Chapitre 06. Toujours Là.
Section 01 :
"Silence malade,
Deux ombres côtes à côtes —
Sans plus d'horizon."
Lys s’avança lente — ment, la démarche lourde, le regard fuyant quelque chose ; qu'elle seule voyait. Chacun de ses pas — Frotch… faisaient craquer l'herbe rêche — Tchrrr... Un bruit sec, comme une plainte trop vieille pour être entendue.
Elle plia les genoux, s'effondra presque, les bras serrés autour d'elle-même. Sa respiration, lourde — Fuuuh… battait plus fort que le Vent.
Elle ne dit rien. Elle ne sourit pas. Elle ne leva pas les yeux vers lui. Comme une enfant trop fatiguée pour faire semblant d’être forte.
Un Silence.
Trop Long.
Trop Lourd.
Pas le leur.
Ce n’était plus celui des nuits complices. C’était un Silence dur. Froid... malade. Un Silence qui pleure, mais sans larmes, sans voix, juste… ce vide.
Lys resta Là, long — temps. Peut-être une heure… peut-être plus. Elle restait figée, étranglée dans ses propres bras.
Le Vent remuait ses cheveux, soulevait par moments un pan de sa veste — Frouu... frouu... comme un enfant secouant un jouet qui ne répond plus. Mais elle ne bougeait pas. l'épouvantail non plus.
Évidemment.
Mais ce jour-Là. il l'aurait souhaité.
Vraiment.
il aurait voulu tendre une main, ou juste… pencher la tête, montrer qu’il était Là, qu’il l’avait attendue, qu’il sentait ce Poids qui l’écrasait — même s’il n’avait ni chair ni cœur. Mais rien ne bougea.
Et puis, elle murmura quelques mots, enfin.
— J'ai essayé, tu sais. Être forte. De faire comme si… rien. Mais parfois, même respirer — c’est trop.
Sa voix était ténue, presque inaudible, comme si elle parlait dans un rêve — ou à un fantôme.
— Y’a eu — un accident. Un type. Un gosse en fait. Quinze ans… peut-être moins. Juste Là, sur la route...
Dans son regard, une ombre, un corps élimé par la faim, et un regard… de poisson mort.
Les oiseaux s'étaient tus. Même les Nuages semblaient suspendus, figés dans une attente. Et le Vent aussi... comme s'ils voulaient lui laisser le deuil de sa pudeur.
— Et moi... j’ai pas réussi. J’ai paniqué — J’ai rien fait...
Elle ferma les yeux, et y plaça le revers de sa paume, comme pour retenir quelque chose derrière ses paupières.
— C’est idiot, hein ? Je peux réparer. Je peux diagnostiquer. Je peux sauver…
La lueur dans son regard s'était fanée. Ne restait qu'un rictus coupable.
— Mais ce jour-Là… J'ai pas pu tendre une main. Pas su dire les mots. Alors… il est parti — Seul — et moi, plus seule encore.
Un Silence, incessant, accusateur.
...
Lourd comme la terre mouillée d’un enterrement.
Elle releva la tête vers lui. Enfin. Ses yeux gonflés de fatigue, rougis, comme si le sel avait brûlé sa chair. Ses lèvres tremblaient, et les Mots, timides, ne sortirent pas... pas tout de suite.
— Dis-moi que t’es encore Là. Toi... au moins.
Elle savait qu'il ne parlerait pas, qu'il ne pouvait pas. Mais elle le suppliait quand même, comme on supplie un rêve de rester au réveil.
Et pourtant… si ses yeux avaient pu lire les siens — elle aurait vu combien son ami hurlait.
Mais il resta Là. Muet
R
A
I
D
E
Enchaîné dans le sol.
Alors elle déposa son front... contre son épaule fait de brindilles. C'était rêche. C'était froid. Mais c'était Là. Juste un instant.
Juste…
un instant.
Et Là, ce n'était plus du bois. Plus de la paille. C'était une Présence… et cette simple illusion, suffit à la retenir de tomber.
Ce contact ne dura qu'une seconde, cette seconde brûla comme mille battements d'ailes mortes et pourtant… s'effaça, d'un souffle, comme une braise trop faible.
Et ce frôlement, minuscule, ralluma au fond de lui, un éclat, ténu, fragile, mais refusant de s'éteindre.
Section 02 :
"la Flamme vacille,
Mais l'Ombre recule encore —
Le Coeur tient debout."
je l’ai sentie trembler, juste un peu, au début — comme un coquelicot qui ploie entre deux souffles. Puis...
ça a
L
Â
C
H
É.
Ses sanglots — orages, ses larmes — déluges. Ceux qui secouent tout de l’intérieur. Ceux qui font du bruit, jusque dans la gorge — Hkk… hkk…
Elle s'est brisé comme un ciel trop plein. Sa peau brûlait et ses larmes salées accrochaient ma paille.
Chaque hoquet, br i sé, étranglés dans le souffle, secouait le Monde. Des perles irrégulières, ruisselaient sur ses joues.
Slrii...
S'éclatant contre la pierre.
plok...
plok...
Et je ne pouvais rien faire.
R.i.e.n
j'aurais voulu dire… un mot. Un souffle. Une syllabe. Faire un pas. Frôler ses larmes. Briser l'air entre nous.
Mais rien, Rien, RIEN.
Tout en moi n’était qu’Immobile, comme un tronc creux, comme du bois mort, comme un...
moi.
je n’avais pas de bras pour la prendre contre moi, pas de voix pour lui dire que ça allait passer, pas même un souffle pour chasser ce foutu froid.
je suis resté Là. Inutile. Spectateur de sa peine. Une statue sans pierre. Un pantin sans fil.
Et dans mon cœur fait de ficelle et de brindille, quelque chose s’est br i sé.
Alors, j'ai crié. Pas dehors. Dedans — Crkk !
Un cri si FORT que j'ai cru me fendre en deux. Que tout en moi allait se rom/pre.
je… je… BOUGE !!
Pour Elle !
Pour dire que tu es Là !
R
I
E
N
Pas un son ne sortit. Juste du vide… comme moi.
Chaque seconde s'e f f i l o c h a i t comme un fil d'araignée que le Vent tire, sans Jamais rompre.
Tic…
Et le Présent s'enlisait dans la glaise du vide.
Tac...
moi. j'étais Là. témoin Figé de la douleur de celle qui m'a Toujours porté.
j'ai tant de choses à lui crier, mais ma bouche est de paille. Et le Silence me tient la gorge, comme un rocher sous la pluie dont l'eau refusait de tomber.
Elle s’est calmée. Un peu... Pas vraiment. Mais assez pour respirer.
Les sanglots s’étaient tus, remplacés par ce Silence tremblant… celui d’après, celui des choses cas/sées qu’on ne sait pas re-coller.
Lys est restée Là, recroquevillée, le front posé contre mon flanc, comme si j’étais un mur… ou un refuge.
Et peut-être que je l’étais. Même sans bras. Même sans voix.
j’étais encore Là.
Alors, elle a parlé. Pas pour raconter. Pas pour expliquer. Juste quelques mots, lâchés comme on vide un verre trop plein.
— Je déteste ça. Pleurer devant toi. J’voulais être forte. J’ai toujours été forte.
je voulais la bercer…
je ne pouvais pas.
— Mais là… j’sais pas. J’suis fatiguée d’être forte. Juste… reste Là, d’accord ?
je le voulais aussi. je le voulais de tout moi. Même inutile, même muet. je resterais Là.
Lys a reniflée, essuyée ses yeux du revers de la manche, une fatigue sourde qui ne demandait qu'à parler.
Puis elle a tirée sur un pan de mon écharpe râpée — Frrt… Shh… l’a serré dans sa main comme une corde de secours, un fil entre Elle et moi.
Une chaleur douce, portée par le Vent. Son souffle me consolait d'une caresse. Pourtant, je devrais être celui qui la réconforte.
INUTILE.
Mais malgré ça, je m'efforçais de rester droit.
Et dans son geste, si minuscule, si simple — il y avait Tout ce qui restait. ce Lien. Invisible. Incassable.
moi, j’étais Là, Toujours. Et pour Elle, parfois…
c’était encore assez.
Section 03 :
"Fleur sans rosée,
Une main cherche encore —
Ce qu’elle a perdu."
Toi, la seule personne que j’ai eue dans ce monde… Tu es un écho.
Un écho qui s’amenuise, se rétrécit à chaque retour, qui s’éteint dans le vide de mes fibres.
Une Lumière derrière le brouillard. Tu me guides… mais je ne peux te suivre.
Mes pieds de bois ploient dans la terre humide, chaque pas craque comme un vieil arbre sous la pluie.
Chaque souffle que je ne peux produire résonne contre mes côtes de paille, comme une tempête muette dans un vase vide.
Printemps après printemps… Ta voix me réveille. Automnes après automnes… Tes larmes s’enfoncent dans ma paille, comme des gouttes de pluie qui imbibent un champ desséché, qui collent aux fibres, lourdes, froides, étrangement chaudes.
Et chaque hiver… me laisse un peu plus creux. je sens le Vent s’infiltrer entre mes nœuds, mon ventre de bois se contracter, mes articulations craquer dans la froidure.
Tout mon corps de brindille tremble sous la gravité de ton absence, mais il n’y a rien à dire. Rien à faire.
je n’ai Ni bouche pour te répondre, Ni souffle pour te réconforter, Ni chant.
R.i.e.n
Juste cette paille. Cette maudite —
paille.
Condamnée à vibrer sous le vent, à craquer sous chaque frôlement. Condamné au silence. Condamné à te regarder. Condamné…
je suis —
désolé…
Le Silence est dense, gluant, et il-colle à mes fibres comme la brume à la terre.
Et ce fut à cet instant ; que quelque chose, au fond de lui.
C
É
D
A.
Peut-être le hasard, peut-être une volonté… ou juste le vent.
Son bras droit se balança, lente — ment, presque imperceptiblement. Le bois gémissait dans ses articulations.
Un froissement sec, une onde minuscule parcourut chaque brin de chanvre, un frisson qui s’insinua dans ses nœuds, dans ses jointures, comme si son corps de paille, respirait, osait… pour la première fois.
Un tremblement de bois contre bois, une vibration fine, hésitante, qui parcourait ses articulations desséchées, ses fibres serrées.
Un frisson d’existence, comme un rêve qui ose… qui essaie de s'incarner.
Mais Lys ne leva pas les yeux. Elle se recroquevilla davantage, les épaules froissées sous sa veste froide, rêche contre ma poitrine de bois.
La texture de son manteau me parvenait par contact — un froid sec, presque abrasif, qui s’imprimait sur ma peau de paille, laissant une trace de réalité, un Poids que je pouvais ressentir.
Elle restait Là, Immobile, silencieuse, comme une fleur fanée, abandonnée dans un champ de cendres.
Chaque souffle qu’elle laissait échapper — un petit murmure chaud et humide — s’insinuait dans mes fibres, s’y coinçait, me rappelant la fragilité de ce contact.
Comme une enfant qui serre encore son réconfort entre ses mains, ses doigts crispés sur ma veste, ses paumes tièdes contre le bois froid.
Et moi… je ressentais Tout. Le froid qui mord, la rigidité de mes membres, la densité de chaque brindille, chaque fibre qui se tendait, tremblait, s’éveillait.
Alors que le Monde… ne lui offrait plus rien.
Je continue :)
Scrib.
Triste début en effet...
Lys qui raconte rapidement la scène, qui n'est pas intervenue, par peur apparemment. L'épouvantail toujours bien utilisé et je trouve ça toujours aussi chouette aha
Sinon, non, c'était pas trop long du tout aha c'est vraiment fluide et ça se lit rapidement.
Pas grand chose à dire de plus ça fonctionne bien :)
A plus ! ^^
C'est vrai que c'est pas un pavé de quatre mille mot. Heureusement que ça reste fluide et lisible, moi qui pensait en avoir fait trop.
Content que tout ces efforts en valaient la peine.
J'espère que la suite te plaire tout autant.
À plus.
Urukem