La réunion terminée, Liam suit son père dans son bureau.
Il perd son regard au travers des baies vitrées, tout en s'asseyant en face de son supérieur et patriarche.
- Tout les devis sont prêts, ton équipe avance plus vite que la mienne, si ça continue on commencera l'intérieur, que les murs ne seront pas terminés.
- Le job n'est pas égal, c'est une fausse avance papa. Le bureau d'étude nous fera perdre du temps et ce, au niveau de la création des plants mobilier comme des fournisseurs. Je ne vais même pas parler des dessinateurs qui se prennent pour des artistes. Je me suis posé la question sérieusement de déléguer à une équipe en freelance.
- Vu les soucis que j'ai avec les constructeurs, je te déconseille vivement de faire appelle à l'extérieur. Après c'est toi qui gère, mais comme on dit : " On est jamais si bien servi que par soi-même ! " Au moins ton équipe est de l'autre côté du couloir !
- C'est certainement pour cette raison que je finis toujours par terminer les plans moi-même.
- Haha ! Fils, tu es tout bonnement aussi artiste et perfectionniste qu'eux ! Bon tu déjeunes avec moi ? Les grosses huiles seront là pour le projet " SOTER."
- J'peux pas, j'ai un rendez-vous pour louer la mezzanine et ensuite il y a une réunion à la radio pour choisir les candidats au déplacement francophone et outre-mer.
- Tu devrais partir ça te ferait du bien, tu es blanc comme un cul, ta mère s'inquiète.
- Et c'est toi qui me dis ça !
- Dans trois mois le bureau sera au ralenti, profite-en ! Tu as trouvé à louer la mezzanine ?
- Oui.
- Je n'comprends pas pourquoi tu ne profites pas de l'appartement tout seul, je détesterais cohabiter avec des étrangers.
- Je sais. Je ne suis pas toi, je n'ai pas maman avec moi. C'est ça ou je déménage. Le loft est trop grand pour une personne seule, je m'y sens perdu.
- Trouve-toi quelqu'un. Je vais pas te dire de fonder une famille hein, mais tout de même.
Liam perd encore un instant son regard au loin par la fenêtre, avant de lui répondre.
- J'ai pas le temps pour ça.
Son père soupire en recrachant la fumée de sa cigarette.
- Tu ne le prends pas, tu sais bien que tu peux te faire seconder ici. Tu vis tes plus belles années, après tu auras l'air d'un vieux grigou ! Regarde moi !
Liam lui sourit, las.
*
Yann est perdu... Deux heures qu'il cherche l'adresse, cinq fois qu'il appelle Uzu, pour finalement se retrouver comme un con à l'attendre sous un abri bus. Le temps est pluvieux. Il se pose encore la question de savoir s'il fait le bon choix. Saint-Pierre doit être agréable à cette époque et Paris est déjà si gris, l'automne n'est pas tout-à-fait là pourtant. Il aperçoit le japonais se garer et reste là, à l'observer sans bouger. Cette démarche nonchalante légèrement chaloupée, ce visage fermé. Pourtant, Uzu ne semble avoir aucun besoin de faire d'efforts tout a l'air de lui sourire. La vie est-elle, pour certain, plus facile ? Qu'est-ce qu'un type tel que lui peut bien avoir comme problème ? Il a le choix entre vivre au japon où son père lui a trouvé un super job sans qu'il lève le petit doigt ou vivre en France auprès d'un mec qui l'aime et continuer à bosser dans un job trouvé par sa mère.
- La vie est parfois injuste, se dit Yann. Il y en a qui ont tout et ils ne s'en rendent pas comptent.
- Je te retrouve enfin ! Si Liam n'avait pas changé le lieu du rendez-vous, tu aurais sans doute eu moins de mal !
- Mon pauvre chéri, je suis dyslexique. Voilà pas que je passe mon temps à me paumer, je vais à gauche quand il faut aller à droite. Pas étonnant que je me sois retrouvé à tourner en rond ici.
- Courbevoie aurait été plus pratique avec les lignes de métro. J'aurais aussi pu te dire de me rejoindre chez Gabriel et on serait arrivé ensemble !
- Ça aurait sans doute été plus simple mais j'ai pas voulu m'imposer, Hugo n'est pas avec toi ?
- Non Gabriel l'emmène chez la nounou à quatorze heures.
Uzu a les cheveux détachés, il porte une veste en velours bordeaux, une chemise de soie noire et un slim. Nul doute que Gabriel est derrière ce look. De plus, cette veste lui appartient c'est certain, Yann en donnerait sa main à couper, il a déjà vu son ex avec. Il le suit, admirant sa superbe.
- Ha... Et donc c'est quoi ton plan ? lui demande Yann avec qui Uzu est resté très évasif.
- Un duplex grand luxe en colocation à côté d'ici. Si tu ne peux pas justifier d'un salaire, il va falloir que tu lui expliques pour ta formation et que tu lui montres ton relevé de banque et ton CV. Tu as de l'argent de côté et un bon bagage, ça devrait suffire, par contre joue pas ton relou.
- C'est qui ce type ? Et il va me louer comme ça ?
- C'est mon ex, il a confiance en moi.
Il se retourne nonchalamment l'air de rien :
- C'est pas une raison pour en profiter, tu paies ton loyer !
Yann s'arrête.
- Ton ex ? Carrément ? Et tu me balances ça comme ça ?
- C'est une vieille histoire.
- Comment ce mec peut-il être aussi ascétique ?
En suivant Uzu, Yann tente d'imaginer la tête que peut bien avoir cet ex. Petit, bridé, vieux, ressemble-t-il à Gabriel ? Il va donc faire colocation avec un autre gay. Il ignore s'il doit s'en réjouir ou en avoir peur.
À l'intérieur du petit café parisien Yann se délecte de cette fameuse odeur qui l'a séduit à son arrivée à Paris. Étrange comme certaines fragrances vous restent en mémoire, pire même, vous ramène des années en arrière rien qu'en respirant les yeux fermés. Le mélange de grenadine, de bière et de veilles cigarettes l'interpelle. Aujourd'hui interdiction de fumer dans les lieux publics, pourtant l'odeur de tabac froid persiste dans certain endroits. Les banquettes en cuir, les rideaux poussiéreux aux couleurs passées, les miroirs belle-époque, on se trouve là dans un bar typiquement parisien.
Liam attend déjà devant un énième café en lisant "Les Échos". Impressionnant jeune homme blond vénitien qui lorsqu'il se lève à l'arrivée des deux autres, fait à Yann une grande impression. L'andro se sent tout petit.
- Il mesure quoi ? Deux mètres ?
Planqué derrière Uzu, il n'ose pas lever les yeux et c'est la tête baissée qu'il serre cette main de géant. Une poigne douce et chaleureuse, une voix chaude, celle d'un homme, pas d'un post-ado. Yann est de suite troublé et un peu bête. Uzu, lui, a l'air plutôt à l'aise et affiche un air hautain.
- Je n'ai pas eu le temps de déjeuné, avoue Liam. Vous restez manger ?
Uzu dédaigne l'invitation.
- Nan, j'ai déjà mangé avec mon copain.
Yann ressent un vent frais traverser la pièce.
- Moi je serais plutôt sucré, annonce-t-il alors, pour sa part.
Liam tousse un coup puis étudie le candidat à la location avec intérêt.
- Ils ont des glaces super bonnes ici et des petits gâteaux ! lui signale-t-il au passage, les yeux pétillants.
- On est là pour l'appart... fait remarquer Uzu en remuant sur son siège.
- C'est un ronchon, déclare le blond en continuant d'observer Yann, un brin moqueur. Va donc commander, moi je vais prendre des profiteroles !
Yann pouffe, ce mec lui parait sympathique.
- Okééé et je demande à qui ? La vieille en rose qui a l'air d'une péripatéticienne ? demande Yann goguenard.
Liam ricane.
- À celle que tu veux, celle en rose ou celle à moustache, n'importe laquelle fera l'affaire !
Yann hoquète un semblant de rire puis se dirige vers le zinc, n'osant pas se retourner, il commande pour tout les deux et y attend leurs consommations.
*
- C'est drôle de le voir enfin, je me souviens de tout ce que tu m'as raconté sur le spécimen, maintenant que je le vois, je le trouve touchant. Faire tout ça par amour, c'est un peu fou. Il a l'air marrant !
- J'avoue que j'ai eu la même réaction que toi. M'enfin c'est plus par égoïsme que par amour. Je ne suis pas certain que si ton ex couchait avec ton nouveau dans ton propre lit, tu trouverais ça aussi mignon. Gabriel n'arrivait plus à supporter ça.
-...
Liam reste sans répondre l'intérêt totalement tourné vers Yann.
- Et si je suis de trop, tu le dis, grince le japonais.
- Mon ex... C'est toi mon ex, je te vois mal faire ce genre de chose. D'ailleurs prend garde, tu es très différent toi. Malgré le fait que ton mec ne supportait pas toutes ses extravagances et que ce jeune homme allait visiblement trop loin, ça risque de lui manquer.
- Tu crois ça toi ? C'est un peu la raison de leur séparation, je te rappelle !
- Tu n'es pas très démonstratif et encore moins par la parole. Il me semble, que tu as eu des soucis avec lui à ce propos dernièrement !
- Hein ? Nan ! Quand ça ?
- Quand tu es venu me voir. Ne soufrait-il pas d'ignorer si tu l'aimais ou non ? Je ne crois pas que tu en serais venu à te poser la question si tu n'avais pas vécu une quelconque pression, je me trompe ?
- ...
*
L'ambiance entre ces deux là a l'air assez tendue et pourtant ils montrent un certain intérêt l'un pour l'autre. Yann trouve curieux, les regards que lance Uzu à son ex, un mélange entre froideur et attention.
Il revient s'assoir. Rien ne l'énerve plus que cette timidité ridicule qui le prend. Ce Liam lui en impose pourtant il n'y a aucune raison.
- Alors Yann, c'est bien Yann ? Je peux te tutoyer ou tu préfères le vouvoiement ?
Yann ne trouve rien d'autre à faire que de ricaner bêtement, quelle question...
- Pourquoi ? J'ai l'air d'une vieille connasse ?
Uzu le toise, alerté et Liam perd de sa superbe en ne sachant quoi répondre.
- Hé bien voilà, suffisait d'être désagréable pour réussir à lui faire perdre cette image impressionnante, pense l'effronté réunionnais. Oui chéri, tu peux me dire TU. Voilà j'ai grillé toutes mes chances en moins de vingt secondes, croit-il aussitôt.
Liam se recule pensif dans son siège, croise les jambes, se gratte le menton et recommence à examiner l'ostrogot qui se présente en tant que candidat en devenir, à la colocation.
Pendant quelques minutes Yann n'y prend garde, persuadé que la partie est perdue d'avance, il se contente de dévorer sa glace. Mais cet examen insistant bien que tranquille, finit par le perturber.
- Suis-je si fascinant que ça ?
- Je trouve oui, avoue Liam, le visage flanqué d'un petit sourire narquois.
Yann reste la cuillère en l'air et pique un phare. Un simple " oui " et les rôles de nouveau s'inversent.
- L'appartement est très grand, trop grand pour une personne seule, reprend le blond. Je ne propose qu'une chambre mais tu auras ta salle de bain privée avec lavabo, toilettes et douche. Pour le reste, je partage ma cuisine, mon salon, le bureau et la salle à manger. J'ai ma chambre, ma salle de bain privée et mes commodités. Ça t'irait ?
Yann s'étonne quelques secondes, la proposition est toujours d'actualité malgré son comportement !
- De toute façon je n'ai rien d'autre à l'horizon, répond-t-il simplement. Après, ça dépend combien tu proposes de loyer.
- Au prix de ton ancienne chambre. Que je réclame un loyer, c'est normal, je ne suis pas le secours catholique, cependant je n'ai pas de problème financier. Par contre je cherche une vraie colocation, j'aime l'idée de vie en commun, mon souci c'est ton job, car tu vas retravailler non ?
- Bha oui, vu que pour moi l'argent ne me tombe pas du cul chéri, il est clair que c'est pas ma formation qui suffira à payer ton loyer. Je sais même pas si elle sera rémunérée.
- Et tes horaires seraient tard le soir ?
- Ça dépend... J'ai pas l'air mais je sais me faire discret quand je rentre tard. Là depuis que je suis à Paris je suis en coloc', j'ai l'habitude.
- Je ne cherche pas une personne discrète justement ! La solitude dans cet immense appart' me pèse. Si tu dors quand je pars et que je dors quand tu rentres, je n'vois pas la différence avec maintenant.
- Je ne comprends pas bien.
- Je regarde la télé seul. Je cuisine et je mange seul. Je bosse de longues heures devant mon PC seul. J'écoute de la musique seul. Je passe mes weekends seul. J'aimerais avoir une présence, quelqu'un à qui parler de temps en temps, sans forcément m'envahir.
Une réflexion désagréable brule les lèvres de Yann du genre : " Trouve-toi une occupation ! " Mais il se retient, parce que depuis des mois, lui aussi vit seul et ce, bien qu'il ait un voisin de chambrée. Il répond de faite tout autrement.
- Mon chou, la taille de l'appartement importe peu, on peut être seul dans un quinze mètres carré avec colocataire. Si ça te rassure, je ne suis pas quelqu'un qui passe inaperçu.
- C'est ce que j'étais en train de me dire en t'admirant.
Yann s'empourpre de nouveau.
On parla tapage nocturne, roulement pour la vaisselle, la lessive, le ménage, noms notés sur la nourriture et respect de l'intimité. Plus Liam souriait à Yann et plus celui-ci avait envie d'emménager. Uzu observa le phénomène dans l'ombre. Il n'avait jamais vu son ex aussi volubile et Yann autant timide, le monde à l'envers.
Yann, réussit bien à sortir deux, trois conneries dignes de lui, telle que la proposition de payer son loyer en nature, quelques réflexions pas très fines et cette habitude d'appeler les gens " Mon chéri " ou bien " Mon chou " à tout bout de champs mais rien ne s'avéra faire peur au blond.
Il ne se souvient pas l'avoir vu aussi sûr de lui. Liam a changé, peut-être pas avec lui, néanmoins en présence d'autre en tout cas, il s'avère plus mature.
- Après tout, tant mieux ! se dit-il.
Cependant, il s'interroge sur la durée de cette prochaine cohabitation. Que donnera la tornade Yann face au trop sage Liam ?
- Il est tellement " vieux jeux ", enfermé dans ses habitudes de garçon, tout le temps entouré par ses parents aussi bien sur son lieu de travail que dans sa vie personnelle.
Le côté niais et sans caractère qu'il affichait déjà il y a quelques années paraît malgré l'évolution, toujours très présent. Que fera-t-il face à un personnage tel que Yann ? Cet être aux sentiments d'écorchés vifs, faisant de lui un redoutable cynique à l'extravagance choquante, en perpétuelle crise d'ado cherchant des limites que personne ne lui donne ? Bien qu'il laisse le bénéfice du doute à Yann et qu'il ne soit pas vraiment d'accord avec ce que dit de lui, Gabriel, Uzu en est persuadé, Liam va très certainement se faire bouffer et retourner comme une crêpe. Ainsi Yann continuera à développer cette mauvaise image de lui-même.
Qu'est-ce qui le retient de les prévenir mutuellement, l'égoïsme ou le jeu ? Il aimerait parier sur le résultat d'un tel rapprochement.
La discussion entamée un peu plus tôt entre Liam et Uzu reprend lorsque Yann s'excuse afin de se rendre aux toilettes.
- Tu n'as pas l'air d'être inquiet, observe Uzu.
- Je devrais ?
- Je t'ai déjà brossé un portrait de lui, maintenant vous avez parlé, tu vois un peu où tu mets les pieds. Tu penses pouvoir le supporter à longueur de temps chez toi ?
- L'avenir nous le dira.
- ...
- Il y a des similitudes physiques entre lui et toi, une certaine finesse du corps, balance Liam l'air de rien. Niveau caractère par contre vous n'avez vraiment rien à voir.
- Pourquoi tu dis ça ? Tu espérais me remplacer ?
- Dis pas n'importe quoi, pour qui tu me prends ? Non. Seulement, je comprends que ton copain se pose des questions sur tes sentiments, tu ressembles à Yann tout en réagissant différemment.
- J'aurais jamais dû t'en parler en fait !
- Ils se sont aimé Youd'zeu et quand tu restes longtemps avec une personne, tu finis par lui ressembler un peu. Tu comprends ses réactions même les pires et quand tu aimes vraiment, certains défauts qui font partis de cette personne, finissent par te plaire. On ne peut pas en faire abstraction, soit on aime la personne avec, soit on ne l'aime plus.
- Encore faut-il les connaître...
- De quoi ?
- Non rien. Ils se sont séparés à cause de ça.
- J'ai pigé ça, pourtant c'est bien toi qui m'as dit qu'ils s'aimaient encore, alors ?
- ...
- C'est flippant non ? l'interpelle Liam.
- Quoi donc ?
- D'avoir un éventuel adversaire ! jette-t-il en se retournant pour voir Yann de dos, au font du bar attendant que les toilettes ne se libèrent.
Uzu hausse les épaules et ne répond rien.
- D'ailleurs c'est assez étrange que tu me demandes de l'aide pour qu'il puisse rester. Ça ne serait pas plus arrangeant pour toi qu'il s'en aille ?
- Ce que je souhaite c'est que Gabriel soit heureux. Il a besoin de Yann dans sa vie, dans son groupe. Quand à Yann, c'est une personne que j'apprécie. Je suis confiant. Je ne pense pas qu'il cherche à me nuire. Il est spécial mais ce n'est pas une mauvaise personne.
- Tu es si sûr de toi. Je suis étonné que tu te préoccupes de quelqu'un d'autre que toi-même, ça m'énerve !
Uzu est gêné par cette situation, le contentieux entre Liam et lui demeure un peu trop important sans doute, pour en faire table rase en claquant des doigts.
Le blond reprend le cours de son explication visant à avertir son ex, des écueils possibles de cette relation si nouvelle pour celui-ci.
- De plus si les couples finissent par se ressembler à la longue, il est probable que ton Gabriel réagisse un peu comme Yann, tu vois ? Si tu ne fonctionnes pas de cette manière, ça va poser un problème.
- Tu tentes de me foutre le moral à zéro ? Je vais pas me transformer en ce que je ne suis pas !
- Non, je t'aide au contraire ! Personne ne te demande d'être quelqu'un d'autre, et surtout pas ! Bien que je trouve qu'être un peu plus expansif ne te ferait pas de mal. Tu le dis toi-même, ils ont rompu à cause de sa façon de se comporter ! C'est une nécessité pour ton mec de se reposer de tout ça ! Mais, parfois, il aura besoin d'une sorte de piqure de rappel, tu comprends ? Et toi, tu devras te faire aussi à l'idée que les comportements que ton copain n'aimait pas chez son ex, soient un minimum présent dans ses propres façons de faire à lui. Et qu'il les recherche un peu chez toi.
- Je n'comprends pas la moitié de ce que tu me racontes ! C'est compliqué les relations pff !
- Tout se paie ! Dans la vie on n'obtient rien en claquant des doigts ! Il faut donner de soi. Tu es heureux ?
Uzu sourit bêtement.
- Et bien ce bonheur, il se paie. C'est un long travail que d'entretenir l'amour, de construire un avenir à deux, de prendre soin d'une relation.
La fin de sa phrase sent l'amertume.
- Ça vaut le coup, ajoute-t-il. Tu as aussi la possibilité de retourner à ta vie d'avant ou rien ni personne ne te posait problème et rester seul.
Un silence s'impose de quelques secondes.
- Tu trouves que je ressemble à Yann ?
- Juste un petit quelque chose, physiquement, ou pas, je ne sais pas une sorte de fragilité négative.
Légère pause encore, ils observent Yann qui disparait à l'intérieur des sanitaires.
- Je voudrais te dire un truc, j'aimerais que ça ne te blesse pas, ça n'est pas le but. Je peux ? demande Uzu de but en blanc.
- Vas-y, je crois qu'on est plus à ça près.
- Je ne t'ai jamais aimé. Je ne t'ai jamais vraiment apprécié pour ce que tu étais avant, mais en vérité, je crois que toi non plus. Je veux dire que je ne suis pas celui que tu as cru. Pour ma part, j'ai pas vraiment d'excuse, je n'ai pas pris la peine de te connaître, si je l'avais fait, je suis certain que l'histoire aurait été différente. Tu es quelqu'un de bien. De ton côté, je crois que tu t'es voilé la face à mon sujet !
Liam fait la moue, laisse apparaître une petite ride au milieu du front et une grimace crispée.
- Je m'en veux de t'avoir aimé, tu n'en valais pas la peine, réplique-t-il au japonais impassible. Pense ce que tu veux, j'ai toujours su qui tu aurais pu être et c'est cette personne que j'ai poursuivi. Pour mon malheur, tu l'es juste devenu pour quelqu'un d'autre.