Chapitre 1 : Retour innatendu

Notes de l’auteur : May (Part1) Cole(Part2)

7 ans après:

Je finalisai les derniers bouquets, plaçant Jacinthe et Narcisse. Le mélange de violet et de jaune que les deux offraient, formait une idylle parfaite. Je soupirai, heureuse de ce havre de paix que j'avais pu confectionner de mes mains. Je regardai dehors, par-delà la vitrine de ma boutique, il pleuvait à verse. Un jour triste, gris et dévalorisant, voilà ce que m'incitait comme poésie la pluie. Un an s'était passé, depuis que j'avais eu le courage de réaliser mon rêve : ouvrir un commerce de fleurs, où j'étais ma seule patronne et employée. Être entourée de fleurs, de cette odeur délicieuse et de ces sourires que je faisais naître sur les visages de mes clients, voilà ma définition même du bonheur. J'étais heureuse de pouvoir participer à des unions, des baptêmes, des fêtes, des anniversaires, et triste de représenter des services funéraires. J'ai toujours été trop empathique. Alors les larmes de bonheur ou de tristesse parlent d'elle même parfois. Certains disent que je suis trop gentille ou trop fragile, mais je pense que j'apprécie la vie à sa juste valeur, vivant chaque instant comme le dernier. Brise, mon chat blanc, se léchait tendrement la patte avant, monopolisant mon tabouret. Un long sourire s'étira sur mon visage, appréciant ce calme moment de tranquillité. Dans quelques minutes, neuf heures sonneront, et des dizaines de personnes entreront dans ce petit paradis, que je façonnais tous les jours. Je vérifiai les derniers détails, les vases étaient pleins, les épines avaient été enlevées des roses blanche et rouge, et la chaleur de la pièce réconfortait l'ambiance par ce temps pourri. Les heures défilèrent ensuite, aussi vite qu'une voiture sur une piste de rallye. L'argent rentrait à foison dans les caisses, malgré mes bas prix, et je remerciai mes ancêtres de m'avoir trouvé pareil local, planté au milieu du centre-ville piéton. Le temps ne s'améliora pas, lui. Nous exposant inlassablement ses nuages noirs et son vent froid. Les gouttes tombaient sur les vitres, laissant des traînées blanches en séchant.

- Il me suffira de nettoyer demain, maugréai-je optimiste.

Belle journée, si vous voulez mon avis. La seule façon dont j'allais fêter mon vingt-cinquième anniversaire, c'était seule, dans mon appart, avec mon chat et la pluie. Mes amies, parties vivre à l'autre bout du pays où à l'étranger, ne pouvaient pas sortir, restant dans leurs villas avec leurs enfants et leurs maris. La seule qui n'avait pas de copain, c'était moi. Aussi seule depuis plus de dix ans, les petites relations ne comptant pas. Il y avait eu un garçon, Paul. Aussi charmant que mes chaussettes avec des vaches. Il m'avait largué au bout de six mois, prétextant être allergique aux fleurs. Je riais, me rappelant que d'après lui, il n'avait pas besoin de m'acheter des bouquets, car j'étais fleuriste. Je vous avais prévenu, très charmant. Aussi galant qu'un gentleman dans les romances. Je rangeais les dernières affaires sur mon comptoir, espérant en finir vite pour retrouver mon lit et mon livre. La clochette d'entrée retentit, signalant l'arrivée d'un client.

- Je suis fermée, déclarai-je sans me retourner.

- Cela ne prendra que quelques minutes, annonça une voix grave.

Elle était sensuelle, me donnant de petits frissons dans la colonne vertébrale.

- Je n'ai plus de fleurs, répondis-je en me retournant, Monsieur.

Un homme élégant se tenait sur le pas de la porte, vêtu d'un costume valant une fortune. Il tenait un joli bouquet de lys dans sa main droite, l'autre dans sa poche. Son visage était parfait, un long sourire irrésistible, des yeux aussi profonds que l'océan, et des cheveux bruns en bataille.

- Vous avez déjà un bouquet, lui fis-je remarquer.

- Je sais.

Je le regardai suspicieuse.

- Que voulez-vous alors? Il ne vous plaît pas?

Il rigola d'un rire que j'avais entendu des centaines de fois. Un rire chaleureux, enfantin, sans mensonge, sans peine. Ce n'était pas possible, mes souvenirs me jouaient des tours.

- Aïe, me dit-il, je ne pensais pas avoir autant vieillit.

C'était bien lui. Ma respiration se bloqua, et mes pensées partirent à toute fusion. Que faisait-il donc ici?

- Cole? Murmurai-je.

- Bonjour, Anderson. Me répondit-il.

- Je n'en reviens pas! M'écriai-je. Que fais-tu ici?

J'observai de nouveau sa tenue. Venait-il de sortir du travail? Son costume était trempé, faisant apparaître ses muscles sous sa chemise. Je déglutis.

- Bon vingt-cinquième anniversaire, me souhaita-t-il en me tendant le bouquet.

Je lui fis des yeux doux.

- Merci, chuchotai-je émue.

Je reniflai les fleurs, mes préférées. Était-ce une coïncidence où il s'en était vraiment rappelé? Il s'approcha de Brise et lui caressa les oreilles. "Elle va le mordre" pensai-je. Brise détestait qu'on la touche sans son autorisation, seule moi pouvait l'approcher. Elle accueillit sa main avec un doux ronronnement, et se frotta contre lui.

- Étrange, marmonnai-je.

- Tu as dit?

- Rien, le rassurai-je en mettant les fleurs dans un grand vase en cristal. Parle-moi de la raison de ta venue, dis-je en changeant de sujet, tu n'es pas d'ici, alors je doute que tu sois passé seulement pour cet anniversaire.

- Eh bien, je suis venu respecter ma promesse.

- Ta promesse?

Il attrapa une mèche brune qui me retombait sur la joue, et la remit d'un geste calme derrière mon oreille, ses yeux plantés dans les miens.

- Celle du bal de promo.

Je réfléchissais à toute vitesse, essayant de ne pas être déstabilisée par son regard pénétrant. Le bal de promo. Cette soirée remontait à loin dans ma mémoire, plus de sept ans.

- Tu ne t'en rappelles pas? Me demanda-t-il déçu.

Ma jambe se secoua. Il fallait que je trouve. Pour mon plaisir personnel, il fallait que je trouve la réponse à cette énigme. Finalement, je secouai la tête, abattue.

- Laisse-moi te rafraîchir la mémoire, susurra-t-il dans le creux de mon oreille.

Je frissonnai, essayant de ne pas rougir. Mon regard s'ébruita une seconde sur Brise, se détachant de lui. Elle coursait une coccinelle pour jouer, et l'attrapa entre ses griffes.

- Brise! La réprimandai-je.

Elle lâcha la petite bestiole qui repartit se cacher derrière un pot. Je tournai la tête pour reposer les yeux sur Cole. Il était à genoux devant moi, un doux sourire sur les lèvres. Sa main tenait un joli boîtier rouge en velours, qui accueillait en son sein une magnifique bague en diamant. Elle avait l'air de coûter plusieurs milliers d'euros.

- Qu'est-ce que tu fais? Le questionnai-je en paniquant.

- Il y a sept ans, lors du bal de promo, je t'ai proposé de m'épouser à nos vingt-cinq ans si aucun de nous n'était dans une relation sérieuse. Je suis ici pour honorer cette promesse, faîtes entre deux vieux amis. Alors, May Anderson, veux-tu devenir ma femme?

Toutes pensées fusèrent dans ma tête. Confusion, mélodrame, joie, peur, tristesse, incompréhension. Je fixai ses yeux, attendant un sourire sur son visage pour me prévenir de sa blague mais non, aucun trait de son visage ne se déforma. Il resta sérieux, pendant de longues minutes, aussi interminable que d'attendre une place dans le RER pendant les heures de pointe. Je ne pouvais pas devenir sa femme. Je ne pouvais pas l'épouser. Car même si mon cœur me dictait de tout laisser tomber et de partir avec cet homme qui jadis avait fait battre mon cœur, il restait sur ses gardes, ayant peur de l'avenir. Je n'étais qu'une petite fleuriste ayant ouvert une boutique, il était désormais un riche homme d'affaires en quête de pouvoir. Nos mondes étaient opposés, nos mondes étaient différents, et aucun événement ne pouvait rétrécir le fossé qui s'était creusé entre nous. 

Cole

Ses yeux s'agrandirent de stupeur, ses cheveux tombant gracieusement sur ses joues. Elle était aussi belle que dans mon souvenir. Un visage radieux, des yeux bleus magnifiques, aussi enchantés qu'un arbre de Noël qui exhibait son parfum épicé. Son sourire me faisait toujours autant craquer, et pour la première fois de ma vie, je ne regrettais pas mon action passée. Cette proposition, que je lui ai faîtes, sept ans plus tôt, était la bénédiction de ma vie.

- Relève-toi, siffla-t-elle entre ses dents.

Mon genou me faisait atrocement souffrir, mais je ne pouvais terminer ce que j'avais entrepris.

- Tu ne m'as toujours pas répondu, lui fis-je remarquer.

Elle était nerveuse. Je le voyais bien par ces regards répétitifs au-dehors, où sa jambe qui se secouait au rythme des battements de son cœur.

- Je ne peux pas, déclara-t-elle enfin.

Mon esprit s'embruma. Pourquoi avais-je cru que ça serait aussi facile? Elle était compliquée, aussi abrupte qu'un sentier de montagne. C'est ce qui me plaisait chez elle. Je me relevais doucement, mettant fin au sacrifice de ma jambe blessée.

- Pourquoi? La questionnai-je.

Ses yeux de biche me regardèrent avec pitié.

- J'ai un petit copain. M'annonça-t-elle.

La menteuse. Quand May proférait des mensonges, son nez tressautait. Un petit mouvement, difficile à voir, mais que j'avais remarqué au fil des années. Je ne lui avais jamais avoué, de peur qu'elle s'énerve et arrête de faire ce geste répétitif qui accentuait son charme.

- Tu mens.

- Pas du tout, continua-t-elle, il s'appelle Paul, ce sont nos un ans dans une semaine.

- Vos un an? Insistai-je.

Elle acquiesça, et je réduisis la distance entre nous. Je la déstabilisais, je le voyais bien. Tout son corps tremblait dès que je m'approchais. Elle jouait nerveusement avec la brettelle rouge de son soutien-gorge, augmentant mon désir de la faire mienne.  L'effet que je lui faisais réchauffait mon cœur, me rassurant sur le fait que tout n'était pas perdu. Tu avais peut-être vu cette promesse comme une blague, Anderson, mais à l'époque, ça avait été mon moyen de t'avouer mes sentiments. Des sentiments que j'avais cachés depuis bien trop longtemps, par peur que tu m'échappes.

- Anderson, il est 20h, c'est ton anniversaire. Où est-il? Lui chuchotai-je à l'oreille.

- Ok! Râla-t-elle. Je n'ai pas de petit ami, mais cela n'empêche pas que je ne puisse pas t'épouser.

- Et pourquoi?

- Parce qu'on ne s'aime pas, dit-elle de but en blanc.

Ouche. Cette phrase me transperça le cœur, les poumons, tous mes organes vitaux, comme des lames acérées de venin.

- Un mariage de convenance, inventai-je précipitamment.

Nous verrons la suite plus tard. Pour l'instant, je devais juste la convaincre de rester avec moi.

- Un mariage de convenance? S'étonna-t-elle.

- Oui, liés par un contrat, balbutiai-je, tu seras payée pour te faire passer pour ma femme lors des événements officiels de mon entreprise, sinon, nous ne seront rien de plus que de vieux amis qui se rendent service.

Elle fit mine de réfléchir. Chose qui lui donnait un petit air d'écureuil. Avais-je gagné? La peur me crispa l'estomac lorsque son visage s'assombrit.

- Non.

- Pourquoi? Criai-je presque.

- Je ne suis pas une escorte Cole. Trouve-toi quelqu'un d'autre.

Elle avait raison sous ses airs de rebelles. Je secouai ma main dans mes cheveux et parcouru sa boutique de long et en large. Aucun de nous ne prononça la moindre parole. L'endroit était mignon et joli, à son image. Les étagères en bois élancées prenaient place sur les murs, accueillant vase vide par cette heure. Son chat sauta du rebord de la fenêtre, et se frotta à mes jambes. D'après ce que j'avais compris, elle s'appelait Brise. Un magnifique nom pour cet animal à la fourrure blanche et aux yeux bleus. Je regardai au-dehors, admirant les rues mouillées et les lampadaires qui diffusaient une lueur jaune sur le sol. May était derrière moi, les bras croisé sur sa poitrine. Une femme attira mon attention, même si celle-ci était entièrement dévoué à mon amour d'enfance. Elle était élancée, les cheveux blond platine, des habits provoquant, elle me rappelait quelqu'un que j'essayais à tout prix d'éviter. Non. Elle était quelqu'un que je voulais à tout prix éviter, et elle se dirigeait colériquement vers nous.

- Oh, oh. Marmonnai-je.

Je pris le chat avec moi, pour je ne sait quelle raison, et me précipitai derrière le comptoir, au grand étonnement de May. J'étais terré, au sol, essayant de devenir invisible.

- Cole? M'interrogea-t-elle.

Je mis un doigt sur mes lèvres, espérant qu'elle comprenne ma soudaine folie. La cloche retentit, et la porte claqua.

- Puis-je vous aider? Clama la voix de May.

- Où est-il? Hurla la nouvelle venue.

Une petite explication s'impose. La femme qui était entrée dans la boutique était une folle, répondant au nom de Carol. C'était la femme d'un associé de ma boîte. Elle avait notre âge, mais son mari en avait trente de plus. Alors, en me rencontrant il y a quelques semaines, elle s'est mise en tête que nous étions amants, alors que je ne lui avais même pas tenu la main une seconde.

- Je sais qu'il est ici! Vociféra-t-elle. Je l'ai suivis.

Elle en était fière, croyez-moi.

- Vous l'avez suivi?

May paraissait décontenancée, ne sachant plus quoi trop en penser.

- Bichounnet! Hurla Carol en secouant ses cheveux.

- Bichounnet?

Elle faisait le tour de la pièce, me cherchant.

- Colinou, mon amour!

Je rentrais encore un peu plus la tête dans mon costume, priant pour qu'elle abandonne. Je soupirai de désespérance. Comment pourrai-je convaincre May après ça?

- Excusez-moi, vous le connaissez? La questionna-t-elle.

- Je l'aime! Déclara l'autre folle, et vous?

Brise s'échappa de mes bras, et je voulus la rattraper dans un dernier geste pour ne pas attirer l'attention. Trop tard. J'étais désormais allongé au sol, le chat dans mes bras, aux pieds de May. Carol m'examina de la tête au pied, avant de se retourner vers May. Elle, me regardait, observant la panique présente dans mon regard. Elle réfléchissait à toute vitesse, je le remarquai. Mais l'ombre qui habitait ses yeux, m'était, elle aussi, habituelle. Elle avait le même regard qu'en seconde, quand son amie s'était mise en couple avec son coup de cœur. De la jalousie. Voilà ce qu'elle exprimait. Je lui souris. Un sourire taquin qui la mettait hors d'elle.

- Oui, je le connais bien, commença-t-elle en me fixant, c'est mon fiancé.

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Princesse Devil
Posté le 23/07/2024
C’est qui cette Carol elle se prend pour qui 😑
Moi par contre je veux bien t’épouser Cole 😂💍
May qui ne comprend rien mais elle n’est pas non plus désintéressée juste surprise je pense 😌
Leyslav
Posté le 16/07/2024
Je vais pas te mentir j'ai eu peur au début, en plus la manière dont il lui a demandé en mariage était trooop mignonne. En tout cas May a une drôle de façon de dire oui xD
jaimeecrire23
Posté le 17/07/2024
:) c'est vrai<3
Vous lisez