Hugo suivait Fostine dans les rues de Lämird, tentant d’imiter sa démarche chaloupée semblable à celle de tous les habitants de la ville. Il lui semblait que les pieds de la rousse trouvaient d’eux-mêmes un chemin au sec, se posant naturellement sur le moindre îlot pavé émergeant de l’océan d’eau sale, là où les siens, cherchant à maintenir son rythme rapide, s’y immergeaient invariablement. Si bien qu’il lui était difficile de suivre tout ce qu’elle lui disait.
La figure de ce Léonce dans le cahier semblait avoir dissipé toute sa méfiance. Pourtant, elle ne le connaissait pas vraiment, lui avait-elle dit, tout au plus avait-il mangé quelques fois à la brasserie, mais elle assurait pouvoir le retrouver. Hugo avait l’impression qu’elle attendait depuis longtemps d’avoir une bonne raison de le chercher, une impatience mal dissimulée rendait sa voix plus aiguë et ses yeux plus dansants. Cela ne s’annonçait pas simple pourtant : pour le retrouver, lui avait-elle expliqué, il suffisait de suivre les trois étoiles. Comme Hugo levait la tête vers le ciel voilé de la fin de l’après-midi, par pur réflexe plus que par réflexion, elle poussa un soupir feint, et lui asséna :
– Vous, les tactiles, vous êtes tellement terre-à-terre. Vous ne voyez pas ce qui est pourtant sous votre nez !
Et elle lui avait montré, caché sous une encoignure, un symbole étrange à la couleur passée. Sans qu’il sache d’où elle l’avait tiré, Fostine repassa avec une craie le dessin : un œil barré surmontait une flèche pointant derrière eux.
– Ça veut dire quoi, ça ?
– Ça, ça signifie que la ruelle dont on vient n’est pas visible des sentinelles.
– Comment c’est possible ? Les sentinelles voient tout, partout ?
– À Ardtus, peut-être, mais ici, c’est parfois un peu plus difficile. Et, ajouta-t-elle d’un ton presque narquois, tout le monde ne leur facilite pas la tâche.
Et, semblable aux illusionnistes aux manches pleines de surprises, elle tira d’une poche un immense foulard sombre qu’elle enroula autour de sa tête à la mode des lavandières. Les boucles plaquées sous le tissu elle faisait plus que son âge, et ressemblait maintenant à une anonyme travailleuse aux mains rougies par l’eau chaude.
Ainsi grimée elle reprit son chemin. Hugo peinait à la suivre, et pas seulement pour éviter les flaques.
– Pourquoi tu te caches la tête ?
– Pas envie que tout le monde sache tout ce que je fais.
Elle réajusta une boucle récalcitrante sous un pli du tissu, et poursuivit sa marche. Hugo ne comprenait toujours pas.
– Mais pourquoi ? Tu ne fais rien de mal ! Enfin, j’espère ? C’est quoi d’abord ces symboles, que tu traces ?
Sans quitter son cap, sans presque ralentir l’allure, deux autres dessins avaient été ravivés à la faveur de leur passage sous les doigts de Fostine. Se retournant à demi, elle lui répondit, du ton qu’on prend pour expliquer aux petits enfants pourquoi il ne faut pas abuser des bonbons au miel :
– Ce n’est pas ce qu’on voit que tu fais, qui importe, mais ce qu’on veut voir. Tu pourrais être aussi innocent qu’un bébé, suffit qu’une sentinelle t’en veuille, et elle trouvera mille raisons de te faire tomber. La seule solution, c’est qu’on ne te voit pas. Et ça, conclue-t-elle en pointant sa tête enturbannée, est la meilleure façon qu’on ne me voit pas, moi.
Hugo voulut répliquer, mais il se tut. Plus tôt, avant tout cela, il se serait récrié, arguant l’impartialité des sentinelles, la droiture de l’Ordre Panoptique. Sauf que depuis, il en avait fait les frais, enfin, plus Philidor que lui-même. Et il pouvait difficilement nier que si les tours-sentinelles ne l’avaient pas retrouvé, lui, au milieu de la ville, le fils du Régent serait en ce moment même parmi eux, afin de rencontrer Léonce.
Léonce ! Et si c’était lui la raison poussant Fostine à se cacher ainsi ? Qui était-il, après tout ? Il s’apprêtait à lui poser la question lorsqu’elle s’arrêta net, le déséquilibrant.
– Là, regarde, je savais que je les avais vus ici !
Tout excitée, elle pointait quelques traits tracés au charbon. De son côté, Hugo tirait sur sa chaussure, les orteils recroquevillés à l’intérieur afin d’être sûr qu’elle adhère plus à son pied qu’à la vase dans laquelle elle s’était enlisée, et tentait en même temps de reconnaître le dessin. Il gagna contre les sables mouvants dans un bruit de succion peu élégant, et feignit d’être très intéressé :
– On dirait trois soleils alignés, ou bien…
– Ce sont les trois étoiles de Léonce ! On doit plus être très loin ! Viens, on continue par là !
« Par là » pointait directement vers le quartier de Montcaï, entrelacs de rues mornes aux maisons délabrées. Il sembla à Hugo que la brume prenait une densité différente, plus opaque, plus solide. Il n’y voyait plus grand-chose, mais Fostine ne paraissait pas gênée outre mesure, et Hugo se demanda si, en plus d’être goûteuse, elle n’était pas voyante. Après tout, elle avait admis être une double-talent.
xxx
L’aéronef s’était arrêté, gîtant sur un côté. Il vacilla un peu lorsque les deux garçons se remirent debout, mais resta suspendu dans sa position précaire. Ils se relevèrent avec précaution, époussetant leurs vêtements et leurs cheveux des éclats de verre et des aiguilles de pin. Un vent froid charriant une odeur résineuse envahissait la cabine par la vitre cassée. Le ballon, toujours en partie gonflé, entraînait dans ses oscillations l’habitacle. Il leur fallait le quitter, et vite !
Philidor saisit son sac tandis qu’Hugo ouvrait tant bien que mal la porte. La descente, de branche en branche, jusqu’au sol, les laissa essoufflés et pantelants, et ce n’est qu’une fois assis sur le tapis d’aiguilles sèches, le dos appuyé contre un tronc râpeux, qu’ils purent se considérer en sécurité.
Leurs halètements se calmèrent peu à peu, et Hugo rompit le premier le silence :
– Et maintenant ?
– Maintenant, et bien, il n’y a plus qu’à marcher.
– Tu veux marcher jusqu’à Lämird ?
Philidor rit :
– Non, jusqu’au village qu’on a vu ! On devrait pouvoir trouver de l’aide, un moyen de transport. Car lui, dit-il en pointant son ballon, il ne revolera plus.
Et sans un regard en arrière, il se redressa. Il s’apprêtait à partir, lorsqu’une hésitation d’Hugo le freina :
– Et bien, quoi, viens ! On ne peut pas rester là !
– Tu crois que c’est bien prudent d’arriver ainsi, dans un village de mineurs où on ne connaît personne ? Habillé comme ça ?
Philidor baissa les yeux sur ses vêtements. Malgré la terre et la poussière, le vert profond du velours le reliait du premier coup d’œil à ses origines nobles. Il y avait une chance infime que les sentinelles dans la tour n’aient pas assisté à leur accident. Mieux valait rester discret. En un tour de main, Philidor retira son sac, sa veste, et la retourna sur l’envers. La doublure, d’un marron passe-partout, ferait bien l’affaire.
Ils se dirigèrent au jugé vers l’orée de la forêt que le soleil déclinant dessinait au travers des branches. Ils l’atteignirent au moment où l'astre bascula derrière la montagne, et débouchèrent dans un pré laissé à l’abandon depuis peu, sur lequel les arbres regagnaient déjà du terrain. Sur un chemin longeant le versant le plus proche, une silhouette, petite et mince, semblait venir à leur rencontre.
Il ne leur fallut que quelques minutes pour la rejoindre. C’était un garçon, plus jeune qu’eux, malingre et noiraud. Sans leur laisser le temps de parler, il les accosta :
– C’est vous, qu’étiez dans le ballon ?
Sa question n’attendait pas de réponse, et Philidor prit son plus beau sourire pour lui demander :
– On cherche un endroit où passer la nuit, peut-être que tu peux nous emmener au village ? Je m’appelle Philibert, et lui c’est Hugo.
– Philibert...
Il scruta attentivement le ciel, dans la direction de l’accident, mais ne fit aucun commentaire. Il se tourna derrière lui, puis à nouveau vers les deux naufragés. Hugo se sentit détaillé, et réprima une remarque acerbe. Il n’aimait pas ce garçon, et détestait dépendre de lui. Il n’avait pas l’air d’un tactile, plus probablement un goûteur. Une légère aversion le fit frissonner malgré lui. Philidor, lui, semblait à son aise comme à son habitude. Le garçon lâcha :
– Venez.
xxx
Philidor était ravi. Il était d’un naturel optimiste, de l’optimisme naïf de ceux n’ayant jamais connu les revers de fortune ni les soupes trop claires. Que son ballon se soit retrouvé accidenté en pleine forêt, bien trop loin de sa destination, ne lui apparaissait pas comme une embûche plus qu’incommodante, mais comme une occasion fabuleuse de voir de plus près le village survolé précédemment. Et rien, ni la mine sombre de son compagnon de voyage jetant des regards fuyants à Samson, ni la perspective de passer la nuit sur une couche de fortune, n’aurait pu calmer ses ardeurs.
Le dénommé Samson les avait conduits sans dire un mot le long du chemin, en lisière de forêt et à fleur de falaise, jusqu’au passage d’un petit col. Là, le village s’était découvert, accroché au coteau, ses maisons saillant tels des champignons sur une souche pourrie. Dominant les habitations, une tour-sentinelle, bâtie au plus haut point en un périlleux porte-à-faux, surplombait la ville et étendait son ombre au soleil couchant plus loin que n’importe quelle autre construction, à l’exception du chevalet de mine.
Plus bas, au creux de la vallée, une rivière étroite abritait quelques maisons, et d’imposants docks de chargement. Quelques péniches assoupies en amont fumaient encore. Combien de personnes vivaient là, ils n’auraient su le dire. Mais probablement plus que ce qu’ils avaient cru. Vu de haut, tout semble plus petit, plus insignifiant, en particulier si l’on parle de mineurs.
Les villages comme celui de Samson, il y en avait plein les montagnes. Quand on naît goûteur, les options pour exploiter son talent se comptent sur les doigts d’une main : en ville, on trouve toujours un tenancier pour vous engager comme apprenti dans les cuisines, mais en dehors, c’est une autre affaire. Depuis aussi longtemps que les goûteurs existent, leur vie rejoint celle de la terre.
Pourtant, faire pousser n’est pas vraiment le problème, tout pousse à foison. La difficulté vient plutôt de sélectionner ce qui doit croître, ce qui est comestible, sur ce qui ne l’est pas. Si bien que de cultivateur de carotte on se retrouve souvent bûcheron. Face à cette vie de misère, quelques goûteurs, plus malins, se mirent à goûter la pierre elle-même : là où leurs ancêtres repéraient dans la terre les nutriments adaptés à leurs cultures, eux trouvèrent dans la roche les particules infimes des minerais que d’autres savent exploiter. De fermiers, ils devinrent mineurs. Et de fait, de bûcherons, ils devinrent casseurs de pierre. Si bien que leurs vies, d’étriquées, en devint dans bien des cas misérables.
Mais tout ceci restait bien loin des préoccupations de Philidor. Et plus ils s’approchaient des maisons, plus leur trajectoire déviait vers la forêt. Au fur et à mesure que la déclivité se réduisait, en direction de la rivière, les arbres reprenaient leur droit. Ce fut vers l’un d’entre eux, juste à la lisière, que leur jeune guide les mena.
Ce que Philidor avait d’abord pris pour un gigantesque épicéa s’avérait être plus que ça : dans le bois, au cœur même du tronc de l’arbre mourant était creusée la maison de Samson. Leth, sa mère s’y trouvait déjà, petite femme vieillie avant l’âge aux mains recroquevillées telles des veuves noires sur une étoffe à la couleur passée qu’elle ravaudait pour ce qui paraissait être la centième fois. Elle n’avait pas trop posé de questions, du moins pas à haute voix, et celles au fond de ses yeux semblèrent trouver satisfaction dans les explications sommaires de son fils puisqu’elle les avait laissé entrer.
Un mauvais feu de bois vert éclairait chichement la petite pièce circulaire depuis l’âtre empierré, étouffant quelque peu l’atmosphère. Ils avaient mangé un repas trop frugal, bien que Leth eut fouillé au fond d’une niche creusée à même le tronc pour en dégager une conserve de légumes afin d’agrémenter le ragoût d’écureuil. Le silence pesant tout autant que la rareté des mets avait abrégé le souper, et même l’enthousiasme de Philidor s’était heurté aux manières rugueuses de leurs hôtes. Il semblait qu’ici, on ne parlait pas pour ne rien dire.
Le lendemain matin à leur réveil, Leth déjà partie leur avait laissé un petit pain et quelques noix. Philidor piaffait d’explorer les environs, les habitations, les mines, les gens, mais en quelques mots Samson l’en avait dissuadé :
– On est pas très bien vus. Y faut pas trop qu’on sache qu’il y a des étrangers chez nous. Surtout des… des pas goûteurs.
Hugo, occupé à tisonner le feu, avait dressé l’oreille à la réplique de Philidor :
– Et comment tu le saurais, qu’on n’est pas des goûteurs ? Ce n’est pas écrit sur nous que je sache ?
– Non, et justement, personne ici sait lire. Mais il y a pas besoin. Toi, dit-il en pointant un regard appuyé, son premier regard franc, sur Philidor, toi, t’es un voyant. Il y a qu’à voir comment tu scrutes tout, et comment tu entends rien.
Pas le moins du monde outré, et sans vraiment se soucier de maintenir un semblant de couverture, Philidor rit, et lui demanda :
– Et toi, tu es un goûteur ?
Samson se détourna à nouveau :
– Pas sûr que tu sois un voyant en fait, si tu penses ça.
Philidor le scrutait. Il savait bien que ni le jeune garçon ni Leth n’étaient des goûteurs. Sa mère, une tactile, probablement, à voir comment elle glissait ses mains sur les tissus colorés qui pendaient sur des fils accrochés près du plafond. Mais Samson ? Il cassait les dernières noix du bol, deux par deux, au creux de sa main, et ses minces doigts habiles fourrageaient dans les demi-coques pour en extraire le fruit.
– Tu es un sans-talent, n’est-ce pas, c’est pour ça que vous êtes à l’écart, ta mère et toi ? demanda Philidor.
Fermant les yeux à demi, prunelles de chat luisant entre les fentes amincies de ses paupières, il tenta :
– Ton père était mineur, non ? C’est courant les accidents de mine, il paraît.
Pour toute réponse, Samson renifla, puis se frotta vigoureusement le nez avec la bordure de sa manche. Philidor s’en voulait d’un seul coup, mais cela ne dura pas. Changeant de sujet, il désigna Hugo :
– Et lui, il est quoi à ton avis ?
Le visage de Samson se fronça un peu plus. Jouant de l’index le long de son assiette jonchée de coques de noix, il lâcha du bout des lèvres :
– Un tactile ?
C’était moitié une affirmation, moitié une question. Philidor chercha Hugo du regard, mais celui-ci gardait la tête obstinément baissée vers les baises, remuant un feu mourant qui n’avait pas besoin de l’être. Il hésita, après tout, ce n’était pas à lui de dire quoi que ce soit. Sauf que s’il attendait de ces deux-là qu’ils échangent une parole, la forêt les aurait recouverts avant qu’ils ne se soient ne serai ce que regardés.
– C’est un tactile, oui. Et aussi un otique.
Samson rentra la tête dans les épaules et, lâchant ses noix, croisa les bras en un geste de défiance. Sa répartie ne se fit pas attendre :
– Un tactile et un otique ? Comment c’est possible ?
– Tactile par son père, otique par sa mère. Il a hérité des deux.
Samson ne quittait pas des yeux Hugo désormais, qui lui même feignait de ne rien entendre. Ce qui concordait plutôt mal avec ce que Philidor venait d’affirmer. Sans tourner la tête, il prit enfin la parole :
– Hier soir, avant que tu nous rejoignes à l’étage, ta mère t’a parlé. Tout doucement, elle t’a demandé pourquoi tu nous avais ramenés ici. Tu lui as dit, pour le ballon, que tu nous as vus nous échouer dans les arbres. Tu lui as dit la couleur de la toile. Et tu lui as dit qui il est, lui.
Retourné maintenant vers eux, il montrait Philidor du tisonnier qu’il n’avait pas lâché. Ils se tournèrent de concert vers Samson, qui ne nia pas, mais qui prit une attitude défensive.
– Si tu m’as entendu, alors tu l’as entendu aussi : elle veut que vous partiez, au plus vite.
Samson n’avait plus rien dit de tout le jour. Les laissant avec comme consigne absolue de rester discrets, il était revenu deux heures plus tard avec un jeune lièvre que Leth, réapparue entre temps, leur avait cuisiné. Dans l’intervalle, Philidor résigné s’était absorbé dans ses croquis, en complétant certains, en commençant un autre. Hugo l’avait observé un long moment, sans mot dire, avant de chercher à se rendre utile tout autant qu’à s’occuper les mains, sans grand succès. Le silence tacite qui envahissait l’espace les avait gagnés, et ce n’est qu’à la fin du souper que Samson le rompit :
– Vous pourrez partir demain. Il y a une péniche qui lève l’ancre à l’aube, et qui s’arrêtera pas avant Lämird. Vous serez pas trop les bienvenus, faudra pas vous montrer, mais avant la nuit vous y serez.
– Viens avec nous.
Hugo sembla le premier surpris de s’entendre faire cette proposition. Trop absorbé par ses croquis, Philidor n’avait rien perçu des sentiments contraires qui l’avaient agité durant cette longue journée. Le jeune apprenti qui, par peur ou par faiblesse, n’avouait pas ce qu’il considérait comme une tare, ouvrait les yeux sur la réalité d’être un sans-talent.
Il se sentait lâche de toutes ces années de mensonges et de cachotteries, qui lui semblaient maintenant relever plus de la coquetterie que de la raison. Une journée ici, à saisir par l’attitude défensive de Samson, par la triste résignation de sa mère, la dure réalité d’être relégué en dessous de ceux-là même déjà en dessous de tout le poussait à tenter de rééquilibrer les chances. Comment, il ne le savait pas, et même si un sans-talent n’apparaîtrait jamais sur les pages crème de Philidor, cela importait peu. Seuls comptaient ces yeux au regard déjà trop vieux et le malaise qu’ils faisaient croître en lui.
Leth resta muette, et s’installa proche du feu, les virevousses de ses mains sur le tissu moins vives que la veille. Samson l’observa, petits coups d’œil rapides jetés en appât, mais elle ne mordit pas. Il finit par dire :
– Demain matin, je vous dirai pour la péniche. Je vous montrerai où. Y a la place pour deux, pas pour trois.
xxx
Le demi-jour de fin d’après-midi pelliculait les bâtiments alentours d’ombres grandissantes. Fostine ne cessait de murmurer pour elle même : « On y sera bientôt » ; Hugo quant à lui portait son attention sur les pas de sa guide dans une ultime tentative de percer enfin le secret des habitants de Lämird. Il s’en sortait de mieux en mieux, mais n’en tirait aucune fierté. Son esprit était assombri par le souvenir de Samson.
Il avait renoncé à chercher les trois étoiles leur servant de balise : Fostine décelait tout, chaque empreinte cachée, chaque indication secrète, bien avant lui. Quelques instants plus tôt, il supposait tout au plus qu’elle se rangeait du côté des voyants tout autant que des goûteurs ; il en était maintenant convaincu.
– C’est là !
Elle se tenait bien droite face à une habitation singulière qui se hissait un étage plus haut que ses voisines sur des pilotis déjà surdimensionnés. Hugo ne savait dire qui des inondations ou du temps avait causé le plus de dommages, et surtout pourquoi, après avoir accordé tant de soin à sa construction, elle se trouvait dans un tel état de décrépitude. Les poutres de la façade à colombage mangées par les termites ne retenaient plus qu’à grand-peine les briques garnissant ses figures géométriques. Fostine poussa sans hésiter le portillon aux gonds grippés par l’humidité et l’oxydation. Il en était encore à détailler l’avant de la bâtisse lorsqu’il comprit : sur le fronton triangulaire, dans l’alignement de la double porte d’entrée, une fantaisie de maçon, une lubie de constructeur : trois étoiles de briques claires incrustées dans le brun rouge du mur.
J'ai bien aimé la réflexion de Hugo, qui pleurnichait de pas avoir de talent alors qu'il en avait deux et qu'il le savait. Très fin !
La construction de ton histoire me laisse énormément perplexe, mais avant de m'étaler dessus, je tiens à relever cette belle faute de frappe : "celui-ci gardait la tête obstinément baissée vers les baises". Manifestement, les feux, dans ton monde, sont très très chauds, wink wink :p
Donc, la construction de ton histoire : ça fait deux chapitres que ça me titille. Je pensais qu'on allait rester avec Fostine et Hugo après le grand flashback racontant la rencontre Hugo/Philidor. Mais non, on en goûte systématiquement. Sauf que comme chaque alternance est courte, j'ai à peine le temps de m'habituer à l'une qu'on passe à l'autre. Le changement de pdv dans ce chapitre 6 me paraît peu justifié, d'autnat plus qu'à la fin on n'est plus du pdv de personne et tout à coup on repasse du pdv de Hugo, donc ce souci-là s'ajoute à mon incompréhension plus globale de ton objectif : vraiment, pourquoi cette structure de chapitre ? D'autant plus qu'on retourne ensuite dans le présent avec Fostine et Hugo, pile là où on en était au début. ça me donne une impression de chapitre haché et d'un plan peu maîtrisé, comme si dans le doute tu t'es dit que tu allais tout donenr en vrac et que tu verrais bien ce que ça donnerait. Les flashbacks sont compliqués à maîtriser et là je suis au regret de te dire que tel quel je suis perdue. Je ne vois pas pourquoi tu as choisi d'alterner à un rythme aussi rapide présent/passé et ça me gâche la lecture parce que ça me rend suspicieuse, en plus du fait que ma lecture n'est pas fluide du fait de cette courtesse des scènes. Et comme je le disais, cette histoire de pdv ne me semble pas au point, on tombe souvent hors du pdv choisi initialement.
Sinon la qualité intrinsèque est bonne, je dis pas, mais la structure me perturbe trop pour que je relève autre chose.
Du coup, je suis en pleine phase de réflexion. Il semble que les flash back ne marchent pas, que ça ne prend pas. J'ai probablement mis la barre un peu haut, et en essayant de m'en dépêtrer, je passe à côté d'autres choses plus importantes.
Doonnc... En accord avec moi et moi même, j'ai décidé de:
- Laisser tomber les flash backs, mais conserver les changements de pov (parce que ça, je sais que je peux le faire!)
- Tailler dans le lard tout ce qui n'est pas vraiment nécessaire sur ces premiers chapitres, quitte à les replacer plus tard.
Ce qui implique une grosse refonte... que je n'aurais pas le courage de mener maintenant! Car en vrai, j'en ai 16 déjà de chapitres d'écrits! Donc je fais une petite pause. Je continue sur Chimères, et dans un mois ou deux, quand ça se sera décanté, j'y remettrai le nez.
Quand à la belle faute de frappe... my bad!
Vala vala! A suivre, donc, mais pas tout de suite ;)