Ce qui fait disparaitre la foi

Par Luvi
Notes de l’auteur : Vaste lieu d’une ancienne dévotion monastique et mystique, l’îlot sacré d’Arca se dresse sur le plus haut îlot d'Elysia. Tout dans ce lieu rappelle que l’humanité est infiniment petite face à la grandeur des puissances divines qui règnent par-delà les étoiles. Le temple, immense panthéon construit à l’apogée de la civilisation Elysienne s’éleve vers les cieux. Dédier aux Dimiour s’étant succédé, les plus grands mythes de ce monde, se sont construits à travers les allégories burlesques de ce lieu onirique, empreint d’une théologie spirituelle en déclin depuis des millénaires.
Encyclopédie divine – Temple et sanctuaire – Le grand Panthéon d’Elysia

Le temple, immense, haut de sept mètres et large de soixante, était taillé dans les pierres les plus blanches en provenance des carrières de Vrachos, planète jumelle d’Elysia. La coupole aux reflets d’or, gigantesque par ses soixante mètres de haut, était soutenue par un péristasis vertigineux et des pinacles d’or massif de forme conique qui s’étendaient sur le large toit de l’édifice. Le dôme de lumière s’élevait vers le ciel, offrant un appel aux divinités par ses reflets lumineux, visible depuis le firmament pour leur acuité visuelle supérieure.

Les deux cents colonnes sculptées en relief, gravures à l’image des déités, d’une finesse et d’une grande précision donnaient l’impression que ces êtres de pierre pouvaient se mouvoir à tout moment. Le péristyle rendant hommage aux styles architecturaux audacieux d’un temps ou la grandeur d'Elysia, résonnait dans tout le Méros.

Le plafond haut de marbre, peint de scènes surréalistes pour les non-croyants, entachait la beauté immaculée de la façade. La grande porte, d’une hauteur affolante, métallique, couverte de rouages et d’enluminures d’or le plus fin était close depuis des siècles. Deux gigantesques griffons rugissants faits d’un métal rappelant du bronze, les orbites serties, veillent sur l’entrée. Se dressant fièrement à quelques mètres du sol, leurs queues fourchues prêtes à fendre l’air, leurs griffes acérées et le détail de chacune de leurs plumes invitent à la prudence, comme s’ils allaient attaquer pour châtier les intrus. Le mélange de l'archaïsme et de la sérénité du style dorique dont s’était targué ce peuple durant des années, apportait une dimension divine, comme si les dieux avaient eu même construit ce temple.

Lostris se tenait là, se demandant quels mystères et quels trésors renfermaient encore la lourde porte, qui ne s’ouvrirait plus. Elle avait troqué sa robe d’un doux vermeil contre son armure de jais. Revêtit ses armes dont la clarté de Lumia, son sabre de lumière, irradiait doucement à sa hanche. Ses longs cheveux attachés en queue-de-cheval, flottaient dans le vent qui murmurait, apportant les acclamations d’une foule sur l’île royale en contrebas.

Debout sur le parvis envahis par les hautes herbes et la puanteur de la magie noire que dégageait l’homme à ses pieds, elle contemplait la puissance passée du panthéon de légende, se remémorant les histoires que lui racontait son professeur au sujet de ce peuple. Les plus grands héros d’Elysia, avaient vu leur ferveur atteindre la clameur céleste, avant de sombrer dans l’oubli. Les plus grands architectes avaient vu leur génie, acclamer par la force divine, retomber dans la folie et le néant. Les plus grands dieux avaient marché sur son sol, loué par les foules hystériques, avant d’y être chassés par l’indifférence et la colère humanoïde.

L’homme de sa vision, agenouillé et paralysé par un sortilège, attendait muet. Son corps ne brillait ne plus. Le sort noir qui coulait dans ses veines, éclats noirâtres insultant la lumière de ce monde, flux magique argenté brisant le silence, pulsant tel les battements d’un cœur n’était plus. Mais nul soulagement dans son esprit. Il se demandait quelle punition l’attendait.

 Cette femme, être angélique auréolée d’une aura divine, lumière aveuglante dans l’océan de ténèbres qui régissait sa vie, se tenait devant lui. Celle pour qui son maître avait conçu et lancé le plan le plus extravagant du clan des ombres. Elle qui devait marquer un tournant décisif pour l’humanité était à portée de sa main.

Retrouverait-il sa place au sein de ses compatriotes ? Lui, le traître, élevé au rang de héros, mensonge éhonté du clan royal pour mieux manipuler le peuple ? Serait-il vu comme un membre émérite du clan, s’il parvenait à la capturer ? S’il offrait la divinité d’or à son maître ? Il ne le saurait jamais. Il savait au plus profond de son âme, quelle serait la suite pour lui. Se voir arracher l’âme, ou servir de bombe humaine, quel destin atroce pour un homme qui ne souhaitait que venger son enfant. Jamais plus il ne reverrait sa femme. Son âme ne se réincarnerait pas. Son énergie rejoindrait le flot incessant de l’énergie créatrice de toute chose.

Derrière eux, en contrebas de la place centrale, descendant parmi les masses brumeuses et paresseuses aux traînées rosées, le grand escalier de pierre menant à l’île royale. Les nuages illuminaient de leurs luisances poudreuses les tours immaculées et vertigineuses du château. Blanc, entaché de rouge et d’or, couleur de la royauté, resplendissant sous les premières lueurs de l’aube, brillait tel un phare en pleine tempête. Les armatures métalliques des vitraux reflétaient le rayonnement de l’astre de feux. À moitié ensevelit par les masses cotonneuses, les fanions rouge aux motifs dorée de phénix, claquaient dans le vent.

Elle leva sa main auréolée d’une douce aura. Un maelstrom de sentiment s’empara de Barlen, lorsqu’il ressentit le contact de la main de la divinité sur sa tête. Sa fréquence cardiaque s’accentua au rythme de ses tremblements et sa respiration chaotique si fit bruyamment entendre. Barlen avait peur, et son ressentiment se mélangea à l’immense chagrin qui enserrait son cœur. Étonnée par ce ressenti, Lostris, fermant les yeux, incanta, intensifiant son aura. Fouillant les méandres de l’esprit du prisonnier, elle y recherchait la moindre information qui pourrait la mener vers la planète du clan des ombres. Mais seule la triste image d’une jeune fille affluait sous ses paupières. Tel un film au ralenti, elle se laissa entraîner par les souvenirs de son prisonnier. Les cris d’une foule en colère, le clapotis de la pluie, puis la jeune fille, enchaînée, portant un linge dans les bras. Une estrade et un poteau, l’odeur du sang et la clameur du public et enfin, les larmes de Barlen. Puis le vide, comme si son esprit avait été vidé de tout.

Lostris souffla de mécontentement, tentant maladroitement de faire disparaitre le sentiment de tristesse qui s’emparait d’elle. « Où ! Où se trouve ta planète humain ! Cessant son sortilège, elle assena un violent coup de pied à l’homme, l’envoyant s’écraser contre la fontaine.

Se redressant quelque peu sonné, il s’agenouilla. « Je l’ignore ! Pitié, je ne veux pas mourir !

— Tu oses réclamer pitié pour ta vie ? Et toi ? As-tu eu pitié pour tous ceux que tu as envoyés vers la mort ?

— Je, je n’faisait que mon travail ! Pitié sainte lumière, je ne veux pas mourir.

Elle venait de dégainer son sabre, prêt à châtier l’impudent. Elle eut soudainement une idée. Levant deux doigts, elle fit léviter son prisonnier, le forçant à se redresser. Plongeant violemment sa main dans sa poitrine, elle lui arracha le cœur. L’organe chaud, pulsait entre ses mains, se cristallisant dans un éclat noirâtre. Lâchant Barlen, il s’écrasa au sol, se redressa et porta sa main à sa poitrine, l'incompréhension dans le regard. Il leva la tête, regardant la divinité le statuant de toute sa hauteur.

— Tu ne veux pas mourir ? Soit, sans ton cœur, tu ne peux pas ! Mais certains sorts sont bien pires que la mort humain ! Elle se baissa et lui murmura à l’oreille. N’ai crainte, tu vas retourner auprès de ton maître avec un message ! Se redressant elle fit demi-tour, ordonnant à Hélios de s’occuper du prisonnier.

Barlen, les yeux écarquillés par le choc de l’annonce, se jeta à ses pieds en hurlant. La terreur se propageant dans son esprit. Retourner auprès du maître sans pouvoir mourir allait lui apporter bien des souffrances.

 

L’esplanade du palais, immense terrasse de pierre lourdement décorée d’orfèvreries où les statues de phénix aux ailes majestueuses côtoyaient de lourdes tentures de velours rouge, attendaient l’arrive de la reine. La verdure attenante, immense jardin coloré et parfumé de mille splendeurs végétales sous les ombres des grands arbres, encerclait le bâtiment royal. Tranchant l’îlot en deux, une fine rivière aérienne terminait sa course vers la mer en contrebas dans une puissante cascade dont les embruns embaumaient l’atmosphère et apportait fraîcheur.

Les soldats, au garde à vous dans leurs armures rutilantes, camaïeu de coloris sur la blancheur de l’édifice, arc-en-ciel vivant d’un nuancier de peintre, étincelants sous les rayons solaires, s’impatientaient. Les cliquetis sonores de leurs armes, lances d’or à la magie primaires, résonnaient dans le silence. Les armes de poing et les épées de capitaines, fièrement endormis dans leurs fourreaux de cuir carmin aux coutures de fil d’or, vibraient légèrement, excité par l’aura magique qui s’infiltrait sur le monde. Les soldats, bien trop faibles magiquement ne le voyaient pas, mais les haut gradés, les yeux rivés vers le sol le voyait parfaitement. Une brume, cotonneuse, aérienne et légère, collante et parasitant se dégageait de terre telle une fumée cendreuse après un incendie emportée par le vent capricieux. Une vague effrayante, portée par un froid glacial dans la fournaise.

Un héraut souffla, et les notes d’une trompette résonnèrent. Sur le balcon, les quatre généraux se présentèrent. Les maisons du phénix, de Jupiter, d’Atla et de Pontos, furent accueillies par les applaudissements et les cris des soldats, armes aux poings. Le sol trembla et l’atmosphère rosée de ce début de journée se chargea d’un brouhaha sonore sans nul doute entendu par les dieux eux-mêmes.

Les notes délicates d’un orchestre mirent un terme à l’effervescence en cours. La musique dont les accents graves des violons et des flûtes embaumant le ciel lumineux, jouaient l’hymne patriotique d’Elysia, annonçant l’arriver de la reine. Tous se figèrent. Les regards brûlant d’un désir ardent de combats se fixèrent sur le balcon.

Elle apparut. Ses dames d’honneurs se plaçant derrières elle, entachant l’armure de feux de la reine de leur robe en tissus fluide aux couleurs de leur maison respective. Morgiane, d’une élégance folle même dans la ferraille et l’éclat céramique de sa fine armure, s’avança et se saisit de sa lance de Trium. Elle leva l’arme dont l’éclat rougeâtre vint aveugler les soldats en contrebas. Son regard d’une grande froideur d’où se dégageait la colère sylvestre des plus grandes reines qu’Elysia avait connu au fil des siècles, martelait chaque soldat. Morgiane prit la parole, son être surplombant de toute sa hauteur les bataillons. D’une voix forte et puissante, ses mots résonnèrent dans le silence.

 

Soldats ! Fier peuple d’Elysia ! Gardien sacré de la lumière en notre monde !

L’obscurité est à nos portes ! Le glas d’un hiver cruel et éternel résonne par-delà les grandes murailles des monts Zonan.

De nombreuses batailles ont bouleversé notre monde

 au cours des siècles.

La pureté de notre terre et nos êtres n’ont

 Eu cesse d’être mis à l’épreuve !

Mais par qui ? Nos dieux ?

Ces entités qui ont allégrement piétiné notre foi ?

Qui ont cessé d’être nos protecteurs ?

Qui encensent la violence et la haine dans les Méros ?

Non ! Eux ne nous regardent plus !

Ils nous ont abandonnés ! Oubliés !

La calamité qui nous accable aujourd’hui,

est un fléau étranger à nos terres !

Ils ravagent notre patrie ! Ils veulent maudire nos vies !

Ils veulent repeindre nos glorieux jours

d’une nuit sanglante et immuable !

Nous qui n’avons connu la cruauté ! Il est temps de dire stop !

Il est temps de leur montrer le visage de la grande Elysia !

Celui qui rayonne à travers les firmaments ! Celle qui fût jadis aimée des dieux !

Nous ne laisserons pas la désolation s’abattre !

Mes frères, mes sœurs !

Aujourd’hui, unissons-nous dans la douleur !

Vous qui n’êtes qu’un seul et même peuple, levons-nous et ensemble martelons l’ennemie du rugissement du phénix !

La terre trembla, l’air cristallin se chargea d’une gronde qui résonna jusqu’à l’île la plus haute de ce monde se préparant à la dernière bataille. Les soldats, les armes aux poings, tambourinant leur bouclier d’un tam tam assourdissant, entrèrent en liesse, portés par les paroles de leur reine. Le dernier combat, celui qui allait déterminer leur avenir, porté leur futur, teinté leur vie d’espoir ou de désespoir, allait commencer sous le regard impénétrable de la reine Morgiane.

A suivre

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Plume de Poney
Posté le 16/06/2025
Bonjour bonjour!

Va y avoir du sport d'ici peu...

La reine Morgiane sait assurément motiver ses troupes!

Et Lostris jouer avec le coeur des gens. Barlen, lui, n'a pas fini d'être tourmenté. Bon ça reste un expert de l'esclavagisme mais quand même.

Hâte de voir comment le fait d'avoir désamorcer la bombe humaine du clan des Ombres va les fâcher !

Sinon au tout début du chapitre, tu dis ça : "Le temple, immense, haut de sept mètres et large de soixante, était taillé dans les pierres les plus blanches en provenance des carrières de Vrachos, planète jumelle d’Elysia. La coupole aux reflets d’or, gigantesque par ses soixante mètres de haut,"

Le temps est haut de 7m, mais ensuite tu parles d'une dôme à plus de 60 m, des portes incroyablement hautes etc.
Donc est ce que c'est moi qui ait mal saisi ou est ce que les 7 m sont trop peu?

Bonne soirée
Luvi
Posté le 16/06/2025
Bien le bonsoir👋,

Ah mince, j’étais complètement passé à côté de ce détail… 70 mètres tout de même 😅
Le pauvre Barlen… mais il ne sera pas le seul à voir son cœur mis en miettes par Lostris. Et clairement pas le seul à en baver à cause de ce qu’elle prépare…
La vengeance du clan va faire mal. Leur roi, lui, ne va certainement pas digérer ce nouveau camouflet. Bakura va bien s'amuser avec Barlen.
A bientôt
Plume de Poney
Posté le 17/06/2025
Bonjour à toi!

Oui 70 m ça me va mieux :)

Elle m'a l'air du genre bourreau des coeurs cette Lostris en effet.
Et je comprends que le clan soit tout bougon après ça !
Luvi
Posté le 17/06/2025
Il n'y a pas que des cœurs qu'elle va briser dans les prochains chapitres 😜 😂 Ma guerre sera follement amusante pour elle...
Bonne journée
Vous lisez