8- La jeune femme

- Aide-moi. 

J'ai un moment de bug avant de me reprendre :

- M-mais t'es qui toi ? Tu sors d'où comme ça ? Ça te prends souvent de sortir des miroirs et de demander de l'aide sans plus d'explications ? Déjà quel est ton... 

Elle pose son index sur mes lèvres. Une chaleur intense m'envahit et je me mets à rougir :

- Je suis Hyju. Aide-moi. 

- Oh non non non ! Je vois très bien le genre de personne que tu es Hyju ! Tu me demandes de l'aide puis tu finis par t'incruster chez moi ! Je ne veux pas de problèmes et je tiens à garder une vie tranquille moi ! 

Hyju se mords la lèvre inférieure et affiché une expression déçue et triste. Comme un idiot, ça me fait culpabiliser et je finis par dire :

- Bon bon... Je vais t'accueillir chez moi en attendant que tu trouve un autre foyer. Et on ferait mieux de te trouver d'autres habits car les tiens sont vraiment étranges... 

Ses vêtements se limitent au strict nécessaire. Une sorte de brassière ornementée de pierres qui scintillent joliment et une jupe bleu nuit. Elle porte aussi une cape d'un bleu transparent qui semble flotter derrière elle. Quand elle s'aperçoit que je l'observe, elle me lance un regard assassin. Je rougit encore et je balbutie :

- C-Ce n'est pas ce que tu crois !

Hyju soupire et s'en va de la pièce. Je la suis en courant et en lui demandant où elle va. Elle s'avance dans le couloir et descend les escaliers comme si elle connaissait la maison. Sur cette pensée elle me dit :

- Les escaliers n'étaient pas comme ça avant. 

Il y a un reproche dans ses paroles. Je haussé les épaules et lui explique :

- Les anciens escaliers allaient tomber en ruine... J'ai pas eu d'autre choix que de les changer... 

Puis je me rends compte de ce qu'elle vient de dire. Avant ! Elle a parlé d'avant ! Ça voudrai dire qu'elle a habité ici ? Ou qu'elle y est déjà venue ? Je m'embrouille... Ma nouvelle colocataire s'installe dans le fauteuil du salon. Du coup je reste debout. Je lui lance un regard désespéré mais elle se contente de lever un sourcil avec l'air de dire : Ben quoi ? Je suis ton invitée alors c'est mon droit de m'installer dans le coin le plus confortable. 

    Cette fille m'intimide, disons qu'avec elle je me sens ridicule. Je détourné le regard en rougissant. Encore. J'ai l'impression que le rouge va devenir ma couleur de peau naturelle à force ! Dans un énième soupir, je me retourne vers elle et lui dit d'un ton nonchalant :

- Bon... Je vais te prêter des affaires et oon va aller se coucher parce qu'il est 3h du matin et que je suis hyper fatigué. 

Hyju ne répond pas. Je suppose que c'est sa façon d'être d'accord... Je lui cède le fauteuil à contrecœur et je sors un sac de couchage de ma valise. Je l'installe sur le parquet et je me glisse dedans. C'est dur, il fait froid. Je ne sais pas si j'arriverais à dormir... 

~*~

    J'ouvre les yeux. Je suis tout endolori et j'ai faim. Je ne me rappelle plus vraiment de ce qui s'est  passé cette nuit mais je sais que je me suis endormi et qu'il y a une fille chez moi. J'entends un grognement qui sort des tréfonds de mon estomac. J'ai vraiment faim... C'est pas étonnant... Je vois sur ma montre qu'il est 13h. Une odeur délicieuse vient me chatouiller les narines. Je tourne la tête et je vois Hyju assise par terre à côté de la cheminée dans laquelle un feu crépite :

- Tu te réveillés enfin ! me dit-elle : Tu ronfle vraiment fort tu sais ? 

Je m'enfonce dans mon duvet. J'ai envie de disparaître. Je savais que je ronflais très fort... Mais se l'entendre dire par une fille... Surtout aussi jolie... Mais à quoi je pense moi ?! Pourquoi je me sens honteux ? Ronfler c'est tout à fait normal ! Je me sens honteux et indigné. Deux émotions plutôt contradictoires qui se combattent et me donnent mal à la tête.

    Finalement, pour ne pas montrer que je suis vexé par la remarque, je sors de mon sac de couchage et je me détourne de Hyju. Je prends mon sac et je farfouille dedans quelques secondes avant de trouver ce que je cherchais : Des habits de rechange. Je tends une chemise et un pantalon à la jeune femme. Je la dépasse d'une tête mais je n'ai pas d'habits à sa taille alors elle devra se contenter de ça pour l'instant. Ma colocataire m'amène dans la cuisine et ferme la porte derrière moi pour pouvoir se changer tranquillement. Je prends donc le temps d'examiner les lieux plus attentivement que la première fois.

    Là cuisine est grande mais ça ne se voit pas car elle est toute en longeur. Du côté gauche, il y a un long plan de travail, des placards et un frigo. Du côté droit il doit y avoir une gazière, un vieux four calciné et, plus loin, un évier. C'est assez difficile à savoir parce que la partie droite est en très mauvais état. Le sol et le papier peint sont à pleurer tellement ils sont vieux et laids. Je pousse un soupir. Je regrette d'avoir commencé les travaux par le salon... Je m'attaquerais à la cuisine quand mes frères seront avec moi. Je vais m'asseoir sur une chaise à la solidité douteuse quand j'entends un léger boum. Je m'arrête à mi chemin entre la position assise et celle debout pour comprendre quel était ce bruit. Mais tout est devenu silencieux. Je m'assois complètement sur la chaise mais le four se met à trembler, provoquant un vacarme sans nom. Je suis une personne assez saine d'esprit pour ne pas m'approcher de l'engin qui fait des siennes. 

    Le four finit par s'arrêter de bouger. Mais moi je ne m'approche toujours pas. Au bout d'un long moment de silence complet, je décide d'aller voir ce qu'il s'est passé. Je m'approche du four mais à ce moment, la porte de l'engin s'ouvre lentement, toute seule. Je m'arrête. Je suis de nature assez peureuse. Et je ne veux pas faire la même erreur que la fois où j'ai rencontré Hyju. La curiosité l'avait emporté et ça ne m'avait attiré que des ennuis. Alors je ne m'approche pas plus et je me contente d'observer de loin. Et j'ai raison ! Il y a un dernier bruit puis un liquide noirâtre s'écoule du four pour venir s'étaler sur le carrelage. J'ai le temps de voir une chose bouger dans le compartiment du four avant de péter un câble. Je pousse un cri ridicule et je sors de la cuisine, claquant brutalement la porte derrière moi. Hyju lève la tête et m'adresse un regard interrogateur :

- Il y avait quelque chose dans le four ! Un liquide noir... Ça... Ça a bougé ! Une ombre ! je m'écrie.

- Mais qu'est-ce que tu racontes ?! Je ne comprends rien ! Il ne peut rien y avoir dans un four à part un plat ! Il n'y a personne ici hormis toi et moi ! 

Je vois bien dans son regard qu'elle me cache quelque chose... Elle a l'air troublée. Cette fois c'en est trop. Je veux mes réponses ! Trop de gens me cachent des choses :

- Hyju... Tu es sortie d'un miroir qui est apparu comme ça devant moi. Et tu veux me faire croire que j'ai alluciné ? Je sais qu'il y avait quelque-chose. Je l'ai vu. Comme je vois cette lueur troublée dans tes yeux. 

- M... Mais pas du tout ! me répond-elle sur la défensive. 

- Si ! Tout le monde ici semble savoir quelque chose ! Et moi je ne comprends rien ! Alors dis-moi Hyju ! Dis-moi juste comment tu es arrivée ici ? Qui es-tu ? Qui es-tu vraiment ? S'il... S'il te plaît. Dis-moi. 

- D'accord. Mais ça va être une longue histoire...

Je ne réponds pas et je m'assois à côté de la cheminée. J'ai toujours aimé les histoires qu'on raconte au coin du feu mais là je pense que je suis trop avide de reponses pour prendre le temps d'apprécier. Alors Hyju vient se placer devant moi. L'histoire peut commencer.