6. Cela l'étonne, mais pas vraiment

Elle se tourne d’un côté. De l’autre. Elle soupire bruyamment. Le bruit la dérange. Elle met des bouchons d’oreille. Ils la gênent. Elle les enlève. Elle a soif, elle se lève pour boire un verre d’eau. Elle en profite pour un énième détour aux toilettes. De retour dans le lit, elle a trop chaud. Elle repousse la couverture qui la gêne. Elle a froid. Elle remet la couverture sur elle, à moitié seulement.

Elle prend une grande inspiration, expire lentement, tâche de se calmer.

Les pensées tourbillonnent dans sa tête. Quel temps fera-t-il demain ? Quand aura-t-elle le temps d’écrire ce mail, qu’elle aurait du envoyer hier ? Pourquoi a-t-elle oublier que les concombres s’appelaient concombres quand elle a commandé au restaurant ce midi ?

Elle regarde son téléphone. Déjà deux heures qu’elle est couchée. Même si elle s’endort immédiatement, elle sera fatiguée demain.

Elle se relève, désespérée.

Sur son balcon, elle observe la ville. Elle est silencieuse. Cela l’étonne, mais pas vraiment. Quelques fenêtres sont encore éclairées. Sinon, noir complet. La lune, immense, baigne les bâtiments d’une lueur argentée.

Son regard est attiré par le fil qui s’étire au dessus du vide. Il reflète les rayons lunaire, et brille comme du mercure en fusion. Elle enjambe la barrière, et fait quelques pas. Son équilibre plein d’assurance l’étonne, mais pas vraiment. Le chemin s’étire devant elle, à perte de vue. Elle n’a pas envie de le parcourir à pieds, trop long, ces quelques pas l’ont déjà épuisée. Elle monte sur le vélo. Il était là depuis le début ? Cela l’étonne, mais pas vraiment.

Elle est très loin au dessus de la ville. Le vent siffle autour d’elle, elle pédale tranquillement. Elle se sent légère, très légère.

Elle flotte dans les airs. Cela l’étonne, mais pas vraiment. La lune lui tend les bras, immense, ronde, éclatante.