PRESENT : NILT
Nilt arriva au moment où Elijah décidait de faire une pause dans la préparation de leur excursion. Il vit le jeune adulte s’asseoir dans l’herbe, à côté de la charrette, et s’approcha de lui.
- Tu fatigues ?
- Je n’arrive pas à préparer ce fichu cheval. fit le mage aux yeux d’or d’un air boudeur.
Nilt sourit, prit le relais. L’affaire fut bouclée en quelques minutes. Elijah avait déjà fait une bonne partie du travail. Ils commencèrent à charger les quelques bagages qu’ils allaient emporter. Alors qu’ils effectuaient leur deuxième aller-retour, Elijah reprit parole.
- Je ne t’ai pas demandé où on allait.
- En Ygualroy. Dans les montagnes. C’est là-bas que se trouve la forteresse de la guilde.
L’Ygualroy. Un pays encore instable, après la guerre qu’il avait perdue. Leurs droits leur avaient été confisqués et la plupart des habitants vivaient dans la précarité. Le froid n’aidait pas. Les récoltes se trouvaient souvent ralenties par le givre et la neige. L’Ygualroy était un pays de guerriers, mais ses habitants avaient perdu leur droit de combattre. Il était très difficile de passer les frontières du pays et c’était pour cette raison que la guilde avait été installée là-bas par l’ancien chef des mercenaires.
- Nous sommes loin de l’Ygualroy ? demanda Elijah.
- Plutôt, oui. Le voyage devrait prendre un mois. Mais nous pourrions y être un peu plus rapidement si nous rencontrons les bonnes personnes.
Il y eut un silence, puis le jeune mage reprit.
- Nilt… Ce jour-là, je n’ai pas réussi à utiliser mon pouvoir.
Il se sentait coupable. Nilt le comprenait. Il venait d’apprendre qu’il avait un pouvoir offensif, et pas seulement une magie de soutien. Et il n’avait pas su s’en servir. Le retourneur prit une inspiration.
- Tu dois te sentir coupable, et c’est normal. Mais dis-toi bien une chose : le pouvoir d’influencer le corps et l’esprit est difficile à contrôler, imprévisible. Cela prendra longtemps avant que tu ne puisses t’en servir correctement. Les mages comme toi, les mages d’influence, s’entraînaient pendant des années pour apprendre à contrôler leurs pouvoirs.
- Mais je n’ai pas des années. Je n’ai qu’un mois. Après ça, il faudra que je sois en mesure de protéger Jio et Nethan.
-Elijah. Tu seras prêt. Si tu veux vraiment les protéger, tu en seras capable.
Le jeune adulte eut un maigre sourire. Nilt n’était pas un bon mage, mais il savait parler. Et même s’il mentait, même si Elijah ne pouvait pas être prêt dans un mois, une seule parole pouvait tout changer. Il posa le dernier bagage à l’arrière de la charrette s’installa à l’avant, aux rênes, tandis qu’Elijah prenait place à côté de lui. Derrière eux, les enfants attendaient leur départ. Nilt fit claquer les rênes. Le destrier se mit en marche et Elijah se retourna, adressant un au revoir de la main aux enfants. Nilt espérait qu’il les reverrait. Il espérait que ce départ ne serait pas définitif.
PRESENT : LE DUC NOWISE
En une semaine, ils avaient parcouru une bonne partie du sud du Keruen. Ils ne s’étaient presque pas arrêtés, si ce n’était pour échanger les chevaux fatigués et pour prendre un peu de repos. Samaër chevauchait à ses côtés mais son enquêteuse faisait des aller-retours pour assurer leur sécurité. Erlein Nowise était déçu. De ses deux compagnons, la jeune femme était la seule avec qui il aurait pu avoir une conversation intelligente. Samaër, sans être un idiot, n’était pas des plus intelligents et se contentait d’être d’accord en tout points de vue avec le Duc. Or, Nowise détestait les conversations plates qui ne menaient nulle-part. Il en était donc réduit à chevaucher en silence, observant le paysage qui défilait devant ses yeux. Il pensait avec excitation et inquiétude au moment où il retrouverait enfin Soö, Jio, et Nethan. Au moment où il les aurait tous les trois sous la main. Ce matin, il avait envoyé une lettre au conseil disant qu’il allait avoir besoin de renforts à la guilde. Il avait ordonné que les membres de l’assemblée ne partent pas avant une semaine. Ainsi, il serait le premier à arriver, il pourrait en finir avec Soö sans être interrompu.
Il entendit le cheval de son associée avant de le voir arriver. L’enquêteuse s’arrêta juste devant lui. D’une voix calme et maîtrisée, elle annonça :
- Des pilleurs arpentent la route, à 200 mètres. Ils n’ont pas l’air très forts, mais ils sont nombreux.
- Contournons-les. Inutile d’engager un combat. Nous ne ferions que perdre notre temps.
- Bien. Suivez-moi.
Elle prit la tête du groupe et ils quittèrent la route. Des pilleurs. C’était embêtant. À cause d’eux, Erlein allait perdre un temps précieux.