L’hiver ouvre aujourd’hui les portes d’un royaume
Où le peuple des morts hurle parmi les vents
Où les cauchemars des hommes éclaboussent les murs
Où le froid donne à l’air une haleine de sang
Qu’Ils respirent essoufflés sur l’océan des nues
Parfum de lèvre sèche et de langue mordue
Piquant comme l’eau fragrante au goudron des banlieues
Bruine contre la brique en taches écarlates
Les maisons du silence et des drames sans grandeur
Tracent autour de Liais pour un vol éternel
Leurs cercles maçonnés de rapace infernal
Comme un mur de vers blancs devant nos yeux qui grouillent
Une lame de fond née dans un ciel éteint
Renverse sur la terre les eaux d’un autre monde
Et la rumeur des spectres envahit les impasses
Comme autant de sépulcres aux angles de béton
Béton fleur de nos cris coffret de nos sanglots
Tapis égratigné par des ongles sanglants
Nuages déchirés au-dessus d’Artaan
La mêlée des fantômes se précipite en masse
Par le premier plafond sous le crachin des anges
Déferlante croupie sur les rues de la ville
Ils tendent avec leurs mains le soir comme un drap froid
Puis au gré des bourrasques implacables touristes
En haut lieu mortifère se répandent sans bruit
Dans un souffle assassin de quartier en quartier
Pour vider de son sang la cité tout entière
Que viennent-ils donc chercher que déjà ne connaissent
Rien n’a jamais vécu entre ces murs de plâtre
Personne n’a remonté ces longs trottoirs perdus
Les goules qui s’apprêtent à fondre sur nos têtes
Sauront trouver sans peine leur chemin jusqu’à nous
Parmi les cent ruelles identiques là-haut
Nous vivant morts sur morts dans des pièces évidées
Dans un pays sans âmes où sur les chairs à vif
L’Au-delà se dépose épousant monts et plaines
Comme un calque embrumé des reliefs du pays
Frayons sans un hiatus avec la fin des temps
Et la peine intervient bien avant le procès