Adieux

Par Rachael
Notes de l’auteur : Bientôt le départ...
_____ 
Le lendemain matin, Arthen fut réveillé assez tard, par une Oanell survoltée, qui le secoua en riant.

- Fainéant ! Tu crois qu'on va rassembler tes affaires pour toi ? On part à Arcande ! On n'a pas trop de la journée pour préparer. Et on n'a pas de temps à perdre. Il faut se mettre en route dès demain.

Il écarquilla les yeux. Il n'avait jamais vu sa mère si enthousiaste. Elle paraissait jeune et insouciante comme ça ! Il eut envie de lui dire qu'il la trouvait belle, avec ses cheveux blond roux, qu'elle portait mi-long, virevoltant autour de sa tête, quand la nouvelle atteignit son cerveau encore endormi :

- C'est vrai, maman ? Je n'ai pas rêvé ? On y va tous les trois ? Sio, toi et moi ? À Arcande ?

Les brumes du sommeil s'évaporèrent à toute vitesse, laissant apparaître Arcande telle qu'Arthen l'avait façonnée minutieusement, dans l'ardeur de son imagination : magnifique et intrigante.

- Hum, Mon fils est agile comme un écureuil, mais curieux comme un chat !

Le garçon rougit et se justifia :

- Vous parliez si fort que ça m'a tenu éveillé. Mais je n'ai pas tout entendu, à part Lestrenn qui disait que j'étais trop jeune. Pff ! Je me demande quel âge il faut avoir selon ses critères !

- L'âge de se défendre seul. Tu crois en être capable ?

Oanell le taquinait. Elle savait qu'il avait pris très au sérieux les cours dispensés par les adultes du village : combat, maniement des armes, neutralisation d'un adversaire. Il tirait mieux que tout autre du clan familial, à part sa mère. Il visait avec calme, retenait son souffle ; la balle filait droit vers la cible. Il avait également tiré deux fois avec une arme à énergie, une de celles laissées par les Spatiaux, et constaté qu'il parvenait à transpercer l'objectif avec autant de sûreté. Au combat à mains nues, il était désavantagé par sa petite taille, mais compensait par une technique maîtrisée. Il ne lui restait plus qu'à grandir, comme son cousin Kiezan, qui l'avait depuis un an dépassé de quinze bons centimètres...

Il prit un air fâché, en croisant les bras. Oanell éclata de rire. Décidément, la perspective d'aller là-bas la mettait en joie, faisant pétiller ses yeux dorés. Son fils aimait tant la voir si gaie, elle d'habitude plutôt mélancolique, qu'il ne la lâcha pas de la journée. Pour être honnête, il n'arrivait pas non plus à croire en sa bonne fortune. Il avait l'impression que s'il la quittait des yeux, elle s'enfuirait sans lui à la ville, comme de nombreuses fois par le passé.

Tout le monde s'affaira en préparatifs divers. Maintenant que la décision était arrêtée, Oanell et Siohlann ne voulaient plus attendre. Un jour de retard dans l'envoi d'une patrouille pouvait signifier une attaque de la ferme. Une énergie débordante les animait, se communiquant au reste de la famille, pourtant peu ravie de les voir s'envoler.

 

****

 

Ils avaient prévu de se mettre en chemin le lendemain matin, dès l'aube, pour couvrir la plus longue distance possible.

Les adieux revêtirent une certaine solennité, ce qui sembla étrange à Arthen. Il avait pensé qu'il s'agissait d'un petit séjour, mais peut-être qu'il s'était mépris... D'habitude, quand sa mère partait à la ville avec Sio, ils ne s'absentaient pas plus de deux semaines.

Arthen se mordit la lèvre, conscient de sa stupidité : puisqu'il venait avec eux, ils n'avaient plus de raisons de se dépêcher ! Là-bas, ils pourraient à loisir profiter de la famille, que le garçon n'avait pas vue depuis une éternité. Il avait mis du temps à comprendre quelque chose à la famille de sa mère : Oanell et Sio, après la mort de leurs parents, avaient été élevés non par Lestrenn, mais dans l'autre branche familiale, par Trisbée, la sœur jumelle de leur mère. Celle-ci tenait avec son mari la principale auberge d'Arcande. C'est là qu'ils allaient loger durant leur séjour.

En guise de cadeau d'adieu, Lestrenn donna à son petit-neveu un fusil léger et maniable, orné d'une plaque à son nom. Une reconnaissance de ses performances au tir : Kiezan, à quatorze ans, ne possédait pas encore le sien !

- Pour que tu puisses te défendre, grogna Lestrenn de son ton bourru habituel. Tu es bien trop jeune, mais plus mûr que ton chenapan de cousin, je dois bien l'avouer ! Il attendra, conclut-il en haussant les épaules, son regard grave survolant Kiezan. Il ne craint rien ici, avec nous tous.

Il donna à Arthen une tape sur le dos, et ébouriffa affectueusement ses cheveux noirs. Le garçon se sentit heureux et ému. Son grand-oncle Lestrenn se montrait d'habitude assez avare de compliments ou gestes tendres ! Pourtant, un lien spécial existait entre eux deux, tout en subtilité. Lestrenn n'avait jamais traité Arthen autrement que ses petits-enfants. Il n'avait jamais fait de réflexions sur ses yeux bleu foncé, qui le distinguaient du reste de la famille. Il ne l'épargnait pas plus que les autres, mais il s'intéressait à lui. Le garçon avait souvent remarqué son regard sur lui, bienveillant et attentif...

Son cœur se serra ; ce cadeau précieux confirmait ses suppositions sur la durée du séjour à Arcande. Qui sait quand ils reviendraient ! Nulle date de retour n'avait été mentionnée. Il se sentit idiot de ne pas avoir posé la question à sa mère.

Arthen embrassa tout le monde, jusqu'au petit dernier dans son berceau. Même Kiezan, son infernal cousin, l'air un peu envieux, vint lui serrer la main, pour faire « adulte », et lui murmura à l'oreille :

- Eh, l'explorateur ! Si tu vois le monstre, tu m'envoies une photo ?

- Ah, ah, cours toujours ! Les communications avec la ville coûtent trop cher, t'auras qu'à te déplacer, pantouflard, si t'es curieux... répliqua-t-il sur le même ton badin, mais sans réelle ardeur.

 

****

 

Les premiers rayons du soleil faisaient étinceler les toits de pierre noire de la ferme quand Arthen la perdit de vue. Le cœur lourd, il prit conscience qu'il quittait pour de bon la maison dans laquelle il avait grandi, lieu de tant de souvenirs, de jeux partagés avec ses cousins, de récits au coin du feu...

Mais après tout, Arcande l'attendait. Et avec sa mère et Sio, ainsi que l'arme qu'il serrait avec émotion, il était prêt à aller affronter les souilleux, les nazgars et autres monstres de cette terre.

 

 

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Olga la Banshee
Posté le 11/01/2018
J'aime beaucoup cette famille, il y a quelque chose de très vrai et de très vivant. Je sens que les personnages vont devenir trèèès vite attachants ! Et ils ne sont pas clichés du tout, c'est super.
Un détail, une phrase où j'ai un peu bugué (mais je chipote) : "Elle paraissait jeune et insouciante comme ça !"  J'ai une sensation de manque. Comme elle paraissait jeune ? Elle paraissait si jeune ? 
Rachael
Posté le 11/01/2018
Allons bon ! j'ai plein de commentaires et seulement un seul message de FPA aujourd'hui...
Merci pour ta lecture !  
Elka
Posté le 09/04/2016
Salut Rach !
Tu ne m'en veux pas si je ne commente pas chapitre par chapitre ? Je crains n'avoir pour l'instant rien à dire sinon des félicitations <3
J'ai trouvé ton premier chapitre excellent. Cette découverte de cadavre est tellement... improbable. Je sais que c'est un roman pour plus jeune et je suis d'autant plus admirative de ta façon de raconter aussi bien et simplement. Cette découverte macabre, ce peuple d'alter (<3 j'aime tellement l'idée !), les télépathes...
Les infos se suivent mais en nous perdent pas. A la rigueur j'étais un peu embrouillé sur la joyeuse tribue d'Arthen mais je crois que c'est surtout parce que j'étais fatiguée à ma lecture "xD (je crois cependant que tu répètes dans le chapitre 2 que Lestrenn est le patriarche. Vu la longueur du chapitre, une fois (la première) suffit :))
Parlons-en de cette tribu d'ailleurs ! On y passe vite, pourtant on sent l'amour dans lequel Arthen a grandi et je suis aussi triste que lui de quitter cette maison. Tu nous présentes de sacrés personnages ! Si j'ai eu un pincement au coeur en quittant Lestrenn, je sens que je vais aimer Sio <3 Son rapport à Arthen me plaît beaucoup !
Arthen qui se révèle donc être un enfant doué, curieux et vif. Sa façon de considérer le cadavre avec recul m'intrigue. Je me dis aussi qu'il est peut-être télépathe mais je lirai la suite pour savoir !
Un gros bravo pour ce démarrage d'histoire en tout cas <3 Je n'en entends que du bien depuis longtemps, et je crois déjà comprendre pourquoi !
Rachael
Posté le 09/04/2016
Hiiii ! coucou, c'est chouette de te voir par ici !
Pour quelqu'un qui n'a rien a dire, tu arrives quand même a dire pas mal de trucs ! XD
On quitte vite Lestrenn, mais je l'aime bien ce vieux grognon, alors il est prévu qu'il revienne dans l'histoire, mais pas dans ce tome... 
Merci pour les félicitations, j'espère que ces premiers chapitres te donneront envie de continuer, même si tu n'es pas exactement dans le coeur de cible (t'es, comment dire, un peu trop vieille ? ^^)
(Meuh non, c'est pour rire !)
 
Sierra
Posté le 05/06/2014
Bon, me revoilà, sans vraiment grand-chose à dire de ce chapitre : il m'a paru extrêmement court ! Le départ à Arcande se fait tout en douceur, on sent un réel attachement entre tous les villageois, c'est assez étonnant dans un monde post-apocalyptique comme celui-ci, et pourtant c'est parfaitement en harmonie avec le ton de ton récit.
Arthen me donne l'impression d'être un gentil petit garçon, sensible et intelligent, même malgré le peu d'informations que tu nous livres à son sujet. C'est un choix de ta part de ne t'apesantir sur aucune description physique ? Attention, ce n'est pas une critique, juste une simple curiosité :) Ça fonctionne d'ailleurs bien, je n'ai pas tellement de problème à imaginer tout ce petit monde !
Bref, je ne m'éterniserais pas : je suis sous le charme des Héritiers Célestes, ça y est ! 
Rachael
Posté le 05/06/2014
 Coucou Sierra,
C'est vrai que je n'ai pas beaucoup détaillé la famille d'Arthen, d'un point de vue physique. Quant à lui, on en sait un peu plus mais pas énormément, par de petites choses glanées au passage (agile, mince, yeux bleus, cheveux noirs). C'était un choix pour lui, parce que c'est toujours un peu délicat de détailler le personnage qui raconte : le coup de se regarder dans la glace et de se décrire, ça manque pas mal de naturel... Et puis, je voulais avancer vite dans le récit, mais là encore, n'ai-je pas été un peu vite, ça fait partie des questions que je me poserai en relisant...
Merci pour ton commentaire, ça me fait réfléchir utilement à ce qu'il faudra que je regarde attentivement à ma prochaine relecture :)
Lyrou
Posté le 21/04/2014
hello!
toute cette ponctuation rend le texte très vivant! il y a juste une chose que je ne comprend pas : pourquoi il partent si longtemps si ils doivent seulement convaincre une patrouille de se rendre à la ferme pour les protéger des "souilleux",des voleurs...? m'enfin, peut être que ce sera révélé dans les prochains chapitres!
Rachael
Posté le 21/04/2014
Coucou Lyra,
Oui, oui, tu a raison de te poser la question, Arthen se la pose aussi, et il va vraiment la poser à son oncle et sa mère dès le chapitre suivant ! Donc, réponse très vite.
Ponctuation ? tu parles des dialogues du début du chapitre ? 
Au fait, tu n'as pas à te sentir du tout obligée de laisser un commentaire à chaque chapitre si tu continues la lecture.  Une petite impression de lecture de temps en temps, ca m'ira très bien (^_^)
 
♥♥
 
 
Luna
Posté le 13/01/2014
Je suis lancée ! Et encore un chapitre de dévoré. Je tombe des nues, tout comme Arthen je ne pensais pas que son séjour serait aussi long ! Mais j'imagine que tout ça est lié avec ce que les adultes lui cachent... je suis persuadée qu'ils en savent plus que ce qu'ils ne disent à son sujet. Quelque chose me dit qu'Arthen va être embarqué dans une sacrée aventure...<br />
<br />
J'ai adoré cette image : "Les brumes du sommeil s'évaporèrent à toute vitesse". C'est... beau. Tout simplement ! C'est que j'aime particulièrement dans ton écriture : elle n'est pas très complexe, mais elle est loin d'être simpliste, au contraire ! Les phrases coulent toujours bien, et quelquefois on tombe sur de jolies petites métaphores, pour le plaisir des yeux et des oreilles.<br />
<br />
Cette fois-ci j'ai une toute petite remarque de forme. Même si je ne suis pas certaine de moi (souvent en lisant je découvre pas mal de nouvelles expressions), je préfère t'en faire part :<br />
- "On n'a pas trop de la journée pour préparer" : je comprends le sens de la phrase, mais la formulation me paraît étrange, j'ai un peu buté dessus en la lisant.<br />
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À bientôt pour la suite :) d'ailleurs je crois que je vais m'y replonger dès demain, j'ai un peu de temps et Les Héritiers Célestes sont assez addictifs en fait ;)
Rachael
Posté le 13/01/2014
Hello,
Oui, c'est sûr, ils en savent plus qu'ils n'en disent, ces méchants adultes ! Arthen commence tout juste à réaliser qu'on lui cache pas mal de choses, en fait... 
C'est vrai que je privilégie souvent les phrases courtes, par goût (même si en tant que lectrice, j'apprécie aussi d'autres styles), et peut-être aussi par peur de casser le rythme avec des phrases trop complexes (comme celle-là, qui tortille un peu trop...).
Mais en écrivant, je ne me pose pas trop la question à vrai dire (se gratte la tête...). 
Ca me fait vraiment plaisir que tu dises que c'est addictif... Je crois que c'est le plus chouette compliment qu'on m'ait fait jusqu'ici.  *_*  
Surtout ne te censure pas, si tu as envie de contiuer  (^_^)
Pour la phrase que tu relèves, je vais regarder si c'est bien correct... 
 
Liné
Posté le 30/10/2013
Moi aussi je veux partir à Arcande, moi aussi ! o/ <br />
<br />
Plus sérieusement, j'aime la manière que tu as de nous tenir en haleine. On sent que notre héros va en subir des vertes et des pas mûres, que pour le moment il est tout content au milieu de sa famille mais que cela ne va pas durer et, pourtant... Je veux qu'il aille se frotter aux Nazgars et à d'autres créatures ! J'ai vraiment hâte d'en savoir plus. Jusqu'à présent, tu nous as posé les bases de ton récit, et je suis curieuse de savoir ce qui se trame en ville... <br />
<br />
Ton héros me fait un peu penser à celui des Contes de Terremer (probablement à cause de son jeune âge, de son nom, du fait qu'il se rende dans une grande ville inconnue). <br />
<br />
Quant à ton style, ma foi il est toujours aussi impeccable et épuré (dans le sens "accessible aux jeunes lecteurs", comme tu me l'expliquais dans mon dernier commentaire concernant le cadavre du premier chapitre). Je n'ai repéré qu'une seule faute :<br />
<br />
"D'habitude, quand sa mère partaient à la ville"<br />
<br />
Merci pour cette lecture, et à très bientôt !<br />
Liné ~
Rachael
Posté le 29/08/2019
Tiens, un commentaire en souffrance !... mea culpa
EryBlack
Posté le 15/09/2013
Coucou Rachael ! J'ai pris trop de retard sur mes lectures, j'essaye humblement de me rattraper ce week-end >.< 
Un chapitre court mais étrangement agréable à lire, j'ai l'impression de reconnaître des éléments de ma propre vie dans ces préparatifs de départ. L'impatience, l'appréhension, les adieux... C'est très bien conté, vraiment :D
Quelques petites remarques à propos de l'écriture, juste pour améliorer encore si c'est possible ^^
- "Il écarquilla les yeux !" Je trouve qu'un simple point fonctionnerait mieux, vu qu'il y a déjà une phrase exclamative après
- "Une reconnaissance de ses performances au tir ! Kiezan, à quatorze ans, n'avais pas encore le sien !" Plutôt que de poser deux phrases exclamatives côte à côte, tu pourrais les séparer par " : ". Trop de points d'exclamations m'essoufflent à le lecture ! Mais ce n'est que mon avis perso ^^
Je chipote, hein ^^' On devrait m'appeler chipoteuse-en-chef :P Mais j'espère que ça te sera utile.
A très vite pour la suite ! 
Rachael
Posté le 15/09/2013
Salut Ery,
Je suis contente que ce chapitre te plaise. :D
Les (vrais) départs, se sont toujours des moments particuliers, des ruptures où on laisse quelque chose de connu pour quelque chose qui l'est forcément un peu moins... D'où ce mélange de regrets et d'anticipation. Je suis ravie si tu l'as senti dans le texte, ca veut dire que je n'ai pas trop mal réussi à le faire passer...
Tu as parfaitement raison de "chipoter", j'ai tendance à abuser des points d'exclamation sans trop m'en apercevoir. Et comme tu dis, trop, ça tue l'effet. Je pars en chasse des "!" surnuméraires...
Merci pour ta lecture, et n'hésite pas à "chipoter" sur la suite ;)
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