AB-Fantasia

Par Moje
Notes de l’auteur : Histoire inspirée par la chanson de Dolly, "Je ne veux pas rester sage". Présentement abandonnée jusqu'à nouvel ordre.

AB-Fantasia, la drogue interdite par excellence. Sous son emprise, le monde change, en devient un autre : agressif, inquiétant, oppressant. Et pourtant si « fun ».

Les rackales sont des créatures invisibles à l’œil nu, composés d’ondes électromagnétiques puissantes. Ordinateurs, téléphones, éoliennes, cerveaux, ils sont capables de tout dérégler, tout influencer. La majorité de la population ne croit pas à leur existence pour la simple et bonne raison que seul l’AB-Fantasia permet de les distinguer. Plivenne est la seule à connaître la menace qu’il représente, et doit le rester si elle ne veut pas compromettre la sécurité de sa famille.

 

 

 

 

Chapitre zéro- Prélude, déluge.

Papa nous avait entassé dans la voiture pendant que Maman faisait les valises, chargeant dans le coffre autant d’objets de valeurs que possible. Mô, et Nett -Mauvrice et Nettillance, de leur nom complet- étaient serrés l’un contre l’autre, transis de peur, d’incompréhension et de fatigue. Pourquoi diable nous avait-on réveillé avant l’aube pour nous faire partir comme des voleurs ?

 — On… on part en vacances ? avait timidement minaudé mon petit frère.

Papa lui avait adressé un sourire mais n’avait pas répondu tout de suite. J’avais beau n’avoir que huit ans, je comprenais bien que Mô se trompait, et ce pour trois raisons. Premièrement, Papa était beaucoup trop tendu, alors que les vacances étaient censées être un moment joyeux. Deuxièmement, si cela avait été le cas, ils nous auraient prévenus à l’avance pour que nous fassions nos valises. Troisièmement, il y avait école aujourd’hui. Et demain aussi.

Maman arrivait, nous nous tûmes.

 — Voilà les affaires des enfants : vêtements, papiers d’identité, carnets de santé. Vous pouvez y aller.

Comment cela ? Maman ne venait pas avec nous ?

 — Non, toi vas-y, je vais…

 — Non. C’est ma responsabilité, c’est mon laboratoire. Tu es mon assistant, alors tu vas faire ce que je te demande.

Puis, la voix de Maman s’était brisée.

 — Une dernière fois, d’accord ? Après il n’y aura plus d’assistant et plus de docteur, juste notre famille. Je te le promets. Dès que j’ai fini, je vais louer un camion chez Julius et je vous rejoins avec autant de meubles que possible. D’accord ?

Trop de « d’accord ». Cela sonnait comme un piège. Un piège dans lequel ils allaient désespérément tous tomber.

Sans un mot, il l’avait pris dans ses bras. Puis Maman s’était penchée dans la voiture pour nous faire un câlin à tous les trois. Mô s’était mis à pleurer parce qu’il ne comprenait pas et avait peur de ne jamais la revoir.

 — Mais non, Mô ! avait baillé Nett. Tu n’as pas écouté : Maman nous rejoint bientôt !

Un dernier sac dans le coffre, puis Maman était repartie dans la maison.

 — Liv, changes de place et vient à l’avant à côté de moi.

Liv, s’était moi.

 — Mais Papa… j’ai que huit ans !

 — Ne discutes pas.

Son ton s’était fait tranchant, et il venait de démarrer le moteur de la voiture. Sans un mot, j’obtempéra. Décidément cette journée commençait de façon incompréhensible.

Papa fit quitter le garage au fougon, puis partit comme une flèche. Depuis ma petite taille, je n’arrivais pas à voir les chiffres sur le compteur aussi bien qu’à l’arrière, mais j’étais presque sûre qu’il ne respectait pas les limitations de vitesse.

Avec appréhension, j’observais le paysage pluvieux défiler à toute vitesse. Le jour allait bientôt se lever dans la campagne grise de brouillard et de rosé. Le trajet que nous prenions ressemblait à celui pour aller à l’école. Aucun de nous trois n’osait poser de question : la tension de Papa était contagieuse. Ce fut lui qui brisa le silence le premier.

 — Tiens, Liv, tu ne nous mettrais pas un cd ?

Une boule s’était formée au creux de mon estomac. Je n’avais aucune idée de ce qui nous arrivais, mais l’impression qu’il s’agissait de quelque chose de très grave me broyait le ventre. Allions-nous mourir ? Pourquoi Maman n’était pas avec nous ? En fouillant dans la boite à gants, ma main se posa au hasard sur le cd de Aaron.

 — Je pensais à un truc un peu plus joyeux, Liv. Tu vois, le genre de musique qu’on aurait envi de chanter, qui nous ferais danser !

 — Papa, il est quatre heure et demi du matin.

 — Et alors ? Ça se fait tout à fait de danser à cette heure-là ! Tu comprendras quand tu seras plus grande.

Il s’efforçait de paraître détaché pour nous rassurer. Je jetais un regard en arrière, et Nett me renvoya une oreillarde crispée. Cela marcherait peut-être avec Mô parce qu’il était le plus petit, mais pas avec nous. Le second cd tiré au sort fut un condensé des hits de l’année passée. Papa dut juger que ça suffirait à ne pas d’avantage plomber l’ambiance puisqu’il me laissa l’insérer dans la radio. Aussitôt une musique americana envahit l’habitacle. Papa monta le volume beaucoup trop fort alors qu’il s’éloignait du chemin de l’école en prenant la route de la voix express. Quelques minutes plus tard, nous quittions notre petite ville de Neo-Franscheska sous une pluie battante.

Une larme roula sur la joue de Papa.

Un gouffre abyssal naquit dans ma poitrine.

 

 

 

Chapitre 1

                 — C’est malin, maintenant tu va vraiment devoir lui acheter un poney !

 — Un cheval ! J’avais demandé un cheval !

Autours de la table, tout le monde paraissait sérieux. Dans mon rôle, je m’efforçais de froncer les sourcils et de croiser les bras. Nett faisait mine de nous ignorer, Mô de ne pas succomber à la vague de joie folle et d’accomplissement qui l’envahissait. Papa, lui, restait stoique, comme à son habitude. Pourtant, nous avions tous envi d’éclater de rire devant le ridicule de la situation : Mô, habituellement très mauvais élève, venait d’obtenir son grade cinq avec la mention « Très bien » et les félicitations de son enseignant. Celui-ci, alerté par le manque d’intérêt de notre petit frère pour l’école, avait suggéré à Papa lors de la dernière réunion parents-professeurs de sérieusement motivé Mô, qui était loin d’être stupide. Par contre, pour Papa, on se posait toujours la question…

Il avait donc réfléchi la question. Comment motive-t-on un gamin de quatorze ans ? En le grondant ? Papa ne savait pas nous gronder. La seule qui grondait dans cette famille c’était moi. En l’encourageant ? Non, Mô n’était pas si facile à corrompre. Il fallait l’acheter. Et à quoi peut bien rêver un gamin de quatorze ans ? Pour les autres, j’en ai une petite idée, cela commence souvent par « con » et se termine comme « désole » au « s » près qu’on pourrait rajouter à « con », parce que généralement ils y jouant à plusieurs.

Mais Mô, lui n’aspirait qu’à une chose depuis qu’il avait l’âge de regarder l’écranvision : monter à cheval. Alors Papa lui avait naturellement promis un cheval s’il obtenait la mention « bien ». Ha-ha, on était tous moooooorts de rire. Maintenant, il allait devoir le lui acheter, son canasson, se débrouiller pour clôturer le jardin, lui trouver une bassine d’eau et apprendre à monter à cheval tout seul. Quoique. Mô était un jeune gars bien débrouillard, à tous les coups il s’était abonné à une (ou plusieurs) chaine de cavaliers sur le net. Il ne faut jamais miser sur un échec de sa part. Mô arrive toujours à ses fins.

 — D’accord, d’accord, nous irons t’acheter un cheval dimanche prochain…

 — Il y a une foire aux bestiaux à Hornstock vendredi prochain. C’est un jour férié, alors tu ne travailleras pas, hein ?

 — Heu… ben, non, je suppose…  — Et vous allez le ramener comment ?

Nett était enfin sortie de son mutisme et avait arqué un sourcil moqueur. La face de Papa devint blême. Hornstock était à trois quarts d’heures en voiture par la voie rapide, autant dire une journée à pied.

 — Je me débrouillerais pour trouver, finit par marmonner notre frangin.

En cela, on pouvait lui faire confiance.

Le temps impartit au petit déjeuner prit fin, entrainant à sa suite le temps de partir à l’école. Nett, comme toujours, était plus que prête, fraiche comme une rose, parfumée, le nez poudré, sa chemise impeccablement repassée et sa mallette à la main.

 — Bon aller, on part. Tout le monde n’a pas la chance d’avoir « déjà » fini l’école pour la saison !

 — Bonne journée, les filles !

 — Bonne journée, mes filles !

 — Bonne journée Mô, bonne journée Papa !

Après avoir débranché mon électrauto qui avait passé la nuit à charger, nous prîmes la route.

 

 

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Liné
Posté le 14/08/2018
Hello Moja ! :-)
J'aime beaucoup le principe de "laisser couler" tes idées d'histoires dans ce "cahier" : j'ai l'impression de me plonger dans tes réflexions d'auteur.e, je trouve ça très intéressant et enrichissant !
La trame générale de la première histoire m'a un peu fait penser à Whiplash : un film qui n'a rien, mais alors strictement rien à voir avec la magie ! mais qui pourrait peut-être t'inspirer sur le rapport maître-élève et dépassement de soi ? Te donner quelques idées ?
Quant à la 2e histoire, je t'avoue m'être demandé si tout le corps de texte était lié ou non aux premières notes (sur AB, les créatures invisibles...). Je suppose que ces quelques lignes d'incipit ne t'ont pas permis de développer l'univers de magie :-)
En tout cas, ravie d'avoir fait connaissance avec ta plume !
A très vite,
Liné
Moje
Posté le 14/08/2018
Hello!
J'ai vu ce film en cours cette année et honnêtement j'espère que le maître de Serfrane sera plus cool! L'idée que j'en ai pour le moment est celle d'un homme franchement pas convaincu par le fait d'avoir une apprentie mais qui fini par succomber devant les efforts de cette dernière. Pourtant, il se voit obligé de s'en débarasser pour continuer à gravir les échelons.
Pour la deuxième histoire, en effet, on en apprend un peu plus au fur et à mesure (enfin dans ma tête parce que je n'ai rien écrit de plus que ce qui est là), mais je ne sais pas si je vais résister longtemps à écrire le plan (si je le fais je le posterais ici par la suite)!
Merci d'être passée et à plus!
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