damassieu. Son œil blanc scintillait, cet œil qui ne voyait plus attirait tous les regards. Le port dressé de son menton, ses mouvements lents, tout indiquait qu’Aster était tombé et que les Lombrics avaient un nouveau chef. Dans son sillage, Den referma la porte, une dague dans le poing. Certainement la même dague avec laquelle elle avait menacé Judy sous la gorge dans les galeries, il y avait si longtemps qu’il arrivait que Judy en doute. La même avec laquelle elle avait tué sa mère.

— Qu’est-ce que tu veux, Jim ? demanda Damassieu, hostile.

— Ce que vous voulez aussi.

Mémé fit rouler le monocle, éclat dorée, entre ses doigts. Le caressa avec tendresse. Presque nostalgique. Regret. Tristesse.

— J’ai ce dont vous avez besoin.

— Ce truc ne sert qu’à ramener les connexions, cracha Damassieu. Ce n’est pas la vengeance que l’on nous a promise.

— Aster n’a pas la vérité, dit Mémé. Les Esprits sont furieux. Ils veulent récupérer ce qu’on leur a volé : l’Anti-lumière. Ce avec quoi l’on déconnecte, justement.

— Qu’est-ce que t’en sais, toi ? Tu leur as parlé ? Tu t’appelles Léna alors tu penses être la grande Léna Clastfov ? Allez, arrête tes bobards. Rendez-vous. Vous n’avez plus le choix.

— Renoncez-vous donc à vos projets ? Allez-vous continuer à vivre en parias dans les tunnels de la capitale ?

Le regard de Mémé, rempli d’une conviction sans faille, se faisait de plus en plus persuasif. Judy pouvait voir l’hésitation apparaître, frêle, dans les rangs des Lombrics. Ils se concertaient davantage du regard, s’agitaient de plus en plus. Ils fixaient tous Damassieu.

— Qu’est-ce que vous proposez de faire ? dit Damassieu à Mémé après de longues minutes de silence.

— Rendre l’Anti-lumière aux Esprits.

Damassieu fronça les sourcils. Quelque chose clochait. Quelque chose ne s’emboîtait pas comme il le fallait. Quelque chose manquait au tableau. Personne ne savait ce que Mémé avait à gagner. La véritable pièce manquante, c’était elle, et ce qu’elle taisait.

— Donnez-nous les enfants. Les trois. On les libèrera seulement si vous dites la vérité et qu’il se passe ce qu’il doit se passer. Sinon, le blond, on lui coupe les oreilles et on le pend, toi, on t’étripe. Et les deux autres, deviendront nos armes de guerre, si tu vois ce que je veux dire.

Nathanaël recula imperceptiblement et se tendit. Judy se tourna vers Mémé. Mémé n’avait rien à perdre à les livrer comme chair à canon. Mémé. Lui avait-elle un jour porté un tant soit peu d’affection ? Avait-elle été sincère ? Ou tous ces moments partagés, ces Mémés et ces rires articulés n’avaient été que des mensonges, un rôle, une façade pour servir ces propres desseins ?

Le sentiment de trahison et d’abandon mêlés l’envahit, poison abrasif, feu de honte absolue, cette sensation de ne rien valoir, de ne pas compter, de n’être rien.

— D’accord, dit Mémé.

Judy ferma les yeux, sous l’impact. Ce n’étaient qu’un pauvre petit mot, il avait la force d’une balle dans le ventre.

— Mais, en échange, en cas de réussite je veux vos prisonniers. Tous vos prisonniers. Les enfants inclus.

— Nous voilà face à un marché équitable, dit Den.

Mémé tendit la main, satisfaite de son arrangement. C’était presque curieux d’entendre cet acquiescement dans la voix de Den. Équitable paraissait dans sa bouche être un mot étranger.

— Il serait bon de le conclure, les pressa Mémé.

Damassieu la serra de mauvaise grâce, et Den leva un sourcil inquisiteur en voyant que Mémé ne bougeait.

— Avant de procéder, je veux voir les prisonniers.

— Cela ne faisait pas partie du marché.

— Vous avez besoin de notre coopération, non ? J’ai à parler à votre traître Aster. Ce sera mon unique autre demande.

Den consulta Damassieu, affichant une méfiance manifeste. Damassieu recula et passa son buste dans l’entrebâillement de la cabane.

— Ramenez les prisonniers à l’extérieur, lança-t-il, étouffé par l’épaisseur du bois.

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