Le mysticopolium était un vieux bâtiment dont les encoignures s'écaillaient, affichant par endroits la couleur originelle de sa matière première. Éblouie par le soleil qui entamait son ultime descente de la journée, Eleonara peinait à lire les lettres de la mosaïque collée au-dessus de l'entrée.
En passant sous le seuil, ses pupilles mirent longtemps à s’accommoder au changement de luminosité. Une ronde de taches vertes se déplaçait à chaque saccade oculaire. Une vague fragrance de viande bouillie, de jasmin et de four à pain encensait l'air. En arrière-fond, une mélodie au duduk.
— Assieds-toi ici, fit Sebasha à voix basse. Ne converse avec personne pendant que nous commandons les repas. À bientôt.
L'elfe se mit en tailleur là où lui indiquait l'Opyrienne et, ayant recouvré la vue, disséqua la salle. Elle s'était attendue à des tables et des tabourets comme au Saint-Cellier, or dans cet établissement-ci, les clients – travailleurs et voyageurs – consommaient des plats rapides à même le sol, appuyés sur des traversins. Il se resservaient à un comptoir marbré en forme de L, perforé de cuves remplies de ragoûts et de céréales. Sur les murs et aux plafond, des fresques et des mandalas, tracés avec minutie et expertise, prenaient une allure d'enluminures géantes.
Derrière elle, un raconteur hypnotisait une petite audience :
— Vous entendrez mes avertissements de la bouche de tous les nomades, anciens comme marmots. Nous seuls, de ces jours, comprenons et respectons les étranges contes du reg. Méfiez-vous de la nuit ! Dès que le soleil s'enfuit, faites comme lui ! Ô lieu de mille feux, ô jardin de poussière ! Magnifique, sec et cruel désert. Le vent n'est pas le seul à souffler là-bas, non, non, il y a quelque chose d'autre, bien plus agile que le souffle du ciel. Quand il se déplace, il crisse ; vous le sentez venir que quand il est déjà là. Il change de corps et n'a nul visage... Distant mirage, il se faufile partout : dans vos pensées, dans vos rêves ! Il sait qui vous êtes, d'où vous venez, ce que vous faisiez, faîtes et ferez ! Il n'y a pas de paupière à ce grand œil et nulle part où se cacher.
Eleonara pensa au gravier mouvant du reg. Elle repensa au Don'hill. Son visage se mit à gratter. Le front baissé, elle vérifia que le pan de son chèche dissimulait ses stigmates. En remarquant le regard insistant d'un serveur, elle soupira. Elle devait vraiment avoir l'air d'un raton-laveur.
Ce fut alors que deux Religiats suants firent leur entrée et s’assirent juste derrière Eleonara. Celle-ci se raidit et se tordit de côté de façon à pouvoir les épier du coin de l’oeil.
— J'en peux plus de cette chaleur et de ces moustiques, se plaignit l'un. Tellement hâte de redevenir Nocturne.
— T'as encore cinq mois à tenir, vieux !
— Inutile de me le rappeler. Hé, c'est quand qu'on retourne dans le secteur ouest ? Demain ?
— Pour ma part, jamais. Après le type qui a rôti la mascotte de son voisin pour une boutade et le duel entre poissonniers de mercredi, je suis servi, merci.
— T'es vraiment un spécialiste, Eudes. Tu pinailles pour ça et t'oublies que c'était dans notre propre caserne, lemassacre sans précédent, le massacre de l'année. L'Abbé et Tomislav d'Ox zigouillés en une nuit, ça ne s'oublie pas, ça !
— Comment pourrais-je l’oublier ? Je n’en dors pas la nuit !
— Surtout quand les trois Barbares gambadent dans la nature ! renchérit un arrivant en déposant ses affaires, un moine-soldat qu'Eleonara aurait juré avoir croisé au Don'hill. À mon avis, ils ont dû s'enfuir de la ville. Sinon, on les aurait attrapés depuis des lustres. Ou trébuché sur leurs cadavres.
Ils éclatèrent de rire, sauf celui qui s'appelait Eudes.
— Je ne le prendrais pas à la légère à votre place. Pas avant qu'on ne soit sûrs que ce ne sont pas eux, les fautifs.
Un de ses compagnons lui passa un bras par-dessus les épaules tandis que l'autre se levait pour aller commander.
— Pour te dire vrai, mon ami, ça me rassurerait que ce soient eux, les criminels. Bon, qu’est-ce que vous voulez manger ?
Lorsque la conversation des Religiats dériva sur des banalités, Eleonara regarda par la fenêtre et s’imagina le Rêve, le cours d'eau qui, au loin, abreuvait le bassin central, puis continuait sa route, traversait le port et se jetait dans la mer. Qu'était-il arrivé à Agnan et à Sgarlaad ? Et à Errmund ? Qu'était-il arrivé tout court ? Avaient-ils péri à l'instar de leurs collègues ? Leurs corps avaient-ils été jetés aux flots ? Où qu'ils fussent, sur ou sous terre, sur ou sous l'eau, ils étaient dans de beaux draps.
« La caserne, ne cessait-elle de se répéter. Les meurtres ont eu lieu à la caserne des Religiats. »
À son retour, Sebasha posa un bol fumant sur le sol et distribua des morceaux de pain de froment ainsi que des cuillères avec une expression qui voulait dire : « Tant pis, il faudra composer avec ». Elle avait dissimulé son visage derrière son chèche, comme Eleonara. Razelhanout était hors de lui.
— Une bouillie de céréales ? Franchement ? Tu m'invites au mysticopolium pour une bouillie de céréales ? C'était le choix le moins coûteux de la carte !
— Justement. Et baisse le ton, nous avons une certaine compagnie dernière nous.
— Je suis vexé. Vexé au plus profond de moi-même. On dit que la pensée d'un Opyrien réside dans son estomac. Eh bien, sache que tu viens d'offenser ma pensée.
Eleonara inspecta le contenu du bol avec curiosité et goûta. Simple, sobre, mais nutritif et revigorant. Pour un repas bon marché, ça lui paraissait correct et bien meilleur de ce dont elle se nourrissait chez les Taberné. Elle rumina là-dessus quelques instants, puis, aux trois quarts du repas, elle lança à voix basse :
— Vous saviez que les assassinats avaient eu lieu à la caserne ?
Razelhanout se contracta. Sebasha arrêta sa cuillère à mi-chemin entre elle et son bol. Leurs regards convergèrent sur sa peau comme des rais brûlants. Puis l’Opyrienne désigna discrètement les moines-soldats du menton.
— Alors, on étire ses oreilles ? C’est bien. (Elle se pencha en avant :) Oui, je le savais, servante de Diutur.
— Arrêtez de m'appeler comme ça, maugréa l’elfe, gênée. Je ne suis plus une nonne du Don'hill. Vous l'avez dit vous-même, je suis une apostate.
— Soit. Mais ne crions pas nos secrets sur tous les toits. Nos amis sont encore là.
Les yeux en demi-lune, la Peau Sombre entreprit de déchiqueter sa miche de pain en dés jusqu’à ce que les Religiats finissent leur repas. Lorsqu’ils claquèrent la porte de l’établissement, rassasiés, Razelhanout redressa son haut turban qui penchait sérieusement de côté.
— Dis-lui ce que tu sais, Sebasha.
L’interpellée hocha la tête et, après un coup d’oeil aux alentours, commença :
— J'ai été parmi les premiers à découvrir les corps de mes camarades. Nous les avons trouvés couchés sur leurs lits, troués de coups de couteaux. Quatre chacun, tous à l'estomac.
En un clignement de paupières, Eleonara se dépeignit la scène. La pâleur grise des visages, le bordeaux du sang coagulé et le rouge vif de celui qui coulait et tachait les draps, le sol, les vêtements. Un frisson, et l'image s'altéra : les traits des Religiats s'affinèrent, leurs turbans se changèrent en guimpes, tandis que leurs mains se collaient en prière. Deuxième frisson. Le cadavre d'un braconnier au clair de lune, la pointe d'une flèche engagée sous son menton. Troisième et quatrième frisson. Monsieur Taberné, étendu sur sa couchette, le cou entaillé, tel que l'alchimiste l'avait laissé lors de son avant-dernier passage au Saint-Cellier. Eleonara sentit son ventre se contracter et la bile lui remonter à la gorge. La Dame, inerte sur un sol de prison.
— Nulle fenêtre en morceaux, nul signe de discorde, nul garde alerté ou voisin dérangé, poursuivit l'Opyrienne. Je voulais étudier chaque grain de terre et de poussière, interroger chaque âme du quartier. Mais le sergent de Blodmoore – maudit soit-il ! – m'a forcée à rentrer au Don'hill avec lui pour m'avoir à l’œil. Je sais à quoi tu penses. Que l’on devrait accourir à la caserne pour la mettre sens dessus dessous et nous faire repérer. Permets-moi de t’économiser la pendaison. Aujourd'hui, ces appartements sont occupés par d'autres Religiats. Nos chances d'y déceler des preuves sont stériles. Un collègue s'y est rendu plusieurs fois et n'y a rien trouvé. Nous devons être rusées et humer une piste autre part.
« Un collègue ? s'étonna Eleonara qui n'avait jamais vu Sebasha travailler avec qui que ce fût.
— Qui se trouvait sur le lieux des faits le soir des meurtres ?
— En plus de l'Abbé et de Tomislav ? Errmund et onze convers, dont tes amis Nordiques. Le reste des Religiats et moi étions de garde nocturne, répandus à travers Arènes. Ça, c'était dans notre pavillon. Les autres pavillons étaient occupés par les Religiats Diurnes.
— Pourquoi les Nordiques, les convers et les victimes sont-ils restés dans leurs appartements s'ils étaient censés être de garde ?
— L’Abbé avait des rapports à rédiger. Sgarlaad et Agnan avaient été assignés à des tâches d’écurie, à l’instar de certains convers. Le reste des convers avaient contracté un malaise de l'estomac après avoir goûté un plat typique. Tomislav et Errmund étaient partis avec nous mais sont rentrés plus tôt. Les sergents n'aimaient pas l'idée de laisser l'Abbé seul avec autant d'étrangers sans supervision.
— C'est absurde. Errmund est mikilldien, aussi.
— De sang, peut-être. Mais pas dans le coeur ou la tête. Le sergent de Blodmoore ne doute jamais de sa fidélité.
Eleonara s’équilibra sur son coussin, trop mou à son goût.
— Ne me dites pas que l’empoisonnement des convers était aussi de ma faute.
Sebasha lâcha un rire de hyène.
— Non, non, les convers se portent bien, parole de nomade.
Razelhanout, quant à lui, avala la boutade comme une cuillerée de poivre. Il planta ses poings dans ses cuisses en tailleur.
— Pardon ? Elle a déjà empoisonné des gens ? C’est quoi cette histoire ? Sebasha ?
— Ce récit sera pour demain. Il se concilie mal avec les ventres pleins.
— Super, je ne dormirai pas de la nuit, maintenant, grommela le pharmacien.
— Et... vous n'avez rien vu de suspect ou d'anormal ? s’enquit Eleonara, pressée de changer de sujet.
— Si, répondit Sebasha. À la fin de notre patrouille, les convers dormaient à poings fermés et ne se sont réveillés que le surlendemain, sans souvenir des jours précédents. Autre chose : tes amis Barbares ont acheté une substance somnifère peu avant les faits chez Razelhanout qui n'a pas attendu pour le crier sur tous les toits.
Le pharmacien manqua de s'étouffer sur la croûte de son pain.
— Mais ! Les Religiats m'ont menacé de mort si je ne crachais pas le morceau ! Comment aurais-je pu deviner ce qu’ils comptaient faire avec, ces Nordiques ? Tout ce qui m'intéresse, moi, c'est de vendre ! Je croyais qu'ils avaient de la peine à dormir à cause du changement hypnique ou que sais-je !
— Le changement hypnique ? demanda Eleonara, perdue.
— C’est un changement d’heure spécifique à Arènes. Je t’expliquerai, promit Sebasha. Le principal, c’est que tesamis sont les premiers accusés pour avoir tué mes amis. S'ils sont retrouvés, ils seront pendus. Tu dois être si fière.
— Ça ne peut pas être eux, s'indigna Eleonara avec un nœud dans la gorge. Pourquoi Agnan et Sgarlaad s’en seraient-ils pris à l'Abbé ou à Tomislav ? C'étaient les seuls Einhendriens qui rendaient leur vie au Don'hill supportable ! À mon avis, le meurtrier ne supportait ni la présence d'étrangers au sein des Religiats ni l'idée que des Einhendriens les soutiennent.
— Le meurtrier ? s'étonna Razelhanout. Non, ils devaient être plusieurs. Poignarder deux personnes sans bruit, sans que les victimes aient le temps de crier ou de s'entraider... Ils étaient plusieurs, c'est sûr.
— Ce doit être un coup monté par les sergents du Don'hill, cracha Eleonara. Ils ont dû soudoyer un tiers pour se salir les mains à leur place. J'ai tout entendu lors d'une de leurs réunions au Don'hill : ils cherchaient à se débarrasser des moines-soldats étrangers coûte que coûte. Peut-être qu'ils voulaient punir l'Abbé pour avoir recruté des étrangers et Tomislav pour s'être montré miséricordieux envers eux.
— Tu as tort, trancha Sebasha. Le sergent d'Ox n'aurait jamais tué son propre frère ; Blodmoore n'aurait jamais osé un affront aussi compromettant et Hormont ne s'éloignerait jamais d'une table à mangeaille pour massacrer des innocents. Ils n'approuvaient pas les inclinations de Tomislav, c'est tout. Un tel complot se saurait au sein des Religiats s'il avait eu lieu. Le décès du garçon me choque. Tomislav d'Ox n'était pas dangereux, mais l'influence de sa famille, si. Quiconque l'a tué s'est attiré plus d'ennuis que d'avantages.
— Un acteur externe cherche à faire peur aux Religiats, constata le pharmacien. À les mettre en garde ou à les retourner les uns contre les autres.
— Les possibilités sont infinies, répliqua Sebasha en s'essuyant la bouche. C'est égal, je retrouverai les coupables. Et quand je l'aurai fait, je m'allumerai un feu avec leurs viscères et je me grillerai des falafels.
Razelhanout s’éclaircit la gorge et se placarda une expression niaise sur le visage.
— Ah, petiote, peux-tu me rappeler ton prénom ? Il est si exo...
— Peu importe son vrai nom, le coupa Sebasha. Il lui faut un nom d'ici. Sans cela, son déguisement est incomplet, maladroit, inadéquat.
Eleonara sut à ce moment-là que si elle n'entreprenait rien, on lui épinglerait à vie un sobriquet aussi honteux que Vache à Lait, Seins Blancs ou Pure de Cœur. Cette fois, elle prendrait le soin de se baptiser elle-même, merci beaucoup.
— Ourébi, déclara-t-elle un tantinet trop fort. Appelez-moi Ourébi.
La mâchoire de Sebasha se referma comme une huître. Les deux traits de crayon sur son front se touchaient.
— Une ourébi est une antilope gris fauve, tu sais ça, n'est-ce pas ? s'enquit Razelhanout.
Eleonara hocha la tête, satisfaite. C'était un des premiers mots d'opyrien ancien qu'elle avait appris en cours au Don'hill. Elle se souvenait même d'avoir tracé une antilope sur le coin de son pupitre, ce qui n'avait pas plu du tout à Sœur Rosemonde.
— Ourébi est le prénom de ma grand-mère paternelle, maugréa Sebasha. Tu ne t’appelleras pas comme ma grand-mère.
— Et pourquoi pas ? s'étonna le pharmacien.
Pendant que les deux Opyriens initiaient un débat avec potentiel de litige, Eleonara avala goulûment sa part du repas. Quand elle en eut assez, elle reposa sa cuillère, apaisa sa soif et, en attendant que ses compagnons finissent de se rassasier, elle contempla le mysticopolium, balayant du regard les bavards, les rieurs et les serveurs. Ce fut alors qu'elle remarqua, au fond de la salle, une porte entièrement repeinte en turquoise sur laquelle était dessinée une balance. L'elfe ne s'y serait pas intéressée davantage si quatre hommes n'attendaient pas à gauche de la porte, côte à côte sur un banc penchant.
— Qu'y a-t-il derrière la porte là-bas, avec la balance ?
D'un simple battement de cil, Sebasha noua la langue de Razelhanout.
— Si cela peut apaiser ta curiosité, il est plus sage de demander qui et non pas quoi. Ouvre cette porte et tu rencontreras les êtres les plus curieux des Troyaumes. Une spécialité toute opyrienne : les Mysticophiles.
Eleonara dévisagea Sebasha sans comprendre.
— Les Mysticophiles ?
La Peau Sombre souffla sur sa cuillerée de bouillie.
— Mysticophiles, Vendeurs de Secrets, Cachottiers... ils ont plusieurs appellations. Tout s'échange en Opyrie ; le négoce et le partage est dans notre sang. Derrière cette porte se cachent certes des vendeurs, mais pas n'importe lesquels et certainement pas de la sorte dont abonde l'Einhendrie. Non, l'Einhendrie est bonne fournisseuse en bois, en pierre et en armes, mais ça s'arrête là. Ces messieurs qui font la queue sur le banc ont une question qui brûle leurs lèvres. Les Mysticophiles leur en céderont la réponse en échange du juste prix : un secret qui leur est propre.
— Quel genre de question peut-on poser aux Mysticophiles ?
— Tout et n'importe quoi.
— Vous êtes en train de me dire qu’il y a des personnes ici qui peuvent répondre à toutes nos questions et nous, au lieu de leur demander qui a commis les assassinats, où sont Agnan et Sgarlaad et qui a écrit le message qui vient potentiellement de Hêtrefoux, on se goinfre de céréales ramollies ?
Elle entendit tout juste le tenancier de l’établissement se plaindre en arrière-fond avec un « hé ! » indigné. On n’insultait pas ses bouillons.
— Mille cieux, baisse le ton ! Ce n’est pas aussi simple que tu le crois. Les Mysticophiles ne donnent pas n’importe quelle information au premier venu.
— Mais, balbutia Eleonara, comment ce service peut-il fonctionner ? Je veux dire, les Mysticophiles ne peuvent quand même pas disposer d'une réponse à tout, si ?
— Ne te taraude pas la cervelle pour des aubergines. Ces gens-là jouent à un jeu dangereux. Si des pauvres âmes parient leur fortune aux dés et la perdent en un claquement de doigts, ils sont moins à plaindre que ceux qui misent leurs secrets sur la table des Mysticophiles. Vendre ses secrets, c'est se dénaturer au goutte-à-goutte, se dépouiller de son intimité, de son identité. Ne sois jamais tentée par le symbole de la balance, Bron... Ourébi. Les Vendeurs ne feraient qu'une bouchée de toi. Ils te ruineraient.
La nuit sur le toit de la pharmacie fut fraîche, tourmentée et bruyante. Si le couvre-feu était une loi incontournable en Einhendrie, un tel concept n'avait jamais été mis en vigueur à Arènes. Sa population était trois fois plus importante que celle de Terre-Semée – elle renfermait près de trente mille habitants et un mélange de cultures hallucinant. La ville troglodyte et cosmopolite était si surpeuplée que, pour contrer sa densité de population, elle avait réparti ses citoyens en deux castes non pas sociales, mais hypniques : les Diurnes et les Nocturnes. Tandis qu'une moitié des Arèniens vivait le jour et dormait la nuit, la seconde moitié faisait exactement le contraire. Ainsi, les rues ne se vidaient jamais, le brouhaha des marchés ne se taisait pas, la musique et la danse ne mouraient pas, même passé le crépuscule.
Les Arèniens appartenaient au groupe hypnique de leur famille depuis leur naissance et ne pouvaient le changer qu'en déposant une demande officielle, par exemple en cas de mariage polyhypnique. De telles unions étaient rares, étant donné les maigres opportunités de fréquenter une personne suivant le cycle de sommeil opposé. Le traitement des dossiers était d'ailleurs si méticuleux, si compliqué et les temps de procédure si long que les Arèniens respectaient leur distribution hypnique à la lettre.
Aux équinoxes, les rôles s'inversaient : les Diurnes se convertissaient en Nocturnes et les Nocturnes en Diurnes, une alternance réglée par les Religiats, qui ne devaient qu'exceptionnellement distribuer des amendes.
Eleonara avait cru que cette animation permanente l'empêcherait de s'endormir, mais ce ne fut pas le cas. Les voix, les échos et la vie active ininterrompue mettaient ses ressassements en sourdine et lui fournissaient une agréable sensation de sécurité. En revanche, ils ne pouvaient rien contre ses démangeaisons et ses mauvais rêves. L'elfe s’était réveillée plus d'une fois au cœur des ténèbres en grelottant, la gorge sèche et des visions cauchemardesques sous les paupières. Des linceuls. Des lèvres noires. Une balance peinte au sang. Un message flottant depuis Hêtrefoux, détruit par les flots.
Au quatrième éveil, Eleonara repoussa ses draps. Une sauterelle s'était posée sur sa poitrine ; elle la chassa et empoigna l'Œil de Diutur, son pendentif reçu au Don'hill. Le collier multifacétique lui renvoyait à la fois une sensation de tiédeur – là où il s'était pressé contre sa poitrine – et de fraîcheur.
Elle se frotta énergiquement les yeux ; des billes de rosée s'étaient constellées sur ses cils. Elle replia sa couverture. Brossant le toit-terrasse du regard, elle s'étonna à ne pas y déceler la silhouette féline de Sebasha. Sa couche gisait là, froissée, à côté des énergumènes feuillus que Razelhanout laissait sécher sur sa pharmacie. « Elle fait sans doute un tour aux latrines », extrapola l'elfe.
Cette dernière s'assit sur le rebord de la toiture et cala son visage sur le socle de ses mains, suivant distraitement les contours des coupoles, des tourelles et du phare. Entrecoupant les couleurs disparates des habitations, les vergers, les serres et les bosquets amenaient du vert là où il était le moins espéré. Arènes était comme un paradis terrestre, s'appuyant sur ses atouts et ses ressources pour s'organiser avec inventivité. Elle possédait par exemple un système pour récolter l'eau de pluie et abreuver ses nombreux habitants, un exploit que les localités einhendriennes les plus aisées s'étaient empressées de copier.
Pas un coclorement n'émanait de la basse-cour ; les poules somnolaient encore, pelotonnées dans leurs nids. Un calme rare planait sur Arènes : c'était l'entre-deux, l'intervalle où les Nocturnes rentraient chez eux pour se glisser sous leurs couettes et où les Diurnes hésitaient encore à quitter les leurs. Les plus matinaux étaient déjà debout. Une voisine battait un tapis devant son portail et, trois rues plus bas, une silhouette fixait une roue sur une brouette. De faibles meuglements et aboiements troublaient parfois la sérénité éphémère, à la manière d'une foliole d'acacia dérangeant la surface lisse d'un étang.
Eleonara aurait voulu se transformer en géante et, doucement, soulever les toits un à un telles des coques de noix pour guigner à l'intérieur des grottes. Seul un miracle lui permettrait de localiser Sgarlaad et Agnan dans cette immensité, et encore, c'était prétentieux. Pourquoi réussirait-elle là où les Religiats avaient échoué ?
Quand elle songeait à ses amis mikilldiens, elle n'arrivait plus à s'imaginer leurs visages avec acuité et netteté. Elle savait à quoi ils ressemblaient et saurait les reconnaître, or les garder vivants dans sa mémoire s'avérait de plus en plus corsé. À l'instar de la Dame, ils s'effaçaient. Ils deviendraient alors une vague certitude, des mots flottants et troubles, des sources d'émotions fanées.
Du bout des ongles, l'elfe frôla la boucle de ceinture en bronze coincée sous sa tunique crème. Quelque part dans cette grouillante métropole, ses compagnons s'étaient volatilisés ; une idée éprouvante à digérer. Agnan et Sgarlaad, potentiellement ici, à Arènes, à la portée de ses doigts et nonobstant introuvables. Une chair de poule se réveilla sur son épiderme. Ils étaient là, dans cette ville. Ils devaient l'être.
Ponctuel, le soleil cuisant se pointa tôt à l'est, baignant Arènes dans son éblouissante bienveillance. Sebasha n'étant toujours pas de retour, Eleonara descendit au rez. Avec un certain degré de timidité et d'appréhension, elle poussa le battant de la pharmacie.
— Nous ne sommes pas encore rouverts ! explosa une voix. Oh, ce n'est que toi, petiote. Entre, entre, viens, viens.
Monsieur Razelhanout, paré de jaune du sommet de son turban aux pointes recourbées de ses babouches, l'invita à avancer en gesticulant des mains. Eleonara lui trouva un air de bougie en cire d'abeille.
Aussitôt entrée, elle polit l'intérieur de la boutique du regard. Tapies de tiroirs, les parois rocheuses alignaient des étagères de frasques, toniques, bocaux étiquetés et boîtes de thés. Une balance argentée trônait sur le comptoir, entourée de sachets de sucre. Poussé dans une encoignure, un ottoman pour les consultations.
Le vieux pharmacien posa un récipient en céramique sur le comptoir et y versa un liquide aux émanations familières.
— Ton infusion à l'ail est prête.
Sûre que sa poisse avait un rôle à jouer là-dedans, Eleonara imbiba l'éponge qu'on lui tendait, repoussa son chèche, écarta une mèche fuyarde et se frotta le visage. Elle serra les dents, détournant son attention de l'odeur nauséabonde qui désormais la suivrait à nouveau. Elle se remaquilla, entourant ses yeux de disques noirs tel que Sebasha lui avait enseigné.
— As-tu faim ? s'enquit Razelhanout quand elle eut terminé,
— Un peu, oui.
— Alors suis-moi.
Surchargée, la pharmacie paraissait minuscule ; or Eleonara saisit qu'elle n'avait pas tout vu lorsque Razelhanout tira sur le rideau de perles derrière le comptoir. L'humidité et l'épaisse vapeur de la salle de préparation la saisit aux joues. C'était une jungle de fougères, de fleurs, de racines et de gerbes incomparables aux frêles pousses du potager. Razelhanout avait adopté ces espèces de la manière dont on accueille les animaux abandonnés : avec le poignant sentiment d'obligation de les garder près de soi et de les aimer sans conditions. C'était à se demander où il dénichait des herbacées aussi variées dans une terre aussi aride que l'Opyrie ; ces spécimens ne pouvaient pas tous provenir des berges du Rêve.
L'apothicaire se délecta de la mine médusée de son invitée.
— Impressionnée par ma collection ? Ah, ça, ce n'est pas le travail d'un amateur ! Tout expert ou initié sait qu'avant de se lancer à la recherche de l'espèce rare, il faut en cerner le caractère, le connaître à la perfection, l'anticiper ! Certaines plantes, vois-tu, sont craintives, alors que d'autres sont dominantes ou solitaires. Certaines bourgeonnent à l'ombre des roches, d'autres en plein désert. Certaines sont farouches, d'autres dociles et domesticables.
Eleonara écarta une brindille de cataire qui poussait de biais juste sous son nez. Cerner le caractère, le connaître à la perfection, l'anticiper. Devait-elle rechercher ses amis avec la méthode d'un herboriste traquant la plante rare ?
— Autant que tu le saches tout de suite : je suis diplômé de la Maison de la Sagesse. Il m'arrive d'y animer des lectures. Sebasha m'a dit que tu as des connaissances en opyrien ancien ; moi aussi. C'est un savoir qui se perd, depuis l'occupation. Il est pourtant essentiel dans toute pharmacie. Le nom des plantes, des substances, des composantes, des concoctions et des réactions sont généralement en opyrien ancien. Même les Religiats ont compris son importance. La preuve : ils l'apprennent. Tu étais moniale, n'est-ce pas ? C'est pour ça que tu portes le... comment ça s'appelle ? L'Œil de Diutur ? Je pense que tu pourras m'assister. Qu'en dis-tu ?
Eleonara n'en croyait pas ses oreilles. C'était une opportunité en or.
— Si mes tâches de scribe le permettes, oui, volontiers ! Est-ce que vous pourriez mes donner des cours de langue pendant vos heures perdues, en échange ? Vous devez savoir tant de choses.... et je voudrais tellement encore pouvoir approfondir mes connaissances. J'aime beaucoup l'opyrien ancien. Les langues en général, en fait.
— C'est d'accord. Splendide !
Étouffée par la végétation peu appropriée aux dimensions de la maison, une surface de travail disposait de mortiers et de pilons ainsi que du matériel à filtration, décantation, distillation et ébullition. C'était ici que Razelhanout expérimentait sur diverses herbes, poudres et liquides médicinaux.
Eleonara contempla les pipettes et les éprouvettes séchant sur le bord des fenêtres. Si seulement elle n'avait pas égaré le flacon bleu-doré de l'alchimiste, elle aurait pu l'étudier ou le soumettre à la loupe du pharmacien. D'ailleurs, qu'aurait-il à dire d'une fleur jaune, sa fleur jaune ?
— Est-ce que vous avez déjà vu ou entendu parler d'un liquide à la fois bleu et doré ?
Razelhanout se gratta le sommet de son turban, à croire que leur inséparabilité avait rendu son couvre-chef sensible.
— Bleu-doré ? Voilà qui est particulier. Quel genre de bleu ?
— Dans les turquoises, je dirais.
Le pharmacien aplatit ses sourcils gris et hérissés, puis coiffa sa barbe.
— Mmh non, ça ne me dit rien. Les couleurs peuvent être trompeuses, tu sais. Il suffit que le préparateur ait teint son mélange... Quelle odeur a ce fameux liquide ?
Eleonara grimaça en se grattant le cou, là où s'étendait l'invasion de boutons.
— Euh, ça sentait la cannelle.
— Alors là, j'avoue être confus. S'agit-il d'un parfum ?
Razelhanout profita de leur passage en salle de préparation pour vanter son cagibi secret – pas si secret que ça, apparemment – où il emmagasinait ses potions non-achevées, ses concoctions en fermentation et des sacs de fèves, au-dessus desquels étaient entreposés ses livres et ses rouleaux.
— Ces joyaux appartenaient à mon oncle qui les avait lui-même hérités de mon grand-père. De génération en génération, ces ouvrages ont sauvé des vies et guéri des maux. Leurs propriétaires leur insufflaient au fil des décennies nouvelles recettes et corrections.
Voyant le manifeste plaisir que prenait le pharmacien dans sa visite guidée, Eleonara ne se sentit pas gênée de tourner la poignée de ce qui lui parut être une armoire. Elle manqua toutefois l'arrêt cardiaque en y découvrant deux vieillards inertes étendus sur des banquettes superposées.
— Oh, je te présente les frères Louroum, mes collègues, chuchota Razelhanout en refermant lentement l'armoire. Il arrive que Diurnes et Nocturnes partagent leurs demeures, voire leurs lits. Comme tu le vois, c'est le cas de notre pharmacie. Ne les dérangeons pas, ils assurent les ventes post-crépusculaires de mon – notre – entreprise. Nous ne voudrions pas qu'il se lèvent du pied gauche.
Sur ce, il la pressa vers une porte concave donnant sur la cour arrière, là où Pia chiquait son avoine, où les poules picoraient et où le potager mourait de soif. Eleonara et Razelhanout s'assirent sur les irrégularités de la roche et, sous l'ombre d'un acacia, dégustèrent du miel, du pain frais, des olives et des fruits.
Sans famille et sans apprenti, à qui Razelhanout léguerait-il son expérience, ses manuels et sa connaissance ? Aux deux barbus assoupis dans l'armoire ? Eleonara n'osa pas l'interroger.
Elle se servit une pêche dans le bol à fruits.
— Où est Sebasha ? Elle a disparu durant la nuit et je ne l'ai pas revue depuis.
— Il faudra t'habituer à ses absences, Ourébi : Sebasha est une femme occupée. À mon avis, elle ne restera pas très longtemps avec nous ; dès qu'elle mettra la patte sur son propre logement, loin ! Ne t'inquiète pas, tu peux rester chez moi aussi longtemps que tu le souhaites, pour autant que tu me prêtes un coup de main et que tu me donnes du « monsieur ». J'aime ça.
— Merci, vous êtes très généreux. Donc, si j'ai bien compris, Sebasha travaille ? Quel est son métier ? N'a-t-elle pas peur d'être remarquée par des Religiats ?
— Par pitié pour mes nerfs, je me persuade qu'elle sait ce qu'elle fait. Quant à son métier... que t'a-t-elle dit, à toi ?
— Pas grand chose. C'est une sorte de guerrière-soldat-lanceuse-de-poignards, non ?
Les yeux de Razelhanout s'écarquillèrent pour ressembler à des œufs et ses sourcils dansèrent. Il semblait chercher le sens dans le récit incohérent d'un enfant.
— Non, non, non, tu n'as rien compris. Elle est... cueilleuse, déclara-t-il, passablement convaincu de son choix de mots.
Sebasha aurait pu exercer n'importe quel métier compromettant, clandestin, risqué, mais pas celui-là. Cueilleuse ? Razelhanout voulait-il vraiment faire croire que sa compatriote s'éclipsait pour ramasser des petites baies et des pastèques au clair de lune ? Les compotes et les confitures, c'était pour quand ?
Inconcevable. Ridicule. L'elfe était sur le point de s'avouer insultée lorsqu'une lampe à huile s'alluma dans sa tête. « Cueilleuse, d'accord, mais de quoi, exactement ? »
Le chapitre 5 présente des descriptions envoutantes et utiles pour la compréhension de cette nouvelle partie du monde mais ça manque peut-être d’un peu d’action…?
Dans le chapitre suivant, l’apparition de Monsieur Razhelhanout est bienvenue, elle fait rebondir le récit et donne surtout envie d’en savoir plus sur Sebasha et son mystérieux passé. Par contre, j’ai du mal à me représenter le turban en ruche d’abeille é_è
Arènes m’évoque un peu Marseille, matinée d’Alexandrie (la bibliothèque), très méditerranéenne en tout cas. Une question que je me pose pour la suite : va-t-on se retrouver à un moment au coeur de la cour einhendrienne? Parce qu’à force de l’entendre évoquée comme une éminence grise dont la main pèse sur toutes les contrées, j’avoue que j’aimerais beaucoup y être plongée ^^
Au fil de ma lecture, lorsque Sebasha, Élé et Monsieur R. font des suppositions sur les meurtres, il me vient une idée. Et si c’était Tomislav la vraie victime? Bloodmore le fait tuer pour pouvoir mettre la main sur l’héritage de la famille d’Ox en épousant Melvine?
Je trouve très prometteuse l’idée du marché avec les Mysticophiles même si j’ai un peu peur qu’Élé ne fasse une bêtise en essayant de recourir à leurs services… :/
Je crois que ce que je préfère par dessus tout, c’est de voir Éléonara rencontrer des gens un peu bienveillants avec elle, comme M. Razelhanout. Malgré les douloureux souvenirs du Donhill, je la sens plus détendue :)
A bientôt
Dommage que l'image de ruche d'abeille n'ait pas fonctionné pour toi ; je le laisse ouvert, tu peux y voir plutôt la couleur ou la forme allongée pas tellement définie par exemple (mais pas comme une boîte carrée en bois non xD)
C'est intéressant de voir comment tu t'imagines Arènes ! En effet, j'ai pensé à Alexandrie, mais plutôt pour le phare (on en parlera plus en détail après) Personnellement, j'ai toujours été fascinée par les villes troglodytes telles que Pétra et je me suis demandée ce à quoi elles avaient dû ressembler pendant leur époque de gloire. Une sorte de Petra creusée à l'intérieur d'une espèce d'Ayers Rock... ouais c'est un peu comme ça que je la vois xD
Merci pour avoir partagé tes hypothèses sur les meurtres, c'est toujours très enrichissant pour moi ! mais évidemment je ne peux rien spoiler hihi
Eleonara, faire une bêtise ? Jamaaaaaaais :D
En effet, l'Opyrie est probablement le premier endroit où Eleonara a pu souffler et prendre le temps d'admirer le paysage... Et quelqu'un comme Razelhanout, c'est rafraîchissant (pour moi aussi haha)
Merci et à bientôt !
Concernant la cour royale einhendrienne : c'est justement une des questions que je me pose en ce moment (je planifie mon tome III) :D C'est assurément un thème que je vais aborder, mais je ne sais pas encore sous quel angle. Comme Hêtrefoux n'est pas exactement une histoire qui se focalise sur les nobles, peut-être que je me servirai de l'influence de Melvine ? À voir. Dans ce tome par contre, tu verras la cour des Blodmoore de très près :)
Agnan et Scarlaad sont pas loin ! ils ont meme vu Razelnout ! hiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii !!
J'aime beaucoup que Razelnout transmette un peu de son savoir a Elé ! c'est super cool !
J'ai beaucoup rigolé a imaginer Sebasha qui fait des confitures xD
Eh ouais, nous voilà sur la piste des Nordiques ! Devineras-tu où ils sont avant Eleonara *insérer clin d'oeil ici * ? (aucune pression hahah)
Razelhanout aime étaler sa science. Littéralement. Heureusement qu'il raconte des trucs pratiques, sinon Eleonara aurait dû se procurer des bouchons d'oreilles xD
A mon avis, Sebasha n'aurait jamais la patience pour faire des confitures xD Elle laverait les fruits, puis laisserait tomber xD
Merci d'avoir lu et de m'avoir laissé tes impressions <3
De même que le désordre organisé de la pharmacie (les deux vieillards dans le placard... ♥) et tout ce qui concerne Mr Razelhanout lui-même. Je n'avais pas forcément vu venir que ça allait être un personnage important, mais j'imagine que si tu t'attardes autant sur lui, c'est qu'on va le voir un moment. Sera-t-il plus simple à déchiffrer que Sebasha ? Je l'espère pour Elé !
Outre le plaisir que me procure encore ta plume, je vais quand même te faire la même remarque que précédemment : ce chapitre est encore assez descriptif. Quand je parle de descriptions, ce ne sont pas uniquement des décors, tu donnes aussi des informations dont je suis certaine qu'elles ont leur importance (les secrets des mysticophiles par exemple ou le métier de Sebasha). Mais compte tenu de l'avancement (7ème chapitre), je continue à penser qu'il faudrait un évènement majeur dans ce début. Quelque chose qui fasse avancer l'intrigue, un retournement de situation, un gros obstacle ou au contraire une chose qui rapproche Elé de son but (genre une info très importante sur ce qu'il est advenu de Sgarlaad et d'Agnan).
Là, ça ronronne un peu trop. Elé découvre certes de nouvelles personnes, de nouveaux décors qui changent sa façon de voir les choses et la font évoluer, mais je pense que ça ne suffit pas.
Leigh Bardugo, l'auteure de Six of crows (que j'ai beaucoup aimé), disait dans une interview qu'elle repartissait dans chacun de ses tomes 12 événements majeurs à intervalles réguliers. Evidemment, ce n'est pas une loi à prendre au pied de la lettre, mais je pense que le conseil est intéressant pour rythmer le récit et alimenter l'intrigue.
D'ailleurs, rien n'empêche de garder tout ce que tu as mis : tous les ingrédients qui font évoluer Elé et régalent le lecteur. Mais il faudrait ajouter un rebondissement. A ta dispo pour en parler si nécessaire ;)
Détails et coquillettes :
"Vexé du plus profond de moi-même." : au plus profond de moi-même ?
"— Une ourébi est une antilope gris fauve, tu sais ça, n'est-ce pas ? s'enquit Razelhabout." : Razelhanout
"Ainsi, les rues ne se vidaient jamais, les brouhaha des marchés ne se taisait pas," : le brouhaha (ou alors tout au pluriel)
"Eleonara avait cru que cette animation permanente l'empêcherait de s'endormir, masi ce ne fut pas le cas." : mais
"Razelhanout avait adopté ces espèces à la manière que l'on accueille les animaux abandonnés" : à la manière dont on accueille
"et te voudrais tellement encore pouvoir approfondir mes connaissances. " : et je voudrais
A très bientôt !
Eh oui, tu m'as grillée : j'ai passé beaucoup de temps à réfléchir au fonctionnement de cette ville et à faire des recherches. Je voulais que cet endroit fasse un peu "alien" et non pas Terre-Semée 2.0 xD
Je ne me souviens plus exactement de comment je suis tombée sur l'idée de la répartition hypnique, mais à l'époque, j'écrivais ma thèse de bachelor sur le sommeil; ça a dû plus m'influencer de ce que je pensais !
Je t'avoue que Razelhanout n'était pas censé devenir important du tout, mais il a pris tellement de place qu'il s'est même décroché une place dans le tome 3. Il n'en fait qu'à sa tête, j'ai peur !
Ouiii pardon d'abuser avec les descriptions xD Tu as raison; j'ai tendance à rallonger le début et empiler 50 révélations dans la 2 ème moitié du texte. Je suis contente que tu aies soulevé ce problème parce que ça m'a aidé à trouver la solution d'un autre couac que je viens de rencontrer. Je m'explique: généralement, j'ai un ou deux chapitres d'avance par rapport à celui que je publie sur FPA pour pouvoir le relire deux fois. J'ai vu que dans le chapitre 8, plusieurs rebondissement se suivaient de très près, ce qui n'était pas naturel. Du coup, j'ai décidé d'avancer deux conversations-rebondissement dans le chapitre 7 :) Et c'est fait !
Le nouveau passage se trouve au milieu et commence à partir de : "Ce fut alors que deux Religiats suants firent leur entrée" jusqu'à "et je me grillerai des falafels". Désolée, ça te fait encore une fois retourner en arrière pour quelques informations, ce n'est pas très pratique ^^' Si tu y jettes un coup d'oeil, n'hésite pas à me dire ce que tu en penses ;)
J'aime beaucoup cette idée de 12 événements majeurs répartis ! C'est drôle, je viens justement de terminer Crooked Kingdom <3 Comme je planifie actuellement le tome 3, je vais garder ce conseil en mémoire pour l'appliquer très bientôt. Je vais aussi regarder les interviews de Leigh Bardugo; j'adore les interviews d'auteur, c'est si enrichissant !
Argh ! Les coquilles ! "Razelhanout" hahaha alors, là, je me suis surpassée ! Je les corrige maintenant.
Merci infiniment pour tes remarques toujours si constructives qui me motivent à avancer et à recorriger !
à bientôt ! (psst, t'en es où avec le prochain chapitre des Princes ? ;-) )
J'espère que tu ne m'en veux pas d'insister ;) Les fameux 12 événements majeurs, ce sont des scènes d'action très fortes où quelqu'un est blessé ou des twists inattendus... pas seulement des infos. Alors elle décide d'aller voir la caserne, de suivre Sebasha, de poser une question aux mysticophiles ?... bref, il faudrait faire un peu frissonner le lecteur en mettant Elé en danger ou au moins en risque. Depuis le début, elle est très protégée par Sebasha et elle se "contente" de suivre. Où est la Elé qui a décidé de s'enfuir du Saint-Cellier ? De rejoindre les nonnes ? De sauver Agnan des braconniers ? Elle me manque un peu, je dois dire ;)
"Celle-ci se raidit et et se tordit de côté de façon à pouvoir les épier du coin de l’oeil." : un "et" en trop
"Tu pinailles pour ça et t'oublies que c'était dans notre propre caserne, lemassacre sans précédent, le massacre de l'année." : il manque un espace
"un moine-soldat qu'Eleonara se jurait d'avoir croisé au Don'hill." : qu'Eléonara aurait juré ?
"Pas tant qu'on ne soit sûrs que ce ne sont pas eux, les fautifs." : "pas tant qu'on n'est pas sûrs" ou "pas avant qu'on soit sûrs"
"Elle rumina là-dessus quelques instants, lorsque aux trois quarts du repas, elle lança, à voix basse :" : je pense qu'il y a un problème d'utilisation des temps (à cause du "lorsque"). Il faudrait plutôt mettre quelque chose comme "Elle rumina là-dessus quelques instants, puis, aux trois quarts du repas, elle lança à voix basse :"
"— Vous saviez que les assassinats eu lieu à la caserne ?" : avaient eu lieu
"— Alors, on étire ses oreilles ? C’est bien." : excellent !
"L’interpellée hocha la tête et, après un coup d’oeil pour ses alentours, commença :" : aux alentours
"Un collègue s'y est rendu plusieurs fois et n'y rien trouvé." : et n'y a rien trouvé
"— Les convers avaient contracté un malaise de l'estomac après avoir goûté un plat typique" : oh mon dieu mais si ça se trouve, Elé n'est même pas responsable de l'empoisonnement des nonnes ! En tout cas je ne peux pas m'empêcher de faire la relation entre les deux (je ne sais pas si c'est voulu ?)
"chez Razelhanout qui n'a pas attendu de le crier sur tous les toits." : pour le crier sur tous les toits
"Comment aurais-je pu deviner ce qu’il comptaient faire avec, ces Nordiques ?" : ils comptaient
"Le principal, c’est que tesamis sont les premiers accusés pour avoir tué mes amis." : il manque un espace
"Pourquoi Agnan et Sgarlaad se seraient-ils pris à l'Abbé ou à Tomislav ?" : s'en seraient-ils pris
"sans que les victimes n'aient le temps de crier ou de s'entraider..." : sans que les victimes aient le temps (pas de négation)
"Ils ont dû soudoyer un tiers de se salir les mains à leur place." : "Ils ont dû soudoyer un tiers pour se salir..." ou "ils ont dû convaincre un tiers de se salir..."
"de Blodmoore n'aurait jamais osé un affront aussi compromettant et de Hormont ne s'éloignerait jamais d'une table à mangeaille pour massacrer des innocents." : quand on appelle seulement par son nom quelqu'un qui a une particule, on ne dit pas la particule, sauf si le nom sans particule fait une seule syllabe (et encore). Donc ne dira pas "de Blodmoore" ou "de Hormont" mais "Blodmoore" ou "Hormont" (je connais la question : j'ai une particule ;) )
"Ils n'approuvaient pas les inclinaisons de Tomislav, c'est tout." : inclinations (inclinaison c'est pour un angle)
Prochain chapitre des princes : écrit à moitié, mais j'ai un problème de découpage, je ne sais pas où mettre la fin... Bref, ça ne devrait pas trop tarder.
A+
Tout d'abord, merci beaucoup pour ta patience en relevant toutes ces coquilles - honteuses, d'ailleurs, je dois être en manque de sommeil xD.
Moi ça ne me dérange pas du tout que tu insistes sur le point des rebondissements, ça me pousse à approfondir la chose et à me creuser les méninges pour trouver des solutions ! :)
J'ai surligné tous mes "gros rebondissements" dans ma frise chronologique et j'ai remarqué qu'ils étaient rares avant le chapitre 8 et qu'ils s'enchaînaient à partir du chapitre 10. J'ai réfléchi et j'ai fait quelques modifications pour encore répartir tout ça. Au chapitre 5, on apprend notamment que le billet que Sebasha essaie de déchiffrer a été intercepté dans un qanat (un aqueduc souterrain) dont la source se trouve à Hêtrefoux. Cette info était prévue pour plus tard mais je crois que la mettre plus tôt explique mieux l'intérêt de chercher à décoder le billet. Ca donne également une motivation personnelle à Eleonara.
J'ai également retravaillé les dialogues au mysticopolium. car - et j'espère que ça ne te décevra pas - un gros rebondissement dans ce chapitre ferait un peu artificiel, à mon avis, en plus de rallonger le chapitre. Mais peut-être que je manque de recul. J'ai pensé à faire qu'un des Religiats reconnaisse Sebasha ou Eleonara (ce qui aurait été drôle), mais ça aurait déclenché toute une série d'événements un poil trop tôt malheureusement... Bref, je n'ai pas trouvé un moyen de déplacer un événement important dans ce chapitre de façon crédible. Du coup, j'ai changé l'attitude d'Eleonara. Quand elle comprend la fonction des Mysticophiles, elle confronte Sebasha sur pourquoi elles ne les consultent pas alors qu'ils pourraient apporter des réponses à toutes leurs questions. Sebasha reste ferme, mais Eleonara insiste puis, frustrée, demeure pensive à ce sujet, sous-entendant que cette affaire ne se termine pas là.
Je ne vois pas Eleonara comme quelqu'un d'impulsif mais plutôt quelqu'un qui a sa propre survie comme priorité. Elle doit donc d'abord se familiariser avec son environnement et en connaître les règles avant d'agir . Alors oui, jusqu'à maintenant, elle dépendait de Sebasha qui lui servait de guide. Je pense que ce chapitre-ci annonce son indépendance qui approche :)
Merci pour être repassée sur ce chapitre pour me donner ton avis sur les corrections ! C'est très encourageant !