Chapitre 15 - La foi ou la mort
On avait aménagé une partie du château pour recevoir le grand malade. Il n'était plus question pour lui de grimper le grand escalier ni pour se rendre à son chevet. On adapta donc une chambre d'hôte du rez-de-chaussée pour y installer un lit médical, ainsi que tout le matériel nécessaire pour une hospitalisation à domicile. Marion, elle, dormait dans un autre lit près du sien. Elle était prête ainsi à voler au secours de son cher ours s'il se sentait mal. Et, pour ne pas y perdre en activité, leurs appartements avaient été transformés en suite d'hôte. Ainsi, pouvaient-ils accueillir des clients en même temps et en tirer quelques revenus.
Ce fut non sans mal que les autorités médicales acceptèrent la décision de Léo. Sous d'apparentes bonnes intentions et de soi-disants soins plus adéquats, le professeur Louvin peinait à laisser filer les bons bénéfices qu'il représentait. Après une quinzaine de jours soumis à l'intense traitement de rayons et de chimiothérapie, les soins ne donnaient pas le résultat escompté. Pire, le foie perdait de plus en plus de cellules saines ; le cancer gagnait en surface et s'étendait aux organes voisins. Les effets secondaires étaient devenus insupportables. Le professeur, plutôt inquiet de constater cette progression rapide de la maladie, avait alors proposé une autre stratégie toute aussi massive, n'ayant pas d'autre alternative que de modifier les dosages et les protocoles. Léo refusa tout en bloc. Il préférait mourir au château, sereinement, plutôt que dans cet environnement indigne qui ne le respectait pas.
Petit à petit, une équipe d'aide-soignants, d'infirmières et de médecins se formait pour être à son chevet et lui prodiguer les soins quotidiens. Son état de faiblesse était tel qu'il peinait rien que pour se rendre à la cuisine ou aux toilettes. Dans les meilleurs jours, il traînait avec lui un tuyau à oxygène fiché dans les narines et parfois une potence de goûte à goûte avec sa dose de morphine en perfusion. Dans les pires jours, on lui approchait le bassin, on le faisait manger assis sur son lit et on le massait de manière à soulager ses douleurs de plus en plus insupportables.
C'était les vacances de février. Marion avait sollicité Justine afin de l'aider à faire des recherches pour retrouver Camille, le fils de Léo. Celle-ci avait accepté avec enthousiasme. Participer, ne serait-ce qu'un tout petit peu à recoller les morceaux d'une histoire romanesque la motivait bien plus que d'imaginer l'issue fatale d'un des protagonistes majeur, en l'occurrence, son oncle d'adoption. C'était comme cela qu'elle le voyait. À quoi pouvait bien ressembler ce fils prodigue, ce garçon sortit des méandres des rancœurs familiales à l'aune de tout espoir pour son père ? Avec les informations que Léo leur donnait, Justine et Marion explorèrent le net, les annuaires, firent des appels en mairie et auprès du dernier notaire connu de Léo pour s'assurer qu'on parlait bien du même garçon. Lorsqu'elles eurent confirmation qu'il s'agissait bien de Camille Calavany, fils de Ségolène Marchand, elles composèrent son numéro de téléphone.
Aujourd'hui, il s'apprêtait à arriver au château. Marion, avec des mots bien choisis, l'avait convaincu de venir. Justine mettait à un point d'honneur à le recevoir dignement. Peu importait s'il y mettait de la bonne volonté ou non. C'était un éminent protagoniste qui pouvait sauver la face de leur histoire. Cela avait été non sans mal. Marion, au début, n'avait pas bien su comment présenter la chose. Lui dire qui elle était fut déjà plutôt délicat, mais en plus, lui annoncer que son père était au plus mal et qu'il voulait le voir une dernière fois était bien trop brutal à ses yeux. L'adolescent au bout du fil ne savait s'il devait prendre la chose au sérieux. Son père l'avait abandonné en plein divorce d'avec sa mère alors qu'il n'avait que sept ans. Depuis, ses visites s'étaient limitées à quelques jours aux vacances de Toussaint, période creuse dans l'hôtellerie, pendant laquelle son père ne se trouvait pas sur un yacht en pleine mer ou embrigadé dans un trois étoiles. Puis, les années passant, Léo changeait souvent d'employeur et parcourait le monde en permanence, ses visites ne se réduisirent qu'à un seul week-end par an, puis plus rien depuis ses douze ans. Camille faisait ses études désormais à Toulouse dans le management et marketing des secteurs voyages, hôtellerie et tourisme. Il accepta tout de même de le revoir, avec l'assentiment de sa mère, et de faire le voyage jusqu'à lui.
Marion et Justine étaient allées le chercher à la gare. Le garçon arriva au château, présentant l'allure déguingandée d'un enfant qui avait grandi très vite à une famille d'inconnus au complet. Intimidé sous sa grande mèche de cheveux bruns qui lui cachait un oeil, il bredouilla un «boujour» maladroit à la cantonade. Chacun se présenta à lui, Maxime le premier en tant que chef de famille, qui faisait en sorte de le mettre à l'aise. Faire la connaissance du rejeton de Léo mettait tout le monde dans ses petits souliers, étant donnée la circonstance.
- Venez, dit Marion en invitant chacun à se déplacer, installons nous au salon pour faire connaissance.
Justine, prête à tout pour lui être agréable, le débarrassa de son blouson et de son sac de voyage, puis elle rejoignit toute la troupe pour s'asseoir en face de lui en poussant Mathis qui prenait ses aises sur le canapé. Maxime attisait le feu dans la cheminée, Diane, en bonne mère de famille, installait ses enfants pour entourer Camille de leur présence. Marion était allée chercher à boire à la cuisine, et, lorsqu'elle revint avec un plateau d'assortiments de boissons chaudes et froides, la jeune adolescente s'avançait pour lui proposer elle-même de servir le jeune homme. Son zèle amusait sa tante et elle la laissa faire.
- Camille, nous sommes très heureux de te recevoir chez nous, tu sais, commença Marion en espérant trouver les mots pour ménager ce qu'elle devra lui dire ensuite. Ton père a désiré te retrouver après toutes ces années et c'est vraiment tout à ton honneur d'avoir accepté de venir. Je sais que cette démarche est difficile pour toi, tu me l'as dit au téléphone. Je le comprend tout à fait. Tu as sûrement beaucoup changé depuis la dernière fois où vous vous êtes vus. Et je t'assure que lui aussi a beaucoup changé.
Pendant que Marion parlait, Camille se faisait servir un coca par Justine qui lui souriait jusqu'aux oreilles. Il écoutait celle qui prétendait être la compagne de son père avec attention malgré les minauderies de l'adolescente. Sous son allure de grand timide, elle devinait sa filiation et sa ressemblance avec Léo ne trompait pas. Il avait la même précision dans les gestes et malgré ses épaules portées en avant, un peu voûtées, comme pour rapetisser son corps trop grand pour lui, il avait cette façon qu'a Léo d'afficher une certaine fierté. Vêtu simplement d'un sweet-shirt bariolé ouvert sur un autre avec un keffieh autour du cou et d'un jean, il présentait l'allure d'un jeune homme plutôt décontracté. Pourtant, elle notait en lui les fêlures de l'absence et l'emprise maternelle. Bien des jeunes gens d'aujourd'hui vivaient avec un seul de leur parent et ils savaient mêler débrouillardise et fragilité. Pour le fils de Léo, c'était bien le cas, en plus d'avoir les mêmes yeux verts.
- Où est-il ? demanda le jeune homme d'une voix mal assurée. Je veux dire... où est mon père ? ... vous m'aviez dit qu'il vivait avec vous...
- C'est bien là où je voulais en venir, Camille, dit Marion un peu gênée. C'est que... je dois t'expliquer quelques petites choses avant d'aller le voir.
Le jeune homme reposa son verre sur la table basse, comme pour mieux se concentrer sous sa grande mèche brune. Il était un peu nerveux.
- Qu'est-ce qu'il a, mon père ? demanda-t-il, le ton légèrement impatient. C'est si grave que ça ?
- Oui, c'est très grave, confirma Marion. Et je suis désolée que tu doives le retrouver dans des circonstances aussi difficiles. Il a demandé à te voir, parce que...
- ... parce qu'il va le lui annoncer lui-même !
La voix de Léo coupa court à toutes les explications qu'avait ménagées Marion. Il était apparu dans l'embrasure de la porte du salon sans faire de bruit, à demi chancelant dans un jean et un pull enfilé à la hâte. Il tentait vainement de cacher son crâne chauve sous un foulard noué en bandana. Sa maigreur et son visage émacié ajoutés à son teint de craie rendait sa tentative de sourire aussi vaine qu'un soufflé raté. Il avait retiré son tuyau à oxygène, seul apparaissait le pansement de sa perfusion sur le dos de sa main droite. Il avança en essayant de paraître naturel, mais les douleurs et sa faiblesse ne trompaient personne. Marion se redressa immédiatement et se précipita craignant qu'il ne perde l'équilibre, mais Léo l'en dissuada d'un regard assassin. Il était hors de question que quiconque lui fasse perdre la face devant son fils.
- Bonjour, mon garçon, dit-il en avançant vers lui avec un sourire crispé. Je suis très heureux de te voir.
Le jeune homme s'était redressé, mais il n'osa faire un pas en avant. Cet homme était-il vraiment son père ? Etait-il possible qu'on puisse être aussi décharné ? ... aussi... faible ! Que s'était-il passé pour en arriver là ? Qu'avait-il fait de mal pour que son père se retrouvât dans un tel état ? Non, il devait rêver... ce n'était qu'un rêve et rien d'autre. Rien de tout cela n'était réel. L'homme s'avançait vers lui et il aurait préféré reculer. Le canapé l'en empêchait. Les autres restaient vissés à leur siège en observant la scène.
Léo était tout près et plantait son regard dans celui de cet enfant qu'il avait à peine vu grandir. Il n'avait plus à baisser les yeux pour le dévisager. Il le reconnaissait tout juste sous les traits durcis de ce grand jeune homme. Un discret petit duvet sombre se dessinait entre ses lèvres et ses narines, des poils rebelles et dispersés parsemaient son menton, ses joues aux pommettes saillantes et son cou devenu fort avaient fait disparaître le visage enfantin qu'il conservait dans ses souvenirs. Il avait les cheveux bruns comme lui et les yeux verts, mais le visage volontaire de sa mère et sa bouche boudeuse.
Père et fils se jaugeaient en silence, cherchant un souvenir sur l'autre. La maladie qui rongeait Léo prenait toute la place dans son corps et ne laissait qu'une part infime du père qu'il était autrefois, si absent fut-il. Pourtant, une petite étincelle était née dans l'œil de Camille en reconnaissant un rictus que son père avait toujours. Il venait de l'entr'aperçevoir à l'instant. Mais, les yeux du malade demeuraient toujours aussi creusés. Son corps manifestait subtilement l'appréciation des retrouvailles. Seule Marion pouvait le percevoir, le distinguer avec son sens aiguisé. Dans son aura sombre et minuscule, des petites agitations, comme des pétillements, se montraient au niveau de la poitrine et du ventre. Cela donna un semblant d'espoir à la jeune femme.
- Laissez nous seuls, je vous en prie, ordonna soudain Léo à la famille de Barjac. J'ai des choses à dire à mon fils qui ne regardent que nous deux.
Tous sortirent respectueusement, sans rien dire. Marion referma la porte derrière eux non sans les observer une dernière fois, inquiète et en même temps confiante. Pourvu qu'ils se réconcilient ! Pourvu que Léo soit apaisé après cette entrevue. C'était tout ce qu'elle espérait.
Chacun repartit à ses occupations. Marion, à sa cuisine, essayait de se concentrer désormais sur le menu du soir. Une soupe miso sera la bienvenue, eut-elle envie. Ses vertus anti-radioactives, entre autre, seront excellentes pour Léo, tout en étant gustativement agréable pour tous. Et pour harmoniser l'ensemble, un plat de domburi au poulet fera l'affaire. Un émincé de poulet cuit avec des légumes, assaisonné de sauce teryaki et accompagné de riz japonais. Cuisine extrême-orientale pour ce soir. C'était décidé. Malgré la terrible envie d'être mouche et d'assister à ce qui se disait au salon, elle se mettait aux fourneaux.
Entre père et fils, les mots étaient difficile à délier. Le divorce avait laissé des traces de rancœurs, d'amertumes et de griefs de toutes sortes. Léo avait commencé à lui faire remarquer à quel point il avait grandi et qu'il était devenu un homme, désormais. Il lui demandait poliment ce qu'il devenait et quelles études il poursuivait. Camille lui répondait entre les dents, se contentant de donner l'information minimum. Pourquoi devrait-il lui livrer les détails de ses activités alors qu'il ne s'en était pas inquiété pendant plus de cinq ans ?
- Papa, tu te fous complètement de ce que je fais dans la vie, répliqua Camille pour couper court et en venir aux faits. Alors dis-moi pourquoi je suis là. Qu'est-ce que tu as ?
- Bon d'accord, tu as raison, admit le père qui renonçait à lutter contre lui et en s'asseyant dans un fauteuil. Après tout, tu es venu pour ça.
Camille s'assit de même sur le fauteuil d'à côté. Son père remua légèrement sur son siège pour prendre une position plus confortable.
- J'ai un cancer, fiston... Et je vais mourir.
Camille arrondit les yeux sous sa mèche, surpris. C'était plutôt brutal, dis comme ça.
- Mais papa... s'inquiéta-t-il. Alors, c'est pour ça que tu es si maigre ? C'est pour ça que tu as ce truc sur la main ? Tu es à l'hôpital, c'est ça ?
- Non, je ne suis plus à l'hôpital, rectifia-t-il d'une voix sombre. Je suis ici et je vais y finir mes jours.
Camille marqua un temps de silence en essayant de rassembler tous les éléments dans sa tête. Il était venu ici pour retrouver son père en imaginant qu'il lui proposerait de reprendre une vie commune ou même des visites régulières ou encore qu'il avait des projets d'avenir pour lui. Il s'y serait tellement attendu qu'il aurai été prêt à le parier, sachant qu'il était toujours à côté de la plaque. Il s'était préparé aussi à lui déverser des reproches et surtout son manque total d'intérêt pour ses études. Mais l'attitude inquiète et grave de la nouvelle compagne de son père l'avait fait s'interroger sur ses véritables motivations sans vraiment en deviner l'enjeu. Et il se rendait compte à l'instant des raisons impérieuses qui l'avaient poussée à lui demander de venir. Le cumul des griefs étaient conséquent, mais le jeune homme gardait en lui cet irrésistible et inavouable admiration paternelle qui, malgré l'envie de lui jeter à la figure toute ses années d'absences et de manque d'amour, l'empêchait d'envisager un seul instant qu'il puisse disparaître à tout jamais.
- Tu ... tu ne peux pas mourir, papa, s'inquiéta Camille. Tu es bien entouré, ici, tout le monde s'occupe de toi et on te soigne, n'est-ce pas ?
- Oui, on me soigne, dit-il, désabusé. Mais plus personne ne peut rien pour moi, maintenant. J'ai tout essayé et la maladie progresse encore. Alors, je t'ai fait venir, parce que nous avons des choses à régler, toi et moi.
- Si tu as des vieux comptes à régler avec moi, alors vas-y, défoule-toi ! s'exclama le fils trop ému pour oser se jeter dans ses bras. Dis-moi tous les reproches que tu ne m'as pas encore faits, comme ça tu seras débarrassé.
Il était prêt à la confrontation. Et il ne voulait pas avoir l'air d'une mauviette face à son père.
- Ce n'est pas du tout ce que tu crois, Camille, pas du tout, fit Léo, la voix fatiguée et incapable de lutter. Laissons de côté ces vieilles querelles, tu veux ? Nous avons mieux à faire aujourd'hui.
Camille l'écoutait attentivement, incrédule.
- Lorsque je ne serai plus là, c'est toi qui héritera du peu que j'ai. Tu es tout ce qu'il me reste, ici, sur Terre. Ta mère a déjà la maison... La gérance de l'hôtel, c'est elle qui l'a aussi. Je n'ai plus que ma moto et un petit pécule à la banque. Ce sera pour toi.
- Tu n'es pas marié, avec... questionna Camille en faisant un signe du menton vers la porte. ... avec la femme ?...
- Marion ? ... Non. Et ce n'est pas ce que je désire avec elle... avoua Léo le regard perdu dans le vide. C'est autre chose que du matériel, entre nous...
Il restait volontairement énigmatique, comprenant alors, avec la sincérité de son cœur, que ses sentiments envers Marion étaient instables voire plus incertains que jamais. Mieux valait ménager ce fils dont il supposait la naïveté amoureuse. Lui raconter ses aventures dans ce domaine n'était pas vraiment le propos du moment et surtout trop compliqué à expliquer.
- Je vais donc régler les formalités avec mon notaire. Ce sera très simple, tu verras, lui expliqua-t-il. J'ai déjà contacté les pompes funèbres, tu n'auras à t'inquiéter de rien.
- Pourquoi tu fais ça, papa ? Tu ne vas pas mourir. Regarde, tu es encore debout, il y a de l'espoir, non ?
Camille était aux abois. À peine s'était-il préparé à retrouver son père qu'il fallait envisager de le perdre définitivement. Pour lui, la perspective était inacceptable. C'était trop lui demander.
- Je ne vois pas comment, répliqua son père, désespéré. La chimio ne peut plus rien pour moi et... à moins de supprimer les organes atteints les uns après les autres... ce qui me mènerai à la mort tout aussi sûrement... je n'ai pas d'autres solutions.
Il remua doucement dans son fauteuil pour soulager ses pauvres muscles endoloris aussi souplement qu'il pouvait le faire tout en essayant de faire bonne figure.
- Mais si, mais... bredouilla le jeune homme qui tentait d'urgence de trouver une idée. On pourrait aller voir des médecins en Suisse, je ne sais pas... Il n'y a vraiment pas d'autres médicaments pour soigner les cancers ? Je suis sûr que tu n'as pas tout essayé. Maman avait raison ; tu t'arrêtes et tu fuis à chaque fois qu'il y a un problème.
- Laisse ta mère où elle est, veux-tu !! s'exclama-t-il agressivement. Elle n'a aucune idée de par où je suis passé pour en arriver là. Alors, ne la mêle pas à ça !
Mais il regrettait déjà le ton qu'il avait haussé. Ils se turent tous les deux. Un silence gêné s'installa entre eux. Chacun voulait faire un pas vers l'autre, mais la pudeur et l'orgueil mêlés les en empêchaient. Léo était embarrassé.
- Pardonne-moi, mon fils. Je ne voulais pas être désagréable.
- Pourquoi tu m'as fait venir alors ? demanda Camille, décontenancé.
- Je t'ai fait venir parce que je voulais passer mes derniers jours avec toi. Je voudrais réparer mes fautes du passé... le fait que j'ai été un mauvais père pour toi...
Léo s'était avachi sur le fauteuil et semblait avoir du mal à respirer.
- Camille, aide-moi à me relever, s'il-te-plaît, fit-il dans un souffle. Je me suis trop épuisé. Il faut que j'aille me recoucher.
Le jeune homme s'empressa et le soutint sous un bras fermement. À les voir ainsi tout proches, ils faisaient presque la même taille. En d'autres circonstances, Léo l'aurai dépassé largement en corpulence, mais la maladie l'avait tassé sur lui-même. Le corps décharné de l'un valait en poids celui de l'adolescent en pleine croissance. Camille accompagna ainsi Léo jusqu'à sa chambre. Le frou-frou traînant de ses pantoufles alerta Marion au loin dans sa cuisine. Elle vint s'enquérir de ce qui se passait.
- Laisse, Marion, envoya Léo qui s'asseyait lentement sur le lit médical. On se débrouille très bien sans toi.
- Comme vous voudrez, répondit-elle, contrariée. Si tout va bien, je m'en vais. N'oublies pas de mettre ton oxygène. Oh... et... nous nous mettons à table dans une heure.
- Oui, oui, c'est bon, laisse nous, maintenant, la renvoya-t-il, agacé.
Marion accusa le coup et ne dit rien. Elle referma la porte derrière elle en se demandant ce qu'elle avait bien pu faire pour mériter un tel traitement.
C'était les vacances de février et tous les enfants étaient au château. Certaines pièces grouillaient d'activités tout au long de la journée. Ludovic, l'aîné de Barjac, et Camille avaient presque le même âge. Dans sa chambre, ils s'entendaient sur bien des sujets, notamment à propos d'une collection de figurines de films. Justine trouvait un prétexte par heure pour être avec eux. Ce garçon à la mèche sur l'œil lui plaisait décidément beaucoup. Affable mais timide, souriant mais à peine, il avait un petit air triste qui lui donnait une irrésistible envie de le consoler. Elle ne cessait de vouloir l'accompagner où qu'il aille. La sonnette de la porte d'entrée résonnait souvent. Entre les visites des infirmières, du kiné, du médecin, des services de l'aide à domicile pour les déchets médicaux et même les collaborateurs architectes de Maxime, sans compter les clients des chambres d'hôte, le château, lui, ne perdait pas la vie. Marion tentait d'assurer parallèlement son travail en cuisine pour les hôtes et d'être le plus souvent possible auprès de son homme. La tâche pesait de plus en plus lourd au fil des jours.
Pourtant, malgré toute cette vie dans le château, Léo, dans son lit, dépérissait de jours en jours. Ses forces l'abandonnaient, son teint blême et sa peau parcheminée laissait voir des veines bleues sur ses bras et son cou, ses yeux se creusaient dans leurs orbites et le blanc était jaunâtre. Il avait l'esprit agité et le corps inconfortable comme si mille éléphants voulaient l'enfoncer dans le sol. Se lever devenait une épreuve de plus en plus insurmontable. L'homme athlétique au col tricolore n'était plus que l'ombre de lui-même. Malgré les efforts redoublés de Marion pour être aux petits soins dans l'assiette, il avait perdu le goût des aliments comme si chaque plats n'étaient qu'un ramassis de caoutchouc à l'huile rance. Le médecin qui venait diagnostiquer son évolution n'était pas optimiste. Les infirmières repartaient chaque jour avec un rictus d'impuissance. Elles faisaient tout leur possible pour qu'il ait le moins de douleurs possibles, mais elles n'envisageaient, elles aussi, plus aucun espoir. Marion ne savait plus quoi faire.
Camille passait un peu de temps chaque jour avec son père lorsque celui-ci recouvrait un peu de courage et de lucidité. La mascarade du premier jour n'avait pas tenu longtemps. Léo n'aurai pas pu masquer plus avant l'état avancé de son cancer. Les dosages de morphine l'aidaient à ne pas sombrer totalement dans des grimaces de douleurs et des délires insensés. Alors, quand cela allait mieux, ils évoquaient ensemble leurs années passées en famille. Leurs jeux quand il était petit, les tours à moto quand il avait grandi, les grandes vacances en Grèce, le camping dans le grand pré sous la maison chez papi en Toscane et même son accident de moto qui lui avait valu quinze jours d'hôpital et trois mois d'immobilisation à la maison. Camille s'en souvenait très bien car c'était là qu'il avait le plus apprécié son père. Il avait alors dix ans. Il pouvait profiter de lui autant qu'il voulait pendant son séjour dans son petit appartement Toulonnais. Tous les DVD et jeux vidéo y étaient passés et ils avaient beaucoup ri. Léo souriait de voir son fils heureux à ce souvenir. C'étaient leurs seuls moments de bonheur à l'époque de la procédure de divorce. C'étaient aussi ses premiers mois de vie de célibataire qu'il ait eu à vivre avant qu'il n'entame sa vie de nomade, seul, embauché sur les plus luxueux paquebots du monde.
Agonisant, les nuits de Léo étaient agitées. Il réveillait Marion très souvent, criant dans ses cauchemars, délirant ou lui réclamant un massage pour soulager ses douleurs, un besoin urgent de vomir, parfois aussi sans le faire exprès, se parlant à lui-même tout haut ou pleurant à chaudes larmes. La jeune femme dormait à peine, toujours sur le qui-vive, craignant le pire à chaque fois.
Une nuit, comme d'autres auparavant, l'une des plus agitées où ses tripes venaient de crier vengeance, Marion décida de poser ses mains sur son crâne chauve pour l'apaiser. Calmement mais résolument, elle utilisa naturellement les énergies positives environnantes, histoire qu'il garde la vie et que le reste de la nuit lui permette de se reposer. Rendre ses entrailles l'épuisait terriblement. Dans la lumière blafarde de la lampe de chevet, se dessinait son corps douloureux sous les couvertures. Tout autour n'était que pénombre et douce noirceur. Les heures calmes d'une nuit sombre et sans joie s'étiraient, favorisant un esprit de contemplation troublée. Dans cet environnement propice, la jeune femme voyait se profiler les autres corps de son compagnon et elle dialoguait avec eux sans parole. D'âme à âme. De longues minutes s'écoulèrent en contact l'un de l'autre. Le corps astral de Léo s'élevait au-dessus du lit, comme pour échapper un instant à l'intense douleur du corps physique. Un moment de répit pour son être qui luttait et se perdait dans des émotions mêlées. Marion écoutait et se faisait l'intermédiaire d'une supplique muette et d'une source d'énergie bénéfique inépuisable qui s'offrait ici sans condition. Lorsqu'elle sentit l'apaisement se diffuser dans tous les corps, elle enleva les mains de son crâne et se déplaça pour vérifier que le goutte-à-goutte suspendu au portique s'écoulait bien. Il était inconscient mais il allait bien.
- C'est amusant de jouer avec la mort, n'est-ce-pas ?...
Cette voix, à la fois narquoise et égrillarde, Marion l'aurait reconnue entre mille. Elle se retourna brusquement dans sa direction. Il était là, dans la chambre, tapis dans la pénombre tel un gnome dans sa grotte, appuyé sur sa canne des deux mains. Le vieil Antoine étirait son sourire cynique jusqu'à l'indéfinissable couple.
- Comment êtes-vous entré ici, vous ?! s'exclama la jeune femme sans forcer sur sa voix pour éviter de réveiller son compagnon.
Il ne répondit pas et s'approcha du lit en fixant le visage souffreteux et inconscient de Léo. Il en perdit le sourire.
- Si c'est pas malheureux d'en arriver là, tout de même ! se désola-t-il.
- Antoine, je vous en prie, sortez d'ici, je ne vous ai rien demandé, l'obligea Marion.
- Vous non, mais lui, oui. Il m'a demandé, annonça-t-il, tout en se penchant un peu plus sur le malade endormi avec un air examinateur. Je l'ai entendu m'appeler... alors, je suis venu.
- Comment ça, il vous a demandé ?
- Marion, ne faites pas celle qui ne sait rien, je vous en prie, la réprimanda-t-il, toujours en examinant Léo de ses yeux cerclés de blanc. Vous êtes désobligeante quand vous vous y mettez.
Le vieil homme enserra ses doigts osseux sur le poignet du malade et écouta ses pulsations internes.
- Vous l'avez bien apaisé avec vos mains, ma chère, reprit-il tout en restant à l'écoute de son examen sensoriel. Vous voyez que vous servez à quelque chose quand vous voulez bien vous y mettre !
Elle ne répondit pas et croisa les bras, nerveuse.
- Il semble que les parchemins n'ont pas eu l'effet escompté, constata le vieil homme, déçu.
- Quoi, comment ça ?!... s'exclama Marion. Alors, les parchemins, c'était vous ?
Il agita une main pour signifier à la jeune femme de se taire et il approcha une oreille de son visage.
- Il est temps, Léo... il est grand temps que vous ouvriez les yeux sur votre vie, murmura-t-il. Venez par ici, ma jolie.
D'un signe, il invita Marion à s'installer en face de lui de l'autre côté du lit.
- Que voulez-vous faire ? se méfia-t-elle.
- Vous voulez que votre amoureux reste en vie, n'est-ce pas ? supposa-t-il. Alors, venez m'aider à le basculer du côté droit.
- Quoi ? ... mais pour quoi faire ?
- Ne discutez pas. Nous perdons du temps, là. Il faut faire vite.
Il retira la couverture d'un geste sec. Le corps osseux étendu de Léo ne bougeait pas. Sous un signe du vieil homme, elle glissa un bras sous le buste de Léo et le tourna délicatement, pendant que de l'autre côté du lit, Antoine positionnait les jambes du malade l'une étendue et l'autre légèrement repliée de manière à ce qu'il soit stable. Léo respirait mal. Le peu d'air sifflait en traversant ses poumons. Puis, il lui déposa sa main gauche sur la cuisse gauche et sa main droite sous le menton. Il prit la précaution de retirer le cathéter de la perfusion pour ne pas qu'il gène et il repoussa le portique pour être plus à l'aise près du malade.
- Hé, mais qu'est-ce que vous faites ?! s'exclama la jeune femme. Il a besoin de sa dose de morphine pour ne plus avoir mal.
- Plus maintenant.
Imperturbable, le vieil homme poursuivit son installation en lui appliquant un doigt de sa main droite sous le menton contre sa narine droite pour la boucher. Le vieil homme se redressa et observa l'ensemble de la posture qui sembla le satisfaire. Puis, il posa deux doigts de sa vieille main sur la carotide de Léo et écouta les faibles et irrégulières pulsations en fermant les yeux. Un long moment, il ne dit rien. Marion observait les deux hommes en silence. Ce que faisait Antoine était absolument incongru, mais il semblait tellement sûr de lui qu'elle n'osa le contredire. Elle n'avait jamais vu faire ça de sa vie.
- Approchez, Marion, et donnez-moi votre main droite, ordonna le vieil homme en rouvrant les yeux.
Elle s'exécuta sans discuter. Il guida la main de la jeune femme et la posa sur le cœur de Léo.
- Maintenant, connectez vous à son esprit et donnez lui toute la lumière de votre amour, ajouta-t-il. Montrez lui que vous l'accompagnez où qu'il aille. Ressentez sous votre main, la chaleur de son cœur et dans votre esprit, ses émotions. Captez tout ça. Écoutez. Donnez.
Pendant ce temps, le vieil Antoine se déplaça à la tête du lit et posa ses deux mains sur le sommet de son crâne et se concentra. Marion écoutait. Elle ressentait. Quelques pulsations très distantes, puis d'autres accélérées... Elle donnait.
Puis, dans sa poitrine, le cœur de Léo s'arrêta.
Elle entendit le dernier souffle. Ténu, subtil.
- Non ! s'exclama-t-elle dans un étranglement. Non !!!...
La douleur la submergea. C'était inconcevable. Il ne pouvait partir comme ça. Non.
- Chuuttt ! fit Antoine qui se concentrait toujours. Ce n'est pas fini.
La jeune femme, éperdue, suppliait le vieil homme les yeux brillants de larmes. Elle gardait la main sur son cœur horrifiée de ne plus rien sentir sous ses doigts. Comment pouvait-il affirmer une chose pareille ? Léo venait de rendre son dernier souffle. Il venait de mourir, quoi !
Antoine, imperturbable, poursuivait sa tâche. Il se pencha tout près de l'oreille du malade et lui murmura des paroles que Marion ne distinguait pas. Des paroles qui semblaient venir du fond des âges, dites avec une rapidité étonnante, dans une langue inconnue et que Léo entendait subtilement à travers tout ses corps. Cela dura plusieurs minutes. De longues minutes suffisantes pour perdre tout espoir. Mais, elle osa enfin plonger au fond de lui, tentant la dernière chance, se disant si elle ne faisait rien, elle le regretterai toute sa vie. Elle calma ses émotions.
Là était le règne de la Lumière. Léo y baignait tout entier. Cette petite silhouette au loin... Était-ce bien lui ? Elle lui tournait le dos. Elle s'éloignait. Puis, elle stoppa et tourna la tête vers elle, comme si elle avait entendu son appel muet. Elle se tourna alors toute entière vers elle. Et elle se mit à marcher pour revenir dans l'autre sens. Marchant, puis accélérant. Elle se mit à courir. Courir vers elle, ouvrant les bras et le visage rayonnant. Léo, plus beau et souriant que jamais était à deux pas. À deux pas pour la toucher. Il l'avait entendue... ou senti sa lumière... son amour, peu importe. Il revenait.
Sous ses doigts, Marion sentit de nouveau une palpitation. Il battait. De nouveau, la vie pulsait. Antoine continuait ses murmures à l'oreille, comme un ruisseau de paroles dans une vallée de montagnes. Que pouvait-il bien lui raconter de si attractif pour qu'elle sente ainsi son cœur s'accélérer et prendre un rythme de plus en plus normal ? Le vieil homme se redressa enfin et poursuivit de psalmodier de manière incompréhensible dans un flot décélérant, comme s'il concluait ce qu'il avait à prononcer. D'un geste du menton, il intima à Marion de l'aider à le remettre sur le dos. Il le réinstallèrent confortablement, la tête posée sur l'oreiller qu'elle avait glissé de nouveau sous lui. Elle le recouvrit de la couverture, les bras au-dessus, allongés le long du corps.
Peu de temps après, il respirait de nouveau, tranquillement.
Marion n'en croyait pas ses yeux. Émue aux larmes, elle regardait la poitrine de son homme se soulever doucement. Il vivait. Antoine cessa son débit de paroles murmurées et tint encore son pouls du poignet entre ses doigts pour s'assurer qu'il maintenait toujours son retour à la vie. Les paupières de Léo restaient closes, mais son visage recouvrait ses traits vivants, ses petites rides au coin des yeux et ses narines vibrantes. Marion avait du mal à retenir des larmes de joie.
Le vieil homme retira enfin ses mains et les frotta rapidement entre elles. Il avait terminé son travail. Marion, par contre, avait pris l'autre main de son compagnon, et, le visage empli de gratitude, ne cessait de dire merci tout bas.
- Maintenant, vous avez intérêt à ce qu'il remplisse sa vie comme prévu là-Haut, recommanda Antoine qui récupérait sa canne posée contre une chaise. Quand on revient d'entre les morts, ce n'est pas pour la gaspiller à souffrir. Et surtout j'ai horreur de perdre mon temps, termina-t-il en se dirigeant vers la sortie.
- Merci, Antoine, répondit Marion sans lâcher la main de Léo. Merci de tout cœur.
Le vieil homme eut un signe bourru de la main qui semblait dire que ce n'était rien, puis il sortit de la chambre sans un regard et sans un mot.
o0o0o0o
Léo reprit conscience petit à petit, et, jour après jour, il se rétablit miraculeusement. Le plus extraordinaire était l'expression effarée des infirmières en lisant les analyses quelques semaines plus tard. Le cancer était en rémission. Exit, les métastases dans tous les organes ! Disparus, les yeux jaunes et éteints ! Alertés, les médecins voulurent faire moultes vérifications. Même le professeur Louvin avait fait le déplacement, lui, pourtant si peu curieux du sort de ses patients, était venu au chevet de celui qui avait pris toutes les statistiques et pronostics à revers. Il trouva alors un homme qui déambulait dans le grand hall du château en peignoir et pantoufles traînantes, encore amaigri, certes, mais avec une verve nouvelle et une étincelle dans l'œil qu'il ne décelait jamais chez ses autres patients. Léo l'avait reçu au salon, bien décidé à lui montrer comment élargir sa palette de thérapies. Après l'avoir laissé patienter un bon quart d'heure, il revint chargé d'un plateau et deux petits bols fumants avec des cuillères chinoises trempées dedans.
- Goûtez-moi ça, vous allez m'en dire des nouvelles, avait-il proposé l'œil narquois et emprunt de défi en lui tendant un bol de soupe miso.
Et tout en dégustant chacun le bouillon, Léo lui vanta les vertus de cette préparation afin qu'il la préconise à ses patients soumis à la radiothérapie. Évidemment, son statut de cuisinier professionnel faisait montre d'une certaine crédibilité et le professeur n'osa pas le contredire. Mais, visiblement peu sensible à sa démonstration, il abandonna le petit bol et sa soupe à peine entamée sur la table basse et lui posa encore un tas de questions sur ses douleurs. Surtout, le professeur voulait en savoir plus sur le jour, enfin la nuit, où s'était produit le miracle. Car, ce ne pouvait être qu'un miracle ! Il avait étudié son dossier et tous les rapports infirmiers juste avant de venir et il était impossible que les métastases disparaissent et que les cellules cancéreuses étalées un peu partout se soient résorbées comme par enchantement alors qu'il était mourant. Léo aurait voulu être sincère, mais il bloqua encore sur les mots. Chaque fois qu'il essayait de décrire ce moment si incroyable, il ne trouvait rien, aucune expression ni aucun mot pour en parler. Alors, encore une énième fois impuissant à répondre à la question, il envoyait sa réplique cinglante :
- Ce qui s'est passé, je n'en sais foutre rien ! Tout ce que je peux dire c'est que c'était extraordinaire. Extra-ordinaire !! Vous m'entendez ? Et si vous voulez le savoir, vous n'avez qu'à être à ma place.
Le professeur Louvin n'eut rien à contredire. Il ne comprenait pas. À court d'arguments l'un et l'autre, il était inutile de s'étendre sur la question. Le médecin repartit avec encore plus de questions sans réponse qu'il n'en avait en arrivant. Cette maladie avait décidément une incroyable propension à lui échapper et son orgueil de «guérisseur» venait de prendre un coup dans l'aile.
Quant à Camille, il avait laissé son père à la fin de ses vacances, concordant à quelques jours près à sa «résurrection», pour retourner poursuivre ses études à Toulouse. Ils s'étaient promis de se revoir régulièrement, à chaque vacances, au moins. Léo était décidé à ne plus reproduire les erreurs du passé et tenait à garder bien au chaud l'amour pour son unique fils. Et puis la maison était bien assez grande pour qu'il y vienne passer autant de temps qu'il le voulait...
Lorsqu'il reprit pleinement conscience et mesura peu à peu l'étendue de sa rémission, Léo redécouvrait son amour pour Marion. Ils s'étaient retrouvés plus amoureux et attachés l'un à l'autre que jamais. Un élan du cœur irrésistible le poussait vers elle à l'embrasser, la toucher, la dévorer des yeux, lui murmurer des mots d'amour et lui jurait qu'il ne la quitterait jamais. L'homme ne cessait de dévisager sa compagne comme s'il la découvrait pour la première fois. Plus rien n'était pareil, tout était devenu si lumineux et positif. Les mots ne sortaient pas de sa bouche. Il n'en trouvait aucun pour qualifier ce qu'il venait de vivre, pas plus qu'il n'était inspiré pour dire comment il voyait les choses, dès lors. Mais son visage était rayonnant et il parlait pour lui. Marion était au comble du bonheur. Son homme était vivant.
Il restait tout de même une dernière chose pour achever de convaincre Léo de sa foi retrouvée. Quelques semaines plus tard, alors qu'il reprenait doucement force et vitalité, Marion l'accompagna pour lui montrer la plaque commémorative au fond du jardin. Il l'avait suivie sans rechigner. Vêtus chaudement pour faire front à l'air glacial du mois de février, ils foulaient le sol nu parsemé de quelques poireaux figés dans la terre gelée du potager. Elle repoussa les plantes grimpantes accrochée au vieux mur de pierres qui masquait la plaque de marbre. L'épigraphe disait encore :
«Hic ad vitam eternam Guileme & Mathil in amore astrictum esse eternam»1
Léo fixait l'inscription et restait silencieux. Il tenait Marion par les épaules et ne bougeait pas. Au fond de lui Léo savait. Il comprenait. C'était ténu, très vague, mais son aventure aux confins de la mort l'avait persuadé d'une chose : il y avait une vie là-derrière et même plusieurs. Il ne pouvait nier aujourd'hui que c'était la sienne. C'était lui et personne d'autre qui avait vécu le grand tunnel et la lumière blanche. Ce qu'il avait compris là-bas se matérialisait à sa manière ici, sur l'épigraphe. On lui avait demandé de revenir pour comprendre, pour évoluer, pour changer, pour avoir la foi. Ces mots, qu'ils fussent dans un latin qu'il n'avait pas appris, il les entendait par le cœur. La femme qu'il tenait à ses côtés était l'objet de son retour à la vie. Il comprenait soudain qu'elle était bien plus qu'une femme à aimer, mais un guide. Et un guide amoureux, qui plus est...
Marion observait le visage de son compagnon dont les expressions se succédaient à grande allure, le transfigurant de manière étonnante. Les compréhensions qui se faisaient jour sans aucun mots sous son crâne regarni d'un fin duvet poivre et sel le marquait irrémédiablement dans tout son être. Elles faisaient place à la conviction, la confiance et la foi. Elle se blottit tout contre lui, affectueusement, heureuse de retrouver l'homme qu'elle aimait.- Si je comprend bien... Mathilde et Marion, la même initiale... tu as changé de prénom pour mieux m'aider, c'est ça ? lui demanda-t-il. Tu savais que je comprendrais mieux ce qui me lie à Guillaume...
- Oui, confirma-t-elle. Solenne n'avait pas la meilleure énergie qui soit pour une telle épreuve. Marion... enfin... voilà, maintenant, je me devais d'être ton complément et non ton alter-égo. Sinon, je n'aurais jamais pu t'aider comme je l'ai fait. Et d'ailleurs, ma tâche n'est pas terminée... pendant que la tienne commence... en accord avec la mienne. Nous avons des tas de choses à vivre ensemble désormais. Il nous a fallu plusieurs vies pour y parvenir.
Léo eut un élan d'amour et de reconnaissance pour elle. Il se tourna légèrement et l'embrassa très fort de ses deux bras, de tout son corps. ll voulait la sentir toute entière contre lui, même à travers les épais vêtements d'hiver, celle qui n'avait jamais cessé d'espérer et de croire en lui. Il prit doucement son visage à deux mains et déposa un tendre baiser sur ses lèvres. Marion s'abandonna totalement à cet élan d'amour et l'embrassa à pleine bouche.
Ils restèrent un long moment, ainsi embrassés, tout près du vieux mur gravé de leurs mémoires. Le temps était suspendu. Puis, une voix emmitouflée, sortie de l'épaule de Léo, rompit le silence.
- Ça m'a donné une idée de recette, tiens !
Marion s'était exclamée, le visage souriant encore enfoui dans l'écharpe enroulée autour du cou de son amoureux.
- Une idée de recette ?! s'intrigua-t-il.
- Oui. Et même bien plus qu'une recette... toute une symphonie culinaire.
- Tu me montres ?
- Et comment, que je vais te montrer !! Tu seras même mon violon solo !
Eh bien, quel chapitre étonnant ! Je voyais tristement se rapprocher la fin inexorable et au dernier moment, boum ! renversement de situation ! C’est un peu comme la démonstration qu’il faut croire à ses convictions et se battre jusqu’au bout… C’est beau.
Je ne comprends pas bien quelle est la véritable identité d’Antoine du coup… Si c’est lui qui a envoyé les lettres et les a mis en lien avec leurs vies antérieures, je me demande ce qu’il a pu dire à Léo pour le faire revenir « terminer sa mission »…
Encore une fois, tes descriptions sont très puissantes, j’avais peine à retenir mes larmes dans la première partie. Mais ce que tu dis sur la foi, je m’y reconnais vraiment (enfin, pas tout à fait moi) dans le cancer de ma grand-mère, qui s’est rétablie de façon quasi miraculeuse (le médecin n’en revenait pas…), je pense que c’était très lié à sa volonté de guérir. Malheureusement, ce même cancer est revenu quelques mois plus tard et sous une forme très violente à laquelle elle n’a pas survécu. Cependant, je me souviens bien de cet espoir qu’elle gardait toujours et je l’ai retrouvé dans ton chapitre :)
Je suis heureuse de voir aussi le retour de Léo vers Marion, qui n’a jamais cessé de l’aimer malgré toutes les épreuves qu’elle surmontait, et c’est très beau ! J’ai bien aimé aussi l’arrivée de Camille, avec Justine qui en est tombée raide dingue, ça amenait un peu de légèreté bienvenue, et toujours un peu d’espoir en la vie…
Je te remercie une fois encore pour ces agréables moments que je passe à lire ton roman !
Ici, tu t'interroges sur les intentions d'Antoine et c'est bien normal. Pourquoi intervient-il ainsi dans leur couple ? On pourrait croire à une véritable ingérance, mais tu as vu que tout prend son sens dans les chapitres suivants.
Ce que tu dis sur ta grand-mère est très touchant et j'imagine comment vous avez dû vous sentir plein d'espoir et à la fois abattus par son départ si rapide. Ça arrive, parfois, une rémission quasi miraculeuse et puis une rechute violente et mortelle rapidement. Le secret se trouve bien souvent dans l'esprit-même de la personne. Un certain vécu, certaines prises de consciences, des changements radicaux de points de vue peuvent bouleverser totalement la santé de l'être, en bien ou en mal, d'ailleurs. Quand part du principe que la pensée est créatrice, tout espoir et même conviction de vouloir changer et guérir peut tout changer et faire figure de miracle. La médecine n'a aucune explication, parce qu'elle ne va jamais chercher dans ce qu'il se passe réellement dans l'esprit humain. Pourtant, c'est là que se forment les "miracles". C'est ce que Léo a vécu.
C'est à moi de te remercier pour tes commentaires si charmant. Je vais répondre à ton commentaire suivant.
Je ne sais pas trop comment je peux te répondre en fait. Le vieux grigou a des capacités, des pouvoirs et il les utilise... voilà voilà. Je ne sais pas trop ce que tu as trouvé flou, en fait.
Bref, la fin du chapitre était là pour me confirmer dans mes hypothèses : grâce au mystérieux Antoine et à la foi de Marion, Léo est sauvé ! J'ai beaucoup aimé le passage "mystique", qui m'a fait penser à un film que j'ai vu il y a quelques temps : The Fountain. Dans mon esprit, je revoyais l'esthétique superbe de ce film dans tes descriptions. En y repensant, ton histoire et l'histoire de ce film se font un peu écho... c'est marrant.
Enfin, voilà, j'ai beaucoup aimé ce chapitre aussi ! Bravo !
Alors, tu as vu The Fountain et ça t'y a fait penser ?! C'est amusant. C'est un très beau film, c'est vrai. Et le passage où cet homme médecin essaie tout pour sauver sa femme, c'est vraiment émouvant. Mais il se fourvoie dans des espoirs de vie éternelle et c'est là que le film s'alourdi. Enfin, ceci est une autre histoire ! Mais oui, c'est marrant que tu y aies vu l'esthétique de ce film dans ses passages "mystiques". Disons que j'ai essayé de décrire ce que d'autres appellent une NDE, une expérience proche de la mort.
Merci d'avoir apprécié ce chapitre. C'est l'un des plus importants et pour cause !
Une sadique déguisée, moi ? ... nooooon, si peu ! J'accepte le compliment, ma chère. Venant de toi, c'est un honneur.
Malheureusement, la vie est ainsi faite qu'elle est sadique aussi. J'ai essayé de la dépeindre avec mes tripes et mon vécu et c'est Léo qui en fait les frais. Comme on dit ; qui aime bien, châtie bien... ahem ! Je n'ai pas assez lu de Plumes pour savoir si je suis la seule à parler du cancer, mais visiblement, nous sommes quelques uns à l'avoir approché de près, voir à en être touché. Alors, évidemment, je comprend l'émotion que ça peut susciter.
Alors, c'est vrai ? Pour toi, tu classerais cette fiction dans le fantastique ? J'avoue que là, j'aimerai bien mais vu la tournure qu'elle a pris, elle est quasi inclassable, ou alors, dans "Romance/fantastique/drame/étrange" ... et peut-être autre chose, je sais pas. Tiens, c'est une question que je pourrais poser dans mon JdB, pour savoir ce que d'autres en pensent.
Donc, pour la toute fin, tu imagines bien que je vais rester bouche cousue et que même si tu me jettes aux mordantes et même à tes tuantes, je ne parlerais pas. Ce qui me fait avouer fièrement que j'ai réussi mon premier climax ; une fin intermédiaire. J'espère que la suite te plaira ; une sorte de sadisme tout en nuances...
Merci pour ton retour si plaisant. Biz Vef'
Quand j'ai repris ma lecture là où je l'avais laissée et que j'assistais à la déchance de notre ours, dévoré par la maladie jusque dans son âme, j'avais la gorge nouée et je serrais les mains. J'aurais pu choisir une histoire plus légère, mais non, c'est TOI que je voulais lire. Probablement parce qu'il y a quelque chose dans ton récit qui fait inconsciemment appel à quelque chose que je dois et que je souhaite affronter en face, même si c'est difficile.
Ce chapitre m'a permis de comprendre pourquoi.
Après nous avoir fait toucher le fond, présentant un Léo méconnaissable (ta façon de décrire l'impact du cancer sur ses sentiments pour Solenne/Marion était vraiment très dure), l'intervention du vieil Antoine avec son aplomb et son sens de l'humour très particulier apporte une bouffée de lumière et d'espoir. Et là, c'est le miracle, la résurrection, le renouveau. J'y croyais à peine, je m'attendais au pire ! Ca m'a fait un soulagement presque physique, pour te dire ^^
Alors, grâce à cela, je me sens confortée dans mon sentiment : il fallait que je lise "ça", ce message plein d'espoir que tu offres.
J'aurais presque voulu que tu approfondisses davantage l'expérience post-mortem qui s'est passée du point de vue de Léo. Ou du moins son retour progressif à la santé : la deuxième partie du chapitre était un peu trop rapide à mon goût. J'aurais voulu savourer chaque nouvelle étape vers la vie et vers Solenne, de qui Léo s'était presque coupé. Elle en a vraiment bavé, la pauvre.
De plus, même si je comprends la portée "mystique" de cette résurrection (le scepticisme et la négation de Léo l'ont précipité vers la maladie), j'aurais beaucoup aimé que tu ailles encore plus au fond de ce message et que tu nous conduises vers une piste de réflexion philosophique sur le sens de la vie et de la mort, sur le rôle de l'amour dans l'existence, etc. Ce n'est vraiment pas évident et je crois que j'en serais moi-même incapable, mais j'avais l'impression qu'il me manquait quelques éléments clefs pour vivre pleinement ce moment capital de ton histoire. Il ne faudrait pas grand-chose, juste un petit développement... du moins, de mon point de vue ^^ j'ai sans doute des exigences qui viennent de mon propre vécu, alors prends mon commentaire avec des baguettes.
Sinon, je suis vraiment conquise par le style qui est franchement bon et qui épouse complètement ton sujet, dans la joie comme dans la douleur ! Rien que ta façon de décrire Camille m'a fait complètement craquer pour ce personnage *o* il est tellement réaliste ! Je l'adore avec sa mèche qui lui tombe sur l'oeil ! (Justine aussi semble l'apprécier ^^ va-t-elle avoir droit à sa propre histoire d'amour ?)
J'ai tout de même eu droit à deux gros sursauts au cours de ma lecture : la rencontre avec les yeux jaunes du chat dans la cave et la stigmate de Marion à la poitrine O_O C'était fort !
Je crois avoir fait le tour de ce que je voulais te dire ^^ Il ne me reste plus qu'à dévorer les deux derniers chapitres ! Par contre, je compatis pour tes problèmes de mise en page : certains chapitres sont écrits tout petit X_X C'est incompréhensible, tu n'as vraiment pas de chance ! J'espère qu'on trouvera une solution à ça, c'est trop bête.
A bientôt, vefree ! ^^
PS : on te l'a peut-être déjà demandé, mais il y a une intention délibérer de ta part de jouer sur l'homonymie foi/foie ? ^^
Pour en revenir aux passages que tu as soulevés et qui t'ont particulièrement plu, j'apprécie vraiment. Parce que Camille est un personnage que j'ai aimé inventer et modeler comme ces grands ados d'aujourd'hui, à la fois gauches et intelligents à qui on n'épargne pas les difficultés de la vie sociale et affective. Pour le coup du chat, je me suis faite peur aussi toute seule en l'écrivant. Brrr !! Ces animaux peuvent être souvent effrayants quand ils s'y mettent. En tous cas, cette scène dans la cave a été très amusante à écrire, car je me laissais guider par mes visions qui sortaient du noir de ma petite cervelle sans savoir vraiment ce qui allait en sortir. Et voilà ce que ça a donné. Quant au stigmate de Marion, c'était une manière de représenter physiquement une réminiscence du passé pour qu'elle apparaisse de manière spectaculaire et l'aide à avoir des compréhensions supplémentaires. Si le passage t'a plu, j'en suis très contente.
Les deux derniers chapitres, c'est vrai, ont une mise en page exécrable, je sais bien. Je suis la première déçue. Ça m'a pris tellement de temps de rectifier les premiers dégats que je n'ose plus y toucher. En plus, on ne peut même pas agrandir le caractère pour ceux-là, comme fait exprès !!! Alors, je te propose d'en faire un copier/coller dans un autre doc, comme ça, tu le liras confortablement à la taille que tu veux. A moins que ton navigateur te propose une fonction "lecteur" qui agrandit automatiquement la page. Vraiment, encore désolée pour ce désagrément.
Si on m'a demandé pour l'homonymie foi/foie ? .... Je crois que certains se sont douté qu'il y avait un lien mais la question n'a pas été aussi clairement énoncée que tu le fais ici. En effet, il y a une intention délibérée de ma part de jouer sur cet aspect de la chose. Je vais essayer de t'expliquer succintement, mais le nombre d'informations est trop important pour en voir tous les aspects en si peu de mots. Je pars du principe que rien est dû au hasard dans la vie et que tout est de l'ordre du causes à effets. En quelque sorte, tous les événements qui se produisent dans le monde matériel ont un effet quelque part dans l'univers sans aucune notion de temps et d'espace. On appelle ça la synchronicité. Partant de là, s'ajoute aussi que tout aspect de la vie contient sa forme symbolique. Le corps physique, donc, tous les organes qui composent notre corps véhiculent un aspect symbolique, émotionnel et spirituel avec lui. En l'occurence, pour le foie, lui est attaché la foi. Et tu pourras vérifier autour de toi si tu en rencontres, des gens atteints d'une maladie au foie, manquent cruellement de foi de toutes sortes. Foi en eux ou foi en quelque chose ; ils n'y croient pas, tout simplement. Les reins, eux, sont liés à la peur. Peurs de toutes sortes, mais la peur. Ne dit-on pas "pisser dans son froc", lorsqu'on a une peur bleue ? Les poumons sont liés à l'expression, le dialogue et aussi le sentiment d'abandon. Abandon de toutes sortes, aussi, selon le vécu ; solitude, perte d'une être cher ou d'une situation affective douloureuse, etc. Selon les maladies liées aux poumons, des nuances peuvent être apportées.
Bref, voilà, pour ne citer que ceux-là. Je suis partie de ce principe de synchronicité pour raconter ce qui arrive à Léo par l'entremise de sa métempsychose. Le fait que Guillaume ait été atteint au foie dans la vie d'avant et d'y avoir fixé dessus l'émotion indélébile de l'amour qu'il a eu pour Mathilde, morte trop tôt, pousse Léo, –la même âme, donc–, à devoir se confronter à sa foi par l'entremise de son corps qui lui exprime par son foie qu'il est temps pour lui de croire en quelque chose et notamment en lui-même et à celle qu'il aime sans se voiler la face.
Suis-je assez claire, là ? ...
Il m'est difficile d'ajouter d'autres informations à celles-ci, car je les sais fondamentales et complexes dites ainsi, toutes d'un coup, en si peu de mots. Je serai à ta disposition si tu t'interroges encore sur cette idée de symbolique ou tout autre aspect, d'ailleurs.
En tous cas, j'espère que les deux derniers chapitres te plairont. Tu as lu le plus dur, Cricri et je t'admire d'en être arrivée là. Je m'inquiétais vraiment de savoir si tu allais pouvoir passer le cap de ce chapitre. Ne t'inquiète pas pour la suite. Ce n'est que du bonheur.
Avec toute mon affection,
Vef'
Hello Vef'<br />
Je reviens à nouveau ici pour finir ton histoire même si je sais que je ne sers plus à grand chose. Alors je ferai comme si...
Quelques petites interrogations d'abord :
"soupe miso sera la bienvenue, eut-elle envie", je pense que tu as dû déjà corriger
et ôter le "eut-elle envie" ?J'ai noté aussi d'autres petits détails mais je pense que tu as déjà revu toussa.
Donc sur ce chapitre
: (j'ai un problème pour écrire ici, alors ne t'inquiète pas si tu vois des sauts de lignes bizarres) C'est un morceau éprouvant, tu décris la maladie avec la précision de ceux qui l'ont approchée de près, d'une façon ou d'une autre, ainsi que l'agressivité de Léo qu'on peut voir chez beaucoup de grands malades. Les retrouvailles avec son fils me semblent justes, sauf une phrase : celle ou Camille "propose" à son père de se défouler sur lui. Je n'arrive pas à comprendre si Camille lui offre de se défouler pour aller mieux, ou s'il annonce ça avec une forme d'ironie. Quant à Marion, son amour prend ici toute sa dimension, parce qu'il faut être costaud pour accepter une telle agressivité, mais elle ne lâche rien, et garde sa patience. C'est très beau. Le Vieil Antoine a un côté ange gardien sous ses airs grincheux et je t'avoue que la résurrection
de Léo ne m'a presque pas surprise (en plus j'en avais tellement envie !)
J'aurai presque eu envie que ce chapitre dure encore un peu plus longtemps dans les retrouvailles des uns et des autres, mais bon, ç'est cohérent avec la totalité du roman qui ne s'apesantit jamais trop longtemps sur un événement.
Je suis contente pour ces deux là ainsi que pour la nièce de Marion qui semble avoir bien accrochée avec le jeune Camille (ça met du soleil tout au long de ce chapitre pas facile)
. Et puis tout ça semble tellement évident que ça force à y croire.... Maintenant Léo peut s'ouvrir et se remplir à nouveau
d'amour, et à son tour abreuver les autres, et ainsi de suite....Ah ! j'oubliais, petit sourire à l'évocation du médecin "obtu"... Ça ne lui fait pas de mal
à cet homme de chercher à comprendre tout ça ! C'est vrai que de mon côté, je suis entre Léo et Marion et n'arrive pas à faire un choix tranché, (je doute encore, même si je sens des choses...), mais ce livre à le mérite de nous faire nous poser des questions. Et en ce moment, il est pour moi le bienvenu.Te fais des bisous (je ne sis pas ce qui se passe, mais il m'est impossible de revenir à la ligne, ou d'en sauter une ???!!!) et je passerai à la suite dès que possible !
Donc donc donc... C'est le chapitre que je redoutais le plus pour toi. On dirait qu'il est presque bien passé. En tous cas pour Léo. Pour Camille qui propose à son père de se "défouler" sur lui, c'était plutôt l'idée d'une confrontation père/fils un peu comme pour le défier et dire qu'il est assez fort pour supporter tous les reproches qu'il pourrait lui faire. Un peu comme pour combler tout le temps qu'ils n'ont pas passé à se confronter. C'est sa manière à lui de s'affirmer face à un père au charisme perdu, une manière aussi de ne pas perdre pied face à lui. Je ne sais pas si c'est bien compréhensible, finalement.
Marion a beaucoup de patience, c'est vrai et elle supporte énormément de choses. Et le vieil Antoine fait en quelque sorte office d'Ange gardien ici, c'est vrai. Mais il semble que tu as loupé une information. Je pensais que tu l'aurais détectée malgré sa descrétion, puisque tu m'avais parlé du livre bouddhiste de la Vie et de la Mort. J'ai décrit la position des mourants que les bouddhistes utilisent pour "passer". Ouais ouais !
Pour le retour à la vie, c'est vrai que je n'ai pas eu envie de m'étaler de trop. ça peut sembler court. Tu n'es pas la seule à trouver ça, d'ailleurs. Je voulais aller à l'essentiel ; leur amour qui se reconstruit. Et puis le médecin "obtu", c'est vrai, je ne voulais pas le montrer de trop fermé et le cas d'une rémission interpelle bien souvent tout médecin un peu sérieux dans son travail. Donc bon. Tant mieux si je t'ai fait sourire avec ça. Et puis ne t'en fais pas. Je crois qu'il est naturel de douter pour ce genre de situation. Je pense que tant qu'on n'a pas vécu soi-même une rémission ou une guérison inespérée, il est difficile d'être tranché. Par contre, ça donne beaucoup d'espoir, je trouve. On se dit que c'est toujours possible.
Je suis heureuse de constater que tu n'es pas rebutée en lisant. Pour moi, c'est rassurant, car loin de moi l'idée de démoraliser mes lecteurs touchés de près ou de loin par cette maladie.
Je te fais des bisous
Vef'
Il ne fallait rien de plus, rien de moins. C'est juste ce qu'il faut.
C'est vrai que j'ai été bien silencieuse sur les derniers chapitres (toujours pour les mêmes raisons), mais tout de même, je ne sais plus si ce chapitre est le dernier ou s'il va y avoir un épilogue, mais en tout cas, ça me semble essentiel de donner mon avis.
Juste parfait. Bien entendu, la maladie de Léo que tu exposais de plus en plus au fil des chapitres était vraiment bien décrite. J'admire toute la recherche que tu as dû faire sur le cancer pour coller peu à peu les bouts d'information comme ça.
Ce chapitre-là m'a bien retournée. Mais le côté dramatique et les descriptions pas joyeuses étaient très bien dosés, et c'est ce qui le rend tout juste parfait comme ça !
Sauf que j'étais persuadée que Léo allait mourir. D'un autre côté, j'attendais l'intervention du vieillard parce que je sentais que son rôle était très important et qu'il avait quelque chose à faire dans cette histoire. Quelque chose d'encore plus important et essentiel que ce qu'il avait déjà fait avant.
Mais finalement, tout est bien qui finit bien. Et ça fait très plaisir. Léo revient à la vie, retrouve la forme, la foi, l'amour... et un fils. :) J'ai un peu bugué avec le prénom de Camille, je te l'avoue (XD), même si je savais que c'était assez courant comme nom chez les garçons.
Pour moi, Vef, c'est un carton plein ! ;)
Ata, Clo, c'est pas fini !!! Non, non, c'est pas fini ! Il reste encore au moins deux chapitres avant la conclusion.
C'est vraiment très gentil ce que tu me dis, tu sais. J'apprécie vraiment. Je me suis documentée sur le cancer, oui, mais j'en ai malheureusement aussi l'expérience (pas moi, hein, mais mon entourage). C'est pour ça aussi que j'arrive à en parler, même si j'ai pas trop envie d'approfondir pour ne pas remuer des trucs pas drôles du tout.
Tu as tout juste concernant le vieil Antoine ; il a un rôle important dans l'histoire. Et il n'allait pas laisser Léo comme ça, penses-tu !
Carton plein, didon ! Ce que je peux être gâtée ! Mais ata de lire la suite pour rendre ton verdict. J'espère que ça te plaira aussi. Camille, c'est vrai que c'est un prénom mixte, mais peu utilisé pour un garçon. Il m'est pourtant venu spontanément. Je n'ai pas forcé. Je me suis dit que ça irait bien pour le fils de Léo. Je le voyais bien porter un tel prénom.
En tous cas, merci pour ce joli commentaire. Je suis vraiment gâtée, je trouve.
Biz Vef'