La nuit fut calme, Saka était resté sur le pas de la porte, Thomas n’avait pas eu la force de prendre sa défense. Ce matin, il se souvenait de son rêve avec difficulté, une cacophonie de chuchottements dont il ne comprenait pas le sens. Léon s’était assuré qu’il descende petit-déjeuner avec eux, puis, discret comme une souris, Thomas échappa au concierge pour quitter le château en direction de l’atelier. Avoir les idées claires lui permit d’avancer sur son épreuve de diplôme, il lui restait deux semaines avant l’examen.
Pendant la pause de midi, il partit à la recherche des jardiniers et apprit que Mr Grollet ne travaillait pas aujourd’hui, il le trouverait sans doute chez lui dans un quartier en bordure du parc. Il s’y rendit en cachette dès la fermeture de l’atelier, il n'était pas permis de sortir sans autorisation, tant pis s’il ratait l’office ce soir.
Au deux rue des fougères, il découvrit une petite maison de brique rouge et blanche à moitié couverte de vigne et couronnée par des arbres en fleurs dont elle émergeait à peine. Passé le portail, les senteurs florales et l’ambiance tamisée par ce plafond végétal réveillèrent en lui des souvenirs de sa petite enfance, il était déjà venu ici.
Une voix grave provenant de l’intérieur le surprit avant même qu’il ne frappe à l’entrée :
– C’est pour quoi ?
– Bonjour, je suis Thomas Avril, je… je viens de l’orphelinat. Je crois que votre femme s’est occupée de moi quand j’étais enfant, serait-il possible de…
Quelqu’un avait ouvert. Une petite dame au visage rond le dévisageait derrière ses lunettes. Un grand costaud d’une cinquantaine d’années montait la garde à côté d’elle, un jardinier que Thomas avait du croisé sans le remarquer. Elle s’approcha de lui et souleva ses cheveux en bataille qui lui tombaient sur le front. Le contact soyeux de sa peau le transporta quatorze années en arrière. Il la revit soudain, penchée sur lui, glisser une main sur sa tête, murmurant un air apaisant.
– Oui, je me souviens de toi, dit-elle. Il n'a pas changé... ce tounesol dans tes yeux. Combien de fois me suis-je perdue dans ce regard ? Tu t’en souviens Paul ?
Sa voix à elle non plus n’a pas changé, remarqua Thomas. Son mari n’avait pas répondu quand elle poursuivit :
– Hum… je t’ai gardé une année, peut-être deux, jusqu’au décès de Mme de Galmière il me semble, entre donc.
Il avança jusqu’au salon, une pièce modeste à la décoration soignée. Il s’assit dans un fauteuil bordeaux au cuir craquelé et s’y enfonça comme dans un fromage fondu, au point de se demander s’il pourrait en ressortir.
– Souhaites-tu boire ou manger quelque chose, Thomas ?
– Non merci, je… j’aimerais juste vous poser des questions me concernant, accepteriez-vous d’y répondre ?
– Je veux bien essayer, dit-elle en s’installant face à lui, accompagnée de son mari.
Elle sortit tout de même une boîte de gâteaux qui semblaient faits maison. Thomas tenta en vain d’étouffer les bruits de son estomac, il regrettait déjà son excès de politesse. Non, il n’était pas là pour ça !
– Connaissez-vous par hasard les circonstances de mon arrivée à l’orphelinat ? dit-il sans quittait sa nourrice des yeux.
– Hum, tu es le garçon qu’on a retrouvé au pied du château, c’est bien cela ?
– Oui.
– Je me souviens de cette histoire, Mme de Galmière aurait pu te répondre avec plus de précision que moi, c’est elle qui t’a trouvé, elle notait ces informations dans vos dossiers en général, as-tu demandé à consulter le tien ?
– Oui, mais je n’y ai rien trouvé d’utile à part votre nom. Je cherche des détails du jour où l’on m’a retrouvé ou bien des éléments de l’enquête de police, est ce que par hasard quelque chose vous revient ?
– Malheureusement non, mon garçon, à l’époque, je travaillais ici, l’orphelinat n’était pas adapté pour les enfants aussi jeunes. Mme de Galmière t’a amené chez nous au retour du commissariat. Elle s’est montrée très prévenante avec toi, elle t’a fait passer une visite médicale, car tu ne savais toujours pas marcher, puis elle s’est assurée qu’on puisse t’accueillir au sein du château. Nous t’avons appelé Thomas, c’était inscrit sur ta chaîne il me semble. C’est tout ce dont je me souviens, dit-elle en jetant un coup d’œil vers son mari qui acquiesça.
Thomas tenta en vain de masquer sa déception, il se pris le visage entre les mains avant de poursuivre:
– Et... rien d’autre les mois d’après ?
– Non, je ne savais rien du déroulement ou des résultats de l’enquête policière. À l’époque, Mme de Galmière tenait un journal des évènements quotidiens à l’orphelinat, peut-être y a-t-elle noté quelque chose. Je n’ai aucune idée s’il existe encore par contre.
Thomas gardait le silence, les épaules de plus en plus basses.
– Je ne t’aide pas beaucoup mon garçon, je suis désolée.
– Ce n’est rien, j’ai retrouvé ici des souvenirs, cette maison… vous. J’aimerais vous remercier de m’avoir accueilli.
– Ce n’était pas grand-chose, tu sais, à l’époque nous voulions un enfant plus que tout. Elle se tourna vers son mari et lui prit brièvement la main. Je me suis ensuite occupée des orphelins de Saint-Philippe avec plaisirs. Qu’es tu devenu mon grand ?
– Je suis une formation de sellier à l’orphelinat, si j’obtiens le diplôme cette année, j'espère trouver du travail au forum des métiers. Je ne sais pas vraiment où aller par contre, c’est aussi pour ça que je cherche des traces d’une éventuelle famille.
– Je comprends, si quelque chose me revient, je viendrai te voir, de ton coté, saches que tu sera toujours le bienvenu pour nous rendre visite.
Thomas acquiesça, se leva, non sans mal, remercia sa nourrice et sortit après un dernier regard sur ce salon à l’ambiance familière. Il quitta l'atmosphère et les odeurs envelopantes du jardin, redressa sa tête et son dos puis se mit à sourire, il n’en savait guère plus, mais au final, cette visite l’avait réconforté. Quelqu'un ayant véritablement souhaité un enfant l'avait élevé. Mme Grollet s’était souciée de lui pendant une ou deux années. Durant cette période, elle avait été sa mère.
Grâce à ce chapitre, on a enfin quelques pistes... Peut-être que Thomas devrait aller fouiller le bureau de la directrice... La nourrice a aussi parlé d'une enquête, d'examens médicaux, il faudrait aussi creuser cette piste...
J'espère que Thomas va réussir à trouver des indices...
Je poursuis ce récit avec toujours autant d’intérêt. Mes remarques précédentes sur les descriptions valent également pour ce chapitre. Thomas s’interroge sur ses origines, il est visiblement angoissé, n’hésite pas à entrer davantage dans sa tête en imaginant tout ce qu’il peut ressentir et comment il doit y faire front. Thomas est au cœur du récit, on doit trembler, pleurer, s’interroger avec lui. Ses angoisses doivent nous émouvoir.
Je sais, c’est facile à dire mais je parle d’expérience car je suis souvent confrontée aux mêmes difficultés.
Quelques coquilles :
- Thomas avait déjà croisé sans le remarquer : pourtant il l’a reconnu. Peut-être atténuer le « sans » ?
- s’il pourrai en ressortir : pourrait
- j’aimerai juste vous poser des questions : j’aimerais ?
- dit-elle en s’installant face à lui accompagnée de son mari : une virgule après « lui ».
À très bientôt.
Je l'aime cette nourrice. J'aurais presque aimé que ce passage dure un peu plus, que tu nous décrives un de ces souvenirs qui remontent dans l'esprit de Thomas.
En tout cas, elle nous a fournis un détail important, qui solidifie mon hypothèse d'une excursion dans le bureau de la directrice : le journal de l'ancienne directrice ! Je me demande ce qu'il va y trouver...
A bientôt ! =^v^=
Emmy
Je note mes problèmes techniques (Coquilles) et je corrige rapidement
je retravaille l’immersion !