Chapitre 14 - Tendresse et côte cassée

Notes de l’auteur : Je suis curieuse de savoir si vous avez des théories sur la suite de l'histoire !

Les élèves virevoltaient de toutes parts au rythme de la musique, leurs rires et leurs éclats de voix se mêlant aux mélodies entraînantes de l'orchestre. Grâce à leurs tenues chics, ils se fondaient aisément parmi les professeurs, les surveillants et les quelques invités de marque conviés à l'événement. Cependant, une absence était remarquée : celle des figures les plus influentes des grandes familles, probablement peu enclines à se mêler au reste des convives.

Au centre de la piste de danse, Lya tournoyait, sa robe légère s'épanouissant autour d'elle à chaque mouvement. Emrys, le regard ancré dans le sien, la guidait avec assurance, imprimant un rythme fluide à leur danse. À quelques pas d'eux, Amanda et Matthew partageaient une complicité similaire, échangeant des rires et des clins d'œil. À chaque croisement, les deux jeunes filles se lançaient des sourires entendus, savourant pleinement cette soirée hors du temps.

Mais malgré l'ambiance féerique et l'enchantement du moment, une ombre planait sur le cœur de Lya. Il manquait quelqu'un. Son regard ne cessait de glisser vers les entrées, son souffle se suspendant à chaque silhouette qui franchissait le seuil. 

Archi. 

Elle espérait encore le voir apparaître, mais la crainte grandissait en elle qu'il ait réellement choisi de passer la soirée auprès de sa famille.

-Il viendra, ne t'inquiète pas, souffla Emrys avec douceur.

Lya sursauta légèrement, prise au dépourvu par cette soudaine remarque.

-Comment tu peux en être si sûr ?, murmura-t-elle, baissant les yeux.

-Vous êtes très proches, tous les trois, toi, Matthew et lui.

Il laissa passer un silence.

-J'avoue que parfois... ça me rend un peu jaloux !

Il avait dit cela sur un ton léger, accompagné d'un sourire malicieux, mais Lya sentit que ses paroles recelaient un fond de vérité.

-Jaloux ?, répéta-t-elle, intriguée.

-Du fait que vous partagiez tout, expliqua-t-il en haussant les épaules. Parfois, j'ai l'impression d'être invisible à tes yeux quand ils sont là.

Lya resta interdite. Elle n'avait jamais envisagé les choses sous cet angle. Emrys était toujours là, à ses côtés, un soutien silencieux et infaillible. Pourtant, elle ne lui avait peut-être jamais accordé autant d'attention qu'à ses compagnons.

-C'est vrai que nous sommes très liés, admit-elle après un instant de réflexion. Mais toi et moi... on a une relation différente. Peut-être qu'on ne se parle pas autant, mais avec toi aussi, j'ai tout de suite été à l'aise.

Le regard d'Emrys s'illumina, et un sourire sincère se dessina sur ses lèvres.

-Ça me fait plaisir de l'entendre. Parce que tu es spéciale pour moi, Lya.

Elle sentit son cœur se serrer devant la douceur de ses mots. 

Avant qu'elle ne puisse répondre, la musique toucha à sa fin, marquant une pause dans les festivités.

-Tu veux prendre un peu l'air ?, proposa-t-il.

Lya hocha la tête.

-Bonne idée.

Il lui offrit son bras et elle l'accepta avec gratitude. Ensemble, ils quittèrent la salle de bal pour gagner les jardins.

Dehors, la nuit était désormais pleinement installée, drapant le monde d'un voile de quiétude. Une pleine lune resplendissante jetait une lumière argentée sur les allées pavées et les parterres de fleurs, leur offrant une lueur presque irréelle. Quelques lanternes magiques flottaient çà et là, projetant des ombres dansantes sur les haies soigneusement taillées.

L'air était frais, mais étonnamment plus doux qu'en journée. Une brise légère soulevait les mèches de cheveux de Lya, lui procurant un frisson délicat. Autour d'eux, quelques autres élèves s'étaient aussi aventurés à l'extérieur, cherchant un moment d'évasion loin de l'agitation des mondanités.

Emrys ralentit le pas, profitant de la tranquillité de l'instant.

-Ça va mieux ?, demanda-t-il doucement.

Lya expira lentement avant de répondre :

-Oui... Merci Emrys.

Elle leva les yeux vers la lune, ses pensées toujours tiraillées entre la féérie de la soirée et l'inquiétude qui l'étreignait. Peut-être qu'il viendrait encore... peut-être qu'il n'était pas trop tard.

-J'adore l'odeur de la terre après la pluie, dit calmement Emrys, levant les yeux vers le ciel nocturne parsemé d'étoiles.

Lya, inspirant profondément, acquiesça avec un sourire doux.

-Moi aussi ! C'est très réconfortant. Comme si la nature elle-même essayait de nous apaiser.

Un silence complice s'installa entre eux, seulement troublé par le lointain écho de la musique et les rires qui s'élevaient du bal. Emrys tourna légèrement la tête vers elle, ses prunelles d'un bleu profond brillant sous la lumière lunaire.

-Tu as fini le livre conté ?, demanda-t-il d'une voix plus basse, presque intime.

-Celui que tu m'as donné ? Bien sûr ! Plusieurs fois même !, répondit-elle, un éclat d'enthousiasme dans son regard. Grâce à toi, dès que je n'arrive pas à m'endormir, je l'ouvre et je me laisse porter. Ça marche à chaque fois !

Un sourire satisfait étira les lèvres du jeune homme.

-Je suis content que ça te plaise. J'en ai plein d'autres si tu veux.

-Je ne vais pas te voler tous tes livres non plus !, plaisanta-t-elle en lui donnant un léger coup d'épaule.

Emrys rit doucement, secouant la tête.

-Mes parents tiennent la plus grande librairie de la capitale, je ne serai jamais à court.

Lya sursauta légèrement à cette révélation et, par réflexe, regarda autour d'elle pour s'assurer que personne n'écoutait.

-Tu n'as pas peur de parler de ta famille devant tout le monde ?, murmura-t-elle en se rapprochant de lui, la voix pleine de prudence.

Il haussa légèrement les épaules, son regard plongé dans le sien.

-J'ai confiance en toi, tu ne me feras jamais de tort, n'est-ce pas ?, lança-t-il avec une lueur amusée dans les yeux.

-Seulement si tu ne m'en fais pas, répondit-elle malicieusement.

Leurs rires s'éteignirent doucement, remplacés par un silence chargé d'émotion. Leurs regards s'ancrèrent, captifs l'un de l'autre, et dans cet instant suspendu, leurs visages se rapprochèrent imperceptiblement. Les battements du cœur de Lya résonnaient jusque dans ses tempes. Elle pouvait sentir la chaleur du corps d'Emrys, la douceur de son souffle contre sa peau.

Mais soudain, un mouvement attira son attention. Son regard se détourna et se fixa sur une silhouette à l'écart, adossée à une des rambardes entourant l'extérieur de la salle.

Un frisson lui parcourut l'échine. Cette posture familière... Elle plissa les yeux pour mieux voir à travers l'ombre des lanternes.

-C'est Archi, déclara Emrys d'une voix calme, bien qu'une pointe de déception transparût dans son ton.

Lya sentit son cœur se serrer. Enfin, il était là. Mais quelque chose, dans sa posture tendue, dans cette façon qu'il avait de fixer le vide, l'inquiétait.

-Va le voir, reprit Emrys, plus doux. Je vais nous chercher des boissons en attendant.

Elle hésita, ramenant ses yeux sur lui, touchée par sa bienveillance.

-Tu es sûr ? Ça ne te gêne pas ?

Un sourire un peu triste éclaira le visage du jeune homme.

-De toute façon, tu seras perturbée toute la soirée si tu n'y vas pas. Alors fais-le.

Lya lui lança un regard reconnaissant et, dans un élan sincère, le prit dans ses bras. Emrys, surpris, laissa un léger rire s'échapper et posa doucement une main sur son dos.

-Merci d'être aussi compréhensif, souffla-t-elle contre son épaule.

Il resserra légèrement son étreinte avant de murmurer, avec une note espiègle :

-Mais après, tu me promets d'avoir d'yeux que pour moi ?

Lya se détacha légèrement, se pinça les lèvres avec un sourire gêné, puis hocha la tête. Un dernier échange de regards, un éclat complice, et enfin, elle s'éloigna en direction d'Archi, son cœur battant un peu plus fort.

Elle s'élança vers la silhouette adossée à la rambarde. Elle reconnut immédiatement la tignasse blonde cendrée de son coéquipier et, dans un élan de soulagement et d'affection, se jeta sur son dos pour l'enlacer au niveau de la taille. Mais au lieu de la réaction escomptée, Archi sursauta violemment et lâcha un râle étouffé de douleur.

Lya s'écarta instantanément, paniquée.

-Archi, ça va ?

Il se retourna lentement, comme si le simple fait de bouger lui coûtait un effort monumental. 

Lorsqu'elle découvrit son visage, un frisson glacé la gifla.

Sa lèvre inférieure était fendue, et une plaie encore fraîche barrait son arcade sourcilière, laissant perler un mince filet de sang. Un hématome violacé s'étendait de sa pommette jusqu'à sa tempe, témoignant de la violence des coups reçus. Son œil gauche était injecté de sang, à moitié fermé sous l'enflure. 

Lya sentit son souffle se bloquer dans sa poitrine.

-Archi ! s'affola-t-elle. Merde, mais qu'est-ce qui s'est passé ?!

Un sourire amer tordit les traits endoloris du garçon.

-Je ne sais pas de quoi tu parles !, répliqua-t-il d'un ton ironique.

-Arrête de plaisanter ! Ce n'est pas drôle !

C'est alors qu'elle remarqua qu'il se tenait le ventre, le dos légèrement courbé, comme s'il tentait de masquer une douleur plus profonde. Son instinct s'alarma davantage.

-Il faut t'emmener à l'infirmerie, insista-t-elle en avançant une main vers lui.

Il secoua la tête et esquissa un rictus qui se voulait rassurant, mais qui n'était que l'ombre de lui-même.

-Ça va aller, Lya. J'ai vu pire.

-On ne peut pas te laisser comme ça ! protesta-t-elle, les poings serrés. Ce n'est quand même pas...

Elle hésita, craignant de prononcer les mots à voix haute.

Archi détourna le regard vers la nuit étoilée avant de répondre d'un ton faussement désinvolte.

-Mon père a une façon bien à lui de me prouver son amour, dit-il en ricanant faiblement.

Chaque mot semblait lui coûter une grimace.

Lya sentit un mélange de tristesse et de rage l'envahir, un nœud d'impuissance se formant dans ses entrailles. Son corps entier frémissait sous l'effet de la colère grandissante. Si seulement elle pouvait se précipiter chez les Angels et leur faire payer chaque coup infligé à son ami ! Plus cette haine montait, plus une pression sourde martelait ses tempes.

Archi, qui la connaissait trop bien, perçut son agitation et posa doucement sa main sur sa tête, dans un geste affectueux destiné à l'apaiser.

-Lâche l'affaire, terreur, murmura-t-il avec une tendresse inattendue. Je t'ai dit que ça allait.

-Laisse-moi au moins te réparer, bêta !, répliqua-t-elle, prête à canaliser son énergie pour l'aider.

Elle leva la main pour tenter d'apaiser ses blessures d'une manière ou d'une autre, mais il l'arrêta avec une douceur ferme.

-Si mon père voit que je me suis fait soigner, ce sera encore pire.

Le regard de Lya vacilla entre colère et détresse. Elle voulait l'aider, elle voulait faire disparaître cette douleur qu'il portait comme un fardeau, mais elle savait qu'il avait raison. Dans son monde, montrer une faiblesse réparée était un affront, une provocation qui ne ferait qu'empirer les choses.

Alors, au lieu d'insister, elle fit ce qu'elle savait faire de mieux : elle resta à ses côtés. Silencieuse, présente, une promesse muette de ne jamais le laisser affronter tout ça seul.

Le cœur de Lya se fendit encore un peu plus. Elle était impuissante devant son ami. Qu'est-ce qu'elle pouvait faire pour l'aider, lui qui semblait déjà si résigné ?Une larme s'échappa sans qu'elle puisse la contrôler. Elle ne chercha même pas à l'essuyer, trop submergée par l'injustice de la situation. 

Avant de quitter sa petite campagne, elle n'avait pas pris conscience que le mal pouvait être aussi insidieux et perfide. Qu'il pouvait se cacher derrière des murs dorés et des sourires hypocrites.

Archi, malgré la douleur visible sur ses traits, leva une main tremblante et essuya sa joue du bout des doigts. Un sourire en coin s'étira sur son visage tuméfié.

-Ça va, je t'ai dit. Je ne suis pas si moche que ça, si ?

-Arrête de rire !, s'exclama-t-elle, la voix tremblante.

-Je préfère être comme ça, au moins ça prouve un peu que je ne suis pas totalement comme eux. Je les dérange tellement qu'ils sont prêts à salir leur image. Et ça, c'est très jouissif. Tu vois ce que je veux dire ?

Lya soupira. Son ami avait en quelque sorte raison. Il ne pouvait pas encore renverser la situation, mais au moins, il leur échappait, il restait lui-même. Et ça, personne ne pourrait le lui enlever.

-Tu as froid, fit remarquer Archi en baissant les yeux vers ses bras nus. Je t'aurais bien passé ma veste, mais... je crois que ton cavalier serait un peu jaloux.

Il fit un léger mouvement de tête en direction d'Emrys, qui attendait patiemment plus loin, deux verres à la main, les observant avec une inquiétude non dissimulée.

-Je ne veux pas te laisser tout seul, murmura Lya, hésitante.

-Va t'amuser. J'ai quelqu'un d'autre à voir avant d'aller me reposer.

Il tourna légèrement la tête vers un coin du jardin où se trouvait Nata. Lya suivit son regard et comprit immédiatement. Archi et Nata devaient assister à la soirée ensemble. Il devait lui donner des explications.

-D'accord..., capitula-t-elle à contrecœur. Mais si tu as besoin de quelque chose...

-Je sais que tu es là, Lya. Merci de ne pas me tourner le dos.

Son regard se fit plus doux, plus reconnaissant qu'aucun mot n'aurait pu l'être. Elle lui adressa un dernier regard inquiet avant de le laisser partir, traînant sa carcasse meurtrie vers son cavalier d'un soir.

Lya l'observa s'éloigner avec un pincement au cœur, puis rejoignit Emrys d'un pas plus lent.

-Ça... ça va ?, hésita le garçon en tendant l'un des verres, jetant un coup dœil inquiet à Archi qui disparaissait dans l'ombre.

-On va dire que oui..., souffla-t-elle.

Emrys ne posa pas plus de questions. Il lui tendit son bras dans un geste protecteur et elle l'accepta, s'accrochant à lui. Ensemble, ils retournèrent vers les festivités, dans une tentative presque désespérée de retrouver un peu de légèreté.

 

*****

 

Archi tapota l'épaule de Nata, qui semblait avoir le regard perdu dans la nature. Lorsque ce dernier se retourna, son visage s'illumina brièvement de joie. Mais cette légère euphorie s'effaça instantanément lorsqu'il posa les yeux sur son état.

Le silence s'installa, pesant, alors que Nata observait les blessures fraîches qui marquaient le visage de son ami. Il fronça les sourcils, comme si son cerveau tentait de refuser ce qu'il voyait.

-Je comprends un peu mieux ton retard, souffla-t-il finalement, la voix trahissant un certain choc.

Archi haussa les épaules, un sourire en coin qui masquait mal la douleur qu'il ravalait.

-Désolé de t'avoir laissé en plan, murmura-t-il.

-Au vu de ta tête, on va dire que je t'excuse, répliqua Nata en croisant les bras. Je suppose que tu ne vas pas me dire ce qu'il s'est passé ?

-Sinon ça casserait mon image d'homme mystérieux !, plaisanta Archi, bien que son sourire s'effaça presque aussitôt.

-Je ne te demanderai rien alors, conclut son ami.

Il y eut un court instant de silence, puis, d'une voix plus tremblante, Archi souffla un simple :

-Merci.

Nata hocha la tête, sans poser de questions. Son regard, cependant, en disait long sur son inquiétude.

-Est-ce que tu veux que je te soigne ?, proposa-t-il enfin.

-Non, j'ai besoin de ces blessures pour imposer le respect !, continua de plaisanter Archi avec une bravade qui sonnait creux.

-Je peux au moins soigner ta côte cassée, je pense...

Archi eut un sourire crispé.

-Comment tu sais que j'ai une...

Il s'interrompit, un rire douloureux lui échappant.

-C'est vrai que tu es le fils de la plus grande lignée de mages soigneurs... Évidemment que tu l'as remarqué.

- Allez, viens, on va arranger ça, insista Nata en lui tendant un bras.

Archi ne protesta pas davantage et se laissa soutenir.

Alors que les deux s'éloignaient lentement du réfectoire, ils passèrent devant la porte centrale. Au même moment, comme un coup du sort, Matthew et Amanda en sortirent, riant aux éclats, leurs voix légères contrastant avec l'atmosphère lourde qui pesait sur Archi.

Le hasard fit que leurs regards se croisèrent. Un court instant, suspendu dans le temps. Suffisant pour que Matthew s'arrête, son sourire se figeant. Amanda, sentant le changement d'attitude de son cavalier, cessa de rire et suivit son regard.

Archi ne s'arrêta pas. Il ne broncha même pas, ne leur accordant pas plus qu'un battement d'œil avant de disparaître dans la nuit, appuyé sur Nata.

-C'était Archi, non ?, demanda Amanda, une pointe d'inquiétude dans la voix.

-Je crois, répondit Matthew, les yeux toujours rivés vers l'obscurité où son ancien ami s'était évanoui.

-Il n'avait pas l'air bien... Tu sais ce qu'il lui est arrivé ?

Un silence pesant suivit. Matthew sembla hésiter, comme s'il cherchait quoi répondre.

Finalement, il murmura, presque pour lui-même :

-... Non... mais ce n'est pas mon problème.

Sa voix manquait pourtant de conviction, et son regard restait perdu, fixé sur un point invisible au loin.

 

*****

 

Nata referma la porte du dortoir vide derrière lui, laissant l'ambiance feutrée de la pièce les envelopper. Loin de l'agitation du réfectoire et des festivités, l'endroit semblait être un havre de tranquillité, mais aussi un témoin silencieux de la douleur d'Archi.

Ce dernier clopina jusqu'à la table derrière le canapé et s'y appuya lourdement, tentant de camoufler la douleur qui tordait ses traits.

-Tu devrais peut-être t'allonger, suggéra Nata, une pointe d'inquiétude dans la voix.

-Non, ça va aller, grogna Archi.

Mais lorsqu'il essaya de retirer sa veste, un cri de douleur s'échappa malgré lui. Nata s'approcha aussitôt pour l'aider, ses mains hésitantes, avant de s'arrêter net, un léger sourire aux lèvres.

-Ça ne te gêne pas que je te déshabille ?, lança-t-il avec amusement.

Archi haussa un sourcil, clairement perplexe. Un court silence s'installa, comme s'il tentait de décrypter la situation, puis il pencha légèrement la tête.

-Non, pourquoi ça me gênerait ?

-Bah, parce que je suis homosexuel Archi !, rigola Nata.

Le blondinet ouvrit la bouche, mais aucun son n'en sortit. Il cligna plusieurs fois des yeux, tentant de traiter l'information, sa surprise trahie par son air interdit.

-Quoi ? Tu ne savais pas ?, s'étonna Nata.

-Comment j'aurais pu savoir ?!

Nata haussa les épaules, réfléchissant.

-Je ne sais pas, je pensais juste que tout le monde était au courant. D'ailleurs, je croyais justement que tu m'avais invité parce que tu le savais et que tu voulais m'éviter d'être seul.

-Premièrement, qu'est-ce qui te fait penser que tout le monde le sait ? Ce n'est pas marqué sur ta tête ! Je peux t'assurer que PERSONNE n'est au courant ! Et deuxièmement, pourquoi tu penses que j'aurais fait quelque chose d'aussi gentil ?

Nata sembla songer à tout cela très sérieusement avant de hausser une nouvelle fois les épaules d'un air détaché.

-C'est vrai..., je pensais juste que ça se voyait ! Bon, je peux t'aider quand même ?

Archi acquiesça d'un simple mouvement de tête. Son ami l'aida alors à retirer sa veste, prenant soin de ne pas toucher ses blessures. En dessous, la chemise blanche était tachée de rouge, signe que les plaies n'étaient pas encore refermées.

Le blessé déboutonna lentement son col, crispant son visage à chaque mouvement. Nata, voyant qu'il peinait, prit le relais avec une délicatesse surprenante.

-Quelle idée de t'habiller en costume avec toutes ces blessures, le sermonna-t-il en détachant chaque bouton avec minutie.

Lorsqu'il écarta le tissu, révélant l'abdomen d'Archi marqué de contusions violacées et d'égratignures encore fraîches, il ne put s'empêcher de noter que, malgré son état pitoyable, son camarade était loin d'être aussi frêle qu'il le laissait paraître. 

Un léger silence s'installa.

-Quoi ?, s'enquit Archi en voyant Nata suspendre son geste.

-Rien, juste... tu caches bien ton jeu !, lâcha-t-il avec un petit sourire en coin.

Archi roula des yeux avant de grimacer sous l'effet de la douleur. Malgré l'atmosphère lourde, un semblant de normalité tentait de se frayer un chemin entre eux. Peut-être que, malgré tout, cette soirée n'était pas complètement gâchée.

Le médecin récupéra une paire de chaussettes propres dans ses affaires.

-Mets ça dans ta bouche pour éviter que tu te fasses mal. Ça va être assez douloureux, je te préviens.

Sans tergiverser, Archi s'exécuta et mordit dans le tissu. Il regarda Nata prendre une profonde inspiration avant d'apposer ses mains sur son flanc gauche. Tout d'abord, il ne ressentit que de légers picotements, une chaleur diffuse qui semblait s'infiltrer sous sa peau. Mais rapidement, la douleur monta en intensité. Une brûlure cuisante se propagea à travers ses côtes, lui arrachant un gémissement étouffé.Il avait l'impression qu'on lui brisait une nouvelle fois les os. Son corps entier se tendit sous l'assaut, ses poings se crispèrent et frappèrent la table dans un bruit sourd. Le bâillon improvisé l'empêcha d'hurler, mais ses respirations se firent hachées, saccadées par la souffrance.

-Tiens bon, c'est presque fini, le rassura Nata, concentré.

Le mage soigneur serrait egalement les dents. Il savait que ce serait douloureux, mais voir son ami souffrir était une épreuve en soi. Il mit toute son énergie dans l'opération, canalisant son pouvoir avec la plus grande précision possible pour ne pas aggraver la douleur. 

Enfin, au bout de ce qui parut une éternité, la magie opéra ses derniers effets. La brûlure se dissipa, laissant place à une douleur sourde mais bien plus supportable. Archi haleta en dégageant la chaussette de sa bouche et bascula la tête en arrière, couvert de sueur. Nata, quant à lui, se laissa tomber sur une chaise, le souffle court.

Ils restèrent ainsi quelques instants, immobiles, reprenant leur souffle dans le silence. Ce n'était pas qu'Archi ne voulait pas parler, mais son corps était encore secoué par les rémanences de la douleur. Quant à Nata, il avait puisé dans ses ressources, et cela se voyait à ses traits tirés.

-Merci, souffla Archi, brisant enfin le silence.

-De rien. Tu as de la chance, ce n'était qu'une fêlure. Si ça avait été complétement cassé, il m'aurait fallu plusieurs séances.

Le blond acquiesça en massant son côté désormais guéri. Ça tirait encore un peu, mais rien à voir avec la douleur qu'il avait ressentie plus tôt.

Le calme qui s'installa ensuite n'était pas lourd, au contraire. C'était une sorte de trêve, un moment de tranquillité après la tempête. Ni l'un ni l'autre néprouvait le besoin de meubler l'instant avec des paroles inutiles. Ils se comprenaient ainsi, sans avoir besoin d'échanger des mots superflus.

Pourtant, Archi finit par rompre le silence.

-Nata ? Est-ce que je peux te poser une question indiscrète ?

Le concerné haussa un sourcil, intrigué.

-Vas-y.

Archi baissa un peu la tête, fixant un point invisible entre ses jambes. Il se mordit légèrement la lèvre, comme s'il hésitait à poursuivre. Finalement, il se lança :

-Quand... Comment as-tu su que tu... tu préférais les hommes ?

La question prit Nata de court, mais il n'en montra rien. Il se gratta pensivement la nuque avant de répondre avec un petit sourire en coin.

-Euh, j'ai simplement remarqué que les garçons m'attiraient, ce n'est pas plus compliqué que ça !

Il observa Archi, tentant de déchiffrer son expression. Son ami était rarement aussi mal à l'aise.

-Est-ce que... peut-être... tu te poserais des questions sur toi ?

Archi sursauta légèrement et secoua la tête.

-Non !... Enfin, peut-être... C'est juste que...

-Balance, insista Nata avec une expression plus douce, mais intriguée. Tu sais bien que je n'en parlerai à personne.

Archi passa une main nerveuse dans ses cheveux désordonnés. Il savait qu'il pouvait parler librement avec lui. Mais le faire à voix haute rendait tout ça plus réel. 

Puis, il prit une grande inspiration, prêt à s'ouvrir un peu plus qu'il ne l'avait jamais fait auparavant.

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M.A.Frogerais
Posté le 13/04/2025
IL EST BI!!!!! se serait cool d'avoir des perso bi non stereotypé ... et archi est franchement mon chouchou et c'est plus facil de voire lya bi que archi, elle rentre plus dans l'idée que les gens se font de nous....
honnetement, j'ai rien annalisé, j'etait trop prise dans le flo d'evenement meme si il etait plus leger
DSWritter
Posté le 13/04/2025
Je suis contente que tu aimes Archi, c'est un de mes petits chouchoux également ^^
J'ai vraiment hâte que tu lises la suite !
M.P Lenoir
Posté le 11/04/2025
Alors, ça ! C'est un excellent chapitre ! Tout est bien dosé, les actions s'enchainent sans problèmes et les twist sont bien amenés. C'est vraiment un bon livre que tu tiens là, j'ai comme l'impression de lire quelque chose déjà édité. La lecture est tellement fluide qu'on n'en voit pas le temps passé.

Je suis tout de même déçue de devoir attendre une semaine pour en connaître la suite, et plus encore pour en connaître tous les aspects de ton recit !

J'apprécie le fait que tu as mis le consentement dans la scène avec Nata et Archi, même le plus petit geste demande à être validé alors c'est vraiment bien que tu l'aies fait.
De même, l'annonce de l'homosexualité de Nata et les questionnements d'Archi sont bien menés, les émotions transparaissent tellement bien.

Pour Lya et Emrys, je trouve que leur relation match bien, Emrys est protecteur, à l'écoute et sait quand est ce qu'il doit laissé de la place à Lya, c'est vraiment le green flag que tout le monde voudrait.

Par contre, Matt devrait mettre petit à petit sa rancune de côté, il reste son ami, son coéquipier, ils se sont promis d'être toujours le trio 3 donc j'espère qu'il se rendra compte de ses erreurs.

Petite théorie : Lya serait l'éveil des ténèbres, un pouvoir qui sommeil en elle mais qui tente de se frayer un chemin de part ses émotions, alors que Matt et Archi sont ses catalyseurs. Ensemble, ils peuvent détruire ou rester en paix selon leur volonté. Leur trio est plus que de simple coéquipiers, leur lien d'âme soeur, même platonique, est ce qui permet à Lya de garder les pieds sur terre. Sauf quand l'un des garçons est blessé, alors là sa nature tente de reprendre le contrôle de la situation.
Je vois bien cela dans la suite, tout bascule dans un ancrage de ténèbre, ou la lumière tente toujours de percer mais est reffrenée.

Hâte de te retrouver dans les prochains chapitres.
DSWritter
Posté le 12/04/2025
Comme d'habitude, merci beaucoup pour ton commentaire. Ça me fait toujours autant plaisir !

Désolé haha. Quand je pourrais, j'essaierai de poster plusieurs chapitres d'un coup (Tout est déjà rédigé, mais j'aime relire et finaliser chaque chapitre une dernière fois avant de les poster. Du coup, entre mon travail et le fait que j'ai déjà commencé à rédiger une nouvelle histoire, il faut que je trouve le temps :) ). 

Le consentement et le non-consentement est un sujet assez central chez moi, comme tu pourras sûrement le voir dans la suite de l'histoire. C'est quelque chose qui me touche particulièrement.

Emrys est le green flag ultime ! C'est un personnage très positif que j'ai beaucoup aimé écrire donc je suis contente que tu l'apprécies également.

Je suis très heureuse de lire ta théorie. J'aime voir ce que mon histoire peut inspirer et voir si je vais vous surprendre ou non (Je ne validerai ou n'invaliderai rien bien entendu, je ne veux pas te spoiler !).

À plus tard et au plaisir de te relire !
M.P Lenoir
Posté le 13/04/2025
Pas de quoi !

Awh, le perfectionnisme jusqu'au moindre détail, je connais également. Ne t'inquiètes pas, j'attendrais le temps qu'il faut.
Dans quel registre vas tu faire ta seconde histoire ?

Alors nous sommes deux. Le consentement est vraiment une notion essentielle que l'on peine parfois à retrouver dans les romances ou tout autre histoire et c'est vraiment dommage. Or là, j'ai été agréablement surprise de le retrouver dans certaines scènes de ton récit. Ça me conforte dans l'idée de poursuivre ma lecture. Au moins, je suis sûre que tous gestes plus que romantique, sera mis sous le véto du consentement, alors grandement merci pour cela !
En tant que femme, et même pour les hommes , notre consentement n'est pas toujours acquis alors c'est vraiment super d'en mettre des notions ici.

Oui ! C'est ce que j'adore chez Emrys, son côté intellectuel, chaleureux et toujours à l'écoute du moindre détails chez les personnes avec lesquels il s'entretient. C'est vraiment un très bon personnage. Il rayonne dans ton histoire.

Je me doute, surtout que je déteste être spoiler dans le registre littéraire. Quand ce sont des films cela va mais pas en libre :/

A vendredi donc et peut être que d'ici là, j'aurais repris l'écriture alors à bientôt !
DSWritter
Posté le 13/04/2025
Ma nouvelle histoire se passe plus ou moins dans la chine (mais dans des pays imaginaires). Je sors du fantastique, donc pas de magie, pour quelque chose d'un peu plus "politique" mais toujours avec beaucoup de romance et des touches darks. Je viens tout juste de terminer le "tome 1", je pense que je la posterai après avoir terminé de publier De la lumière à l'ombre :)
M.P Lenoir
Posté le 15/04/2025
Owh c'est super ça ! Est ce qu'il y aura des références mythologiques chinoises dans cette histoire ? En tout cas, hâte de découvrir ce nouvel univers.
DSWritter
Posté le 15/04/2025
Pour l'instant non parce que je veux vraiment pas quelque chose de fantastique ni fantasy (même si ce sont des empires inventés), mais j'ai essayé de coller le plus possible aux habitudes et à l'environnement de l'époque :)
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