Atalante - partie V

Par Luvi

L'entrée majestueuse se dressait face à moi. Ses lourdes portes d'obsidiennes, scellées depuis des siècles, devaient cacher d'antiques secrets, dont je me faisais un point d'honneur à découvrir. Envahis d'étranges algues phosphorescentes, leur lueur en éclairaient faiblement les motifs gravés dans la pierre. Je n'avais jamais contemplé pareils glyphes, dont les courbes tourbillonnantes se terminaient par une goutte, dont j'ignorais la signification. La magie de cette ancienne civilisation puisait sa force de l'océan, j'estimais donc que ces ornements en étaient la symbolisation.

L'excitation à son comble, ma magie se mit à frémir, s'enroulant autour de moi dans de fines vaguelettes dorées. Levant ma main qui se para d'une douce lumière, je laissai mon pouvoir se saisir de la matière, et tirai de toutes mes forces afin d'en ouvrir les mystères. Les portes se mirent en branle. Sous un grincement semblable aux chants d'un animal marin, elles s'ouvrirent dans un ballet de milliers de bulles de gaz étincelantes. Je ne ressentis aucune peur face à l'obscur passage qui venait de se dévoiler. L'attrait de cette exploration, dans cette noirceur abyssale, me rendait étrangement audacieuse.

Je nageais donc jusqu'au parvis, afin de fouler le sol de ce mystérieux bâtiment, et entrai. Mon passage dans l'entrée me fit sursauter. Une fine couche visqueuse s'accrocha à mes cheveux et mes vêtements. L'entrée, loin d'être inondé comme les autres édifices de la ville, était protégée par une barrière translucide, dont les effluves magiques m'avaient échappé. C'est donc dans un couloir plongé dans la pénombre, que je me débattais, telle une furie, contre cette poisseuse sensation magique.

Débarrasser après de moult efforts de cette viscosité, je ne constatai aucunes odeurs de renfermé ou d'effluves marines. Les murs ne suintaient pas d'humidité, seuls les remugles de poussières et de pierre, emplissaient l'air. Intrigué, je levais ma main et fis apparaître des sphères de lumières qui virent lécher le plafonnement en flottant.

Un long couloir s'éclaira. Des débris de statues, et des bijoux, me renvoyant ma lumière dans une multitude de couleurs chatoyantes, jonchaient le sol. J'approchais d'un mur, et passai ma main dessus. Délavées, les fresques d'autrefois avaient perdu de leurs éclats, la peinture s'effritant avec le temps. Je reculai, mue par un sentiment de déception. Rien dans ce passage ne me semblait digne d'intérêt. Pas même les vestiges des idoles de pierre au sol, qui représentaient quelconques monstres issus de la mythologie de ce monde. Je repris ma route, mes sphères me suivant fidèlement, sous les échos d'un doux clapotis, apportant la seule sonorité en ce lieu.

Quelle ne fut pas ma surprise, en découvrant une haute salle aux parois vertigineuses. Une vaste pièce circulaire, se dressant vers les cieux célestes. J'avançais dans la pièce, tournant sur moi-même pour admirer ces splendeurs de jadis. D'immenses fresques teintées d'un bleu océan, en décoraient les murs, illuminées par la clarté de flammes bleutés. Les vestiges mémoriels de cette ancienne civilisation étaient époustouflants. Chaque détail, finement ouvragé, racontait une histoire. Chaque pierre paraissait murmurer à qui les écoutaient, les secrets d'un passé lointain. De majestueuses colonnes, ornées de motifs complexes, se dressaient fièrement, témoignant de la grandeur et de la sophistication de cette époque révolue.

Au centre de la salle, un piédestal imposant, veillait sur les lieux. L'aura s'en dégageant, apportait une aura mystique à l'ensemble. J'étais émerveillé, ne pouvant m'empêcher de ressentir une profonde admiration à ces artisans, qui avaient créé de telles merveilles. L'histoire de ce monde m'apporta les prémices d'une nouvelle quête. Je souhaitais toujours ardemment rejoindre les bras du sommeil éternel, mais là, face à cette ancienne gloire qui m'offrait tous ces secrets, l'envie de voyager et de connaître l'histoire de cet univers riche et complexe, s'apposa à mon être. Il en fut décidé ! Dorénavant, la jeune princesse peureuse et pleurnicharde que j'étais, mourrait en cet instant même, laissant sa place à l'entité divine que je me devais d'être.

Fière et gonflée de ce nouvel orgueil, j'entamai la lecture de ces archives murales, les gravant en ma mémoire pour la restituer bien plus tard. J'avançais vers l'escarpement montant en colimaçon vers le point le plus haut de cette architecture mémorial, en ignorant le précipice sous mes pieds, que je venais à peine de percevoir. Mon pouvoir arquait l'air, créant une fine plateforme de lumière à chacun de mes pas. Bien qu'un sentiment de sécurité m'habitât quant aux promenades aériennes que j'adorais faire, le vide qui s'étendait de la corniche jusqu'au piédestal central, semblait infini. Le cœur battant, j'accélérai le pas, soufflant de soulagement sur la fine pente.

Reprenant doucement mon souffle, j'essuyais la pierre emplit de poussière, faisant apparaître une gravure d'un autre langage que la langue commune de l'univers. Certains mots me paraissaient familiers, tandis que d'autres, loin d'être connu de ma personne, me laissaient médusé. Je ne pouvais les traduire, moi qui n'avais eu cesse d'apprendre une multitude de langages aux travers de mes lectures.

Au crépuscule de la longue ...

Dans le tumulte des ... pluies

Se dresse ...

De ses crocs, déchirent la chair

De ses griffes, ... nos âmes

Une ... , une éclaircie nous entraîne

Voici la fin d'un exil dans les ténèbres

Nous levons ... et contemplons

La bête du ciel, terrasse la bête de la mer

Dans un cri, ... elle nous libère

Je relevais la tête pour examiner la première fresque. Des créatures humanoïdes à genoux, un être auréolé de lumière tenant en ses mains un étrange monstre. La représentation contait simplement l'arrivée d'un quelconque dieu sur ce monde, venu apporter à lumière de la vie à ce peuple vivant dans la noirceur.

Les fresques suivantes semblaient beaucoup plus intéressantes, racontant l'histoire de ce monde, de sa glorieuse épopée jusqu'à son trépas. Cette historiographie ne faisait que commencer, pour mon plus grand plaisir.

À suivre

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