Lorsque l’on vous demande à quoi ressemblerait l’enfer, qu’est-ce qui vous viendrait à l’esprit ? Vraisemblablement que c’est un lieu sombre, chaud avec des flammes de plusieurs mètres de haut. Un endroit dirigé par Satan, Lucifer ou qu’importe son nom qui vous ferait regretter tous les torts que vous avez causés. Honnêtement, il y a peu, j’aurais répondu la même chose. Maintenant, je sais que tout ça n’était que foutaise. Mon enfer, l’enfer que je connais n’est rien de tout ça. Il est immaculé, glacial, sans âme. Et celui qui le commande n’est pas rouge avec des cornes armé d’une fourche, il n’a qu’une blouse blanche et est un humain banal. Un homme parmi tant d’autres à qui l’on a octroyé un trop grand pouvoir. Assic est le nom qu’il porte.
Une vive douleur au fond de ma poitrine me fait violemment revenir à moi. Mon corps se cambre, mais reste rivé à la chaise où j’ai été ligotée. Je dois m’y reprendre plusieurs fois pour réussir à avaler une goulée d’air. Mon cœur tambourine si fort dans ma cage thoracique que je me demande si mes côtes ne vont pas se briser sous le choc. Mon regard se pose sur la personne qui me fixe quelques mètres plus loin. Nos yeux se croisent une fraction de seconde avant que celui-ci détourne les siens pour s’adresser à son subordonné.
- Vous vous êtes trompés dans la dose, Hurtz. Allez vérifier ses signes vitaux.
- La machine peut très bien s’en… »
- C’est un ordre, Hurtz, coupe Assic la bouche crispée par l’irritation.
Craintivement, l’homme se rapproche de moi. Je souris intérieurement en remarquant le bandage qui lui enserre la main. À l’évidence, il n’est pas encore complètement guéri de sa morsure de la dernière fois. Ils sont idiots de croire que l’on peut se défendre uniquement avec le bas du corps. Toutefois, cette fois-ci, je ne peux rien faire. Ils ont bien retenu la leçon et ont attaché mon front au dossier du siège où je suis assise. Avec des gestes précis et rapides, Hurtz se dépêche d’accéder à l’exigence de son supérieur. Je ne réprime en rien, la répulsion que je ressens au contact de ses doigts sur ma peau. Lorsqu’il a fini, il ne demande pas son reste et retourne auprès d’Assic.
- Tout est en ordre, docteur Assic. Seuls le rythme cardiaque et la tension sont légèrement plus élevés qu’en temps normal, l’informe-t-il, puis s’enquière. Que faisons-nous ?
Un long silence s’installe tandis qu’Assic réfléchit. Soudain, il tourne les talons et se dirige à ma droite où une petite table recouverte de seringues a été disposée. D’un coin de l’œil, je l’observe vérifier ses outils avant que son choix ne se porte sur l’un d’entre eux. Son attention revient à moi, une lueur dérangeante danse dans son regard. C’est toujours comme ça, à chaque expérience, une excitation répugnante l’anime. Bien que je me refuse de montrer une quelconque faiblesse face à cet homme, j’ai beaucoup de mal à calmer les tremblements qui me parcourent. J’observe le liquide qui se balance dans la seringue. Bientôt, il sera en moi. Nouvelle douleur. Assic est désormais tout près. Je peux sentir l’odeur qu’il émet, un mélange de sang, de produits chimiques et de désinfectant. Elle me soulève le cœur à chaque fois. Toutefois, j’ignore si c’est une chance ou non, mais au moment où il s’apprête à planter l’aiguille dans ma chair, la porte de la salle s’ouvre à toute volée et un autre homme en blouse blanche entre à pas pressés. Assic se retourne quelque peu exaspéré d’être ainsi dérangé.
- Pourquoi toute cette agitation, docteur Datin.
- Comme, vous l’aviez demandé, je vous ai apporté les résultats de la prise de sang faite sur le cobaye 66.
Inconsciemment, mes yeux se posent sur la marque qui a été tatouée sur mon avant-bras. Probablement le même nombre qui se trouvait caché sous une brulure pendant des années. Il est ce que je suis ici, ce que je représente pour eux depuis toujours, un numéro. Dans ces lieux, je ne suis plus Elena Darkan, je ne suis plus colonel, seulement 66, comme le projet. Un cobaye similaire à tant d’autres qui se survit entre ces murs. Vivement, Assic redépose la seringue qu’il tenait en main. Il arrache les documents amenés par Datin et se met à les lire avec frénésie. L’instant d’après, il les déchire dans un cri et jette le tout à terre. Datin reste de marbre face à la colère du chef de la section médicale. Il se contente d’articuler lentement :
- Asymptomatique. C’est ce que nous craignons.
Assic l’ignore.
- Hurtz ! hurle-t-il.
Son subordonné qui était en train de noter quelque chose sursaute en entendant son nom.
- Oui, docteur Assic, couine-t-il.
- Doublez la dose, lui répond son supérieur.
Hurtz devient livide. Je continue à observer ce remue-ménage sans comprendre un mot de leur charabia. Toutefois, je ne me sens pas bien. Si Hurtz réagit de cette manière, c’est que ce n’est pas bon, pas bon du tout.
- V… Vous n’y pensez pas, docteur, bafouille-t-il. Le cobaye a déjà supporté difficilement la dernière injection. Les risques de ce nouveau test pourraient être irréversibles.
D’un geste, Assic le fait taire.
- À l’évidence, nous lui avons accordé trop d’importance. Quitte à perdre notre temps, autant qu’elle serve à quelque chose. Et si elle meurt, tant pis.
- Mais le maréchal… »
En deux enjambées, Assic se campe devant Hurtz et lui fourre une seringue dans les mains.
- Jusqu’à présent, je reste le chef de cette section. Donc lorsque je donne un ordre vous obéissez.
De plus en plus pâle, Hurtz hoche finalement la tête. Satisfait, Assic s’éloigne. Pour ma part, je dois être dans un état similaire à celui de Hurtz si ce n’est encore plus terrifié. J’ai compris où Assic désirait en venir, mais j’ignore pourquoi les informations de Datin l’ont mis dans une fureur aussi noire. Que voulait-il dire par asymptomatique ? Je n’ai pas le luxe de me poser davantage de questions qu’Hurtz est déjà à mes côtés. J’aimerais tant crier, mais mes lèvres restent closes. Mon instinct sait que cela ne servirait à rien. Mes mains sont crispées sur les accoudoirs. Je tente tant bien que mal de m’extraire de mon siège, mais j’en suis incapable. C’est donc, impuissante que je fixe l’aiguille qui se plante dans mon bras. Dans un premier temps, il ne se passe rien si ce n’est un léger picotement au bout de mes doigts. L’instant d’après, la douleur me coupe le souffle et mon monde s’évanouit.
Et j'ai du mal a penser que le meme nombre 66 pour le projet et le cobaye soit du au hasard....
il n’a qu’une blouse blanche et est un humain banal > peut etre plus concis en supprmant "et est", "il n'a qu'une blouse blanche, un humain banal.
Derniere phrase : peut-etre eviter la repetition de la syllable "mon" > mon monde avec un synonyme?