35 : Le cimetière des marécages

Trois Lombrics sortirent de la cabane, traînant chacun un corps devant eux ou derrière eux, et boitillaient sous leurs poids inertes. Le premier allongea dans la fange sale le corps englué de sang de M. Olivertown. Son costume gris de boue était à présent marron et encroûté d’un rouge sombre sinistre. Judy avait de la peine à reconnaître M. Olivertown, le directeur d’Otaïla. Il n’était pas mort, si ? Un mort pouvait-il encore être fait prisonnier ? Judy déglutit pour chasser les émotions morbides qui remontaient dans sa gorge.

— Il n’est pas mort, murmura Nathanaël.

Judy se tourna vers lui, surprise.

— Co…

Un autre Lombric plutôt jeune d’ailleurs jeta sans ménagement le tas d’os gémissant que représentait Eustache à côté de la dépouille de M. Olivertown.

— Mon dos, espèce d’invertébré sans cervelle, maugréa Eustache.

Judy se demandait où est-ce qu’il trouvait la force de faire preuve de tant de verbe et d’imagination. Il se redressa assis et leva le menton vers ses agresseurs pour cracher à leurs pieds. Il ne regarda pas M. Olivertown qui gisait à un ou deux pieds de lui.

Le troisième Lombric tira le dernier prisonnier sur la rangée que formait déjà Eustache et M. Olivertown. Aster tenait encore sur ses jambes, mais ne fit aucun geste pour aider le Lombric à le déplacer. Le Lombric le poussa (c’était un homme grand et robuste) cependant Aster trébucha à peine devant lui. Il soutint le regard polaire de Mémé. Entre les deux, on ne saurait distinguer lequel avait l’ascendant sur l’autre. Mémé l’avait piégé, mais rien n’avait changé dans la posture d’Aster. La confiance brillait toujours dans ses yeux. Lui faisait-il confiance ? Non, Mémé ne peut pas avoir réussi ce tour de force…

Quelles étaient ses intentions ? Qui ne trahirait-elle pas ? La panique se déversa en Judy avec une force qu’elle ne pouvait plus endiguer.

Mémé s’approcha d’Aster. Les Lombrics la tinrent aussitôt en joue ; elle ne leur prêta aucune attention.

— Tu as perdu.

— Ah bon ? dit-il sans se départir de sa tranquillité.

— Tu as perdu ta famille. Tu as perdu ta connexion. Juste retour des choses, non ? N’as-tu rien à dire… à ta fille ?

Quelques secondes de silence passèrent. Aster tourna lentement son visage vers Judy. Il avait changé, perdu de l’éclat, s’était résigné.

— Tu peux me blâmer de beaucoup de choses, Judy, dit-il, mais j’ai toujours eu mes raisons d’agir, qu’elles plaisent ou non.

Sans tendresse. Sans une once d’affection. Judy se crispa malgré elle.

— Je ne faisais pas partie de tes raisons.

— Peut-être que si tu avais vu à travers mes yeux, tu comprendrais.

Comprendre quoi ? Elle essayait de comprendre, et chaque fois, elle sentait le poids dans sa cage thoracique grossir. Le poids de cette famille brisée, d’un père qui l’avait rejetée. Elle avait beau vouloir l’effacer de sa vie, son ombre rôdait au-dessus d’elle ; elle pourrait se forcer à ne plus y penser, son corps n’oublierait jamais la brûlure de l’abandon.

Nathanaël et Pierre se raidirent. Bien sûr. Ils ne savaient pas. Elle ferma les yeux. Sera-t-elle donc toujours punie de ne pas avoir eu la force de dire ? Dire, ça voulait dire que c’était vrai. Dire, ça rouvrait la cicatrice et la brûlure tracerait à nouveau son sillon douloureux dans son cœur, avec l’intensité du premier jour. Pourquoi devait-elle dire alors qu’elle ne voulait pas le dire ?

L’incompréhension se peignit sur les traits de Pierre. Ses yeux allèrent de Judy à Aster puis d’Aster à Judy. L’incrédulité qui peignait ses traits se mua lentement en évidence puis en ironie. Comment ne l’avait-il pas vu avant ? Voilà la question qui le brisait en miette et amertume. Comment avait-il pu être aveugle ? Crédule ? Accordant sa confiance à la moindre venue ?

Nathanaël ne dit rien, se perdant dans l’observation de l’horizon, déçu. Peut-être blessé par le mensonge et ce fut ce qui fit le plus de mal à Judy. Elle sentait que quelque chose dans leur amitié avait changé de manière irrécupérable.

— Merci, dit Mémé à Damassieu.

— Non, les retint Eustache.

Il venait de perdre son ennemi mais aussi son seul soutien : Aster, qui venait tout juste de rendre les armes.

— N’y allez pas.

Ses yeux cherchaient en vain à accrocher les leurs.

— Pierre, non, ne fais pas ça. Vous allez le regretter. Vous allez détruire l’Océotanie. Ce sera irréversible.

Il se débattit sur la terre molle, semblable à un poisson tiré hors de l’eau.

— Vous rêviez d’être Connectés… Judy… Les Lombrics vont prendre le pouvoir. Ce sera la fin.

Mémé s’engagea entre les roseaux, tout droit vers l’horizon, comme s’il n’existait pas. Den les menaça – elle, Nathanaël et Pierre – de la pointe de son canif de la suivre. Les supplications inutiles d’Eustache se diluèrent dans le vent, la seule entité avec qui il se battait. Comme Pierre ralentissait, Damassieu l’attrapa par le bras et le poussa devant lui sans ménagement.

— Ça va, ça va, maugréa Pierre avec un faible trémolo dans les cordes vocales.

Il tentait de le cacher mais lui aussi avait peur. Lui aussi, peut-être, sentait-il cette grande vague grandir sous l’océan, impossible à percevoir, qui allait tous les emporter.

Chaque quadrat d’eau se ressemblait, chaque monticule de sel semblait marquer le paysage sans aucune cohérence, mais Mémé savait où elle allait. À l’évidence, elle connaissait cet endroit comme sa poche. Elle avait dû vivre et parcourir cet endroit des mois durant. Quelle coïncidence les réunissait tous dans cet endroit que seule elle maîtrisait ?

La boule de stress s’épaissit. Acculée. Judy jeta un coup d’œil derrière elle, vers les corps des prisonniers, étendus devant la cabane comme des condamnés ayant purgés la peine capitale. Elle avait l’impression d’être la prochaine qu’on emmenait à l’échafaud.

Judy s’éloigna de Nathanaël et contourna prudemment Damassieu, petit à petit, pour ne pas qu’il ne s’aperçoive de sa manœuvre.

— Qu’est-ce qu’on va faire ? souffla-t-elle à Pierre quand elle fut à son niveau.

Elle garda toutefois le nez tourné vers Mémé. Il ne réagit pas immédiatement, si bien qu’elle eut peur qu’il ne l’ait pas entendu.

— Qu’est-ce que tu veux qu’on fasse ? On a choisi ce qu’on allait faire en revenant sur nos pas. Enfin, tu as choisi pour nous.

— Si on avait fui, le problème n’aurait été que différé, se défendit Judy.

Ils allaient encore lui faire porter le chapeau ? Évidemment, c’était toujours de sa faute ! Sa faute d’être la fille de son père, d’être née, aussi, peut-être ?

— Dans le meilleur des cas, on aurait fui toute notre vie, et on aurait légué cette fichue Anti-lumière à d’autres. J’ai choisi pour nous, parce qu’on ne peut pas choisir chacun ce que l’on veut. On est deux et inséparables tant qu’on n’aura pas ouvert le portail. Autant couper le lien aujourd’hui.

Mémé ralentit. À ses pieds, un petit cratère marécageux s’étendait deux ou trois pas de longueur. Retour à la case départ. À la tourbe.

— Tu as envisagé les conséquences d’ouvrir ce portail ? Si ce qu’elle dit est vrai, Judy, les Connexions, ce sera fini.

Judy fixa Pierre, longtemps, trop longtemps. Le métal froid du canon rencontra sa tempe.

— Gamine, on ne t’a pas autorisé à discuter, murmura Damassieu.

Un frisson glacé la parcourut.

— La Source des Esprits primitifs. Nous y revoilà, soupira Mémé. Ce n’est qu’ici que l’on peut ouvrir le portail. Aussi connu sous le nom de cimetière des marécages, et personne n’a jamais compris pourquoi, car personne n’est mort à priori. A priori.

Pourquoi s’embêtait-elle à leur expliquer cela ?

Mémé brandit le monocle vers le ciel engrisé.

— Maintenant, déconnectez-vous.

Judy et Pierre se tournèrent l’un vers l’autre, sous les yeux scrutateurs de Nathanaël, qui lui, découvrait tout.

— Je croyais que vous deviez vous énerver ? objecta Nathanaël. Et contre la personne à déconnecter.

C’était vrai. Judy n’avait aucune idée de comment faire. La même interrogation mouvait sur les traits de Pierre. Elle pouvait serrer les poings, crisper le visage, ça n’y changerait rien. Elle ne ressentait pas cet ouragan dévastateur. Elle jeta un coup d’œil paniqué vers Mémé.

Cette dernière avala l’espace qui les séparait et attrapa sa main pour lui remettre le monocle.

— Vous n’avez qu’une chose à faire : ouvrir le portail. Les Esprits reprendront l’Anti-lumière et vous serez libres, souffla-t-elle.

Il y avait dans sa voix une lumière, telle que les rayons solaires de l’aube qui perçaient les nuages : l’espoir.

Libres. L’étincelle s’enflamma à l’intérieur de Judy.

— Pierre, dit-elle.

Elle projeta vers lui ce souffle d’espoir avec le plus de force, le plus d’intention possible, pour qu’il ressente lui aussi la lumière.

— On ne récupérera pas la Lumière pour la rendre aux Déconnectés, dit Pierre.

— Non, dit Mémé.

— On ne va rien voler, dit Judy. On va rendre. C’est ce qu’il y a de juste à faire.

Une grimace de dégoût traversa le visage de Pierre.

— Je suis lâche ? Et toi donc Judy ? Tu te plies à leur volonté. Tu ne combats rien. Tes idées, c’est du vent. Tout ce que tu veux, c’est sauver ta peau, et peu importe les conséquences auxquelles tu exposes le monde.

Cela l’atteignit en plein cœur comme un venin. Ça faisait mal.

— Pierre, si tu continues, vous allez vous déconnecter, intervint Nathanaël.

Ah. Il venait de choisir son camp. Face aux mensonges, à ce qu’ils lui avaient tous caché, il pouvait enfin faire un choix libre et éclairé. Son choix. Qu’il le fasse. Judy ne voulait plus fuir.

Ne plus jamais fuir. Être libre.

Rendre ce qu’on avait volé. Il ne le voyait pas, Pierre. Étrangement, elle comprit Aster. Il avait ses raisons, comme elle venait de forger les siennes. Personne n’agissait sans pourquoi.

— De toute façon, Nathanaël, répondit Pierre, ils nous tueront si on ne fait pas ce qu’ils veulent et ils… ils hériteront de l’Anti-lumière. Ils le feront bien eux-mêmes, tu penses.

Nathanaël s’agita, déglutit, en proie à un excès de panique et de rage. Serra, desserra les poings.

— Vous êtes des beaux connards, quand j’y penses. Déconnecter toute la population, et je devrais vous assister comme un petit toutou ? Pierre, c’est vraiment ce que tu veux ? Pierre ?

Nathanaël fonça sur Pierre et empoigna les bords de sa veste avec brutalité.

— Qu’est-ce que tu fais ? paniqua Pierre.

Den et Damassieu se dressèrent d’un bond, mais Mémé les arrêta d’un signe de la main. Les émotions : ce qui lui fallait. Nathanaël s’en prenait à Pierre alors que c’était Mémé qui devrait prendre chacun de ses coups.

— Je m’énerve, idiot, cracha-t-il. Parce que tu fais rien. Moi, je peux pas déconnecter d’un claquement de doigt à la moindre émotion négative.

Il le lâcha aussi rapidement qu’il l’avait saisi et se tourna vers Judy. Hésita quelques secondes devant son expression désarçonnée, puis balança son poing dans le nez de Judy. Un horrible craquement retentit, et Judy tomba à la renverse, à deux doigts de défaillir.

Juste retour des choses, j’imagine. Par terre, elle essuya le sang délicatement. Son nez était encore gonflé. Il triplerait de volume en quelques minutes.

— J’espère que ça fait aussi mal que celui de Juan. Tu l’as privé de ce que tu n’avais pas, et tu vas priver tous les autres… En fait, t’es une Lombric. Tu nous as tous entourloupés. Comme ton père.

Elle ne put acquiescer ni démentir, que des larmes, cette fois de douleur, coulèrent sur ses joues. La colère déferla en elle, le choc passé, douce, subtile, déterminée à en finir. Les mots de Nathanaël auraient dû la blesser le plus. C’était le cas.  

Nathanaël se tourna vers Mémé, la déception ruinant son visage.

— Vous me laisseriez partir ?

— Non, répondit Damassieu. S’ils ne se relèvent pas, c’est toi qui morfleras.

— C’est bien ce que je pensais. Que je suis con.

Judy se redressa, assise. Le liquide chaud et poisseux coulait dans sa bouche et dégoulinait sur sa chemise. Elle avait mal. Elle le sentait à nouveau enfler. Deux fois cassé en une année à peine, elle ne devait plus ressembler à grand-chose.

Malgré le flou, elle tendit le monocle face au ciel. Damassieu avait perdu un œil en regardant au travers. Il n’y avait pourtant rien à voir de plus. Elle se rapprocha. Les lignes des nuages étaient les mêmes, quoique légèrement plus lumineuses et se chevauchant par endroit comme s’il y avait deux lignes au lieu d’une.

Les contours du paysage en dehors du monocle semblèrent se dédoubler à leur tour. Dans sa poitrine, la douceur colérique frétillait, ondulait, tirait sur les liens qui la rattachaient à Judy. Une déconnexion s’opérait. De qui à qui, impossible de savoir. Elle avait l’impression que deux énergies s’emmêlaient… ou bien une même énergie qui fusionnait avec elle-même et qui retrouvait son état fondamental.

Le portail était invisible. Toutefois, elle pouvait le sentir percer la réalité. S’ouvrir jusqu’au bout. Pendant quelques minutes, tout fut calme. Au loin, l’eau clapotait sur le récif, la brise se faufilait entre eux et camouflait les autres sons. Ils s’entreregardèrent, tous, attentifs, méfiants. L’espace de ce temps, ils n’y avaient plus de Judy, de Pierre, de Nathanaël, de Lombrics, de Mémé ou bien de Léna. Plus d’amis devenus traîtres, d’ennemis cruels. Ils n’y avaient plus que quelques âmes qui se demandaient quand est-ce que la tempête allait les emporter. Et elle arriva.

Un champ de force haineux fit vibrer la réalité. Les contours de l’horizon et des marais se distendirent. Puis la force fondit sur eux. Judy, qui était assise, se retrouva plaquée au sol, incapable de se mouvoir, et les autres tombèrent tous comme des dominos, fauchés par un vent imperceptible et surpuissant.

Judy contracta les muscles de son cou, mais sa tête était trop lourde. Il n’y avait que ses yeux encore capables de bouger, qu’elle tira au maximum vers le centre de la tourbière. Mémé était encore debout, la tête levée vers le ciel comme si elle lui parlait.

Judy bloqua les déductions et les émotions que cela engendrait en elle. Trop insensé, impossible pour être vrai. Elle ne pouvait plus bouger. Mais il lui restait ce qu’elle avait refoulé depuis que l’Anti-lumière s’était annoncée à elle : sa connexion. Elle était encore là, malgré tout, et peut-être pour la dernière fois. Elle ferma les paupières. L’air salé entrait, sortait toujours par ses narines ; son corps n’était pas complètement immobile, seulement cloué au sol.

L’eau était absolument partout ici. Cependant, son Esprit, l’Esprit de l’Eau auquel elle était connectée restait hors de portée, tourbillonnant entre les dimensions. Il était attiré par la force qui – comme la gravité – les avait fait tomber et les contrôlait tous. Cette force était l’étoile ardente des éléments de l’Océotanie entière.

Judy connaissait les légendes qui se racontaient dans les auberges et dans les tunnels des Doigts de fées. On jurait par leurs noms. Personne n’était sûr de leur existence. Judy ne pouvait les voir, à peine les percevoir, mais c’était eux : les Esprits primitifs.

Un courant d’air froid balaya l’atmosphère, et la force se retira lentement. Le ciel d’un blanc-gris uni ne laissait transparaître aucune forme. Judy se releva, et tendit la main à Pierre qui la refusa. Elle ignora la claque que lui faisait ressentir le rejet. Elle fit un pas vers Nathanaël, mais se figea à mi-parcours, les pieds enfoncés à mi-mollet dans la tourbe. Les Esprits primitifs se tenaient juste entre elle et lui. Bien sûr, ils étaient invisibles. Mais Judy les ressentait aussi clairement qu’elle sentait son cœur battre. Une force immense dans son cœur. Elle sentit aussi leurs mains qui s’introduisaient dans sa cage thoracique, et qui reprenaient leur dû. L’Anti-lumière n’avait pas de couleur. Un poids dans son corps se libéra, s’envola avec leurs mains invisibles, qui se retiraient comme l’océan de la plage.

L’Esprit de l’Eau émergea à sa conscience sans qu’elle n’ait besoin de le chercher. Tout sembla si facilement accessible. Tout sembla s’ouvrir à sa conscience, un monde entier dont elle n’avait perçu qu’une infime portion lui tendait les bras.

Le même émerveillement illuminait le regard de Pierre.

Puis un mur tomba. Il devint impossible à Judy de même chercher l’eau. Il tomba devant les yeux de Pierre. Devant les yeux de Nathanaël. Un cri à glacer le sang retentit à l’autre bout des marais. Peut-être Eustache, ou Lunaé ou Kateline qui étaient revenues sur leurs pas pour les retrouver. Judy sentit l’énergie lumineuse la quitter ; la force l’aspirait sans scrupule. Elle ressentit pour la première fois de sa vie ce que signifiait le mot « déconnecté ». Ses propres limites corporelles s’imposèrent à elle : sa chair, sa prison. Le monde extérieur était devenu inaccessible, les livrant à leur seul et unique corps.

Mémé n’avait pas menti. Les Lombrics avaient gagné. La grande Déconnexion dont ils rêvaient et avec quoi Aster les avait abreuvés d’espoir venait d’avoir lieu.

L’Anti-lumière s’évanouissait dans l’espace autour d’eux aspirant avec elle la Lumière de l’Océotanie entière. La force des Esprits se rétractaient au fur et à mesure que le portail se fermait.

Judy aurait dû s’en vouloir et se sentir coupable à mourir. Pourtant, un sentiment de paix profond l’habitait.

 

 

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