En quittant les lieux, Benjamin avait laissé planer un silence dans son sillage. Les deux protagonistes abandonnés derrière lui ne pipaient mot, et se contentaient d'accomplir les tâches qui légitimaient leur présence en cette écurie. Astrée se pinçait les lèvres pour s'astreindre au mutisme et ne surtout pas prendre le risque de voir cette curieuse conversation reprendre. Roméo et Juliette ? Et pourquoi pas Hansel et Gretel, aussi ? Ah non, ils étaient frère et sœur, eux... Cela dit, puisqu'elle partageait la même date de naissance que le russe, était-il envisageable que...? Tais-toi, cerveau !
— Tu l'as retrouvé ? lui demanda-t-elle après un instant de silence, se rappelant brusquement le pourquoi de l'emprunt de son cheval.
— Je... Non, répondit-il au sortir de ses pensées, se remettant en mouvement pour s'occuper de Néron avec autant de dextérité que s'il avait fait ça toute sa vie. Non, il n'y avait pas trace de lui. Il a dû prendre la fuite avant la ligne d'arrivée.
— En comprenant qu'il avait été trop loin, probablement, il n'aura pas voulu assumer devant la foule, rétorqua-t-elle en brossant une fois de plus, une fois de trop, cet étalon qui devait en avoir plus qu'assez.
— Ou bien simplement parce qu'il ne participait pas à la course initialement.
— Qu'est-ce que tu veux dire ?
— Astrée, bon sang ! Il va te falloir combien d'incidents de ce style avant de comprendre ? s'impatienta-t-il en haussant la voix qui devint subitement sévère et rauque.
— Comprendre quoi ? Je t'en prie, ne t'y mets pas non plus ! La théorie du complot, je donne déjà assez avec mon frère. Je ne suis personne, rentrez-vous ça dans le crâne ! finit-elle par s'énerver à son tour.
— Si tu préfères poursuivre dans le déni, tâche au moins de faire plus attention, lui répondit-il dans un rire sans joie.
Ils n'étaient qu'à moins d'un mètre l'un de l'autre, tous deux tournant le dos à leur monture respective.
— Je fais déjà attention, se renfrogna-t-elle.
— Tu es l'allégorie de l'inconscience.
— C'est faux !
Il se contenta d’hausser un sourcil circonspect. Profondément agaçant. Le sang d’Astrée pulsa dans ses tempes, dans ses poings. La colère lui picotait le ras des cils. Comment pouvait-il être si sûr de lui ?
— Tu ne me connais pas ! tonna-t-elle à défaut d’un meilleur argument.
— Parce que tu crois que j'ai eu envie, un jour, de te connaître ? cracha-t-il à son tour, l’acier de son regard se faisant violence.
Cette simple phrase, ces simples mots venaient de provoquer en elle un véritable tsunami émotionnel. Plus violent qu'une gifle, plus douloureux que n'importe quel coup physique qu'il aurait pu infliger à son être. Une injustice qui la laissa stupéfaite, mutique, blessée. Lèvres entrouvertes, elle ne parvenait qu'à les faire se mouvoir en vain, sans qu'aucun mot, ni même aucun son ne parvienne à s'en extraire. Une blessure visible qui fit réagir le Russe à son tour. Chassant colère et frustration de ses traits, ses sourcils s'affaissèrent en même temps que son regard se faisait douloureusement coupable, et que sa main hésitante pénétrait son espace vital.
Elle voulut, elle souhaita de toutes ses forces se soustraire à ce contact imminent. Mais malgré sa faible tentative de recul, la paume se posa sur son épaule dénudée, et distilla ce foutu calme contre lequel elle chercha à se débattre. Non, elle ne voulait pas être calme. Elle voulait le détester encore, lui en vouloir d'oser lui parler de la sorte, d'exposer des vérités qu'elle se refusait d'entendre. Cependant, au-delà de l'apaisement contre lequel elle ne pouvait rien, il y avait cette attraction contre laquelle elle ne pouvait pas grand chose de plus. Aussi, lorsque la main, de sa prise assurée, l'entraîna jusqu'à ce corps étranger et familier, elle se laissa ridiculement faire et vint s'écraser contre son torse. Ultime piètre tentative de résistance, Astrée plaça ses bras tout contre sa poitrine. Elle refusait le contact direct. Elle refusait la pression complète de son corps contre le sien.
— Pardon... chuchota-t-il contre sa tempe d'un simple souffle à peine audible, immédiatement suivi de ses lèvres se déposant à la lisière de son oreille. Ce n'est pas exactement ce que je voulais dire. Pardon...
Un mot qu'il répéta à de nombreuses reprises sans qu'elle n'y réponde jamais. Un mot qu'il ponctuait chaque fois de ses lèvres qui venaient parasiter une nouvelle parcelle de peau. Il picorait son épiderme avec douceur et une forme d'hésitation, comme si, tout comme elle, malgré la conscience tenace de l'illégitimité de ces gestes, il ne savait s'en empêcher. Il ne savait lutter plus avant. Cela ne lui ressemblait pas. Pas plus qu'à elle. Cela ne ressemblait en rien à l'ébauche de relation qu’ils entretenaient. Aussi étrange soit-elle. Les émotions semblaient avoir pris le pas sur tout le reste, notamment la partie raisonnable du cerveau. Et elle se laissait faire. Malgré tout le ressentiment qu'elle nourrissait à son égard. Elle le laissait faire. Fermait les yeux au propre comme au figuré.
— Dis quelque chose, l’implora-t-il en lui redressant doucement le menton.
Il cherchait à forcer un contact visuel. Contact qu'elle refusait. Trop consciente de l'effet qu'il aurait sur elle, elle s'obstinait à conserver ses paupières closes. Astrée préférait les ténèbres à toute influence extérieure provenant de lui. Elle ne voulait pas croiser l'acide de ses yeux qui sonderaient, sans nul doute, son âme. Elle ne voulait pas lire le repentir de son regard. Et peut-être quelque part ne cherchait-elle qu'à prolonger cet instant. Cette étreinte franche et directe, cette tendresse qu'il prodiguait contre sa peau, de ses lèvres, du bout de son nez, de son front parfois. Une étreinte entrecoupée de supplications qu'il venait souffler contre son épiderme. Et menton toujours relevé, sa dernière prière lui sembla si proche qu'elle sentit son expiration contre ses lèvres et ses joues. Dans sa poitrine, son cœur, plus réactif que son esprit, s'affola. Il était parfaitement conscient de ce qui allait suivre.
C'était une évidence depuis le premier instant. Et pourtant, lorsque ses lèvres touchèrent enfin celles d’Astrée, ce fut une réelle surprise. Peut-être s'était-elle trop enracinée dans son aveuglement, occupée à rejeter systématiquement tout propos visant à la mettre sur la piste. Peut-être était-ce ce fossé entre eux qui l'avait confortée dans son absolue certitude. Mais sa surprise n'avait rien de feinte, pas plus qu'il ne s'agissait de fausse modestie. À aucun moment elle n'avait pu imaginer cela. Elle l'avait désiré, elle l'avait appelé de ses vœux, mais ne l'avait jamais cru réalisable. Pas même lorsque ses lèvres traînaient contre sa joue, sa tempe, son front, quelques secondes auparavant. Comme pour Pretty Woman, ce n'était pas personnel tant que ce n'était pas sur la bouche. Les lèvres étaient du domaine de l'intime. Du très intime. Plus qu'une nuit dans les bras l'un de l'autre, plus que plusieurs tentatives de sauvetage... Baiser sa bouche, c'était comme toquer à la porte de son âme et espérer qu'on l'entrouvre. Peut-être avait-il le même sentiment, puisqu'à peine ses lèvres déposées sur les siennes, délicatement, subtilement, il s'en évapora. Il recula sans s'éloigner, la condamnant à la bande-annonce tandis qu’il la privait du film.
Sonnée, surprise, elle rouvrit les paupières pour la première fois, et c'est là qu'elle le vit, aussi improbable qu'inapproprié : le doute. Dans ses yeux. Dans l'air qu'il affichait. Le doute. Il doutait. Il s'interrogeait. Non, c'était elle qu'il interrogeait, qu'il questionnait du regard. Ses deux perles d'acier cherchaient une réponse dans l’émeraude des siennes. Comment pouvait-il douter ? Comment ce mec-là pouvait ne serait-ce qu'y songer ? Ne comprenait-il vraiment pas qu'il n'avait qu'à se servir, que l'attente d'une autorisation quelconque n'était que pure perte de temps ?
— Pardon, murmura-t-il encore, à quelques millimètres à peine, sans qu'elle ne sache de quoi il s'excusait au juste.
Toujours la même chose ? Ou bien l'autre chose ? Dans le doute, elle souhaita le rassurer sur ses deux points, et vint déposer sa bouche contre une pommette saillante après une légère hésitation.
— Tais-toi, souffla-t-elle simplement.
Le ton doux contredisait totalement la teneur des propos, et le sourire en coin qu'il afficha prouvait qu'il ne s'y était pas trompé. Ce même sourire en coin qui vint mourir contre sa bouche, à nouveau, et soulagea la frustration en même temps qu'il la cultivait. Il ne força pas le barrage, il n'eut pas à le faire. Elle s'ouvrit d'elle-même, naturellement, comme rodée. C'était grisant, galvanisant. Il y avait comme ce feulement qui ronflait dans sa poitrine tandis que ses bras, toujours repliés contre elle, se détendaient, s'étiraient pour venir s'accrocher au bas d'un tee-shirt masculin de peur de s'effondrer. Ses jambes, fourbes, s'entêtaient à se dérober sous elle.
Il l'embrassait avec déférence et vénération, comme un objet de culte qu'on regrette de profaner. Sa douceur n'avait d'égale que sa langueur. Une langueur qu'elle ne savait volontaire ou fortuite. S'il agissait délibérément alors, elle devait bien l'admettre, il savait s'y prendre à la perfection. L'extrême lenteur de chacune de ses caresses ne faisait qu'exacerber son propre désir frustré, que nourrir cet incendie qui n'en finissait pas de se propager. Pas un feu de paille ridicule, mais une véritable catastrophe naturelle. De celles qui font les gros titres internationaux pendant des semaines. Un Eyjafjallajökull, mais version éruption interne.
Son bas-ventre irradiait. Et lorsque les mains masculines s'introduisirent sous le tissu de son débardeur, glissèrent sur sa peau sans la moindre hésitation, et colonisèrent son épiderme en se l’appropriant, elle... Oh, il existait donc un deuxième effet au contact étrange ? Touché statique : apaisement. Touché mobile : tout le contraire. Et bientôt la bouche d’Astrée se fit plus avide, ses lèvres plus voraces. Ses mains se firent exploratrices à leur tour. Elles s'insinuèrent sous ce tee-shirt qu'elles avaient déjà passablement malmené, puis remontèrent, à plat tout le long de sa colonne vertébrale. Elle n'avait pas le sentiment de s'approprier quoique ce soit, mais bel et bien de récupérer son dû.
Lorsque son dos heurta le mur, elle réalisa qu'il l'avait fait reculer sans qu'elle n'en conserve le moindre souvenir. À mesure que l'étreinte partagée gagnait en intensité, elle perdait de vue la réalité. Plus rien n'existait passé la frontière de ce corps masculin. Il n'était désormais plus que son seul horizon, son seul univers. Son début et sa fin, sa naissance et sa mort. C'était ridiculement violent, c'était d'une improbabilité consternante. Ce n'était pas un simple baiser qu'ils échangeaient, mais une année de baisers, une vie de baisers, des siècles peut-être. Une éternité condensée en un seul qui explosait, qui débordait, incapable de contenir ce trop-plein. Elle allait probablement y laisser des plumes, la vie éventuellement, ou en garder des séquelles, mais elle s'en moquait. Elle prenait vie sous ses mains. Ses paumes réveillaient chaque parcelle de peau sacrifiée à la cause.
Un gémissement se fit entendre. Un gémissement qui la surprit avant qu'elle ne prenne conscience qu'il émanait d'elle. Un bruit bas, sourd, primal. L'expression de son attente. Cette attente dont elle ne réalisait l’intensité que désormais qu'il officiait contre elle. Depuis combien de temps l'attendait-elle au juste ? Elle avait le sentiment qu'il s'agissait de bien plus que quelques semaines. Tellement plus. Toute sa vie, peut-être ? Plus encore ? Elle n'était pas en état d'y réfléchir, pas alors que les mains masculines se faisaient plus audacieuses, et ses lèvres toujours plus affamées. Certes, elle avait parfaitement conscience d'où cela allait les mener, mais qu’importait. Ils auraient pu se trouver sur l'estrade de la Place avec l'intégralité du village pour témoin, elle n'aurait su réfréner ses ardeurs.
Il fallait qu'elle se sustente. Et loin d'étancher sa soif de lui, il ne faisait que l'accroître. Le souffle lui manquait. Son rythme cardiaque n'était plus qu'une vaste plaisanterie, et elle ne savait plus si son esprit était en surchauffe ou bien si l'encéphalogramme s'avérait totalement plat. Mais lorsque le prénom du Russe troua un silence jusqu'à présent uniquement rompu de respirations chaotiques, elle aurait pu jurer que c'était dans sa tête. Plusieurs fois de suite ce prénom, comme un appel, et quelque part cela lui semblait logique. Il occupait tellement son être que parasiter sa tête n'était que la suite logique.
Aussi lorsqu'il s'arracha à ses lèvres au bout de plusieurs tentatives infructueuses, elle chercha à le retenir.
— C’est dans ma tête, lui soutint-elle le souffle court.
Non, ça ne l’était pas. Mais elle n’en avait pas encore totalement conscience. Le bout de ses doigts dérapa contre sa nuque en souhaitant le ramener là où il ne voulait que fuir. Reviens ! hurlait son âme. Mais il n'entendait pas, il n'entendait plus, il n'était plus qu'un profil dont le regard portait sur la droite, par-delà la porte de la grange d'où provenait ce prénom scandé à intervalle régulier. Son prénom, d'une voix et d'un ton qu'elle ne connaissait que trop bien. Mais peu importait, non ? Non.
Après ses lèvres, ce fut l'intégralité de son corps qui s'envola, se désolidarisa du sien en lui provoquant la même douleur que s'il s'agissait d'un de ses membres, son bras, sa jambe, son foie qu'on lui arrachait sans anesthésie, tandis qu'il signalait sa position à la voix.
— Là ! avait-il dit en passant un revers de main sur ses lèvres gonflées de désir.
Sans un regard pour elle, il entreprit de lisser son tee-shirt en vrac tout en s'éloignant en direction de la porte. D'abord il ne fut plus qu'un dos qu'incrédule elle suivait du regard. Puis rien de plus qu'une voix qui s'en allait rejoindre l'autre.
— Je te cherche partout depuis des plombes. Tu foutais quoi là-dedans ? interrogeait Pierre.
— Rien d’important, lui répondait l'autre. J'en avais terminé.
Rien d'important ? Elle venait de vivre un cataclysme émotionnel, psychologique, et physique, et il osait qualifier cela de pas important ? Sale en... de fils de... MERDE ! Il s'était moqué d'elle durant tout ce temps ? Comment avait-elle pu se montrer aussi stupide ? La lèvre inférieure coincée entre les dents, elle dut se la mordre presque jusqu'au sang pour retenir ce hurlement qui lui étranglait les cordes vocales.
— Par tous les saints... J'ai ben cru qu'vous alliez foutre le feu au tas d’paille.
Cette voix... Cette voix inattendue en provenance de sa gauche la fit sursauter plus que de raison. La paume contre un sein qui tentait vainement d'en calmer les battements, Astrée tourna un regard entre incrédulité et panique sur ce petit bout de femme dont les avant-bras s'appuyaient sur le panneau de bois qui séparait un box du reste de l’écurie où elle-même se trouvait. Le nez tourné vers l'extérieur, les yeux rivés vers ceux qu’Astrée ne pouvait voir, une brosse au bout de cette main lasse, Jeanne était la nonchalance personnifiée. Pas une once de gêne, pas une miette de compassion. Elle tourna son immense sourire en direction de la jeune femme, et poussa même jusqu'à jouer des sourcils avec... complicité ?
— Merde, mais t'es là depuis longtemps ? bégaya une Astrée de plus en plus incrédule.
— J'ai toujours été là, Gouyate. J'te rappelle qu'on est arrivée ensemble, toi et moi.
Évidemment, oui, elle avait raison, mais... Quand elle avait annoncé qu'elle allait rentrer l'animal dans son box, Astrée n'avait pas imaginé qu'il puisse s'agir du box adjacent ! Qu'avait-elle entendu ? Qu'avait-elle vu ?
— D'ailleurs, c'est quoi cet’histoire d’incidents dont parlait l'prince charmant ? poursuivait-elle.
D’accord, elle avait absolument tout entendu.
— ... Bon j'ai pas osé vous poser la question, j’voulais pas vous déranger, mais...
— Jeanne ! hurla Astrée, excédée.
— Oui, mon ange ? répondit très calmement cette dernière avec cet éternel sourire scotché aux lèvres.
— Tu peux me dire ce qui prête à sourire de la sorte ?
— Non, la bonne question c'est pourquoi, toi, t'es pas en train d'afficher air béat et regard bovin ? Vous étiez tellement beaux ! Tu m’crois pas ? R’garde don’ par toi-même, j'ai pris des photos.
— Tu as quoi ? s'étrangla la jeune femme en observant Jeanne faire glisser son index sur l'écran de son portable.
— Tiens, r’garde...
À présent, elle tendait l'écran dans sa direction, et à mesure qu'Astrée se rapprochait, elle distinguait très clairement les deux corps enchevêtrés, ou plutôt le sien noyé, englouti sous l'imposante masse de l'autre. On ne discernait que des mains, l'une contre cette nuque épaisse, et l'autre dont on devinait la forme étirant le dos d'un tee-shirt blanc. Arrivée à sa hauteur, la jeune femme sentait ses joues cuire tandis qu'elle plaquait une paume contre sa bouche.
— Tiens ! ordonnait l'autre en lui imposant le téléphone entre les mains. Tu peux faire glisser vers la droite, y en a plusieurs.
Pardon ? Comment pouvait-elle lui annoncer ça calmement, sans même entrevoir l'indécence de son initiative ? Malgré tout, poussée par une curiosité malsaine, Astrée fit glisser son doigt et se découvrit dans divers mouvements à mesure qu'elle remontait le temps. Elle ne parvenait à soutenir plus de quelques secondes la vision de chaque cliché, comme gênée par la présence de Jeanne dont elle sentait le regard peser par-dessus son épaule.
— J’me suis retenue, j’voulais pas m’immiscer, tu m’connais… Ah, c’est ma préférée celle-là. T'as vu comme il t’regarde ? commentait Jeanne en experte.
En effet, même si elle se refuserait de l'admettre à voix haute, Jeanne avait raison. Astrée était remontée jusqu'au moment où elle avait encore les bras repliés contre sa poitrine, et que ceux de l'homme l'entouraient comme pour l'empêcher de partir... Ou de s'évanouir. Il venait de l’embrasser une première fois, et... Elle ouvrait les yeux pour la première fois aussi. Le regard, son regard... Jamais un tel regard aurait pu présager de la fin qu'il allait lui offrir.
— Ah non, c'est pas aujourd’hui ça, annonça Jeanne dans un gloussement.
L'index de la petite baronne venait de lui offrir une vision d'elle-même recroquevillée et endormie sur les cuisses du danseur. La nuit du bar et de l’orage. Soit plusieurs semaines auparavant. Combien d’autres paparazzades s’amoncelaient dans le portable de la postière ?
— Bon sang, Jeanne, ça ne se fait pas ! Tu dois être déçue qu'il n'ait pas terminé le travail, t'aurais eu une super sex-tape ! s'indigna-t-elle en lui rendant le portable pour mieux en fuir les images.
— Une sexe quoi ?
— Laisse tomber. J'dois rentrer, lui dit-elle, soudain lasse en s'éloignant de la postière et des chevaux dont quelqu'un d'autre devrait s'occuper désormais.
— Attends don’ ! Où tu cours comme ça ? Dis-moi au moins ce que tu penses d’mes photos. Dis-moi si ça a... comment tu dis déjà ?... une âme !
Non seulement Astrée n’interrompit pas sa fuite et pressait même le pas en direction de la sortie, mais en plus elle ne répondrait jamais à cette dernière question, pas même sous la torture. Parce que ces clichés avaient bien plus qu'une âme, parce que ces clichés avaient tout ce après quoi la jeune femme avait couru toute sa vie. Et parce qu'il était hors de question qu'elle l'admette ou encore qu'elle se l'avoue à elle-même, elle garderait le silence, elle s'enliserait dans le déni, quitte à passer pour la trouillarde qu'elle était. Elle ne voulait rien voir, rien entendre, rien dire. Mizaru, Kikazaru, Iwazaru. Les trois singes de la sagesse.
Mais quel tête à tête :p
Ce moment où ENFIN on a le bisou (oui je sais qu'il faut le faire attendre mais là on le méritait bien nous aussi, au moins autant qu'eux :p).
Astrée qui ne pige pas que s'il minimise le truc c'est pour ne pas se vendre auprès de Pierre :p
Et Jeanne.... oh purée mais les photos quoi !! Excellent passage :p On apprend donc au passage qu'elle espionne Astrée depuis un bon petit moment....
Pauvre Astrée, incomprise ^^ (chapeau pour le truc islandais au passage, tu as usé du copier coller ou pas ? ^^) Je sens que la prochaine personne de sexe masculin qui va croiser son passage va prendre très cher :p
et j'espère que Pâris est toujours sain et sauf, et je me demande pour quelle raison Pierre est venu chercher Syssoï ^^
Bon, hâte de voir où tu les emmènes ^^
Oui, attendre 36 chapitres pour un premier véritable rapprochement, c'est très clairement de la torture, mais bon, ils ne sont pas très doués, ces deux protagonistes (oui, je me dédouane totalement et pointe un index accusateur en direction d'Astrée et Syssoï. C'est pas ma faute, m'dame, c'est eux qui font rien comme je voudrais !)
Alors, c'est drôle parce qu'au moment de la BL de ce chapitre, ma super cobaye m'a fait exactement les mêmes retours que toi, surtout concernant Jeanne (personnification de la discrétion) et d'Eyjafjallajökull (oui, c'est clairement un copier/coller, hahaha). Je suis ravie d'avoir réussi mon coup !
Concernant Astrée, elle n'est pas très perspicace sur ce coup. Cela dit, Syssoï pourrait se montrer un chouilla plus délicat.
Merci Notsil ;)