CHAPITRE 13
- alors, raconte -
— Alors, raconte, dit Marco.
Il était assis sur un rocher en bord de lac, face au soleil qui ne tarderait pas à se coucher. Il avait mangé, du poisson pané et des frites avec un peu de salade, puis avait demandé la permission de retourner sur la plage. Comme tous les soirs. Sauf que ce soir n’avait rien de commun avec les autres. À ses côtés était assise Lili qui l’avait rejoint sur la plage. Leurs cheveux volaient dans le vent et se collaient à leurs joues, leurs oreilles et leurs yeux.
— Raconte quoi ?
— Ben tout, la Tortue, les habitants du lac, les croques-cirqueules. Le vent.
— Oh, il n’y a pas tant à dire. J’aimerais mieux comprendre moi-même mais pour l’instant je suis autant perdue que toi.
— Mais comment t’as fait pour qu’elle ouvre les yeux ?
— Ah ça, sourit Lili. La légende raconte qu’il y a de cela fort fort longtemps, les habitants du lac et la Grande Tortue pouvaient communiquer. Mais avec le temps, les générations et les départs, le lien s’est amenuisé. Aujourd’hui, j’arrive à peine à sentir sa présence et à lui faire connaître la mienne. C’est ce que j’ai fait, je lui ai juste dit “je suis là”.
— Tu sens sa présence ?
— Oui, je sais qu’elle est là, et je sais qu’elle a besoin d’aide. Mais je ne sais pas comprendre en quoi.
Lili avait le visage tendu et les yeux inquiets.
— Et ta grand-mère, elle sait pas ? demanda Marco.
— Oh ma grand-mère, elle est bien vieille, elle ne parle presque plus. C’est elle que tu vois là-bas.
Lili pointa du doigt ce que Marco ne voyait que comme une souche d’arbre à l’entrée de la cabane, tournée vers la mer.
— Je la vois pas.
— Si, elle est assise sur la souche, enfin, elle est la souche aussi. C’est sa manière de se faire oublier des passants. Regarde un peu à côté, concentre-toi sur un point qui est un peu plus loin.
Marco visa un arbuste tout sec qui se trouvait en arrière de la souche d’arbre, un peu à côté de la cabane. Et un reflet étrange se révéla à lui. Peut-être, oui. Peut-être qu’une vieille dame à la peau bleue était assise sur un tabouret juste là, à la place de la souche d’arbre. Ou peut-être pas, il ne la voyait déjà plus.
— Elle a l’air bien vieille, oui.
— Tu vois.
— Et le vent ? demanda Marco.
— Le vent ?
— Oui, pourquoi il forcit, tu m’as dit que c’était la Tortue ça aussi.
— Oh, ça se sont les papillons. Tiens.
Lili sortit de sa poche la petite boîte contenant la poudre magique du lac. Elle la glissa dans la main de Marco qui l’ouvrit, y plongea son index et son majeur et traça sur son visage un large trait lui couvrant les yeux.
La magie opéra, comme à chaque fois. Mais cette fois, la vue de Marco était emplie d’ailes de papillons géants, virevoltant autours d’eux. Ils s’agitaient, comme perdus, tournoyant en tout sens. Leurs immenses ailes battaient l’air, provoquant des remous dans l’atmosphère.
— Le vent, c’est eux, dit Lili.
Dans son errance, un papillon s’approcha de Marco. Ses ailes vinrent lui caresser la peau, et lui picotèrent le cuir chevelu. Au sol, le sable se mit à se soulever sous la pression du courant d’air dans un motif que Marco connaissait bien.
— Ils se réunissent ici et s’agitent parce que la Tortue ne va pas bien, reprit Lili.
— C’est pas un appeau à vent, réfléchit Marco à voix haute. C’est un appeau à papillon.
Lili sourit.
— Tu crois qu’elle va mourir ? demanda Marco en regardant la tortue.
Lili sursauta.
— Qu’est-ce que tu racontes ? N’importe quoi !
Ses sourcils s’étaient froncés et la colère affleurait.
— Non, non, je sais pas, dit Marco. Je me demande c’est tout. Elle est si vieille la Tortue.
— Mais non, elle est vieille pour nous mais pas pour elle, dit Lili qui ne semblait pas bien sûre tout de même de ce qu’elle venait d'énoncer.
— Bon, bon, dit Marco. Mais elle a quoi alors ?
— Je sais pas je te dis.
— Pourquoi tu demandes pas à Bassim ?
— Bassim ? Quel rapport avec Bassim ?
— Ben, je sais pas, dit Marco. Il a un appeau à papillon et voit les grandes anguilles bleues, il doit savoir d’autres choses non ?
— Non, dit Lili.
— Non ?
— Il a trouvé l’appeau sur le rivage, l’un des notres l’avait perdu. Et quand aux anguilles, il les a entraperçu une fois, parce qu’il cherchait autre chose. Il aurait dû oublier, je ne sais pas pourquoi c’est resté. Je crois qu’il voit parfois beaucoup d’autres choses et que dans sa tête, tout s’est mélangé. Mais il ne sait rien de nous, ni de la Tortue.
— Oh.
Marco était un peu déçu.
— En tout cas, reprit-il, on sait d’où viennent les croques-cirqueules.
— Quoi ?
— Regarde.
Il montra du doigt un pan de sable, à quelques mètres de leurs pieds.
De petits crabes verts et bleus s’y agitaient, tournant en rond sans trop savoir où aller, réplique au sol des mouvements éperdus des papillons.
— Eux aussi sont affolés, ils doivent recevoir l’appel de détresse de la Tortue mais ne pas savoir non plus quoi en faire, dit Marco.
Et la trace de leurs pas fiévreux formaient dans le sable des motifs étranges, cercles parfaits de crabes désorientés, laissant derrière eux un témoignage de leur inquiétude.
J'ai relevé ces petites coquilles en cours de route :
fasse au soleil qui ne tarderait pas à se coucher. --> face
J’aimerai mieux comprendre moi-même mais pour l’instant je suis autant perdu que toi. --> j'aimerais ? --> perdue (accordé avec Lily, auxiliaire être)
Marco visa un arbuste tout sec qui se trouvait en arrière de la souche d’arbre --> Je supprimerais peut-être ce "souche"-ci, le mot est écrit souvent et de façon rapprochée. Mais c'est une question d'oreille, ici c'est juste la mienne qui parle ;)
Il aurait dû oublier, je ne sais pas pourquoi s’est resté. --> c'est resté ? (cela est)
J'aime toujours autant <3 ^^
Merci pour le relevé des coquilles, j'ai corrigé ça !
Merci aussi pour tous tes commentaires ♥
Alors ce serait les crabes qui feraient les cropcircles ?
J'ai bien aimé l'invisibilité subtile de la grand-mère.
Je ne comprends pas l'histoire des papillons. Ou plutôt, ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi il ne les voient que maintenant ? Ils ont l'air d'être très nombreux et ils étaient forcément là, la dernière fois devant la tortue, et il avait déjà la poudre. C'est comme si la poudre révélait tout d'un coup plus de choses. Et je ne vois pas pourquoi.
Moi aussi je suis un peu déçue pour Bassim. mais je pense aussi que Lilli ne sait pas tout.
J'ai noté :
- qui ne tarderait pas à se coucher = tu peux simplifier par "couchant"
- avait mangé, (pas de virgule)
- se collait à leurs joues, collaient
- colère effleurait (affleurait plutôt)
Je vais lire la suite
Merci beaucoup pour ton commentaire.
Alors les papillons, en réalité je les avais évoqués avant (la toute première fois que Marco met la poudre) mais tu as raison, c'est trop discret et bizarre qu'on ne les revoit pas ensuite, notamment quand ils sont sur la tête de la tortue, d'autant qu'il y a du vent à ce moment-là... je vais corriger cela !
Merci encore pour tes remarques. Je viens de finir le premier jet de l'ensemble, ce qui veut dire que je vais entrer en phase de corrections et réécriture, donc c'est super d'avoir des remarques comme cela, cela me donne de bonnes pistes de retravail ! : D
J'espère que la suite te plaira !