9. Danser avant l’orage

Par Wen
Notes de l’auteur : "C’était peut-être ça, être vivant : se laisser porter par une chanson sans penser au lendemain."

Amy attendait sa nièce dans la cuisine, adossée au plan de travail, les bras croisés mais les yeux pétillants. Une casserole fumante reposait derrière elle, emplissant la pièce d’une odeur de cannelle et de sucre.

— Tu es sûre que tu veux y aller ? demanda-t-elle, mi-sérieuse mi-amusée, en haussant un sourcil.

 

Arwen lui avait parlé de cette soirée au déjeuner, un peu à contre-cœur, comme si mettre des mots dessus pouvait rendre la chose réelle. Une fête chez un élève de son niveau, ouverte à tout le monde. L’annonce s’était répandue comme une traînée de poudre dans les couloirs : conversations excitées, regards complices, invitations passées de main en main.

— Oui… je crois, répondit-elle, incertaine, les doigts jouant nerveusement avec l’ourlet de son pull noir.

— “Tu crois”, répéta-t-elle avec un petit rire. Écoute, Arwen, si tu veux y aller, vas-y. Ce n’est pas tous les jours que tu t’ouvres un peu.

Ses mots restèrent en arrière-plan toute la fin d’après-midi, comme une mélodie entêtante. Amy ne l’avait pas seulement donné son accord : elle semblait… contente. Presque fière. Et ça, la jeune fille ne voulait pas le gâcher.

 

La nuit était déjà tombée quand Arwen monta dans le taxi que sa tante lui avait commandé. La ville brillait sous les lampadaires, les vitrines encore ouvertes, les silhouettes pressées de rentrer. Le chauffeur, un homme aux cheveux poivre et sel, lui jetait parfois des coups d’œil dans le rétroviseur, comme s’il cherchait à entamer une conversation, mais il renonça vite devant l'air à la fois fermé et absent de sa cliente.

 

La maison d’Adrian Hart apparut au détour d’une rue bordée d’arbres dénudés. Spacieuse, aux murs couleur crème, avec un grand porche éclairé par des guirlandes scintillantes. La musique était si forte que les vitres semblaient vibrer. Une file d’adolescents se pressait déjà devant la porte, certains riant à gorge déployée, d’autres tapotant nerveusement sur leur téléphone.

En franchissant le seuil, Arwen fut happée par une chaleur moite et un tumulte de voix. Les murs étaient couverts de guirlandes lumineuses aux reflets dorés, et une énorme table, à l’entrée, croulait sous les snacks : chips, cookies, gobelets rouges et bleus alignés comme des soldats. Un parfum entêtant de pizza flottait dans l’air, mêlé aux effluves sucrés des boissons.

— Arwen ! s’exclama une voix chaleureuse derrière elle.

Nelly fendit la foule pour la rejoindre, son haut argenté accrochant la lumière, un verre de soda pétillant à la main.

— Je savais que t’allais venir, dit-elle en la prenant par le bras.

Layla apparut à son tour, plus sobre dans une robe noire fluide, ses cheveux roux lâchés sur ses épaules.

— Tu es venue, constate-t-elle, avec un sourire étudié qui laissait toujours planer un doute sur ce qu’elle pensait vraiment.

— Oui… pourquoi pas, répondit simplement l'intéressée.

Un garçon grand, mince, aux cheveux châtains en bataille, s’approcha alors avec un sourire de publicité.

— Salut, fit-il. Adrian. Merci d’être venues. Amusez-vous bien.

Il ponctua sa phrase d’un clin d’œil avant de se tourner vers un autre groupe, distribuant des salutations comme des cartes à jouer.

 

La soirée s’installait. Certains dansaient déjà au centre du salon, d’autres s’étaient regroupés autour des tables pour discuter ou rire à des blagues dont Arwen ne comprenait pas toutes les références. Les basses résonnaient dans sa poitrine, couvrant parfois ses pensées.

Nelly l’entraîna vers un coin où quelques élèves du lycée parlaient musique et projets d’été. Arwen répondait timidement, mais à sa surprise ; elle parvint à sourire, même à lâcher un ou deux rires sincères. Ce qui n’échappa pas à Nelly, qui lui adressa un regard complice accompagné d'un sourire.

En allant chercher un cookie, un mouvement attira l'attention de la jeune fille. Près de la baie vitrée, Layla discutait avec un garçon que l'adolescente n’avait jamais vu au lycée. Ses vêtements sombres et son regard méfiant tranchaient avec l’ambiance détendue de la soirée. Il parlait vite, les mains dans les poches, penché vers la rousse comme pour éviter que quelqu’un surprenne leurs mots.

Layla hochait la tête, sérieuse, l’air concentré. Une fois, elle balaya la salle du regard, et leurs yeux se croisèrent. Son expression changea à peine : un mince sourire, un peu figé, comme si elle voulait effacer ce qu'Arwen avait vu. Puis elle se détourna et reprit la conversation, plus bas encore.

Avant qu'elle puisse s’approcher, un groupe d’élèves heurta la curieuse en riant, l’entraînant de force vers la piste. Un parfum sucré, un éclat de lumière et des éclats de voix se mêlèrent à la musique, l’éloignant toujours plus de la grande vitre. Quand elle tourna enfin la tête, Layla et le garçon avaient disparu.

 

Plus tard dans la soirée, alors qu'Arwen s’accordait une pause près de l’escalier, elle vit Liam. Il discutait avec deux garçons, un sourire sûr de lui. Mais dès qu’il l’aperçut, il leva la main en guise de salut.

— Hey, tu t’amuses ?

La jeune fille haussa légèrement les épaules.

— Ça va…

— C’est déjà bien, dit-il en riant.

Son ton n’était pas moqueur, juste… léger. Il ne chercha pas à prolonger l’échange et s’éloigna, la laissant seule avec un étrange mélange de curiosité et de soulagement.

 

Environ deux heures après minuit, l’air de la maison commençait à se saturer. Les rires devenaient plus forts, les conversations plus désordonnées. Nelly l’embrassa sur la joue avant de filer avec un groupe d’amis. Layla n’était nulle part en vue.

Amy lui avait envoyé un message : “Besoin que je vienne te chercher ?” Arwen répondit que le taxi suffisait.

 

Sur le trajet, les lumières de la ville se reflétaient sur les vitres comme des constellations mouvantes.

 

De retour dans sa chambre, les cheveux encore imprégnés d’odeurs de sucre et de fumée, elle s’allongea sur son lit. Les images de la soirée défilaient dans sa tête : ses rires avec Nelly, la chaleur de la foule, cette conversation étrange de Layla qui refusait de s’effacer.

Pour la première fois depuis longtemps, Arwen se sentait légère. Et si, malgré tout… les choses pouvaient vraiment redevenir normales ?

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Inxs.0
Posté le 27/08/2025
Bonsoirrrr,

Je suis contente qu'Arwen décide de s'ouvrir un peu plus au gens en allant à cette fête, et puis cette Nelly qui est adorable avec elle omg j'adore à quel point elle soutient Arwen c'est mignon. Mais par contre ehh Layla elle devient trop suspect, déjà qu'elle à l'air de stalker Arwen, j'aurais trop aimé être une petite mouche pour entendre toute leur conversation
Wen
Posté le 28/08/2025
Coucoouuu,

Ouii je voulais montrer qu'Arwen commence à évoluer petit à petit. Je voulais aussi qu'elle puisse compter sur une amie fidèle en plus de sa tante <3

J'ai hâte d'avoir ton retour sur le chapitre que je vais sortir aujourd'hui car j'ai eu beaucoup de mal à l'écrire...
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