Août I

Par Plulume
Notes de l’auteur : Les répliques citées dans ce chapitre sont issues des pièces de théâtre "Les Justes" de A. Camus et "Quai Ouest" de B.-M. Koltès.

 

Depuis hier matin les répétitions battent leur plein à L’Institut des Arts de la Parole. L’arrière-cour est noire de monde, tout comme le grand hall. Chaque salle est occupée, chaque recoin accaparé par les candidats du concours. Quelques-uns, encore, se donnent la réplique juste devant l’école, sur le parvis de l’église. L’on se presse, l’on crie, l’on batifole, ou l’on s’exclame d’une voix brisée combien notre cœur brûle d’amour. Toute cette agitation m’est familière.

 

Je me fraye un passage au milieu de cette étrange troupe et je cherche Benjamin des yeux. Comment un garçon si immense peut-il se rendre à ce point invisible ?

 

Le fait d’imposer aléatoirement les partenaires des candidats d’un concours d’entrée pour une école d’art dramatique n’est pas une évidence en soi. Mais l’IAP, véritable eldorado pour les comédiens en devenir, se distingue par ses méthodes.

 

Un garçon en chemise claire manque de me bousculer. Accrochée à son bras, une jeune fille aux cheveux verts avec un piercing dans le nez lui chuchote à toute vitesse un texte que je ne reconnais pas.

 

- Un bruit terrible ! Il a suffi d’un bruit terrible et le voilà retourné à la joie de l’enfance !

 

Je m’écarte juste à temps et m’avance sous l’immense voûte du hall. Puis, je l’aperçois enfin au sommet d’un escalier. Dévalant rapidement les marches, glissant presque sur le bois vernis par les années, Benjamin me fait un grand signe de la main.

 

- Myriam !

 

Il dégage une décontraction presque préoccupante dans pareille circonstance. Pendant un instant, hier, j’ai pensé qu’il manquait de sérieux. C’était avant qu’il m’asseye sur une chaise, face à lui, et que nous lisions notre scène pour la première fois.

 

Je me suis trouvée ébahie devant son aisance. Presque déstabilisée par la justesse et la précision de chaque mot, chaque émotion. Plus tard, dans le train, j’ai cherché « Benjamin Jolly acteur » sur Internet. Mais il n’y avait rien. Pas une trace de ce jeune homme étonnant aux cheveux ras et aux lunettes arrondies. J’étais perplexe.

 

  • Passe là-dedans ! me lance-t-il avec enthousiasme en s’approchant.

 

  • Quoi ?

 

  • Passe là-dedans, répète-t-il plus doucement en arrivant à ma hauteur.

 

Je mets un temps avant de me souvenir que c’est la première réplique de notre scène. Je lui décroche un sourire.

 

  • Il fait bien trop noir là-dedans pour que je passe !
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haroldthelord
Posté le 24/07/2020
Coucou plume,

Je vois enfin où se dirige l’histoire, j’ai pas eu à attendre longtemps et c’est toujours aussi bien écrit.

Pour ma part j’attendrai le prochain chapitre.

À bientôt.
Plulume
Posté le 08/08/2020
Hello,
Merci. J'espère être de retour avec la suite bientôt. Au plaisir de te lire !
Raph
Posté le 04/06/2020
Hello Plume !
Une fois n'est pas coutume, c'est un très bon chapitre !
T'as une aisance à l'écrit et une certaine poésie qui retranscrivent très bien ton affection pour les personnages, et l'ajout de grands textes donne une dimension un peu plus grandiose à l'ensemble, bien joué !
Plulume
Posté le 07/06/2020
Merci à toi !
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