« Où es-tu Manu-Manuréva?
Portée disparue Manuréva
Bateau fantôme toi qui rêvas
Des îles et qui jamais n'arriva
Tu es partie oh, Manuréva
À la dérive Manuréva... »
Camille ne pensait pas que la perspective d'acquérir un excellent américain sauce pita valait la peine de subir quelconque chanson d'Alain Chamfort. Mais elle tint bon jusqu'à quitter la friterie d'Annay avec un sachet contenant une grande frite, deux bagnats thon, une fricadelle et son américain sauce pita. Elle s'arrêta un moment au milieu de la place municipale pour s'approcher de son ancienne école primaire. Elle était exactement comme dans ses souvenirs. Elle était même sûre que le préau avait la même odeur que dans son enfance, une odeur prenante comme celle d'un vieux grenier. Elle avait le vague souvenir de centaines de récréations passées dans les deux cours de l'établissement, de rires qui résonnaient dans les escaliers et d'exercices de grammaire faits rapidement sous le soleil paresseux qui passait à travers les grandes fenêtres de salles de classe. Elle avait encore le souvenir de stylo-plume qui fuit, de Chair de poule dans la bibliothèque au fond de la classe et de jeux de marelle. À se replonger dans ses souvenirs baignés de soleil et de douceur, elle se retrouva à pleurnicher bêtement devant une école vide, un sac de friterie graisseux à la main.
Détails :
• "Elle stoppa un moment au milieu de la place municipale" Ça me brosse dans le mauvais sens du poil, ce "stoppa", car anglicisme + pas de complément d'objet alors que c'est un verbe transitif. Je sentirais mieux un "s'arrêta".
• "Elle était même sûre que le préau avait la même odeur que dans son enfance, une odeur prenante et étrange qu'elle adorait et qui la rendait nostalgique." J'aurais aimé que une description des composantes de l'odeur, des images, plutôt que les adjectifs "prenante" et "étrange" qui sont génériques et ne m'évoquent rien de particulier.
Pour le préau, c'est l'odeur de mon propre préau de primaire et je suis incapable de dire ce que ça sent. Je reconnais l'odeur mais je peux pas l'assimiler à un autre truc, c'est pour ça que j'ai pas trouvé d'adjectif adapté comme tu le demandes...
Courage pour la grippe !
L'histoire est très filaire et en même temps, parfois, il y a ces espèces de petites parenthèses qui font comme des épisodes détachés, qui restent dans le thème et l'ambiance tout en décrochant totalement des événements filaires. Je trouve que ça donne un aspect assez poétique, avec des effets de rupture plutôt réussis, qui jouent avec ce que mon cerveau s'attendrait à lire ou à vivre en termes de rythme. Je crois qu'il y a un aspect très jste aussi avec la psychologie du personnage, dans sa façon d'appréhender le monde et en lien avec les émotions complexes qui le traversent ; ça devient palpable grâce à la construction, je trouve. (je brode un peu cr j'arrive pas exactement à mettre le doigt sur ma sensation, en vrai, mais je peux assurément dire que j'apprécie beaucoup !)
Ple inde bisous !