Arnitan :
Depuis plusieurs semaines Arnitan était rétabli.
Il pouvait de nouveau chasser et s’entrainer.
Pendant une semaine, il avait dû aider le palefrenier à nettoyer les enclos à chevaux. Ça ne l’avait pas mis en joie, mais il savait qu’il avait de la chance que la punition soit aussi légère.
Sa blessure l’avait quelque peu handicapé, au moment où Céleste lui avait annoncé qu’il pouvait de nouveau sortir.
Sur son torse, elle n’avait pas disparu. Une trace noire ressemblant étrangement à la patte d’un loup. Son agresseur avait laissé sa marque à jamais.
Gabrielle était convaincue que ce n’était qu’une coïncidence, qu’elle allait disparaitre avec le temps et un peu de pommade.
Arnitan n’en avait pas été certain et il ne l’était toujours pas.
Trop d’étrangeté se sont produites pour que ce ne soit que le hasard.
Un loup gigantesque dont personne ne connaissait l’existence et dont beaucoup n’y croit toujours pas.
Un monde sans vie où un être étrange lui avait parlé de son destin, affirmant que l’avenir du monde reposait entre ses mains.
Au début il n’y croyait pas. Préférant se dire que c’était la douleur qui lui avait montré ce Krieg sombre.
Pourtant, le loup était son symbole depuis sa naissance. Une hirondelle avait été sculpté par son père. Il l’avait offerte à Gwenn. Pour lui, si cette histoire était vraie, alors l’Hirondelle, c’était elle.
Quelques instants plus tôt il avait pensé ne plus jamais la revoir. Alors quand il l’avait vue entrer dans sa chambre, son cœur s’était mis à battre à tout rompre.
Et ce bisou qu’elle m’a fait.
Arnitan y pensait sans cesse.
Depuis ils n’avaient pas eu le temps de se retrouver seuls.
Se méfier d’un serpent. Ça il n’avait pas encore découvert la signification.
Et surtout, cette fille aux cheveux d’or. Elle était apparue dans sa chambre, une nuit.
Comment avait-elle fait pour arriver là ?
Le prénom qu’elle lui avait donné, d’une voix si lointaine, résonnait encore en lui.
Aelia.
Elle lui avait demandé où ils étaient. Arnitan avait cru que c’était de nouveau la blessure qui faisait son effet.
Ce n’était pas le cas, il en avait eu la certitude. Ses émotions, sa voix, son visage…
Tout ça avait été bien réel.
Puis en un clin d’œil elle avait disparu, laissant Arnitan bouche bée les yeux rivés sur le mur pendant un long moment.
Il n’avait parlé de ce moment ni à sa famille ni à quelqu’un d’autre.
Même pas au comte et à l’homme qui l’avait sauvé.
Erzic.
J’ai pu le remercier. Il a ma gratitude à jamais.
Arnitan s’était même demandé si Erzic ne faisait pas partie de son destin.
L’inconnu avait dit que j’aurais dû mourir. Et c’est Erzic qui m’a sauvé, songea Arnitan.
Mais celui-ci avait disparu de Krieg. Sûrement reparti vers sa quête familiale.
Au plus profond de lui, il sentait que l’histoire de son destin n’avait rien de faux.
Mais qu’est-ce que je dois faire ?
Soudain une douleur le lança à l’épaule :
— On se réveille ! cria une voix devant lui.
Il sursauta.
Perdu dans ses pensées, il n’avait pas vu l’épée de bois foncer sur lui.
Devant lui, Brelan le fixait, l’air excédé.
Chaque matin, dans la petite clairière derrière les habitations, les bruits sourds des combats d’entraînement résonnaient entre les arbres.
— Dans un vrai combat, tu serais mort, dit Brelan, d’une voix d’un homme qui s’ennuie.
— Mais c’est pas un vrai combat, souffla Arnitan.
Il regretta aussitôt ses paroles. Les sourcils de son maître d’arme se froncèrent :
— On peut arranger ça. Même cette épée en bois peut donner la mort.
Le rictus qui passa sur le visage de Brelan, fit frissonner de peur Arnitan.
Je suis foutu.
— En garde, le héros, reprit Brelan d’un rire moqueur.
« Héros », Arnitan détestait ce mot. En quoi était-il un héros ? Le loup avait gagné et c’est Erzic qui l’a sauvé.
J’ai juste eu peur pour mes amis et j’ai pas réfléchi.
Brelan était en position. Sûrement l’homme le plus grand de Krieg, des cicatrices lui barraient le visage et les bras, campé sur sa jambe avant prêt à envoyer toute sa musculature sur Arnitan.
De son côté Arnitan se mit sur sa jambe arrière, prêt à essuyer les coups.
Être patient. Trouver la faille, face à un adversaire plus fort que soi, se rappela le garçon.
Le maître d’armes s’approcha lentement, silencieux. Il se mit à tourner autour de lui, calculateur.
Arnitan pivotait, tendu, les yeux rivés sur chacun de ses gestes.
D’un coup Brelan se jeta sur son apprenti, envoyant un coup puissant.
Arnitan réagit aussitôt. Il bascula son poids sur l’avant, leva son épée juste à temps pour bloquer le coup. Le choc résonna dans tout son bras. Ses muscles crièrent, mais il tint bon.
La sueur perlait sur son front.
Son bras trembla sous la force de son adversaire, mais il tint bon.
Lorsque son équilibre fut parfait, il virevolta sur un côté et passa à son tour à l’attaque.
Il essaya de trouver les côtes de Brelan mais une épée s’interposa.
Les deux combattants reprirent leur distance.
— Pas mal, je vois que tu apprends. Finalement.
C’est bien le grand Brelan, qui vient de me donner un compliment ? se dit Arnitan, un grand sourire aux lèvres.
— Avant de sourire bêtement. Pense à survivre, le rabroua Brelan.
Arnitan se remit en garde, mais déjà son maître était sur lui. Il enchaîna une volée de coups qu’Arnitan essaya tant bien que mal de parer.
La puissance de Brelan augmentait à chaque passage de l’épée. Dans ses yeux, Arnitan perçut une lueur de rage.
Une pointe de panique enserra la poitrine du garçon.
Pense à survivre !
Brelan tenta un nouveau coup. Arnitan pivota, chercha une ouverture, et visa l’arrière du genou. Touché. Son maître vacilla. Avant même que celui-ci ne retrouve son équilibre, Arnitan posa le bois de son épée entre ses omoplates.
— J’ai gagné… souffla-t-il, haletant.
Brelan se releva en grognant.
Ils se fixèrent un long moment. Les yeux du maître jetaient des étincelles.
Brelan lui arracha l’épée d’entrainement des mains :
— C’est pas trop tôt, bougonna-t-il.
Arnitan resta bouche bée.
C’est vrai que jusqu’à aujourd’hui il ne l’avait jamais battu.
Ils s’entraînaient depuis trois semaines et à chaque fois Arnitan rentrait avec de nouvelles blessures.
Son visage s’illumina de fierté.
J’ai battu Brelan ! quand je vais dire ça à Piré… se dit-il.
— Enlève-moi ce sourire niais. Ça n’arrivera pas souvent, mais je suis content que tu aies enfin écouté ce que je t’ai enseigné…
Comme pour répondre, Arnitan sourit encore plus.
Brelan montra son désespoir de la tête.
— Prends ton arc, l’entrainement n’est pas terminé.
L’arc était sa plus grande force.
L’exercice était de tirer sur des cibles de plus en plus éloignées. Au début des troncs puis des branches.
Aucune flèche ne manqua sa cible.
— Trop facile, dit Arnitan.
— Voyons sur des cibles en mouvements, indiqua Brelan.
Le chasseur expérimenté lui montra du doigt un corbeau, perché sur une branche à quelques mètres au-dessus d’eux.
Arnitan se mit lentement en position, pour ne pas faire fuir le volatile.
Il banda son arc, prit le temps de viser, décocha et la flèche partit sans un bruit.
Seul le sifflement du vent indiquait où elle se trouvait.
Sûr de sa réussite, le garçon se leva attendant le son de l’impact.
Son sourire s’effaça lorsqu’une flèche jaillit de nulle part. Elle heurta la sienne en plein vol, les deux projectiles vrillèrent dans les airs. Le corbeau, effrayé, s’envola dans un croassement strident.
Arnitan resta figé.
Dans un buisson, Brelan souriait d’un air mauvais.
— C’est de la triche, je l’avais ! s’insurgea Arnitan.
— La vie n’est faite que d’injustices, mon garçon. Ta flèche était trop molle.
— Pas du tout, elle allait droit sur lui !
— Oui, mais pas assez vite. Il aurait eu le temps de s’envoler s’il avait été aux aguets. Imagine des guerriers aux oreilles tendues au moindre son… Ce serait toi, la proie.
Mauvais joueur, songea Arnitan, dépité.
— Bien. C’est fini pour aujourd’hui.
Trop énervé pour répondre, Arnitan tourna les talons et rentra chez lui.
— A demain, le héros, lança Brelan dans son dos.
Le sourire dans la voix de son maître l’agaça.
Bientôt l’heure du déjeuner. Rien qu’en y pensant, son ventre gargouilla.
Man a sûrement terminé le repas, pensa-t-il, retrouvant d’un coup un peu de bonne humeur.
Depuis qu’elle s’était remise, la maison avait retrouvé sa chaleur d’antan.
Dans les ruelles où flottait l’odeur du bois de cheminée, des guerriers patrouillaient entre les passants.
Arnitan avait remarqué que l’accès au lac de Baddir était fortement gardé. Mais au fond, tout le village semblait surveillé en permanence.
Pourtant, aucun chasseur n’avait aperçu le loup depuis plus d’un mois.
Il aurait aimé croire qu’il n’était plus là. Mais parfois, dans la nuit, son dos se glaçait sans raison. Comme si une présence invisible rôdait toujours dans l’ombre.
Il était venu pour moi.
Il n’avait pas remis les pieds dans la partie autorisée de la forêt. Peu importait ce qu’avait dit cet inconnu : la peur ne l’avait pas quitté.
Devant lui, sortant de la boulangerie, apparut Gwenn.
À ses pieds, Rif était assise.
À leur côté, un homme trapu que le garçon ne connaissait pas.
Qui est-ce ?
Mais Gwenn, elle, le connaissait. À leurs rires, aucun doute.
La chienne sautilla en apercevant Arnitan et se précipita sur lui.
— Bonjour Rif, dit-il en riant, manquant de tomber sous l’assaut des léchouilles.
Au moins elle ne boite plus…
Gwenn lui avait raconté ce qui s’était passé, le jour de son réveil. L’agression devant chez lui. Des gardes.
La colère l’avait alors envahi. Il avait voulu en parler au comte.
Mais Gwenn l’en avait dissuadé. Les gardes avaient été punis.
« Plus jamais ça n’arrivera », s’était-il promis.
Tan, tu as déjà un chien. Tu n’vas pas voler le mien quand même ! plaisanta Gwenn.
Le regard de Gwenn croisa le sien. Un instant, le monde autour d’eux cessa d’exister
Elle s’approcha doucement. Quand elle fut tout près, elle lui murmura à l’oreille :
— Bon anniversaire.
Ce murmure, le frôlement de ses cheveux contre sa joue… Il resta sans voix.
Mon anniversaire ?!
Il avait complètement oublié. Avec tout ce qui s’était passé…
— Tu avais oublié ? demanda-t-elle en arquant un sourcil.
— Je… euh… oui. On est le quinze Noslat ?
Elle se contenta d’un léger hochement de tête, malicieux.
— J’ai un cadeau pour toi, dit-elle avec un sourire mystérieux.
— Ah oui ? qu’est-ce que c’est ?
— Rendez-vous derrière la poissonnerie, juste avant la descente de la marée.
Arnitan hésita. Il ne savait pas quoi répondre. Alors il dit simplement :
— Me… merci.
Gwenn éclata de rire :
— Attends de voir ce que c’est avant de me remercier !
Des bruits de pas s’approchaient.
— Ce doit être Arnitan, dit l’homme trapu.
Gwenn, un peu gênée, acquiesça.
— Eh bien, mon garçon, cela fait un moment que j’attends de te rencontrer.
— Moi ? s’étonna Arnitan.
— Ton acte héroïque n’est pas passé inaperçu, et Gwenn ne cesse de parler de ta bravoure et de ta bonté.
— Ehhh ! protesta Gwenn, le visage rouge pivoine.
Gwenn… pensa-t-il, touché.
— Alors forcément, j’ai eu envie de te connaître, reprit l’homme avec un sourire.
— Et vous êtes… ? demanda Arnitan, légèrement agacé par tant de familiarité.
— Mille excuses, je ne me suis pas présenté. Je suis Calir, messager du comte Ostir.
Arnitan fut surpris par l’air si chaleureux du messager.
— Tan… Il m’a aidée à tenir pendant que tu étais… — elle s’interrompit.
La voix de Gwenn tremblait à peine, mais il y perçut l’émotion. Sans réfléchir, il glissa sa main dans la sienne.
Au contact, une petite décharge lui parcourut le bras. Il sursauta légèrement, tandis que les poils du bras de Gwenn se hérissaient.
Rif, étrangement calme, les observait de ses grands yeux noirs.
Arnitan reporta son attention sur Calir :
— Merci… de l’avoir protégée. Plus que je n’aurais pu le faire.
Gwenn serra sa main un peu plus fort.
De doux picotements lui parcouraient la paume, comme une chaleur vive et silencieuse.
— Ce n’est rien, répondit Calir avec un sourire. Je me suis attaché à cette petite.
Le sourire de Gwenn s’élargit.
Calir leva les yeux vers le ciel, puis bougonna :
— Je crois qu’il est temps pour moi d’y aller. Ravi d’avoir fait ta connaissance, dit-il en se tournant vers Arnitan.
— Je vous accompagne, déclara vivement Gwenn, relâchant doucement la main d’Arnitan.
La chaleur s’évanouit aussitôt, remplacée par le froid du vent.
— Tu n’as pas autre chose à faire ? demanda le messager avec une pointe d’amusement.
— Si… mais j’ai encore un peu de temps, insista-t-elle.
Calir soupira, puis haussa les épaules :
— Très bien, allons-y.
Gwenn bondit légèrement à côté d’Arnitan et lui déposa un baiser sur la joue.
— A tout à l’heure.
Arnitan resta figé. Il ne voyait plus que des cheveux roux qui s’éloignaient en sautillant.
Sa mâchoire était bloquée. Ses bras, inertes.
Alors que Gwenn, Rif et Calir s’éloignaient en direction de la tour, le messager se retourna et lança :
— Nous aurons beaucoup à nous dire, jeune loup.
Puis il fit un signe de la main et disparut dans la ruelle.
Arnitan, lui, était toujours figé. Mais pas à cause du baiser.
Jeune loup ?
Était-il au courant ? Et si oui… comment ? Était-il lié à l’inconnu du monde vide ? Un de ses alliés ?
Et si c’était le signal que j’attendais ? pensa-t-il, une pointe glacée de peur lui montant dans la gorge.
Non… c’est absurde. C’est juste un messager du comte. Pas un étrange visionnaire qui me parle de sauver le monde.
Il essaya de se convaincre. Gwenn m’a sûrement déjà appelé comme ça… ou peut-être parce qu’un loup m’a attaqué. Oui, voilà. Une explication rationnelle.
Et pourtant… il n’en était pas certain.
C’est alors qu’il comprit : il ne pouvait plus garder tout ça pour lui. C’était trop lourd. Jour et nuit, ses pensées tournaient en boucle. Ce que l’inconnu lui avait dit… Ce qu’il avait vu. Ce qu’il croyait être.
Je vais finir par devenir fou...
Mais à qui en parler ? Qui ne le prendrait pas pour un illuminé ? Lui-même doutait encore de ce qu’il avait vécu.
Il pensa à Gwenn. Celle qu’il devait retrouver dans quelques heures. Lui imposer ça… c’était dur. Et pourtant, le choix, il l’avait déjà fait. Le jour où il lui avait offert la statuette de l’hirondelle.
Pourquoi suis-je aussi stupide… pensa-t-il, écœuré de lui-même.
Il reprit son chemin et demeura absorbé dans ses pensées jusqu’à pousser la porte du foyer.
À l’intérieur, Myriam et Céleste s’affairaient autour de la table. Quand il croisa le regard de sa sœur, il reconnut son sourire habituel, peut-être même plus grand que d’habitude.
Comment fait-elle ? Je ne l’ai jamais vue triste…
Sa Man le fixa et lança :
— Quelles blessures allons-nous devoir soigner cette fois ?
— Moins que la dernière fois… répondit Arnitan en levant les yeux au ciel.
Céleste accourut et lui attrapa les bras :
— Hmm… il dit vrai. Deux bleus, pas plus… voyons voir sous la tunique…
Mais il repoussa doucement sa main, le regard sombre :
— C’est bon, y’en a pas plus. Et puis… j’ai battu Brelan, dit-il avec fierté.
— Depuis quand es-tu devenu si pudique, petit frère ? ricana Céleste.
Arnitan grogna.
Mais le regard de Myriam était resté fixe. Elle le regardait avec des yeux ronds :
— Tu as battu Brelan ?
Pourquoi ça l’étonne autant ?
— Oui… Ça n’a pas été facile. J’ai juste utilisé tout ce qu’il m’a appris. Contre lui.
Myriam eut un petit rire. Céleste et Arnitan l’observèrent, curieux.
— Très peu y sont parvenus. Brelan n’enseigne pas à n’importe qui.
— Man… tous ses apprentis doivent bien l’avoir battu un jour, non ? Pour passer les épreuves ?
— Non, Tan. Tu es son premier élève.
Il cligna des yeux. Son premier élève ?
— Quoi ? Mais… Piré ? Il s’est bien entraîné avec lui !
— Oui, mais Brelan n’était pas son maître. Ton frère le défiait, c’est tout.
— Alors…
Myriam acquiesça, rayonnante.
Tout le monde sourit dans cette famille, pensa-t-il en sentant sa propre bouche s’étirer malgré lui.
Mais une question lui brûlait les lèvres.
— Pourquoi moi ?
Sa Man et sa sœur plissèrent les yeux, intriguées.
— Pourquoi il m’a choisi comme premier élève ? précisa Arnitan.
Pour lui, cela n’avait aucun sens. Il n’avait jamais été le plus fort ni le plus doué du village.
— Ton père t’a dit qu’il voulait que Brelan t’entraîne. Voilà la raison, expliqua Myriam.
Arnitan hocha la tête, mais cela ne le convainquit qu’à moitié.
— Mais… Pa ne doit pas être le seul à vouloir que Brelan m’entraîne, non ?
— Ton père sait se montrer très convaincant.
Il remarqua que Céleste fixait le sol, ses lèvres moins étirées qu’avant.
Il y avait autre chose.
— D’accord… dit-il simplement, sans vouloir insister davantage pour l’instant.
Il se promit de demander à sa sœur, un jour où ils seraient seuls, sans dispute.
— Le repas est prêt. Tan, va chercher ton père, il est dans le jardin.
Arnitan revint avec Atlan et s’assit à table.
Le repas s’écoula dans les rires et les récits de voyage du père. Qui lors de son retour avait longuement enlacé Arnitan, qui était revenu parmi eux.
Il avait beau fouiller dans ses souvenirs, rarement il avait vu son père dans cet état.
Alors qu’il finissait de manger et s’apprêtait à nettoyer son assiette, sa mère l’interrompit d’un regard amusé :
— Qui a dit que le repas était terminé ?
Intrigué, il se rassit.
Céleste se leva, fouilla dans un coin et sortit un plateau.
Au centre de la table trônait à présent un gâteau aux fruits rouges.
Arnitan se rappela soudain quel jour on était.
— C’est pour mon anniversaire ? demanda-t-il, hésitant.
Le reste de la table éclata de rire.
— Pour quelle autre raison, gros bêta ? railla Céleste.
Il se sentit idiot. Comment avait-il pu oublier son propre anniversaire ? D’habitude, il en parlait au moins une semaine à l’avance.
Il avait tant d’autres choses en tête… Ce monde étrange l’avait visiblement déboussolé.
— Tu as accompli un exploit digne d’un guerrier aujourd’hui, mon fils, dit Atlan.
Arnitan sentit ses joues s’embraser :
— Non… ce n’était que des bouts de bois.
— Oui-da, répondit Atlan en souriant. Tu as quand même battu Brelan. Que ce soit avec un bout de bois ou une autre arme, ce n’est pas donné à tout le monde.
Arnitan sourit aux paroles de son père, bien conscient que le chemin du guerrier était encore long.
Il repensa à la séance de tir à l’arc, à la façon dont Brelan avait dévié sa flèche.
Comment a-t-il fait ça ? se demanda-t-il, admiratif.
— J’ai un cadeau pour toi, dit Atlan en se levant. Ce genre d’événement mérite bien ça.
Arnitan attendit avec impatience.
Son père revint, portant un paquet enveloppé dans un tissu :
— Je suis sûr qu’elle deviendra ta meilleure alliée. Même si j’espère que tu n’auras que rarement l’occasion de t’en servir.
Un instant, Arnitan resta figé devant l’objet.
— Tu comptes la regarder encore longtemps ? le pressa Céleste.
— Non… répondit-il en retirant le tissu.
Il posa les doigts sur la dague froide, à la lame rouge et au manche blanc.
— Elle est… magnifique, dit Arnitan.
Le garçon vit l’illumination de l’expression de son père. Il ne l’avait que très rarement vu ainsi.
— C’est une dague du royaume de Tyril. La lame est forgée dans une pierre qu’ils appellent Riziur, unique à ce royaume. Le métal rouge lui donne cette couleur. Le manche est fait du bois du chêne de fer, l’arbre le plus robuste qui existe.
Arnitan écoutait avidement son père, s’imaginant les forges de Tyril, le royaume, ses montagnes riches en minerai rouge, ses lames tranchantes.
— Nous pourrions y graver quelque chose, proposa Atlan.
Que pourrait-il faire graver, sinon ce qui l’avait toujours suivi ?
— Un loup, répondit Arnitan sans la moindre hésitation.
Il vit aussitôt les visages changer. Myriam grimaça, Céleste baissa les yeux.
Atlan voulut dire quelque chose, mais Arnitan le devança :
— C’est l’animal qui m’a suivi jusqu’à maintenant… et qui continuera toute ma vie.
Il pensa à la statuette, à l’attaque, à cet homme étrange qui lui avait parlé d’un destin.
Son père hocha lentement la tête.
— Merci, Pa. Cette dague est magnifique… et légère.
Myriam se pencha vers son mari et l’embrassa sur la joue.
Gwenn… songea Arnitan. Il brûlait d’envie de la retrouver.
— Allez, au gâteau, dit Myriam.
Céleste découpa les parts et en distribua à chacun.
Arnitan dévora la sienne en un éclair. La marée ne tarderait pas à descendre.
Je ne peux pas arriver en retard.
Le gâteau terminé, Arnitan se leva d’un bond et commença à débarrasser.
Ses parents le regardaient, les yeux grands ouverts.
Céleste souriait d’un air malicieux :
— Quelqu’un a un rendez-vous ? lança Céleste, malicieuse.
— Un rendez-vous ? s’étonna Myriam.
Une légère chaleur montait aux joues du garçon :
— Je… oui… bredouilla-t-il
— Arrête Tan. Tout le monde est au courant, se moqua gentiment Céleste.
— Tout le monde est au courant de quoi ? répéta leur mère.
Arnitan rougit violemment. Il était sur le point de s’évaporer. Tout le monde le savait ? De quoi parlait-elle ?
— Tan a rendez-vous à la poissonnerie, déclara Céleste avec un clin d’œil.
Tout le monde est au courant de ça ?
Myriam fronça les sourcils… puis ses yeux s’illuminèrent d’un coup.
— Ne la fais pas attendre, mon chéri. C’est une charmante jeune fille.
— J’ai loupé quelque chose ? demanda Atlan.
Arnitan prit son air bougon :
— Merci… grande sœur, grogna Arnitan
Céleste lui répondit par un sourire étincelant.
Il confia sa dague à son père et sortit. Alors qu’il passait la porte, deux voix s’élevèrent en chœur :
— Bonne chance, Tan !
Il soupira, puis referma derrière lui.
Patan était là, langue au vent, allongé devant le portail.
— Tu viens ? On va retrouver Gwenn. Rif sera sûrement là, dit-il en caressant le chien.
Patan se leva aussitôt, la queue frémissante.
Le garçon, oubliant les moqueries familiales, souriait à pleines dents.
Lui et Patan prirent la direction du port, le pas léger.
J’ai hâte de découvrir le cadeau… pensa-t-il.
Mais son sourire s’effaça lentement, comme emporté par le vent du large.
Il se rappela ce qu’il allait devoir lui révéler. Et cette pensée lui serra la poitrine.
Calir n'est pas (que) celui qu'il prétend être, ça devient de plus en plus évident.
Qui pourra entendre et écouter ce qu'Arnitan a à dire ?
A Voir.
J'aime bien écrire ces moments humains, même si ça fait pas avancer énormément l'histoire.
Comme d'habitude l'histoire avance tout doucement en toile de fond mais les moments familliaux sont réussis. J'aime bien nottament Céleste qui passe son temps à charier son frère. Ca se confirme également pour Calir qui est plus qu'un messager.
Je continue :)
Pour la forme :
- mais il savait la chance que la punition soit si faible. (je trouve la tournure un peu bizarre, peut-etre aurais-je remplacé par il avait conscience de ). Aussi pourquoi laisses-tu un espace entre chacunes de tes phrases ? Es-ce pour etre plus lisible en ligne ? Je trouve que par moment ce n'est pas forcément la peine et tu pourrais les regrouper à la suite.
-Trop d’étrangeté se sont produites pour que ce ne soit que le hasard. ( étrangetés je crois).
- Pourtant le loup était son symbole depuis sa naissance. Une hirondelle avait été sculpté par son père ( je rajouterais une virgule après pourtant et scultpée)
- Il n’avait parlé de ce moment ni à sa famille ni à quelqu’un d’autre.
Et le comte et l’homme qui l’avait sauvé. ( plutot ni le comte ni l'homme, sinon tes deux phrases ne sont pas reliées)
- Arnitan s’était même demandé si Erzic ne faisait pas parti de son destin. ( faire partie)
- Toutes les matinées, dans une petite clairière derrière les habitations, des chocs métalliques et des cordes relâchées se faisaient entendre. ( pareil, j'ai l'impression que certaines de tes phrases ne sont pas reliées aux précédentes).
- Il commença à tourner autour d’Arnitan, qui lui suivait ses moindres mouvements. ( j'aurais enlevé le lui)
- Le garçon l’illumination de l’expression de son père. Il ne l’avait que très rarement vu ainsi. ( il manque égalemnt un mot dans cette phrase)
Oui c'est le but de ce 1er tome, en partie. Ces moments sont très importants pour la suite de l'histoire et chaque petit détail compte.
Je prends un grand plaisir à faire Céleste et beaucoup des persos secondaires qui amènent de la lumière à chaque passage :)
Merci encore pour les retours de forme. Pourtant j'étais repassé dessus :')