8 - Le cycle infernal

Le cycle infernal

— Ed, vous tombez bien.

— Sergent ?

— Est-ce que vous avez pu passer aux archives ?

— Oui, sergent.

— Et ?

— Rien, sergent. L’archiviste a dit qu’il allait chercher.

— Rien de nouveau ?

— Il m’a dit de repasser demain matin. Mais il a oublié de préciser selon quel système. Du coup, je suis un peu embêté, sergent. Je n’ai aucune idée de quand passer le voir.

— Vous n’avez pas pensé à demander, Ed ?

— Sur le coup, non, sergent. Je pense que je me suis retrouvé trop impressionné par les archives et je n’ai pas réfléchi clairement.

— Oui, ça impressionne, les archives.

— C’est toutes ces archives dans tous les sens. On dirait parfois que c’est vivant, sergent. Plusieurs fois, j’ai eu l’impression de voir quelque chose bouger au coin de mon œil. Et quand je me suis retourné, il n’y avait rien. Juste des archives.

— Vous verrez, Ed, on s’y habitue.

— Vous descendez souvent aux archives, sergent ?

— Plus maintenant. Plus maintenant… Ed, j’avais à vous parler. C’est à propos de notre histoire d’âmes bloquées.

— Oui, sergent ?

— Comme vous le savez, nous avons redirigé le flux pour empêcher d’autres âmes de devenir stagnantes. Le souci, c’est que dans une autre chambre de décontamination, la même chose s’est produite. Des âmes sont arrivées, toutes différentes. Elles sont passées au jet. Et elles se sont retrouvées bloquées.

— C’est inquiétant, ça, sergent.

— Je ne vous le fais pas dire.

— Qu’est-ce que vous voulez que je fasse ?

— Je vais avoir besoin que vous interveniez avec l’équipe que j’ai formée.

— Que j’intervienne comment, sergent ?

— Chaque chambre de décontamination sera sous surveillance militaire, Ed. Les soldats seront chargés d’intervenir rapidement si quelque chose de ce genre se reproduit.

— Mais les décontaminations sont déjà surveillées par les… euh, les personnes chargées de faire ça. Pas vrai, sergent ?

— Oui, oui. Mais ces personnes… Comment dire ? Ces personnes ne sont pas des flèches. La plupart n’ont même jamais été autorisées à apprendre à lire. Alors, leur réactivité est au plus bas. Ils voient des âmes se coincer et ils ne réagissent pas. Ce n’est pas pour rien qu’on s’est retrouvés avec une chambre remplie d’âmes stagnantes alors qu’ils auraient pu stopper ça dès que la première s’était bloquée.

— Donc vous voulez une présence militaire… pour appuyer sur des boutons. Pourquoi pas des analystes, sergent ?

— Parce que les analystes sont déjà bien occupés, parait-il. Et que selon eux, les militaires n’interviennent pas beaucoup en ce moment.

— Mais, sergent ! Si je puis me permettre, pas plus tard qu’il y a quelques jours, nous sommes intervenus pour un problème réincarnatif sur une planète. Les formes de vie avaient perdu la raison et avaient décidé de se suicider toutes en sautant de la falaise. Leur chef leur avait promis qu’elles se retrouveraient dans une meilleure forme de vie. Mais tout le monde sait que la forme de vie dans laquelle on se retrouve après une mort stupide, c’est le cafard. Et du coup, ces formes de vie…

— Je sais tout ça, Ed. Mais la décision ne m’appartient pas vraiment. Vous allez donc être posté au 42e sous-sol. Compris ?

— Oui, sergent.

— Mais avant, je veux que vous reveniez aux archives. Je pense que demain est déjà arrivé dans quelques-uns de nos mondes.