Chapitre 15 : Léon

Par Malodcr
Notes de l’auteur : BESOIN D'AVIS : ce chapitre évoque un passage de la vie de Léon, j'ai constaté que j'ai littéralement oublié de parler des fêtes de fin d'année ma question est : selon-vous, dois-je ne serait-ce qu'au moins évoquer cette période ? Cela donnera-t-il un autre ton / regard sur la situation ? Je suis assez mitigée car je me dis que si je n'y ai pas pensé à l'instant T, il y a peut-être une raison et en même temps, ça manque au chapitre... Bref , n'hésitez pas à me donner votre ressenti !
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Un nouveau chapitre sera publié tous les 15 jours.
Me permettant d'avancer sur l'écriture et d'effectuer des réécriture, je trouve que mon style d'écriture a évolué et les premiers chapitres sont lourds à lire...

N'hésitez pas à me laisser un commentaire !

La blancheur du plafond rendait Léon malade. Cette pseudo-perfection lui donnait la nausée. Quelle couleur maussade qu’est le blanc.
Allongé sur le matelas gonflable, il fixe le plafond pour ne pas regarder cet appartement, c’est douloureux.
L’appartement 3b est douloureusement paisible.
Il ressasse ces dernières quarante-huit heures après son retour de l’hôpital, notamment quand il a voulu prendre son poste à l’épicerie mais que son employeur lui a ordonné d’aller voir le médecin. C’est dire la tête qu’il devait tirer. Il se revoit entrer dans cette pièce, vide d’âme, silencieuse et dénuée lumière. Il est seul, il venait de vivre un événement traumatisant et il devait s’installer pour manger. Pour vivre.
Le pourrait-il ? Se dire qu’il a fait un choix rationnel ? Qu’il doit à présent mettre ses sentiments de côté et avancer ? Oublier la pâleur du visage d’Emy ?
Il est effrayé, alors il s’allonge dans le lit et souhaite seulement ne pas faire de cauchemars.

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Deux semaines que Léon mange ses ongles pour symboliser sa culpabilité grandissante, et plus il culpabilise plus il se sent égoïste de croire qu’elle ne souffre pas. Il ronge ses ongles à sang, tous, et quand ils sont douloureux et il se gratte les bras. Le stress le consume, l’anxiété prend le pas. Parce que des images restent bloquées dans sa tête, son cerveau le confronte à son échec constamment. Deux semaine où l’appétit l’avait quitté, deux semaines que le silence assourdissant de l’appartement était sa seule compagnie.

« C’était la meilleure chose à faire », se répétait-il, comme un mantra.

Et quand cette phrase surgissait dans son cerveau, il bouillonnait avant de jeter son verre vide contre un mur, puis il éclatait en sanglots, cela avait dû lui arriver cinq ou six fois, rien ne servait de compter. Entre ses larmes, il regardait les éclats de verre éparpillé, regrettant d’avoir bu et d’avoir cassé un autre contenant.
Il savait qu’il serait bouleversé de devoir perdre Emy, mais peut-être ne pensait-il pas que ce serait si brutal ?
Léon regarda les boîtes posées sur la table, elles sont vides. Ces petites boîtes qui renfermaient ce qui aurai pu être mortel. Il n’arrive pas à les jeter, pour se rappeler encore et encore.

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Il essayait de ressortir, plusieurs fois mais le froid ne le revigorait pas. Tout semblait maussade, accentué par la météo capricieuse qui faisait passer l’hiver pour un automne humide. Rien n’illuminait plus qu’autre chose. Même la vue l’enfant qui courrait après son ballon qui roulait vers ses pieds ne lui apporta pas le petit sourire d’amusement qu’il aurai esquissé en temps normal, il n’avait pas le cœur à être sincère alors Léon opta pour un faux sourire tout en repoussant le ballon vers la petite fille, parce que l’innocence qu’elle représentait ne devait pas être entachée par ses problèmes de pré-adultes coincé dans un corps d’adolescent.
Il déambulait, jour après jour, se noyant dans une culpabilité sans fond et la peur qu’il a ressenti ce jour-là le saisit sans qu’il n’y prenne gare. Ce frisson imperceptible d’avoir joué avec la Mort et de l’avoir défié. Il comprend un peu ce qu’Emy vivait. Il se laisse aller, là où ses jambes le portent ou bien là où elles l’abandonnent. Des heures dans le noir, confiné dans les mètres carré d’un appartement qui a vu tant de choses. Son téléphone non loin de lui mais personne à qui parler, personne à qui donner des nouvelles. Comment vont ses propres parents ? S’inquiètent-ils ? Si ils le voyaient, ils auraient tant honte. Enfin, ils ont toujours eu honte de lui, ça n’aurai fait qu’une anecdote de plus à raconter aux événements mondains. Et les parents d’Emy, sont-ils aller la voir ? Il en doute.
Il divagua, puis tout devient sombre une fois de plus, se réfugiant dans le néant, bercé par des songes douloureux mais auxquels il se raccrochait. Qu’il est bon de se faire du mal. Parfois, on se réconforte dans la douleur car on comprend ce sentiment, on se fait du mal jusqu’à ce que ça fasse du bien. Léon voudrait oublier mais il ne le pouvait. Alors il se raccroche à cette obscurité.

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Après avoir ruminé une nouvelle fois, il se dirigea vers le bar du coin, fréquenté par les étudiants et les travailleurs, deux mondes qui viennent décompresser pour des raisons sensiblement similaires mais aux sujets opposés. Et lui, il est au milieu, là pour avaler ses remords et pour ainsi dire, son égoïsme.
Alors qu’il s’apprêtait à boire son cinquième verre, quelqu’un vint s’asseoir face à lui.
Il releva la tête et tomba sur le regard inquisiteur d’une étudiante aux cheveux blond platine : Lucy. Pour se rebeller face à la sévérité qui s’affichait sur les traits de la jeune fille, il avala son shot de vodk* .

— Qui a craqué ? lui demanda-t-elle sans détour.

Léon s’affala dans son siège en jouant avec le verre vide.

— Elle, moi, les deux quoi, railla-t-il en mêlant un rire amer.

— Ah, je vois. Tu fais pitié à regarder. Elle serait déçue, plus que moi actuellement.

— Qu’est-ce que tu en sais ? Il utilisa un ton sévère, le visage reflétant la montée de colère. Vous en avez jamais rien a eu à foutre d’elle.

— C’est vrai mais ça se voyait, qu’elle tenait à toi.

Sur ces paroles, Lucy se leva et partie sans laisser à Léon le temps de répondre. Il se contenta de rester dubitatif, perplexe, les yeux qui regardait encore là où l’étudiante était installée il y a encore une minute, il commença a croire qu’il avait halluciné. La franchise de Lucy eut tout de même l’effet escompté, Léon se remit en question instantanément, le déclic s’était propagé dans chacune de ses fibres.
Il devait se servir de sa culpabilité pour avancer, bien que cela semble diamétralement opposé, c’était sa manière d’affronter la situation. Quitter son foyer n’avait pas été difficile mais quitter le confort du malheur l’était bien plus.
Il devait accepter qu’Emy l’appellera quand elle sera prête et qu’il devait se contenter des nouvelles reçues par les infirmiers et infirmières selon qui lui répondait.
Ainsi, du jour au lendemain, se reprit en main. Il nettoya l’appartement entièrement de l’aspirateur, à la serpillière en passant par les poussières et le tri de divers éléments entassés. Il lava ses vêtements en laverie et pendant ce temps, il alla faire quelques courses pour reprendre un régime alimentaire plus sain. Il accepta de rallumer la télévision.
Léon en profita pour reprendre son hygiène en main et se rendit dans la salle de bain mais son reflet dans le miroir l’effraya légèrement. Il avait perdu tout éclat, ses cheveux noirs ébènes étaient ternes, ses tâches de rousseurs légères semblaient plus éclatantes que jamais tant son teint était pâle, par contre ses yeux verts dégageaient toute la détermination dont il s’était imprégné, il y arriverait.

« Même Athos ne me reconnaîtrait pas, et ne parlons de Lord et Opié ! » cette pensée l’amusa et il vit son premier sourire sincère depuis bien longtemps.

Peu de temps après, il retrouva le carnet de dessins d’Emy et l’ouvrit avec cet émerveillement qu’on ne souligne qu’aux enfants. Il caressa chaque croquis avec passion, ces scènes de vie figées : les abeilles, les feuilles, les chats, tout est représenté et inéluctable. Ces esquisses datant d’avril, une période qui parut lointaine.
La nostalgie prit le pas.
C’est alors qu’apparut son croquis, celui dessiné au BIC bleu mais on le reconnaît tout de suite, il passa ses doigts sur la citation qu’elle lui avait dédié ce jour là :

« Parce que les jours de pluie peuvent être heureux. À toi, Léon. »

Elle lui manque.
Il referma le carnet.

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Léon reprit son poste dans l’épicerie, il accepte de s’épanouir, il s’accorde le droit d’aller de l’avant mais de ne jamais oublier.
Les clients prennent de ses nouvelles, sincèrement inquiets de son absence. Son patron est heureux de le revoir.
C’est une forme de bonheur de savoir que des personnes comptent sur sois quand on se sentait impuissant. Il a accepté ses limites mais pour autant, elles le tenaillent. Si seulement… Si seulement il avait été un peu plus ou un peu.
Les soirées sont longues, allongé sur son lit il se remit à fixer son plafond en se disant « J’ai fait au mieux, je le sais. », une mantra. Mais la nuit, c’est sa Mort qu’il voit chaque fois, alors il se réveille en sueur et il se demande quand est-ce que le jour se lève.

Il attend son appel, qu’elle-même puisse aller de l’avant. Il a hâte d’entendre sa voix. Mais il ne doit rien précipiter.
Il se contente de prendre de ses novuelles par d'autres intermédiaires : elle mange très peu, ne souhaite voir personne et que la psychologue n’arrive plus à lui parler. L’infirmière lui a aussi raconté qu’Emy s’était soudainement lavée alors que son hygiène ne semblait jamais l’avoir dérangé, comportement surprenant selon eux, cette nouvelle le fit sourire : elle était et restera imprévisible.

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Léon raccrocha avec l’infirmière pour la deuxième fois de la semaine.
Il tomba sur la date qui s’affichait sur son téléphone : 14 janvier.
2 mois.

À suivre

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