Chap 1 - scène 1

Par Meryma

Un matin de la mi-octobre, alors que la température baissait de jour en jour, Astrid déposa son châle en laine sur ses épaules, noua un foulard fleuri par-dessus sa chevelure d’or. Après avoir lacé solidement les bandes de tissu autour de ses mollets, et lissé les pans de sa robe épaisse qui tombait jusqu’à ses chevilles, la jeune femme attrapa le panier d’osier par son anse. Elle jeta un dernier regard à la maison encore emplie de la quiétude nocturne, détourna ses yeux clairs et sortit. 

Moins d’un kilomètre plus loin, elle passa le puits et le lavoir, puis arriva en vue du petit village. Un sourire illumina ses traits, le seul sincère de la journée, celui qu’elle ne se forçait pas à produire. Elle aimait se rendre au marché chaque matin. Elle n’avait alors pas besoin de faire semblant. 

Le village fonctionnait selon un système de mise en commun des biens. Les chasseurs confiaient au boucher le gibier qu’ils ramenaient pour que l’artisan la transforme. La viande était ensuite proposée à tous les habitants. Il en était de même pour le pain, les légumes, ou tout autre article. 

Alors qu’elle passait devant la boulangerie, Astrid ferma les yeux pour mieux humer la senteur de la pâte cuite et son sourire s’étira un peu plus. L’odeur du pain chaud lui rappelait des souvenirs d’enfance qui lui échappaient peu à peu au fil des années.

Plus loin, Ester l’herboriste la salua quand elle sortit de sa boutique pour accrocher à sa devanture les petits fagots d’herbes séchées. Astrid lui répondit d’un signe de tête. Elle leva la main pour approcher les brins de son nez et en apprécier les fragrances fleuries. 

Elle repartit d’un pas léger dans les rues du village jusqu’à arriver au marché. Sur l’étal du boucher, elle acheta plusieurs entrecôtes que son mari aimait grandement, et quelques morceaux séchés en prévision de l’hiver rude qui se profilait. Elle en profita pour échanger quelques mots avec son amie Sonja

– Viens dîner un soir, avec Ivar, l’invita la femme du boucher alors qu’elle s’éloignait vers les autres étals. Nous serions heureux de vous recevoir.

La trentenaire remisa une mèche de ses cheveux qui s’était échappée de son foulard. Elle offrit un sourire cordial à la marchande et acquiesça.

– Je te remercie, Sonja. J’en parlerai à Ivar, c’est promis. Mais tu le connais, il n’aime pas beaucoup sortir le soir.

– Alors, venez plutôt en journée. Tu apprendras à ma fille comment tricoter un joli châle comme le tien. Elle m’en parle si souvent !

Astrid sourit légèrement, le cœur serré de devoir se désister encore une fois et salua la femme pour continuer ses achats. Toutefois, son entrain et sa joie passagère s’envolèrent plus tôt que prévu. 

Le visage plus morose, elle se procura les fruits, le pain et les diverses petites choses de sa liste, puis rentra chez elle d’un pas lourd. Avant de franchir les limites du village, elle se retourna une dernière fois pour jeter un regard triste à cette vie qui lui était refusée. 

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