« Ce fût le premier contact avec les anges. Les mois qui suivirent furent des moments de doute dans l'ensemble du monde. Les scientifiques, les militaires essayèrent de comprendre d’où ils venaient, quelle était la technologie faisant voler leurs bâtiments. On appelle stoës ces bâtiments, ces structures qui flottent en l'air, et dans lesquels les anges habitent et qui forment la Cité des Anges.
Des prêcheurs annoncèrent la fin du monde, d’autres voulurent créer de nouvelles religions. Certains pays en profitèrent pour déclarer des guerres « saintes ». Mais sur tous les champs de bataille les anges apparaissaient, et détruisaient les deux camps. De manière tout à fait équitable : il n'y avait pas un seul survivant. Quelques pays tentèrent d'attaquer, la Cité volante – comme on l'appelait alors. Ce fut sans résultat, à part bien sûr les nombreuses pertes humaines et matérielles. »
C'était le dernier cours de la journée au collège St Jean Baptiste à Paris. Le dernier cours de la première journée, il y en aurait bien d'autre tout au long de l'année. Leur professeur d'histoire avait choisi de commencer par aborder l'arrivée des anges. Thème compliqué, mais, selon ses propres dires, obligatoire pour bien comprendre ce qu'était le monde avant Leur arrivée.
« Excusez-moi Monsieur, mais ils essayaient de faire la guerre contre les anges ? », en posant cette question, Davvy n'avait pu s’empêcher une grimace de dégoût quant à l'idée d’une guerre, d'autant plus contre des anges. De guerre il n'en avait jamais vécu, ni ses propres parents d’ailleurs.
Le professeur reprit son cours. Introduisant les uns après les autres, tous les bouleversements qu'avait vécus l'humanité avec la venue des anges : la démilitarisation totale, la fusion progressive de toutes les religions en une seule, la mise en place des offrandes quotidiennes dans toutes les grandes villes, l'arrêt du terrorisme.
En somme, les anges avaient apporté la paix.
* * * * * * *
A la fin de la journée, Davvy, Yann et Lise sortirent ensemble, habitants à côté, ils déambulaient doucement vers leur quartier. En chemin ils refaisaient la journée, discutant de leurs impressions, – des profs, des cours – avec l'euphorie et l'excitation d'une première plutôt réussie.
« Hé, les mioches, vous allez où ? ! »
La voix qui venait de parler n’avait rien d’amical, entre raillerie et menace. Davvy et ses amis venaient de prendre un de ces passages tortueux qui sillonnaient Montmartre. Un groupe de six jeunes – trois ou quatre ans de plus qu'eux – était installé sur les marches. C'était le genre de situation que Davvy essayait toujours d'éviter, il leur fallait : soit passer en plein milieu de l’autre groupe, soit faire demi-tour sur plusieurs dizaines de mètres. Il sentit Lise se cramponner à son poignet.
« Vous avez une langue, non ? », leur demanda d'une voix insidieuse, un garçon qui venait de sauter du muret pour se placer derrière eux, bloquant leur seul espoir de fuite.
* * * * * * *
Les coups pleuvaient. Davvy ne s'était pas rendu compte du moment où la situation avait dérapé à ce point. Un coup dans les côtes, un pied dans le dos, la douleur l'élançait, l’empêchant de penser. Une seule idée restait assez claire dans son esprit : fuir. Loin, et plus encore. Se roulant en boule par terre, il réussit à passer sous leurs jambes, bousculant un garçon au passage.
« Toi tu vas le payer, tu vas voir ! Attrapez-le les gars, qu'on s'amuse un peu » lança un des aînés. Davvy sentit leurs mains s'accrocher à lui, à ses bras, ses jambes, ses vêtements, tandis qu'il fuyait. Chacun de leur geste tendait à le ramener vers eux, tandis que dans sa tête ne tournait qu'une idée, comme un mot d'ordre : fuir !
Arrivé sur la rue, il continua à courir, tournant à droite, à gauche, encore à gauche. Sans trop savoir où il allait, il continuait de courir, toujours plus vite, toujours plus loin. La peur au ventre il n'osait se retourner. De temps à autre, le vent lui ramenait les cris de ses poursuivants. Déboulant de rues en rues, de passages en passages, il prenait les chemins les plus tortueux, les plus sombres espérant ainsi semer ses agresseurs. Des larmes coulaient, floutant sa vision, il se dirigeait dans ce labyrinthe grâce aux seules masses sombres ou claires qu'il percevait.
Poussant une palissade, il se réfugiât à l'intérieur de ce qui semblait être une cabane en bois. Il faisait sombre et, à part une légère ouverture, qui laissait voir une échelle, il n'y avait pas de lumière.
« Où il est passé, ce gosse ?! », leurs voix avaient retenti à l'extérieur de la cabane, tout proche de Davvy, relançant la cadence effrénée de son cœur. Il retint sa respiration. Son cœur battait à tout rompre, et il était sûr que tout Paris devait entendre ce tambour. Mais ils ne rentrèrent pas.
« Hé, mec, voilà des zélés, on devrait partir.
- T'as raison, on aura ce mioche demain, il comprendra que cela ne sert à rien de fuir. »
Les bruits de pas s’éloignèrent. Davvy ne profita pas de ce répit, se demandant qui pouvait bien être ces "zélés". Allongé, en chien de fusil, la douleur des coups qu'il avait reçus le terrassait. Il les voyait de nouveau frapper Yann. « On l'aura demain », « Il va comprendre ». Les mots tournaient en boucle dans sa tête. Le moindre bruit le terrorisait. Mais il était incapable du moindre mouvement. Tétanisé il attendait, que le temps passe, que le lendemain arrive, avec son dénouement.
* * * * * * *
D'un coup la cabane se mit à bouger. Davvy pensa tout d'abord à un tremblement de terre. La cabane était secouée, comme si elle était levée d'un côté puis de l'autre. Il se rendit compte que depuis cinq minutes, les bruits de la ville s'étaient tus. Il rechercha la planche qui lui avait permis de rentrer, espérant pouvoir sortir, et comprendre ce qui arrivait. En vain. S'avouant vaincu, il se dirigea vers la seule lumière, la trappe avec l'échelle, titubant d'un côté à l'autre pour trouver un équilibre, à la manière d'un ivrogne ou d'un marin.
Soulevant une trappe, il se trouva, à l'extérieur, inondé de la lumière du soir. Une fois ses yeux habitués, il vit les immeubles alentours descendre doucement. N'en croyant pas ses yeux, il se rapprocha du bord, de ce qui ressemblait maintenant à une très grande péniche. Le sol s'éloignait de lui, doucement, une multitude de personnes regardait la barge s'élever, dans une attitude de déférence.
Avant même de lever les yeux en haut, il sût ce qu'il allait trouver. Quatre anges, gigantesques – des Convoyeurs – portaient les quatre coins de la barge à l'aide de cordes. Leurs ailes s'activaient pour les faire voler. Il était monté à bord d'une barge d'Offrande. L'offrande que Paris faisait tous les jours aux anges. Déjà il était plus haut que la Tour Eiffel, et il voyait la ville s'éloigner lentement.
Les anges ne semblaient pas l'avoir remarqué. Sur la barge, des fruits, des tonnes de fruits données aux anges en remerciement de leur bienveillance. Une offrande pour leur protection ; une offrande en remerciement de la paix qu'ils avaient amenée depuis trente ans déjà ; une offrande pour l'espoir qu'ils représentaient.
Alors que Paris n'était déjà plus qu'un point sur la terre, Davvy redescendit dans la cale. Il avait du temps avant que la barge n'atteigne leur destination : La cité des Anges. La cité des Anges, il serait sûrement le premier homme à y rentrer ; s’ils ne le tuaient pas avant. Au tout début n'avaient-ils pas tué tous ceux qui s'approchaient ?
Accroupis, tremblant de peur, il s'endormit, rêvant d'anges, de guerre, de coups de pied, de poing. Devant ses yeux, les images dansaient dans un rythme cauchemardesque, un œil en sang, des épées luisantes, une lame qui brillaient sous sa gorge, des mains l'agrippant, des cris de joies, de terreur et de peine.
J'ai remarqué une petite faute :
"à part bien sur les nombreuses " -> bien sûr
Merci pour la faute, je la corriges. (et te prie de m'excuser pour les autres que tu ne manqueras pas de voir.)
- "quelles était la technologie faisant voler leurs bâtiments." quelle
- "A la fin de la journée, Davvy, Yann et Lise sortirent ensembles, habitants à côté" ensemble, habitant
- "La voix qui venait de parler n’avait rien d’amicale" amical
- "Arrivé sur la rue, il continuât" continua
Bonne continuation !
(oui, désolé pour les fautes, j'ai beau me relire .. je les corriges dans la soirée, merci de me les faire remarquer)
Au plaisir
Juste 2petits détailles:
-dans ta présentation de l'histoire, tu dis que ça fait 20ans que les Anges sont là, et ici tu dis 30 (compte tenu du fait que les parents de Davvy n'ont pas connu la guerre, 30 me parait un meilleur chiffre)
-on comprend bien que le groupe de jeune est juste un groupe de brutes, mais ça pourrait, éventuellement, être interessant de les développer un poile plus, pour savoir pourquoi ils le tabassent...
Je note l'idée de développer un poil plus les brutes. J'avoue que le 'pourquoi' ne me servait à rien, aussi ai-je fait au plus simple. Mais il ma faudra peut-être songer à quelquechose qui ait du sens vis à vis de l'histoire.
Idée à creuser.
Merci pour tes remarques
Tu écris vraiment bien, c'est professionnel, fluide et plaisant à lire ! Et jusque-là, l'histoire est original ! Bref, que des points positifs, tu mériterais plus de lecteurs :)