La voiture freina sous un ciel de bruine, s’arrêta devant la voie ferrée. Eemke serrait fort son volant et ne parlait plus depuis le départ du Château. Son corps était noué de tensions : elle risquait gros en m’amenant ainsi à la ville. La locomotive et ses wagons de marchandises fendirent l’air en soulevant des trombes d’eau. Le battement des essuie-glaces ne parvenait pas à éclaircir notre vision. Quand les barrières se levèrent, Eemke oublia d’enlever le frein en démarrant et nous traversâmes les rails en cahotant. J’eus la pensée idiote que notre train était peut-être déjà parti alors que nous avions deux heures d’avance.
Après une longue ligne droite entre les champs, les premiers toits d’Osivel apparurent, ruisselants de pluie. Nous parcourûmes le chemin inverse de celui de ma fugue, comme si l’on était en train de me ramener à la ferme. À cette simple pensée, un frisson me parcourut. Après ces semaines à la bibliothèque, je ne pouvais plus l’envisager. Le freinage d’Eemke dispersa ses noires pensées. En levant les yeux, j’aperçus le dôme de la gare, entouré de dizaines de travailleurs des villes alentour. Le courage me manqua à l’idée de me mêler à cette foule mais ce n’était rien en comparaison des risques qui m’attendaient.
Je claquai ma portière l’estomac noué. Avant d’ouvrir ma portière, je fermai les yeux quelques instants, ralentis ma respiration en espérant me calmer. Mes efforts se heurtaient à la certitude que le plan d’Hinnes ne pouvait qu’échouer. Malgré toute sa conviction, le soutien d’Eemke, mon cerveau refusait l’éventualité d’une issue positive. Quand on a échoué toute sa vie, réussir effraie.
Eemke ouvrit ma portière et me tendit la main. Je m’y accrochais comme à une bouée au milieu du tourbillon de mes pensées. Mes sandales claquèrent sur le trottoir mouillé, je dus enjamber plusieurs flaques. Bientôt, nous traversâmes l’écran de fumée qui s’élevait des pipes de plusieurs groupes d’hommes. La plupart portaient les salopettes bleues de l’usine textile d’Usival. La moitié des hommes de la ville y travaillaient.
Le plus gros de la foule se trouvait à l’intérieur de la petite gare, amassée autour des quelques bancs de fer. À la vue d’une vieille femme allongée contre un mur, je repensais à la nuit sous le pont. Voyant que je la regardais, elle me salua mais je ne pus que faire un pas en arrière. Il lui manquait plusieurs dents et elle empestait l’alcool. Attristée par cette vision, je me demandai s’il était possible que je vienne à lui ressembler un jour. Tous les livres disaient le temps cruel.
Après avoir traversé le brouhaha des conversations, Eemke me fit enjamber une petite barrière blanche. Son assurance eut raison de mes réticences. Nous avançâmes sur le quai entre deux trains tous feux éteints dont les longues silhouettes allaient se perdre dans la brume du matin. Un gros homme se tenait bras croisé entre eux, juste devant nous. Il avait des moustaches blondes taillées en pointe, un petit béret et surtout un uniforme rouge. À me grande surprise, cela n’inspirait pas la moindre peur à ma guide. Elle alla embrasser l’inconnu qui la serra de son seul bras droit.
— Ma petite Eemke, je suis content de te voir.
— Moi aussi. Merci beaucoup de ton aide, Ludi. Je te présente Hildje.
Ludi me tendit la main tandis qu’un sourire lui éclairait le visage. Il manqua de me briser le poignet sans perdre sa bonhomie. Puis il se tourna vers Eemke en ignorant ma grimace.
— J’espère que tout va bien pour toi maintenant. Si jamais ça va mal, tu sais bien qu’on serait très heureux que tu reviennes dans l’équipe. Celle qui a pris ta place n’est qu’une imbécile prétentieuse, elle n’arrête pas de se disputer avec les conducteurs.
S’ensuivit un long monologue sur les conditions de travail des contrôleurs. Eemke sourit devant ce récit, émue par l’enthousiasme de son ancien collègue. Elle finit par intervenir :
— Tout va bien pour moi, ne t’inquiète pas. Merci beaucoup pour ton aide, je ne sais pas ce que j’aurais fait sans toi. On monte dans quel wagon ?
Ludi nous fit avancer jusqu’au bout du quai et déverrouilla les portières d’une longue clé cuivrée. Les lumières intérieures s’allumèrent. Je fis un pas et… Ma gorge se noua, je reniflai et l’émotion me gagna. C’était comme si tous les barrages d’un système de canalisation avaient cédé en même temps. Rien ne pouvait arrêter ce flot. Je sentis mon nez piquer, mes yeux se mouiller. L’instant suivant, ma joue était contre le manteau d’Eemke. Elle murmura :
— Oh, Hildje.
En réponse, je parvins seulement à bafouiller trois mots mêlés de sanglots :
— J’ai peur.
— Ça va aller. Ludi va te couvrir. On a tout prévu avec lui, Hinnes est au courant. Quand le train démarrera, il ne pourra plus s’arrêter. Tu sais ce que tu dois leur dire. Et quand ils appelleront le Château, je serai au bout de la ligne. Tout ira bien. Je te le promets. Vas-y, Emisal t’attends !
Dans ma vie, rares étaient les adultes à avoir tenu leurs promesses. Pourtant, je voulus croire à celle d’Eemke. Je séchai mes larmes et grimpai dans le wagon. Ludi m’ouvrit les toilettes et m’enjoignit d’y rester jusqu’à ce qu’il vienne me chercher. Je m’assis sur la cuvette, trop serrée pour pouvoir écarter les coudes et laissai mon regard mourir sur le miroir sale accroché au mur. Le pas d’Eemke résonna quelques secondes puis il n’y eut plus que le bruit du vent. Ludi sortit du train à son tour et j’entendis sa clé tourner dans la porte. Les lumières s’éteignirent.
Je ne pouvais plus qu’attendre.
*
Malgré la large silhouette de Ludi devant moi, je craignais d’être remarquée par tous les passagers. Le regard plongé sur le sol, j’enjambais les sacs, évitais les coudes et les jambes. Parfois, mon guide s’arrêtait pour répondre aux passagers et j’avais l’impression qu’on me scrutait en se demandant ce que faisait cette fille derrière le contrôleur. Je craignais aussi de croiser un autre uniforme rouge, susceptible de démasquer la supercherie.
Enfin, nos pas arrivèrent devant la portière du wagon suivant et je sus que l’instant décisif approchait. Déjà, je pouvais entendre les cris, les mots et les murmures de dizaines d’enfants frustrés d’être enfermés plusieurs heures. Ce vacarme me rappela celui de la cour de récréation et je voulus faire marche arrière. Affronter les regards de tant d’enfants et adultes inconnus me terrifiait. Je ne pouvais m’empêcher de penser qu’ils sauraient qui j’étais, que je n’avais rien à faire ici. Ils se moqueraient de moi, me renverraient à la ferme. Je regrettais déjà mes livres et le silence des nuits de printemps.
Une seule certitude me tint dans cette nuée de doutes : Hinnes m’attendait. Alors j’avançais, avec autant d’appréhension qu’un animal envoyé à l’abattoir. Derrière la porte, deux petites se disputaient une carte pailletée de rose, qu’elles finirent par déchirer avant de s’écarter devant Ludi. Il y avait des enfants de tous les âges, plus excités les uns que les autres. Deux jeunes femmes tentaient en vain de maintenir le calme. Des petits pleuraient, d’autres jouaient avec leur nourriture, des grands chantaient de leurs voix nasillardes, d’autres embêtaient leurs voisins, le reste des enfants se tenaient en retrait en regardant leurs fenêtres. Enfin, je vis Hinnes, assis au bout. Revigorée par son sourire, je me hâtai de le rejoindre, il me désigna la place vacante à sa droite. Je m’assis entre lui et la fenêtre. Soulagé, il posa sa tête contre mon épaule en chuchotant :
— Te voilà enfin. J’ai eu peur.
— Ils vont me reconnaître, je…
— Ne t’inquiète pas, personne ne se connaît ici, il n’y a que…
— Hildje !
L’homme qui avait interrompu Hinnes venait de l’arrière et sa voix m’était familière. Elle appartenait à Daanio. Je me souvins du bel animateur venu me présenter Emisal un an plus tôt. Malgré sa barbe brune, il avait le même sourire éclatant et la même chemise rouge que lors de notre rencontre. J’étais partagée entre la joie de la voir et la crainte d’être découverte. Hinnes posa une main rassurante sur ma jambe en rendant son sourire à Daanio.
— Ça me fait plaisir de te voir, j’étais un peu triste que tu ne sois pas là l’année dernière. Mais dis-moi, pourquoi est-ce que je ne t’ai pas vu au Château ?
— Je suis accueillie dans une famille maintenant.
— Oh ! Et comment ça se passe ?
Je ne pus mentir mais mon silence eut l’intérêt de calmer la curiosité de Daanio. Regrettant cette question indélicate, il se hâta de changer de sujet :
— Tu as mangé ? Non ? Bon, je t’apporte quelque chose.
Puis il tourna les talons, allant gronder les perturbateurs de l’allée. En le regardant s’éloigner, je craignais de m’éveiller à chaque instant. Il ne m’avait rien dit. Il ne me soupçonnait pas. Et à chaque seconde, j’étais plus proche d’Emisal. Ce ne pouvait être qu’un rêve.
Le bruit se calma avec l’avancée de l’après-midi. Les plus jeunes s’endormirent tandis que les plus âgés sortaient les jeux de carte. Tous les animateurs vinrent me saluer, me demander mon prénom. Je me détendis peu à peu, voyant qu’aucun n’entretenait de soupçons. Je laissais mon regard s’égarer dans les champs, les bois, les marécages, les lacs, les plaines et les collines. Le train s’arrêta dans plusieurs villes mais personne n’entra dans notre wagon, sans doute réservé aux enfants de la colonie.
Bercée par le roulement du train, je songeai aux soirées que j’avais passée à observer les locomotives et leurs longues traînées de fumée. Mon rêve d’évasion se réalisait. À cette heure, je devais me trouver à mille lieues de la ferme, fonçant vers le sud du pays. Jamais plus qu’à cet instant, je ne m’étais sentie libre. À côté de moi, Hinnes s’était endormi sur mon épaule, sans doute soulagé que je sois partie avec lui. Sa lente respiration me réchauffait le cou et sa main m’enveloppait le coude. C’était doux, apaisant. J’aurais voulu que ce trajet dure jusqu’à la fin du monde.
*
— Les grands avec moi !
Trois animateurs se démenaient pour nous séparer en tranches d’âge. À ma plus grande joie, c’était Daanio qui nous appelait, déjà entouré d’une dizaine d’adolescents. Hinnes et moi nous rangeâmes derrière eux, les mains jointes. Deux filles pouffèrent en nous voyant arriver et je lâchai un peu honteusement mon ami. Je ne voulais pas qu’on se moque de lui à cause de moi. Hinnes ne parut pas s’apercevoir des rires et me reprit la main aussitôt. Je ne sus s’il était aveugle ou courageux.
Comme nous attendions que les petits acceptent de se calmer, je pus un peu observer notre nouvel environnement. Le bus qui nous avait convoyés depuis la gare s’était arrêté devant trois grandes maisons de pierres blanches. Nous étions devant la plus grande, dont le toit dépassait les cimes des pins alentour. Ses larges colonnades supportaient quatre étages de balcons et un toit d’ardoise. Deux escaliers à balustrade entouraient les murs extérieurs, des tissus et linges y séchaient au soleil.
Tout autour de nous, une végétation luxuriante prenait racine sur le sol sableux. À l’ombre des conifères et d’un gros olivier, arbustes et buissons ployaient sous un vent doux tandis que la lumière de l’après-midi habillait les fleurs d’un halo resplendissant. Des hortensias mauves aux magnolias carmin, c’était à qui arborerait les plus belles couleurs. Aucune n’égalait cependant les élégantes étoiles blanches des branches de sureau.
Aujourd’hui encore, je peux revoir cet endroit comme je l’ai vu la première fois. Un paradis de nature et de soleil, trop beau pour mes yeux habitués aux ruines poussiéreuses et aux chemins boueux. Je peux encore entendre les sauterelles et des grillons dont le chant me paraissait venir de la terre elle-même. Je peux encore sentir la sueur couler dans mes cheveux et dans mon cou baigné de soleil. Je peux encore humer les lointains effluves des pétales de jasmin. Je sais que je ne pourrais jamais plus être aussi émerveillée que le jour où je découvris cet endroit.
Enfin, nous avançâmes sur un chemin de cailloux blancs. Nous étions une vingtaine de garçons et de filles entre quatorze et seize ans. À part Hinnes et moi, personne ne se connaissait, et nous suivîmes Daanio dans le silence. Derrière la première maison, le chemin bifurquait. Il menait d’abord à un carré d’herbe tondue, avec des balançoires, un bac à sable, une piste de mini-golf, un terrain de pétanque. Un deuxième amenait à un large rectangle azur encadré de blanc. Une piscine.
Je la regardai avec un mélange de fascination et de crainte. Les rayons de soleil jouaient sur ses vaguelettes plus bleues que le ciel. Quelques bourdons s’aventuraient à sa surface, ignorant leurs congénères noyés, peut-être rassurés par son doux clapotis. Une adolescente se tenait allongée sur une chaise de toile, à demi nue. Sa peau cuivrée baignée de lumière happa mon regard. Elle était belle. Si un livre ouvert lui cachait le visage, je pus apercevoir ses cheveux blonds bouclés qui formaient comme une auréole dorée autour de sa tête. Plusieurs mèches étaient teintées de rose. Comme Givke.
Voyant mon sourire s’évanouir, Hinnes resserrait sa poigne sur mes doigts. Je détournai le regard et me hâtai d’avancer pour rattraper le groupe de tête. Presque malgré moi, j’entraînai mon ami sur le bord du chemin, pour m’éloigner autant que possible de la piscine. Nous arrivâmes derrière la deuxième maison et découvrîmes un enclos et de petites maisons de bois avec des chèvres. Alors que tous allaient les caresser, je demeurai en retrait. Repenser à celle que j’avais abandonné avait brisé toute insouciance et l’amertume l’emportait sur l’admiration.
— Ça va, Hildje ?
— Oui. C’est juste que… J’ai rencontré une fille à la ferme et j’aimerais qu’elle soit là.
— Je vois. Et bien elle viendra avec nous l’année prochaine !
— Impossible.
— Comme c’était impossible que tu sois là cette année. Allez viens, Hildje, profite un peu. Je suis là, moi.
Je m’en voulus de gâcher ce qui devaient être les plus belles heures de notre amitié. Je pris sa main. Mon regard plongea dans le sien. Il était beau, avec ses dents blanches, ses yeux rieurs et sa peau brillante de soleil. Pour la première fois, il me donnait l’impression d’être heureux. Ma présence était plus qu’une consolation dans un quotidien grisâtre, elle était un cadeau de vacances.
À l’appel de Daanio, nous marchâmes vers la troisième maison. La nôtre. Il nous fit nous ranger le long de la porte et fut rejoint par deux collègues. Ils commencèrent à nous appeler les uns après les autres, par groupe de filles ou garçons. Quand je compris qu’ils nous séparaient pour les chambres, je voulus protester mais Hinnes m’apaisa d’une caresse.
— T’inquiète, on se retrouve au repas.
Je réprimai difficilement ma colère en voyant Hinnes s’éloigner avec des inconnus. Je m’aperçus qu’il ne restait plus que moi et trois autres filles. Deux d’entre elles murmuraient à voix basse et j’eus la sensation qu’elle se moquaient de moi. La dernière avait le regard perdu sur le sol et se rongeait les ongles.
— Julve, Miil, Hildje et Mateja, vous êtes au rez-de-chaussée, annonça Daanio. Vous pouvez suivre Sivline.
Nous nous retrouvâmes donc à emboîter le pas à l’animatrice, une petite femme au crâne rasé avec des anneaux dorés aux oreilles. Après un hall rempli d’armoires de matériel aquatique en fouillis, nous pénétrâmes dans un couloir peint de blanc avec des empreintes de main peintes sur le mur. Au bout, une porte vitrée dévoilait un sentier de pierres. Il y avait deux portes face à face, avec des écriteaux : les Mouettes et les Bigorneaux. Sivline nous montra la première.
— Vous dormirez ici, juste en face de moi. Voici la clé. Je vous laisse vous installer, appelez-moi si besoin.
Elle posa la clé dans la main de Miil, toujours perdue dans ses pensées. Aussitôt, Mateja la lui arracha :
— Donne ça, la gourde.
L’emploi de ce surnom raviva mes vieilles colères écolières. Il avait été un de mes nombreux sobriquets. Je voulus intervenir, demander à Mateja de s’excuser mais déjà, les filles entraient dans la chambre et ma détermination s’effondra comme un château de cartes. À quoi cela servirait de crier à nouveau ? Je savais déjà comment cela terminerait.
Deux lits superposés, deux armoires, trois chaises constituaient notre seul mobilier. Deux cadres de croquis maritimes servaient de décoration. Julve et Mateja s’étaient déjà appropriées le lit du fond et conversaient, assises sur leurs valises. Miil leur présentait le dos, occupée à ranger ses vêtements. La petite blonde à lunettes avait posé sa valise sur le lit du bas et je montais à regret au-dessus d’elle. Je détestais ces lits superposés dont les ombres ravivaient le souvenir du Château.
Le trousseau composé à la hâte par Eemke, porté dans les bagages d’Hinnes, ne comportait que le strict nécessaire. De la lingerie, une serviette, un savon, un peigne, un chandail, une cape de pluie, deux jupes et leurs hauts. Je rangeai le tout en quelques minutes, sous le regard méprisant de Mateja. Ses yeux criaient : c’est tout ce que tes parents ont pu t’acheter ? Ils ne doivent pas être riches. Je me raisonnai, évitai ce regard insupportable.
J’allai ouvrir les fenêtres puis m’allongeai pour observer la peinture écaillée du plafond. En levant la main, je pouvais arracher des copeaux blancs. Je les effritais sous mes doigts jusqu’à ce qu’il n’en reste qu’une fine poudre blanche. Ce jeu m’aida à relâcher la pression d’une journée épuisante. Le plan d’Hinnes avait réussi, au-delà de toute espérance. Mes paupières tombèrent. Mon esprit s’évada.
*
Premier jour
Ce fut la faim qui me tira des bras de Morphée. De longs gargouillis résonnèrent dans la chambre, plongée dans la pénombre. Les rideaux tirés, nous étions seulement éclairés par une faible lueur blanche. Les longues inspirations de mes camarades assoupies m’étonnèrent. Il ne me semblait avoir dormi que quelques minutes. Je me redressais en bâillant, me frottais les yeux. Motivée par les protestations de mon estomac, je descendis les barreaux du lit puis avançai jusqu’à la fenêtre. Après m’être glissée sous les rideaux, je découvris un paysage nocturne. Les lunes brillaient, translucides, et un lointain halo rouge annonçait leur successeur. C’était le matin.
Trop affamée pour hésiter, j’avançais à tâtons dans le couloir obscur. Le résonnement de lointains ronflements me guida jusqu’au hall, puis au pied d’un escalier circulaire. Je gravis les marches d’un pas hésitant et entendis une voix. En haut, une fille chantait. Après avoir poussé la porte, je parvins dans un couloir obscur, rafraîchi par une brise légère. Une mince silhouette s’échinait sur son balai, éclairée d’une grosse lanterne. Je ne vis d’abord que ses boucles blondes puis elle se redressa. C’était la fille que j’avais vue allongée près de la piscine. Elle était plus jeune que je l’avais imaginée, ne devait avoir qu’un ou deux ans de plus que moi. Vêtue d’une grande blouse blanche, elle lavait le couloir.
— Qu’est-ce que tu fais debout à cette heure ?
— J’ai faim.
— Attends… C’est toi la fille qui dort en bas depuis hier après-midi ? Oh ! Comment tu t’appelles ?
— Hildje.
— T’as un joli nom ! Moi, c’est Liiva, je suis la fille du concierge. Ils ont essayé de te réveiller pour le repas mais apparemment tu as le sommeil profond. Viens avec moi.
Après avoir enjambé les traces humides laissées par la serpillère, je suivis l’adolescente jusqu’à une pièce au milieu du couloir. Derrière la porte entrouverte, je devinai un amas d’objets d’entretien et des armoires de stockage. Liiva peina à dégager assez d’espace pour une chaise puis fouilla dans les tiroirs du fond de la remise. Elle en sortit une assiette avec des tranches de gâteau au chocolat. Je salivai à son odeur, n’osant à croire à ce qui m’arrivait. Importé des pays du sud, le cacao était un mets rare. Je n’en avais mangé qu’une poignée de fois dans ma vie.
— Tiens, tu peux le finir. C’est mon père qui me l’a offert mais j’aime pas trop le chocolat. J’allais m’en débarrasser. Attends, je vais te chercher de l’eau.
Liiva sortit en laissant l’assiette posée sur mes genoux. Je n’osai d’abord y toucher, craignant de briser ce curieux rêve. Puis mes doigts glissèrent doucement le long de ma jambe, se posèrent sur l’assiette. J’écrasai une miette sous mon pouce, comme pour rendre à la pâte son aspect originel. N’y tenant plus, je saisis un part à pleine paume et y mordis avec voracité. Un raz de marée de saveurs m’envahit les papilles tandis que ma salive se mêlait de chocolat. Un délicieux écrasé de douceur mêlé d’amertume se forma sous ma langue pour y fondre. Je n’avais jamais rien mangé d’aussi bon.
Ma faim apaisée, je profitai davantage des textures du deuxième morceau. Sa base croustillante, son cœur fondant et son glaçage de sucre glace s’unissaient dans une harmonie parfaite. Un bigarreau confit ornait le sommet mais je le repoussai à chaque bouchée, le gardant pour la dernière part. Je le collais sur l’épiderme de mon index, ainsi coiffé d’un élégant chapeau grenat. Je l’oubliai jusqu’à avoir terminé le gâteau.
Chaque bouchée en appelait une autre et l’assiette se vida trop vite. Je chassai chaque miette avec rigueur, jusqu’à ce que la porcelaine retrouve sa brillance originelle. La cerise prolongea le plaisir le temps de trop courts instants. Je fermai les yeux en laissant le jus sucré couler le long de mes dents. Je ne les rouvris qu’au retour de Liiva.
— Eh ben, t’as pas perdu de temps ! Tu devais avoir faim.
— Merci beaucoup.
— Bah, c’est rien. Bon, parle pas aux autres de ça. Si mon père l’apprend, il va me tuer.
J’acquiesçai, amusée par le sourire de connivence de Liiva. Après m’avoir laissée boire, elle me proposa :
— Tu veux pas retourner dormir ? Ils vont pas se lever avant au moins deux heures.
— Non, j’ai plus sommeil. Tu veux que je t’aide ?
— Oh, pourquoi pas !
Je passai donc les dernières heures de nuit à récurer les sols, essuyer les vitres, savonner les lavabos, balayer les poussières. Tout en travaillant, Liiva chantonnait des couplets entraînants. Parfois, elle pointait son index dans ma direction et je devais répéter après elle. Quand nous eûmes terminé le couloir, elle m’entraîna dans une danse endiablée entre les sauts d’eau, la lanterne et les balais.
Quand nous nous arrêtâmes, toutes deux essoufflées, je m’aperçus que le jour perçait à travers les rideaux. Les autres enfants ne tarderaient pas à s’éveiller et je regrettais déjà ce moment passé avec Liiva, aussi agréable qu’inattendu. Nous nous regardâmes, toutes deux le sourire aux lèvres, les joues rosies par l’effort. Puis nous rîmes en nous tenant les côtes, sans retenue.
Je commençai à croire Hinnes. Emisal, c’était bien.
*
— Pourquoi tu sens le chocolat ?
Malgré l’animosité qui perçait dans sa voix, je mentis à Mateja dans le plus grand calme :
— J’en avais dans mon sac.
— Menteuse ! Jamais tes parents te paieraient ça alors qu’ils ont même pas l’argent pour remplir ta valise !
Mes poings se serrèrent : cette fille allait trop loin. Je savais exactement ce qu’elle cherchait : me pousser dans mes retranchements, me faire réagir. Rien ne me répugnait plus que lui offrir ce plaisir. Je me tus, me retournant vers le mur. D’un coup d’œil dans le miroir, je me délectai de son regard frustré. Mateja ne devait pas être habituée à autant de résistance. Elle sortit de la salle de bain en grognant.
Je me trempai les mains en savourant cette petite victoire. Cette deuxième journée à Emisal s’annonçait sous les meilleurs auspices. J’avais hâte de retrouver Hinnes. Pour la première fois depuis des semaines, je pris le temps d’un coiffage intégral, tout en admirant mon visage paré des couleurs de l’aube. Pour une fois, je ne me trouvais pas trop laide.
Puis je saisis mes habits propres et me dirigeai vers la longue rangée de douches aux portes bleues. Rudimentaires, elles n’offraient qu’un jet d’eau et deux patères de métal. J’avais tout juste assez de place pour me changer. Je fis glisser mes vêtements de nuit contre mes membres en détournant les yeux des cicatrices de mon bras droit. Car telle était l’épreuve que je subissais chaque matin et chaque soir : repenser à la morsure des brisures de verre, à l’obscurité de la cave. Ne pas voir ma chair marquée l’atténuait un peu.
Puis j’enfilai la lingerie de toile blanche, la jupe bleu ciel, le chemisier de coton donnés par Eemke. Enfiler ces vêtements élégants me perturba. J’avais l’impression d’être une autre. Je regrettai alors de ne plus avoir la montre de Givke, elle aurait été parfaite avec cette tenue. Tout à coup, un pas traversa la salle de bain, trop rapide pour être innocent. La personne avança jusqu’à ma porte et je l’entendis fouiller dans ses vêtements. Un petit claquement résonna dans ma serrure. Le rire de Mateja retentit.
Un rire mauvais, un rire de forfait, un rire qui eut plus de portée que n’en aurait eu la pire moquerie. Je me jetai sur la porte, tentai en vain de la déverrouiller. La panique m’assaillit à toute allure et je commençais à me tordre les doigts en essayant d’ouvrir. Mateja sortit de la pièce et j’entendais pourtant encore son rire. Avant de disparaître, elle tira les rideaux, verrouilla la porte. Je replongeai dans l’obscurité de la cave de la ferme.
Mon champ de vision fut envahi de flots de sang et de vin, mon corps fut parcouru de tremblements incontrôlables et je commençai à frapper du poing sur ce maudit obstacle. Ma tête commença à balancer d’avant en arrière tandis que ma raison chavirait, puis je me retrouvai à frapper mon front contre la porte. La douleur eut le mérite de me raccrocher à mes sensations, à mon corps. Je fis un pas en arrière et me jetai toute entière contre le bois. La serrure trembla.
Je devais sortir avant que mon esprit plonge dans le délire. Derrière moi, il me semblait entendre déferler d’immenses vagues et retentir des détonations de fusil. Je reculai et fonçai à nouveau. Une fois. Deux fois. À la troisième, la porte céda sous ma charge et je chutai contre un étendoir couvert de serviettes. Ivre de rage, je n’avais plus qu’une idée en tête retrouver Mateja et Daawie, dont les visages et les noms s’étaient à cet instant assemblés pour n’en former qu’un seul. Faire ce que je n’avais jamais pu faire. Rendre les coups. Me venger.
Je tirai puis claquai la porte de la salle de bain, fonçai dans le couloir vide. Mateja avait disparu. Je courus vers notre chambre, son refuge le plus probable, les poings brûlants de haine. Des ronflements s’échappaient des chambres ouvertes, on entendait des voix à l’étage mais un seul bruit m’importait alors : le rire de Mateja qui résonnait en boucle. Il n’y avait qu’un moyen de le faire taire.
Avant même d’entrer, je l’entendis ricaner avec Julve. Elle devait lui raconter son méfait, se moquer, encore une fois. J’écrasai l’interrupteur et la découvris assise sur le lit avec son amie, le dos tourné. Je bondis sur ma proie en ignorant le cri de stupeur de Julve. Je la fis basculer sur le sol en lui tirant les cheveux, lui brisai le nez d’un coup de coude. Dans un instant jouissif, je découvris sa peur. J’avais tout pouvoir sur elle et j’allais lui faire mal, si mal. Je l’écrasai sous mes genoux et griffai son visage jusqu’à dessiner des sillons de sangs sur sa peau noire. Puis je la frappai encore et encore. Et chacun de mes coups était comme la délivrance de ce que j’avais toujours enfoui au plus profond de moi-même. Je savourai chacun d’entre eux.
Même s’ils devaient me condamner.
En tout cas j’aime beaucoup la façon que tu as de décrire ces traumatismes de Hildje. Les ombres du château la perturbent, mais elle fait avec. Elle prend le train et a peur de retourner à la ferme, mais Hinnes est là donc elle arrive à se rassurer. Par contre se retrouver seule dans le noir… C’est trop pour elle et elle vrille. On sent qu’elle grandit, qu’elle se crée des ressources, qu’au début elle laisse faire avec Mateja, mais ça serait trop simple si on pouvait guérir simplement avec une virée au soleil.
Enfin bref, tout est cohérent, on ne vire pas non plus dans le pathos à se dire « pauvre Hildje » toutes les 2 secondes parce que ça ne serait pas intéressant. Et elle ne revient pas non plus au point de départ (même si à voir les conséquences de ce nouvel accès de violence), elle évolue, à son petit rythme.
Sur la forme, j’ai juste une phrase qui m’a faite tiquer au début : « Je claquai ma portière l’estomac noué. Avant d’ouvrir ma portière ». J’ai l’impression dans ce paragraphe qu’elle ouvre sa portière, la ferme, la rouvre, puis quelqu’un l’ouvre, je n’ai pas bien compris l’enchaînement portière.
Hâte de la suite !
Oui, c'est dur, Hildje est encore dévorée de colère et de violence, le chemin est encore long...
"On sent qu’elle grandit, qu’elle se crée des ressources, qu’au début elle laisse faire avec Mateja, mais ça serait trop simple si on pouvait guérir simplement avec une virée au soleil." Oui, tu le résumes bien !
"Enfin bref, tout est cohérent, on ne vire pas non plus dans le pathos à se dire « pauvre Hildje » toutes les 2 secondes parce que ça ne serait pas intéressant." Clairement ! C'est top si tu ne sens pas de redite malgré le "cycle" de violence qui se répète, il y a quand même beaucoup de choses qui bougent à côté.
Bien vu pour les portières, je change ça !!
Merci beaucoup de ton retour <3
A bientôt !!
Oui, c'est dur, Hildje est encore dévorée de colère et de violence, le chemin est encore long...
"On sent qu’elle grandit, qu’elle se crée des ressources, qu’au début elle laisse faire avec Mateja, mais ça serait trop simple si on pouvait guérir simplement avec une virée au soleil." Oui, tu le résumes bien !
"Enfin bref, tout est cohérent, on ne vire pas non plus dans le pathos à se dire « pauvre Hildje » toutes les 2 secondes parce que ça ne serait pas intéressant." Clairement ! C'est top si tu ne sens pas de redite malgré le "cycle" de violence qui se répète, il y a quand même beaucoup de choses qui bougent à côté.
Bien vu pour les portières, je change ça !!
Merci beaucoup de ton retour <3
A bientôt !!
En tout cas, c’est bien amené parce que jusqu’à la dernière minute, j’ai cru qu’elle parviendrait à se dominer. D’autant que le chapitre est vraiment très beau, très apaisant.
« Quand on a échoué toute sa vie, réussir effraie. » Une réflexion qui n’a rien d’anodin. On dirait son moi profond. Au fond d’elle, elle se veut condamnée à cette vie d’échec. Peut-être.
Très beau chapitre, je le redis. Un tout petit détail : le mot « coiffage » est certainement juste, mais il n’est pas beau 😉
À bientôt.
Malheureusement, c'est tellement difficile de sortir de schémas qu'on a connu toute sa vie, la rédemption ne pouvait pas être si facile.
Top si tu as apprécié la beauté du lieu, Emisal est un symbole important dans cette histoire.
"« Quand on a échoué toute sa vie, réussir effraie. » " Ca fait plaisir que tu relèves cette phrase, qui est en effet une grosse clé de compréhension du perso d'Hildje (et de beaucoup de personnes dans la vraie vie)
Merci de ton retour et à bientôt !
On la suit pas a pas, dans son evasion, avec la certitude que ca va mal tourner (ce qui montre son courage de se lancer malgre tout) puis tout se passe bien, et on est heureux qu'elle se retrouve avec des personnes qui l'apprecient. Et finalement le paradis... qui n'est pas sans ombres.
Je suis partagee.
J'aime ce nouveau cadre que tu nous decris
"Je peux encore entendre les sauterelles et des grillons dont le chant me paraissait venir de la terre elle-même." J'aime beaucoup cette phrase ! Et les deux lunes qui montrent que ce n'est pas un univers parrallele au notre, mais carrement une autre planete.
J'aime aussi l'idee que ce camp de vacances, qui est decrit comme paradisiaque, est en effet tres attrayant, et dans le meme temps, les problemes et les confrontations suivent Hidle et la rattrappent.
Ce qui me laisse un peu songeuse, c'est l'impression d'une repetition. Dans chaque nouveau lieu de vie qu'Hidje a decouvert, la meme succession d'evenements se produit : elle est traitee injustement (a l'ecole, a la ferme) ou se trouve dans un lieu qui declenche panique et rage (obscurite, piscine) et reagit avec violence.
Dans un sens, ca se tient. Elle vit avec des traumatismes qu'elle comprend mal et subit, et les situations qu'elle traverse en rajoutent, on voit bien que ce qu'elle a vecu recemment a la Ferme a aggrave ses reactions.
Mais je ne peux m'empecher de percevoir une certaine redite.
Je me demande ce qui va se passer maintenant !
Bravo pour nous faire passer dans des emotions si contradictoires dans un seul chapitre!
PAradoxalement, ton retour me conforte plutôt dans l'écriture de ce chapitre. Cette frustration devant la répétition de schémas communs est un peu ce que je voulais écrire. Ca n'aurait pas fonctionné je pense de faire d'Emisal un paradis parfait.
En tout cas merci de ton commentaire !!
Allez, j'ai un peu honte de ne pas prendre le temps de le faire alors que toi tu vas dans le détail pour moi, alors cette fois je note tout. Mais c'est vrai qu'autant ça me dérange pas en BL sur un fichier word, autant sur le site, c'est pas super pratique. Bon, j'arrête d'être flemmarde !
"Une autre voix de ma tête me rappelait que j’avais su fuir la ferme, échapper à la surveillance et aux recherches pendant de longues semaines." : si Hildje peut tout à fait s'attribuer le mérite de la fuite de la ferme et du voyage, le fait qu'elle ait échappé aux recherches en revanche, c'est plus un hasard, parce qu'on ne sait pas du tout dans quelle mesure elle a fait l'objet de recherche (elle disait à Eemke que Gretja n'avait probablement pas signalé sa disparition) et même si c'est le cas, elle n'a pas fait grand chose pour y échapper : elle est rester au château. Je ne dis pas ça pour minimiser, je dis ça parce que Hildje est plutôt pessimiste (et dans cette scène elle vient de dire qu'elle doutait de la réussite du plan), donc ça ne lui ressemble pas de s'attribuer des victoires qui ne lui appartiennent pas. Déjà, reconnaître ses propres victoires, c'est un progrès !
"Mes scandales claquèrent sur le trottoir mouillé, je dus enjamber plusieurs flaques. " : mes sandales
"Voyant que je la regardais, elle me parla" : là, il faudrait écrire ce qu'elle dit, ou dire que Hildje n'a pas compris, sinon ça fait un peu "pas fini".
"Ludi me tendit sa main " : me tendit LA main (a priori, on tend toujours sa propre main, pas celle des autres ;) )
"Il manqua de me briser le poignet sans perdre sa bonhomie. Puis il se tourna vers Eemke sans prendre garde à ma grimace." : pas moyen de construire la seconde phrase différemment pour éviter la répétition de "sans" ?
"Dans ma vie, rares sont les adultes à avoir tenu leurs promesses." : tu es certain de cette utilisation du présent ? Il implique que cette assertion est vraie aussi postérieurement à l'histoire, jusqu'au moment où Hildje raconte (ce qui peut être des années après, pour autant que le lecteur le sache). Ca peut être vrai, mais c'est la première fois que tu l'utilises, il me semble, du coup ça fait un peu drôle. Si tu restes au passé ("Dans ma vie, rares étaient les adultes à avoir tenu leurs promesses."), tu ne t'engages que jusqu'à la scène que Hildje est en train de raconter, la scène du train. Je ne sais pas si je suis claire.
"Le bus qui nous avait convoyé depuis la gare" : convoyés
"Je peux encore humer les lointains effluves vanillés des pétales de jasmin." : moi je ne trouve pas ça vanillé, le jasmin (Je n'aime pas le parfum de la vanille alors que j'adore celui du jasmin), mais on n'a pas l'habitude de décrire les odeurs alors c'est compliqué !
"Je sais que je ne pourrais jamais plus être autant émerveillée que le jour où je découvris cet endroit." : l'utilisation de "autant" me gratouille l'oreille dans cette construction. Je suis sûre que c'est fautif et qu'il faudrait remplacer par "aussi" mais suis incapable de te citer une règle. Je crois que pour utiliser "autant", il faut qu'il y ait une notion de quantité (genre "il y en a autant dans l'un que dans l'autre", "il y a autant de crayons ici que là"...).
"Je relevais les lèvres et pris l’autre main." : je n'ai pas compris. Tu veux dire qu'elle sourit à nouveau ? Et qu'elle prend la seconde main d'Hinnes dans la sienne ?
"Aussitôt, Mateja lui arracha :" la lui arracha ?
"je pris le temps d’un peignage intégral" : j'ai failli te dire que le mot "peignage" n'existe pas, mais après vérification, c'est faux. Il existe bien, mais c'est une opération entrant dans la fabrication de tissus ! Bref, si j'étais toi je remplacerai par "coiffage" ou "démêlage", ce serait plus sûr.
"Derrière moi, il me semblait être pourchassée par d’immenses vagues et des détonations de fusil." : le complément de lieu "derrière moi" ne me paraît pas très adapté au verbe "être pourchassée" auquel il se rapporte pourtant. Peut-être plutôt "Derrière moi, il me semblait entendre d'immenses vagues qui me pourchassaient..."
En lisant, je me suis dit : ah ok, quand Edouard me parlait d'un changement d'ambiance, c'est plutôt vers le mieux ! Le soulagement que le plan marche, le paysage idyllique, la rencontre avec Liiva, le chocolat... A l'apparition de Mateja, j'ai vite compris que ça ne serait pas si simple. j'ai pensé que ce serait le test qui allait montrer que Hildje avait changé... bon ben je me suis plantée dans les grandes largeurs ! La rage est toujours là, et elle est violente ! Du coup je redoute un nouveau changement d'ambiance, mais pas du tout du tout vers le mieux... Bravo pour la surprise, du coup, j'avoue que je n'avais pas du tout vu venir !
En ce qui concerne le début du chapitre, je vais encore faire ma relou, mais j'ai un peu de mal à comprendre comment Hildje peut tranquillement s'installer dans le train puis dans la colo sans qu'aucun adulte ne se pose de question ! Elle ne doit être sur aucune liste. Il est gentil Daario mais il est un peu léger comme directeur, non ? XD Toi qui as le BAFD, j'imagine que tu te rendrais vite compte que tu as un enfant en trop ? Et comment ça se fait qu'il n'y ait que Hinnes qui vienne du château ? Il est le seul à qui on propose des vacances ? Bref, j'ai peur de ne pas être tout à fait convaincue... Je sais que ce n'est pas le propos principal, mais tu sais ce qu'on dit "le diable est dans les détails" et je me demande si ça ne vaudrait pas le coup de trouver quelque chose pour blinder le fameux plan (genre mettre Daario dans la confidence ?).
Bon, pinaillage à part, j'ai trouvé ce chapitre très bien fait (et un peu sadique XD) parce que ça ronronne un peu, on se détend en pensant que cette pauvre choupette d'Hildje a bien mérité ce répit, et finalement, on replonge dans les Misérables ! Bien joué ! J'ai quand même mal pour elle, la pauvre...
A très vite pour voir ce que tu lui as fait subir ;)
Je suis preneur des retours sur la forme, c'est toujours intéressant de voir les petites lourdeurs etc mais après je t'avoue que ce n'est pas si grave si tu ne t'attardes pas dessus. C'est un premier jet, sa cohérence est ce qui m'importe le plus pour l'instant.
Bien vu pour le jasmin ! La description des odeurs est je pense une de mes grosses faiblesses, vu que c'est un sens où je suis pas particulièrement sensible / attentif.
En tout cas, merci pour toutes ces remarques sur la forme, j'ai corrigé et ajusté en conséquence !!
Ahah oui, c'est rare que tout soit facile et positif dans mes histoires xD Tant mieux si la rechute avec Mateja est surprenante / fonctionne. Oui, ça aurait pu montrer le chemin parcouru par Hildje mais il lui reste encore une trotte (=
Oui, je suis d'accord avec toi, c'est un peu lég sur le passage de l'arrivée dans le train. J'en étais conscient en écrivant mais j'ai pas trouvé la réponse et j'ai continué à écrire parce que je voulais pas resté bloqué sur ce détail. J'ai un peu réfléchi après avoir lu ton commentaire et j'ai trouvé un solution chouette je pense. En gros, Ludi serait le N+1 de Daanio plutôt qu'un contrôleur de train, et il serait complice d'Eemke, ça demande pas tant de réécriture et ça solidifie l'ensemble je pense. Je me suis noté tout ça dans mon doc corrections ^^
C'est aussi une chouette idée qu'il y ait au moins un autre enfant venu du Château à la Colo, ça permettrait d'introduire un des ados plus vite et d'ajouter une dynamique intéressante avec Hinnes.
Top si tu continues d'apprécier ta lecture ! Bon, bah tu as pu découvrir ce que je lui réservais xD
Merci de ce riche retour !!!
Ce chapitre commençait bien... Mais avec toi rien n'est jamais rose très longtemps. Le début est très beau, plein d'espoir. J'ai particulièrement aimé la scène de dégustation du gâteau qui est super bien écrite, très réaliste, et m'a donné faim !! Il n'empêche que la fin, bien que triste pour nous, est extrêmement puissante. Tu retranscris très bien la souffrance et le traumatisme d'Hildje, toute cette violence qui ressort à cause d'un seul acte (de cette sale peste de Mateja en l'occurence) et ce réel besoin de vengeance, de faire du mal. C'est déchirant, mais ça sonne réaliste. Décidément, notre protagoniste n'a pas de chance...
Je ne sais pas si je peux dire que j'ai hâte de lire la suite ah ah. Blague à part c'est toujours un grand plaisir de te lire :)
Remarques :
- "Malgré toute sa conviction, le soutien d’Eemke, mon cerveau refusait l’éventualité de sa réussite. Quand on a échoué toute sa vie, réussir effraie." : j'aime bien cette citation, bien trouvée !
-"Je peux encore sentir la sueur couleur (couler) dans mes cheveux et dans mon cou baigné de soleil"
Par ailleurs c'est sympa ce petit clin d'oeil à l'animation et aux colonies de vacances, je te reconnais bien là ;)
A plus !
Eheh oui, j'ai aussi bien aimé écrire la scène du gâteau.
Content que tu aies trouvé que le retour du traumatisme fonctionne, c'est pas forcément évident à écrire pour que ça sonne juste.
Eheh oui, j'avais très envie de leur rendre hommage^^
Merci beaucoup de ton commentaire !!
J'ai modifié ce chapitre. Tu peux relire la scène entre Liiva et Hildje. (à partir de premier jour) Mais sinon, en bref :
Liiva n'est plus une femme de ménage mais la fille du concierge, elle a à peu près le même âge que Hildje. Elle n'a plus de tatouages mais toujours les cheveux blonds. Voili voilou ^^
Me revoilà, faisant une entorse à la règle que je me suis fixée pour la durée de ces HO : "pas de commentaire sinon jamais tu n'avanceras à rythme suffisant", mais quel plaisir de retrouver, au milieu de tous ces débuts colorés, une plume familière.
Bon. J'ai aimé 90% de ce chapitre, qui démarrait si bien... La promesse enfin tenue, la jolie rencontre avec Benia, les retrouvailles avec Daanio, elle passait inaperçu... Puis elle a cédé à la rage.
Je comprends parfaitement le traumatisme qui revient, mais je suis terriblement déçue qu'elle s'enferme dans une boucle de violence qui va la ramener directement d'où elle vient. Je m'interroge, aussi. Durant cette année passée, elle a vécu plus dur, elle a supporté les coups, les humiliations... Malgré le traumatisme, sa réaction n'est-elle pas un peu excessive...?
J'ai peur que ça mette un terme inévitable à son séjour. Alors qu'on a à peine retrouvé Hinnes, alors que tout s'annonçait si bien.
Il y a autre chose, j'ai du mal à comprendre : les motivations de cette fille qui la prend en grippe si rapidement. Peut-être aurait-ce été plus compréhensible après quelques échanges et petite crasses supplémentaires? (comprendre : laisse-la profiter un peu plus d'Emisal steuplait).
Remarques au fil du texte :
- "Quand on a échoué toute sa vie, réussir effraie." -> je ne sais pas s'il est nécessaire de l'appuyer, c'est rendu implicite par la phrase précédente.
- "mais je pus que faire un pas" -> ne pus ?
- "Vas-y, Emisal t’attends !" -> oh, j'aime beaucoup cette boucle, cette très vieille promesse qui se tient. C'est très beau.
- "Affronter les regards de tant d’inconnus, des animateurs me terrifiait." -> j'ai eu un peu de mal à comprendre cette phrase. Je me demande si tu ne pourrais pas la reprendre pour qu'elle soit plus fluide. Peut-être une simple virgule ou un "et"?
- "il se hâte de changer de sujet" -> hâta
- "Hinnes resserrai sa poigne" -> resserrait
- "Je détestais ces lits superposés dont les ombres ravivaient le souvenir de la promiscuité du Château." -> une phrase un peu lourde ici je pense. Le souvenir + la promiscuité, j'ai l'impression que tu rallonges cette phrase. Sans promiscuité, il me semble que ça fonctionne aussi.
- "Le trousseau composé à la hâte par Hinnes" -> ne serait-il pas plus logique que ça soit Eemke qui ait composé sa valise ? Où Hinnes aurait-il trouvé le contenu discrètement ? D'autant qu'un peu plus loin, il y a : "le chemisier de coton donnés par Eemke".
- "Les longes inspirations" -> longues
- "J’écrasai une miette sous mon pouce, comme pour rendre à la pâte son aspect originel." -> très visuel, j'ai beaucoup aimé. Et qui ne l'a jamais fait une fois dans sa vie ? xD
- "Rien ne me répugnait que lui offrir ce plaisir." -> j'ai un peu beugué sur cette phrase-ci. Rien ne me répugnait plus, peut-être?
- "chacun des mes coups" -> de
Je te dis à bientôt ! ^^
Quel honneur d'être ton exception hihi
Petite note, Benia est devenue Liiva dans la nouvelle version de ce chapitre, elle a aussi beaucoup rajeuni, elle a désormais 19 / 20 ans.
Content que tu aies apprécié cette ébauche de douceur avant la chute. Je comprends carrément la déception, le séjour à Emisal est tellement important à ce stade de l'histoire que voir Hildje en être privé est compliqué^^ J'imagine que le chapitre suivant a répondu à certains de tes questionnements xD Pour les motivations de Mateja, elle n'en a malheureusement pas beaucoup, Hildje est juste différente. Et j'ai la sensation qu'il n'en faut souvent pas plus...
"oh, j'aime beaucoup cette boucle, cette très vieille promesse qui se tient. C'est très beau." <3 Certains chapitres du début prennent tout leur sens oui (==
"très visuel, j'ai beaucoup aimé. Et qui ne l'a jamais fait une fois dans sa vie ? xD" ahah tellement^^
Merci pour tes précieuses remarques, j'ai corrigé tout ça !
J'ai fait des modifs sur ce chapitre 11, si tu le souhaites tu peux relire la scène entre Liiva et Hildje. (à partir de premier jour) Mais sinon, en bref :
Liiva n'est plus une femme de ménage mais la fille du concierge, elle a à peu près le même âge que Hildje. Elle n'a plus de tatouages mais toujours les cheveux blonds. Voili voilou ^^