Asphalte

Notes de l’auteur : CW : violence, gore

À l'intérieur de la voiture règne un silence de mort. La tête tournée vers la vitre, j'imagine un petit bonhomme courir sur la route pour me distraire. 

Prochaine étape dans trois quarts d'heure. Mes yeux se perdent en quête d'une distraction. L'écran saturé du GPS. Les mains de ma mère sur le volant. Ses cheveux frisés écrasés contre l'appuie-tête. Sur le siège passager, Vic tape un mail sur son portable. Mon frère Mathis, assis à l'autre bout de la banquette arrière, est déjà endormi. Sa nuque forme presque un angle droit. 

Quand il se réveille, une grimace tord son visage. Il presse les mains sur son ventre.

– J'ai envie de vomir. 

Vic se retourne vers lui. Maman soupire : 

–  On peut pas faire de pause maintenant, tu peux tenir le coup ?

Il secoue la tête, plaque une main sur sa bouche. La voiture accélère avant de s'engouffrer dans un autre chemin. Arrêt précipité sur l'accotement. Je détourne la tête pour éviter la scène. Mes oreilles perçoivent tout de même l'ouverture de la portière, les râles et les crachats dans l'herbe. 

Vic descend pour essuyer son visage avec une lingette humide. Ma mère nous presse :

– On est très mal garés, il faut qu'on se dépêche.

– Il est malade, Maman ! proteste ma sœur. 

Puis elle ajoute, à voix basse : 

–Allez, elle a raison, c'est dangereux. Ça va mieux ? 

– Mathis, monte à l'avant.

La chaleur commence à monter, le soleil de plomb effleure l'herbe cramée de son souffle mortel. Ma tête bascule en arrière. J'ai juste le temps de voir le poids lourd dans le rétroviseur foncer dans notre direction avant de s'encastrer dans la voiture.

Ouvrir les yeux est un effort insurmontable. Comme si mes paupières avaient été soudées par le choc.

Tout autour de moi, l'odeur brûlée du métal, l'essence et les flammes, le goût de sang dans ma bouche, mes narines, les éclats de verre partout.

Dès que j'essaie de bouger, le moindre mouvement me déchire un peu plus. Je tourne la tête, le regrette aussitôt à la vue de leurs corps désarticulés.

Une douleur lancinante perce ma poitrine, s'enfonce de plus en plus loin dans mon thorax. Ma tentative d'inspirer n'aboutit qu'à un faible sifflement.

Pitié, faites que je me réveille.

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Dune LASSITER
Posté le 23/09/2023
C'est efficace !
Asphalte, choix de titre très intéressant, mais c'est seulement après avoir lu qu'on comprend, ce qui rend ce titre encore plus intéressant !
Arison Sword
Posté le 21/09/2023
Macabre mais intéressant. C est assez inattendu comme fin. Une fin léthale brutale cauchemardesque comme la vie elle même à tendance à s achever. On vit on meurt et on ne sait rien de la brutalité de la vie après la mort. Pour moi c est un peu comme se prendre un poids lourd dans la face après avoir gerber ses tripes^^
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