6 | Maxy-photographie

Notes de l’auteur : Chapitre mis à jour le 23.07.23.

NOVA.

Le visage tendu vers le soleil, je glisse les mains dans les poches et déambule dans l’avenue Mille-pavés. Derrière, Maxine s’attarde, photographie penchée comme-ci, penchée comme-ça. Tantôt elle se plaque aux murs, tantôt elle s’accroupit, voire se couche, tout qu’elle distord son corps pour trouver l’angle parfait. Joie-béate, elle éternellise cette miette de Ville dans son appareil avec passion. C’est vrai qu’il y a de quoi ! L’endroit est joli-mimi : allée-flâne-piétons, tout est serein loin des automobiles pantelantes, et les façades à l’architecture fossile, type gothique, baroque, je ne sais ? sont extra élégantes, bien que fléchissantes. Basses tourelles flanquées aux maisons, cages d’escaliers tournoyants, arches raffinées, fenêtres quadrillées, vêtements qui pendent aux balcons. Pivotant sur moi-même, j’extase-dévisage, avec mes doigts dans la poche qui valsent sur la boussole, c’est comme si elle m’appelait m’appelait…

— Au fait, t’as redemandé à tes mères ? me demande soudain Maxine, encore à l’arrière.

— Pour la coloc’ ?

— Ouais.

— Hélas nop ! Tu connais leur avis sur le sujet.

— Et toi, tu connais le mien…

Je ris et je me tourne. Maxine est accroupie et zoome sur un pot de fleurs.

— Oh, tu crois ça ? répliqué-je. Ce n’est pas comme si tu m’en parlais quatre fois par jour !

— Si tu insistais plus auprès d’elles, je t’embêterai moins avec… argh ! Fichue mise au point !

— T’inquiète l’amie… Arrivera un jour où ça changera !

— Oui mais quand ?

— Je sais pas Maxy ! Une année, deux grand max’ ?

Maxine baisse son appareil, se relève, me jette un regard en biais, si peu convaincue que sa bouche grimace l’excédée, mais moi je lui brille un sourire et hoche la tête avec zèle tout en reprenant la marche à reculons et outch ! que je me prends un lampadaire. Mon épaule ma jambe tremblent je vacille me rattrapâmes de justesse tandis que Maxine rit et rit, me demande néanmoins si ça va, joyant surtout ce que je suis incorrigible, enfin voyons Nova ! La douleur s’estompe, je secouette la tête et me joins à son rions encore encore ! Vive elle me rattrape, ses tresses flashant du fauve dans les nuages, finies ses photographies ! Vadrouilles, nous rejoignons l’allée principale. Et tout ce qu’on glisse entre les passants, et tout ce que la route vrombisse de circulation. Maxine me prend par le bras m’entraîne et me dit :

— N’empêche Nova, pour revenir au Pensionnat : j’en suis pas aussi certaine que toi.

— Maman-Rosa et maman-Angie ne pourront pas m’y maintenir à vie. Il faudra bien qu’un jour elles me laissent partir !

— Mais pourquoi pas maintenant ? Ce n’est pas comme si c’était un problème financier !

— Elles sont juste trop protectrices, voilà tout. Ça leur fait du mal que je m’envole et file tisse ma vie loin d’elles…

— Nova : t’es bien mignon mais ta naïveté m’excède parfois.

— Qu’est-ce que tu veux que ce soit d’autre ?

Maxine soupire, un klaxon crispe ses traits, sa main serre trop fort son photographie-vie.

— Je sais pas…, m’avoue-t-elle finalement. Et c’est bien ça le problème.

— Allez, t’inquiète pas ! Je sais pas pourquoi t’es devenue aussi méfiante vis-à-vis de mes mères depuis que t’as quitté le Pensionnat, mais tu te fais des idées pour rien. Ce lieu n’est pas ma prison et un jour on la fera, notre coloc’ ensemble !

Le regard qu’elle m’a jeté, à ce moment-là, était si perplexe que je me suis sentie défaillir. Mes jambes qui ramollissent.  Ça me rappelle le mot de la boussole, la personne derrière qui se méfie de mes mères, mais qu’est-ce qu’on a contre mes mamans aujourd’hui ? Elles sont chicos mes mamans et elles n’ont jamais rien fait de mal mes mamans ! En face, Maxy m’observe encore encore, le front plissé, concentrée à me sonder, avant de me serr’aïe ! fort le bras, me rapprocher d’elle, pincer sa bouche bleue puis finalement l’ouvrir, comme si elle s’apprêtait à me confier quelque chose d’important. Mais elle la ferme. Quelque chose a capté son attention. Elle tourne la tête là-bas devant, c’était trois Grisœils qui patrouillaient sur les trottoirs, vêtus de leur combinaison grise, chacun une matraque qui pendait à la ceinture. Ça m’a gelé l’intérieur, tout que ça m’a emporté la peur, parce qu’aujourd’hui c’est mon anniversaire parce qu’ils savent c’est sûr ma date maudite parce qu’ils m’ont repérée dans la nuée-gens parce qu’ils sont là pour moi pour moi et l’enfant-idéelle où est-il l’enfant-idéelle il s’est caché c’est bien mais moi mais moi mais moi il y a Max qui me tire là-bas et me chuchote ça va ça va elle ne sait rien pour ma date de naissance mais comme moi elle déteste craint les Grisœils nous débouchons sur une grande avenue encore plus grande que l’autre. Sans trafic mais tout plein de boutiques ça grouille de monde, ça monte haut les imposants gratte-ciel. Bistres et vitrés. Plus de Grisœils en vue. Je souffle légèreté bien que je restai un peu nausée à cause de la foufolle-flottille de monde, tous ces chapeaux et ces mallettes et ces costards, j’aurais préféré un endroit moins peuplé. Quelques bousculades. Mon corps-crispature. Nous marchons, enfoncées toujours plus loin dans la foufoule, et Max, bienveillante comme toujours, me demande si ça va ? Mon mal-de-coeur mais mon sourire indélébile : tout va bien ! Et hop que je la relance pour éviter qu’elle ne perçoive trop fort mon malaise : qu’est-ce que tu voulais me dire ? Max hésite, monte son pouce et ronge son ongle.

— Maxy ? insisté-je.

— C’est juste que ça me manque, parfois…

Ce n’est pas ça qu’elle voulait me partager. Pas du tout, même. Je penche la tête, capte son regard, rien ne se dit et c’est néanmoins dans ce regard que tout passe. Toutes ses peurs, incertitudes, bien que sur le moment je ne les comprenne pas exactement, les miennes, tous nos souvenirs qui renferment des années et années et années d’enfance d’adolescence au Pensionnat. Et je me rends compte qu’à moi aussi, ça me manque. Nos conversations dans le jardin, étirées jusqu’au bout de la nuit, là sous les grands marronniers, me manquent. Celles où on partageait nos joies ou se soutenait dans nos peines. Celles où, même si c’était malheureux, je la consolais lorsqu’on se moquait d’elle pour sa grandeur, ses rondeurs, ou ses cheveux roux des flammes. Celles où, coléria, désirant leur montrer à tous qu’on ne la brisera pas, elle a appris à torsader sa tignasse avec une telle adresse que sa tête est tout un art. Celles où elle s’est mise à porter avec fierté la souplesse des formes et la joliveté d’une âme de bohème. Des vêtements en fleurs et des fleurs dans les cheveux. Celles où elle me réconfortait, moi aussi, quand j’étais paumia et lui disais tu sais, je ne me sens pas vraiment garçon… Enfin, il y a des jours oui, carrément, mais d’autres où je me sens plutôt fille, tu vois ? Celles où je lui avouais que parfois c’est aucun en particulier, je vis comme un nuage, enfin je sais pas. Celles où je m’énervais et disais qu’en fait j’en ai aucune idée, il m’arrive de me tromper, et puis honnêtement ? Parfois yolo, non ? Je suis qui je suis, une personne avant tout, une vague qui ondoie comme ci, ondoie comme ça, voilà c’est tout ! Voilà ça suffit ! Et tout ce qu’elle m’aura aidée à savoir qui je suis, et tout ce que je lui aurai appris face aux moqueries, et tout ce qu’on se sera apportées pour la vie.

Ma meilleure amie ne me répondra pas. Elle ne me dira jamais ce qu’elle avait voulu me révéler, mais d’une certaine manière, ce n’était pas grave. Il y avait tout le reste qui était comme une promesse qu’un jour, elle se confiera. Ses pupilles pétillées. Ses lèvres bleues haut tirées. Elle a passé sa main par-dessus mon épaule, comme souvent lorsque nous flânons dans les rues. Et ainsi, bras dessus bras dessous, nous avons fondu dans l’afflux des chapeaux avec foufougue, comme si nous partions à la conquête du monde entier. Fières nous étions, fières nous serons, fières nous sommes. Fières et soeurs. J’ai ravalé ma nausée d’être au milieu des gens, renforcé ma prise à ses reins. J’ai gonflé le buste. J’étais joie, bouffie de reconnaissance, même si Max se comportait de manière un peu étrangia, ces derniers temps, et qu’elle me cachait des petites choses. C’est juste que, voilà : sans elle, je n’en serai pas là aujourd’hui. Oh que non !

Bien sûr, des questions à la qui-suis-je, flouant à la foultitude, j’en ai toujours un tas, mais j’ai appris à m’en détacher. Appris à m’affirmer quand on raillait mon allure joli-joliette, fin-freluquette. Appris à lever la tête plus haut et à vous dire, en lèvres-sourire : mes pronoms c’est il, elle, iel, vous pouvez me genrer comme vous le souhaitez, si vous voulez varier vous pouvez, moi ça m’est égal, tant que vous m’acceptez comme je suis. Appris à porter l’apparence que je veux. Depuis, mes vêtements c’est en fonction de mon humeur, et c’est surtout que j’aime porter des habits très colorés, assez serrés, des bracelets aux poignets, j’ai ma boucle d’oreille, mes lunettes rondes toutes raffinées, un bout de ciel sur mes ongles, du mascara lorsque j’en ai envie, et bien sûr il y a mes cheveux qui participent un peu au look, je suppose, ceux dont je n’ai jamais compris pourquoi la racine pousse en foncé mais les pointes en bleu, ceux que j’aimais pas avant et qu’étrangement j’aime de plus en plus, et c’est comme ça que je me sens bien, comme ça que je me sens le mieux. Peu à peu, je me réconcilie avec moi-même, et bientôt je m’envole je suis ivresse, célébrant la richesse des genres et nos milles façons de les vivre. Yihaa !

— Bon sang, il se passe quoi ? sursaute Maxine.

Que je sursaute aussi. Quoi pardon ? Et que je… oui vraiment quoi ? Qu’est-ce que… Je ne sais. Je ne sais. Je ne sais. pas ce qu’il se passe. Des piaillements crissent soudain à l’arrière, nous nous retournons et toute la foule hurle de ce que nous apercevons : des petits rongeurs cavalent à travers la chaussée, forment un bataillon de cris et de sordide odeur. Ils bondissent ici, nous nous collons au mur, les bêtes nous dépassent et passent loin loin devant. La troupe est sans début, sans fin. Elle est une avalanche d’hideur sans aucune extrémité. Mon souffle. se presse. et flue. un peu. vite. fauché. fractionné, autant à cause des bestiolettes qui lacèrent le bitume qu’à cause de cette foufoule qui prend peur et se masse. afflue. un brin. trop près. trop. de moi. Je déglutis avec peine. À l’abri sous un auvent, nous attendons avec Maxine que les bêtes disparaissent, mais nous ne sommes pas les seules à avoir eu la même idée. Les gens viennent et partent et reviennent et ne partent pas pas pas jamais et gigotent et paniquent et pépient et se collent. à. nous. à. moi. mais moi. mais. je n’aime pas lorsqu’une masse de gens se largue de la sorte, sans prévenir quiconque, personne pas même moi.

— Nova ? Ça va ?

Une main dans la poche, je presse ma boussole. Évidemment que ça va ! Je souris. Je. suis. boussole. J’oriente mon pouls, gouverne mes veines et je prenons le large, je mettons les voiles l’ami ! Naviguons à travers flux, reflux et devenons douce bise qui plisse le miroir de la terre de son souffle serein ! Ô belle glissandade ! Lisse et inflex’ ! Cap au Nord ! Inflexx’ ton Nord ! Mon Nord ? Au Nord mon Nord très cher… Milord ! Minord Mi-nord ? Alors nordons ! a dit le Capitaine ! Capitaine ? Capi- Capi- Capitaaaaaine Orion ! Mais je… Capitons respiration, fluxons respiration ! Faisons voile et larguons les amarres là où notre bleu n’aura jamais été votre bleu, là où votre bleu n’aura jamais été que trop bleu.

— Nova ?

— Ouais ?

— Ton visage est à mi-chemin entre la bouillie de ma grand-mère et ma croute au fromage d’hier midi. T’as besoin de vomir ?

— Je… je me porte bien.

Les épaules tendues, le souffle escamoté, j’observe autour de moi. Ma main tire convulsément mon t-shirt vers le bas. Ces voix… Est-ce que… je… Orion j’ai entendu c’est possible ? Orion comme dans ce poème de l’Onde ? Non non… M’enfin Nova… Tu hallucines une nouvelle fois… Tu veux entendre ce que tu veux entendre, c’est tout… Tu, c’est que, raisonne là ! Parce que, tout de même… Ou alors, voilà : cherche dans la foule ces deux enfants qui ont crié si fort et si clair que leur voix semblait sortir tout droit de ta tête. Là ce serait une chose sensée ! Là zieute comme ça… Ils jouaient ensemble, se répondaient l’un l’autre, ils doivent forcément se trouver là, quelque part devant toi ! Olé-olé où êtes-vous joyeux pitchounes à la fredaine en bouche ? Mais j’ai beau scruter la flopée de monde autour de nous, aucune trace d’enfants qui jouent aux capi’capitaines d’un navire. Fris.son. Encore je serre. mon poing tout à l’intense et je ferme les yeux. Jolie-jolia petite boussolia… Vive-viva petite boussolalalala… Concentre-toi sur la sensation du métal froid contre ta paume. Je crois que ça m’aide à… Ces voix… Familières même ? Mais non voyons ! Arrête, c’est. Là. Ça va. Tout va bien. Tout. est. sous. contrôle.

Je rouvre les paupières. Crissards, les rats sont toujours là. Ils bourrent et puantisent la rue avec célérité, faisant fuir tous ces gens là ils s’agitent s’attroupent angoissés sur les trottoirs. Nausée, montée. Et… et… quoi ? Hein ? C’est moi ou… des idéelles… ? Serait-ce possible ? Parce que, tout de même… je… oui ! Oui, c’est cela ! Deux idéelles passent là ! Oui oui ! Mon ventre saut-périlleuse, mes lèvres s’élèvent haut le ciel. Pendant un court instant, j’oublie la flottille de gens-tourbille et j’observe obnubilée ces deux silhouettes qui fulgurent la brillance et qui, vaporeuses, parviennent à passer là si vite à travers les rats comme si les rats n’existaient pas. C’est un flash étourdissant, un rayon de soleil capté au frémissement d’une paupière. Elles courent et courent et vlop ! Disparues. Loin là-bas. Je mais comment ? Tout est allé si vite, est-ce qu’à nouveau je délire ou… ? Mais autour de moi, voilà qu’on s’exclame : hé, t’as vu ? Une apparition ! Non des fantômes ! Quoi ? Tu dis ? Des revenants ! Non mais j’hallucine ! Des spectres quoi ! Des hologrammes ! Des fanto-lololograaaaames !

Tout le monde crie, mon ventre bondit un souffle qui se refait cahote. J’observe, ahurie, l’écran sur l’appareil photo de Maxine par-dessus son épaule, celui avec lequel elle a pu filmer la scène. La séquence dure quatre secondes à peine. Fascinée, Maxine la renvoie, encore et encore et encore et hop regardons encore une dernière fois s’il nous plaît bien ! Au bout de quatre ou cinq visionnages, il nous est déjà plus facile de reconstituer tout ce qu’il n’est pas perceptible au premier regard. Deux silhouettes, donc : si celle en tête, petite et grêle, court avec des mouvements vifs, fougueux, celle à l’arrière, longiligne, se meut avec plus de grâce, bien qu’elle paraît avoir du mal à suivre la cadence. Leur accoutrement : singulier, comme s’il n’appartenait pas à la bonne époque ou au bon endroit. La petite idéelle porte une pélerine vert mélèze par-dessus un t-shirt noir. Des mitaines à la couleur de l’aubergine lui remontent jusqu’aux coudes. À ses jambes, c’est un pantalon kaki, évasé, coupé aux genoux. Collants noirs, bottines noires. Quant à l’autre, elle est vêtue d’une sorte de poncho bleu roi, virant sur le violet, qui descend jusqu’à hauteur mi-cuisses. Cette palette ces couleurs inouïes c’est un ciel voilé, mon soir d’été, posé sur le tissu. Des broderies en or bougent dessus, forment des motifs puis changent, ornent une autre fioriture, et sur le revers du manteau, il me semble… oui, qu’il y a de la lumière. De la lumière ? Ça rayonne là-dessous. Ça magie, éclaire deux jambes fines, fuselées, serrées dans un pantalon noir. Et j’aurais aimé observer leurs vêtement plus en détails, remonter jusqu’aux visages, tout est si subjuguant, et sûrement que Maxine le voulait aussi car elle tentait avec ses réglages de ralentir la scène, si ce n’est de la zoomer. Mais la foule, soudain, s’élance. Devant moi, derrière moi, à côté de moi, les gens détalent. Les rats ? Plus de rats. Zéro. Rien.

— Allez viens, on les suit ! s’exclame Maxine.

Hein, pardon ? Qui ça ? Quoi, comment ? Et. je.

— … va voir où qu’elles sont allées !

suis.

— Nova ! On va perdre les deux idéelles si on y va pas tout de suite !

douloureuse ?

— Nova… ?

Maxine. Placée en face de moi, elle me regarde, capte mon attention. Ses yeux clairs tentent de me cerner. Je. crois. Je. pense ? Un. petit. peu. Encore elle me demande si tout va bien et je lui offre mon plus beau sourire. Je. vais. bien. et simplement que… n’aime pas tellement. la foule. qui gonfle… dégonfle… joue le personnage imprévisible. Ça me bouscule au ventre. Naus’ naus’… Ma boussole. serrée, un petit peu. À Maxine, je lui réponds vas-y, vas voir si tu veux ! Je te rejoins après.

— Quoi ? Après quoi ? Allez viens !

Autour de nous, plus personne. Du vent. Du ciel.

La rue s’est vidée. De l’étendue.

Continuuuuum d’étendue.

Si ouverte, si haute !

Ah !

Quel allègement cette rue ainsi désertée, dépeuplée par le monde qui grouillait alors… !

Fioufoufou !

Aère aérons nos ciels

où les nuages en laine flottent au bleu des superficies infinies.

Le poids sur mes épaules se décharge’ mon souffle

                                                                   se débouche’ mon visage

                                                                                          s’assouplit. Tout est sous contrôle tout oui tout te dis-je à nous folâtres des plaines-falbalas ! Nous marchons maintenant. Et alors que je m’attitude sérénité, Maxine trépigne d’impatience. Elle sautille, parée à glisser à travers nos folles routes, une fois que j’aurais bien daigné m’engager sur la route avec un tant soit peu de vélocité. J’ai glissé mes mains dans mes poches.

— Vas-y ! répété-je. File !

— Oui mais…

— L’Arbolifère, ça te va ? dis-je. Tu m’y rejoins après !

— Mais… tu veux pas voir les idéelles ?

Elle me fixe sidérée, les sourcils relevés. N’en revenant pas que je ne m’élance pas à la suite des deux silhouettes en nuages, moi qui ai toujours été fascination face aux idéelles. Moi l’étrange oiselle volante derrière ces pensées visibles comme si c’était l’essence de ses journées, sans quoi elle s’éteint puis chute, meurt, les yeux tristes les ailes fracturées. Et là, après tant d’années de morosité, durant lesquelles il n’y avait que l’enfant-idéelle pour remplir ma Vision, je perçois du nouveau et je ne veux pas poursuivre ce qui me tient pourtant tant à coeur de préserver ? Ma faculté à clairvoir le monde ? Qu’est-ce qu’il se passe donc ?

Je hausse des épaules, je souris. Bien sûr que j’aimerais foncer m’émerveiller là-bas, tellement tellement envie, ça me brusque les jambes, m’essouffle d’avance, j’ai ma poitrine qui ‘clate la pétillance, mais c’est aussi que… que voilà. Je ne peux pas. aller là-bas. Aller là-bas, retrouver l’endroit où les deux idéelles ont filé, c’est percuter le monde et son brouillamini. C’est mon ventre qui se méli-mélo et l’impression de me perdre moi-même au milieu d’un pluriel-monde. Tomber ne plus respirer. Aller là-bas, c’est chaos d’émotions. Une noyade dans les gens-typhon, avec l’impossibilité de remonter, souffle-libérer, se ressaisir, être boussole. Viser le Nord. Et si Maxine hésite et qu’elle ne comprend pas, elle finit tout de même par tourner au coin de la rue, filant comme jamais je ne l’ai vue filer et regrettant, peut-être, de me laisser derrière. Je me gratte la nuque. Replace mes lunettes rondes sur mon nez. Je ne lui en veux pas. Comment lui en vouloir ? Elle aussi, elle a vécu au Pensionnat avec moi. Elle aussi, elle a grandi avec la conviction que les idéelles sont des êtres d’exception, et lorsque voilà plusieurs années qu’elle n’a plus rien perçu, il est normal qu’elle se précipite le jour où elle en revoit enfin, surtout que Maxine, c’est miss-curiosa ! Alors non, vraiment, je ne t’en veux pas… Cours, vole, ma belle Maxy-photographie ! Tu me raconteras, tes clichés à l’appui !

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JeannieC.
Posté le 20/04/2023
Hey coucou ! =D
De retour pour mon rendez-vous régulier de lecture plaisir, au contact de ta plume toujours aussi originale et soignée. Déjà, je trouve le titre de ce chapitre particulièrement poétique.

Ravie de retrouver Nova, dont j'apprécie la finesse et la sensibilité des réflexions. Tu prends le temps de nous donner accès à ses doutes et interrogations - le tout mêlé à une certaine douceur. Douceur de l'amitié avec Maxine - laquelle va droit au coeur. Les petits surnoms, les intentions délicates tout au long du dialogue, la complicité, le soin qu'iels prennent l'un-e de l'autre. <3
Moi, je la trouve touchante, la "naïveté" de Nova - elle est surtout un certain optimisme je trouve, et l'une des nombreuses expressions de son énergie. Mais je comprends la réaction de Maxine et ce qui lui fait dire ça.
Comme d'habitude, j'ai adoré certains de tes néologismes, comme les "allée-flâne-piétons" ou la "foufalle-flotille" <3

"Celles où, même si c’était malheureux, je la consolais lorsqu’on se moquait d’elle pour sa grandeur, ses rondeurs, ou ses cheveux roux des flammes. Celles où, coléria, désirant leur montrer à tous qu’on ne la brisera pas, elle a appris à torsader sa tignasse avec une telle adresse que sa tête est tout un art. Celles où elle s’est mise à porter avec fierté la souplesse des formes et la joliveté d’une âme de bohème."
>> Mowww il est tellement délicat et plein d'humanité ce passage <3 L'amie et le soutien qu'on adorerait avoir quand on subit des moqueries pour un physique différent. Et c'est super touchant, cette résistance par l'art. J'aime !

Au passage, au milieu de toutes ces émotions, tu ne manques pas de nous faire sourire avec le "Yolo", le coup du lampadaire et j'en passe xD Nova est tellement pétillante et attachante, dans cette large palette d'émotions qu'elle dégage, de la larme à l'œil au rire en passant par la profondeur de ses doutes.

Gros bisous !
Je repasse dès que possible pour la suite de ce chapitre en bonne compagnie !
Louison-
Posté le 28/04/2023
Coucou Jeannie !
Merciiii infiniment (comme toujours) pour ton ptit passage par ici, ça me fait extra plaisir <3

Chouette si tu apprécies Nova et son côté un peu naïf, j'ai parfois peur que ça agace ^^ Mais c'est de toute façon amené à évoluer et dans l'absolu ça fait assez sens qu'iel soit ainsi :) Iel a reçu une éducation un peu surprotectrice avec ses mamans bhaha :) Quoiqu'il en soit : cool aussi si sa relation avec Max t'a plu dans ce ptit moment, ça me rassure parce que j'ai changé miiiiiiille fois ce chapitre ahahah et je crois d'après les retours que je reçois que cette fois c'est ok ! :D

Voilou, merci encore pour tes doux mots qui à chaque fois me font chaud au coeur <3 J'essaie de repasser aussi au plus vite par chez toi, c'est un peu la course ces dernières semaines avec mes exams qui approchent mais je vais essayer de trouver du temps pour retrouver Estriel qui me manque fort beaucoup <3

A pluche !
Edouard PArle
Posté le 04/03/2023
Coucou Louison !
Super chapitre encore.
J'aime beaucoup le fait que tu prennes le temps de développer l'introspection de Nova, ses questionnements doutes et idées. Ça permet de rendre le personnage plus complexe et humain. Je trouve que ce chapitre aide à s'attacher à lui.
J'ai particulièrement apprécié le passage sur son amitié avec Maxine, ils ont une très belle relation. Franchement j'aurais pu lire encore un chapitre entier sur le lien entre ces deux personnages, je pense qu'il y a encore des choses à dire.
Pour le reste, ton style est toujours top. J'aime bien la différenciation entre ces chapitres et ceux de Jules, je trouve que tu réussis bien à l'adapter au personnage.
Bref toujours un plaisir.
A bientôt !
Louison-
Posté le 10/03/2023
Coucou Edouard !
Merci comme toujours pour ta lecture et ton com :D

Chouette que tu aimes le côté introspectif du chapitre, j'aime bien développer l'intériorité des persos donc ce sera pas un cas isolé ^^ Aawn Max et Nova : contente là aussi que tu apprécies leur relation ! J'ai pas mal retapé ce chapitre et que là tout te semble ok me rassure hihi ;)

Merci pour le reste de tes remarques sinon ! Et à trèèèès vite, je passe sur ton histoire tout soudain :D
dodoreve
Posté le 14/05/2022
« Je ne sais. Je ne sais. Je ne sais. pas et je dois avouer (…) » J’aime beaucoup la répétition et le point dans la phrase, je trouve que son effet est particulièrement chouette ici !

« un petit peu. Des petits rongeurs » Une répétition moins justifiée j’ai trouvé

« Olé-olé où êtes-vous joyeux pitchounes à la fredaine en bouche ? » Cette phrase, j’adore <3

« magions-nous » je t’avoue que je n’ai pas compris ça

« Moi l’étrange oiselle volante derrière ses pensées comme si c’était l’essence de ses journées, sans quoi elle s’éteint puis chute, meurt, les yeux tristes les ailes fracturées. » <3

Héhé ça m’a fait tout bizarre de relire le passage que j’avais déjà lu ! Pour être honnête je trouve qu’il fait très très long par rapport au début tout brusque tout soudain toute la crise, comme si on passait de l’un à l’autre rythme sans suffisamment comprendre pourquoi, mais c’est difficile en même temps d’équilibrer les choses et je ne vois pas comment ça serait possible ? Dans tous les cas ces deux rythmes de récit (wow qu’est-ce qui se passe je panique / walala ma vie c’était et c’est ça) ne peuvent pas s’amalgamer donc sans doute que c’est obligé de ressentir ce truc-là. Bref, comme souvent ce n’est pas très clair ce que j’essaie de t’exprimer, mais si jamais, j’espère que ça pourra te servir (et redemande-moi s’il faut hein).

C’est un peu court comme commentaire aujourd’hui mais tu sais tout ce que je pense du reste. Je note quelques détails aussi qui attirent mon attention dans la mesure où j’ai déjà une petite connaissance de ce qui se passe ensuite, mais bien sûr je ne dis pas quoi ici, et je ne peux qu’avoir hâte de voir comment les choses s’emboîtent à nouveau, ou nouvellement (huhu) <3

bioux bioux
Louison-
Posté le 17/05/2022
Yolo pendant que tu puzzles mwa je viens m'amuser ici <3
Et marciiiiii comme tjrs pour ta lecture, koeur koeur koeur sur toa <3

« magions-nous » je t’avoue que je n’ai pas compris ça >> bhaha c'était un jeu de moi sur "magie" mais à ce que je vois c'est pas limpide :') Maybe je change ça ducou !

Sinon merci pour ces premières phrases que tu relèves, et pour ta remarque finale : woooo, pertinent ce que tu dis effectivement (et si c'est claire ton explication !) et yop dans le fond je sais que c'est beaucoup trop long tout le blabla de Nova, faudrait vraiment que je le retravaille, comme d'habitude j'ai cet affreux défaut de m'étendre sur toutes les scènes possibles et inimaginables et, bon, est-ce que j'apprendrai un jour à faire court ? Je ne sais.

Brefouille, sinon merci tout encore pour ta lecture et ton commentaire !
"C’est un peu court comme commentaire aujourd’hui mais tu sais tout ce que je pense du reste. " >> Et toi tu sais ce que je pense de la longueur des coms, ta présence et ta lecture me suffissent et je SAIS à quel point les com' PA sont prenants en terme d'énergie/temps alors t'inquiète !! C'est souvent ce qui bloque la lecture (la mienne en tout cas, je lis si lentement sur PA parce que je sais que je dois prendre le temps pour faire un retour un minimum constructif) et bref, tout ça pour dire : t'embête pas à vouloir faire long, je sais que c'est pas le travail qui manque (et les animés à regarder et les puzzle à faire yolilolo :D)

IMMENSE BIOU
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