L'odeur de la terre et du foin envahissait nos narines. Revenante sortant de songes assombris, un fer ardent enveloppé de givre, enchaînées, au-dessus de nos visages semi-conscients, des sabots piétinaient la poussière sur nos joues blessées. Les poignées ensanglantées. Le regard voilé par un fil carmin qui s'écoulait le long de mon front, jusqu'à perler sur mes cils battant avec légèreté. Mes épaules paraissaient se disloquer. Nos corps si lourds, enveloppes charnelles presque inanimées, traînaient sur des sentiers inconnus. C'était notre fin. Je me refusais de te voir subir une mort aussi atroce. Alors, je m'agrippais, avec les dernières forces qui brûlaient en mon âme. Le paysage blanc était déformé. Je distinguais à peine tes magnifiques traits, à jamais perdus, me rappelant tout juste le chant monotone qui nous berçait autrefois. C'était notre fin. J'ignorais si j'avais une once de chance pour te détacher et te voir enfin fuir ces lieux. Fuir pour une vie que je n'ai pu t'offrir. J'étais prête à endurer toutes les souffrances pour cela. Tous les supplices.
Et comme dans un rêve, les flocons se figèrent. La douleur n'était plus. Tout ce qui nous accablait disparut.
La fragrance d'un tapis de lys chatouilla mes sens. Si douces, elles soulagèrent immédiatement mes peines. C'est là que je te revis, merveilleusement endormie entre les pétales qui se mêlaient à ta chevelure. Étions-nous mortes ? C'est ce que je pensais avant de le voir arriver. Était-ce un ange ou une fée ? Il s'avança lentement. Mon regard fut captivé par sa clarté. Sa peau de porcelaine s'étira pour esquisser un large sourire. Sa voix vibra dans l'air telle une mélodie.
« Pauvres créatures. Je suis une bête venue vous libérer de tous vos tourments. »
J'adore !^^ C'est un style que j'aime beaucoup, très poétique ! Et le fait de parler à un "tu" dans un texte de narration interne rend le tout très inclusif et, je trouve, d'autant plus beau, et triste, et puissant...
Merci pour cette petite lecture, qui me fait beaucoup de bien ;)