Berceuse de décembre - Averse - La brèche

Par Seol

XXVIII-Berceuse de décembre

Les clans installaient un campement quand apparurent Aaïerberg, la directrice et Michel, avec dans les bras …

— Un dragon ! A qui tu l’as piqué Michel ? s’offusqua Claude.

— A personne ! Il a éclos car j’en ai enfin fini avec mes doutes ridicules.

Avant qu’Inès puisse poser ses questions, Aaïerberg les enjoignit à se rassembler autour du mégalithe dont il amorça l’ascension. Le rituel commençait.

L’immense roche était la pierre angulaire des mondes, déséquilibrés par leurs dérives. Les représentants de chaque monde s’armèrent de leur plume de dragon pour y inscrire une berceuse les incitant à flotter l’’un vers l’autre.

— « Une ancienne ritournelle, autrefois en décembre … », lut Inès. Vous écrivez quoi Domi et Claude ?

— On a travaillé l’orthographe de cette chanson ! s’enthousiasma Domi.

— On voulait donner de belles promesses au caillou, ajouta Claude.
Et, dans un frottement feutré, les mondes se réalignèrent.

 

XXIX-Averse

Aaïerberg avait atteint le sommet. Il l’oignit du même baume qui avait sauvé Claude et qui enveloppa lentement le mégalithe de givre.

De gros flocons tombèrent doucement sur les mondes, pour les endormir et les réparer. Tandis que le temps ralentissait, chacun s’émerveillait du spectacle, visages sémillants et bras tendus vers le ciel.

Seul Michel terminait sa berceuse, d’une plume prélevée sur son propre dragon.

L’horizon s’assombrit. Soudain, la neige délicate se transforma en une violente averse de grêle. Tous cherchaient à se protéger, Dominique et Claude trouvèrent les bras l’une de l’autre.

— Qu’est-ce t’as encore fabriqué Michel ??!

— Grâce à la directrice, je me suis raffermi et je sais qui je suis ! Mon dragon et moi ne nous sommes pas laissés bercer par votre bien-pensance ! Ces mondes seront nôtres !

Mais le déluge émoussait franchement l’assurance de ses mots.

 

XXX-La brèche

Aaïerberg sauta. Il atterrit, accroupi, dans un bruit de tonnerre. Derrière lui, la glace se fissura jusqu’à crever une brèche sans fond autour du mégalithe.

— Aaïerberg ! Aidez-nous ! supplia Inès.

Mais, quand il se redressa, un regard plein d’éclair remplaçait sa bonhommie habituelle.

— Les humains déchirent toujours tout, cracha-t-il. Les mondes ont besoin repartiAAAAAAAAaaaaaaaaa …….  !!!!!

La directrice l’avait poussé.

— C’est moi, la méchante, dit-elle au vide.

Simultanément, Michel s’emmêlait les pieds. Seules Dominique et Claude assistèrent à sa chute. La première, empathique regretta que le temps ne lui eût accordé d’ultimes paroles ou actes rédempteurs. La seconde, pragmatique, pensa qu’elle n’avait pas le temps de pleurnicher et se jeta par-dessus la faille pour inscrire sur la roche, à la place des mots âcres de Michel : « dsl on peu fèr mieu !!! ».

Et comme elle y croyait fort, l’apocalypse cessa.

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