Il faisait vraiment un froid de canard ce soir-là. Il avait plu toute la journée et les pattes de Newton furent bientôt trempées. Le vent soufflait si fort qu’il parvenait à soulever les feuilles mouillées agglutinées sur le gazon. Par bourrasques, elles étaient envoyées sur le pare-brise de la voiture du père de Winnie. Newton ne put s’empêcher d’en être satisfait. Stuart aurait un autre « bazar » à nettoyer demain matin.
Winnie galopait gaiment aux côtés du lapin.
— J’ai appris quelque chose d’intéressant au sujet d’Halloween aujourd’hui, commença la fillette.
Newton arqua un sourcil dans sa direction. Il aurait aimé lui dire qu’il en avait assez soupé d’Halloween… S’il avait pu lui avouer qu’il savait parler.
– Mrs Jones nous a dit qu’il y a très longtemps, continua doctement Winnie, Halloween s’appelait la nuit de casse-noisette ou bien la nuit de la pomme croquante. Bizarre, hein ? interrogea-t-elle son compagnon.
Elle sauta par-dessus une flaque d’eau avant d’ajouter :
— En fait, les familles se racontaient des histoires au coin du feu en mangeant des noisettes et des pommes. C’est de là que tout est parti !
Newton se promit de raconter cette anecdote à Rubie. Manger des fruits à la place des bonbons, voilà une tradition qui allait lui plaire.
En arrivant au poulailler, le détective trouva immédiatement que les poules étaient bien agitées. Christie, postée à la porte, ne cessait de regarder autour d’elle comme si elle pressentait que quelque chose allait lui sauter à la gorge. Par la petite trappe, Newton entraperçu Lucette qui faisait les cent pas devant les pondoirs tandis que Victorine, Hondoise, Eugénie et Gervaine s’étaient blotties les unes contre les autres dans un coin du bâtiment.
— Flûte, j’ai oublié la pelle à grain, pesta Winnie de sa voix fluette.
Newton regarda sa petite maîtresse revenir sur ses pas. Au loin, les aboiements d’un chien percèrent le silence de la nuit.
Le détective continua son inspection du poulailler et, comme rien n’échappe à un lapin détective, il en vint rapidement à la conclusion qu’une poule manquait à l’appel. Tandis qu’il scrutait les coins sombres, une masse duveteuse, sortie d’il ne savait où, s’abattit sur lui avec la vitesse de l’éclair. À califourchon sur le dos de Newton, la créature déploya une aile musclée sous la gorge du détective pour l’empêcher de crier.
Une voix se mit alors à chuchoter à son oreille :
— Comme le cobra, mon coup est senti avant d’être vu…
— Mercotte…, supplia Newton d’une voix étranglée, arrête ça tout de suite… Je peux plus resp…
La poule bondit, une patte fendant l’air comme le plus tranchant des sabres, avant d’atterrir un peu plus loin, un genou à terre. Elle fit volte-face et dévoila un sourire triomphant :
— Pas mal, hein ?
— T’es la meilleure poule ninja de tout le Royaume-Uni, assura Newton en massant son cou. Mais s’il te plaît, arrête de m’attaquer !
— Attends, tu aurais pu être n’importe qui ! On ne peut se fier à personne par les temps qui courent !
— Enfin s’agaça le détective, tu savais très bien que c’était moi. Winnie était là il y a quelques minutes !
Mercotte haussa les épaules.
— Qu’est-ce qu’elles ont ? demanda alors Newton en désignant du menton les poules qui tremblaient de toutes leurs plumes.
Mercotte s’était mise à faire des pompes :
— Un, deux… Ça fait deux nuits que quelque chose rode autour du poulailler… Trois, quatre…
— Une fouine ?
— Non, plus gros que ça… Cinq, six…
— Un renard ?
— Sept, huit… Vu les bruits dans les buissons et le grognement, probablement une pointure au-dessus. Neuf…
Newton fronça les sourcils.
— Les sangliers ne s’aventurent jamais jusque-là, dit-il.
Tout à coup, Winnie réapparut, ce qui coupa court à son interrogatoire. Mercotte cessa immédiatement sa séance de renforcement musculaire et s’éloigna comme si de rien n’était, imitant à la perfection le caquètement de ses congénères, quoi que sont dandinement était un peu trop prononcé pour être naturel ce qui ne pouvait avoir qu’une seule explication :
— Zut, Mercotte a encore des puces, en conclut Winnie.
Newton ne savait pas trop quoi penser. Était-ce Halloween qui, à nouveau, agitait l’imagination des poules au point de leur faire perdre le sens des proportions ? Rien n’était moins sûr. Mercotte n’était pas du genre à se laisser impressionner par quoi que ce soit et, malgré ce que pouvaient laisser penser ses prises de kung-foo, elle avait plutôt les pieds sur terre.
Tout à ses questionnements, le détective ne s’aperçut pas que Winnie avait terminé de nourrir les volailles. Au bout de l’allée, éclairée par quelques lampes faiblardes, il la vit qui s’apprêtait à fermer la porte de la cave par laquelle ils étaient sortis. Il était temps de la rejoindre. Et en vitesse !
Hahaaaa, voilà un début de mystère ! Je me demande moi aussi ce qui effraie tant les poules. Plus gros qu'un renard mais pas un sanglier ? Hmmm...
Je suis fan de Mercotte, la meilleure poule ninja de tout le Royaume-Uni, hahaha, je me régale en ce dimanche d'automne à lire ces petits chapitres si bien menés.