Je sentis quelque chose filer entre mes cheveux. Quelque chose de chaud et fin à la fois. Un geste lent et calculé. Une douce sensation qui me faisait douter de la réalité.
— T'es si adorable quand tu dors...
Cette voix, si tendre et enjôleuse, je commençais à bien la reconnaître. Tout comme son accent britannique qui rajoutait quelques points à son charme.
J'ouvris lentement les yeux pour apercevoir Rey, assise sur le rebord du lit qui caressait délicatement mes cheveux. Elle portait un simple et léger peignoir d'un tissu violet satiné. Elle l'avait lâchement attaché à sa taille, laissant apparaître ses sous-vêtements noirs. Vraiment, je ne pouvais pas avoir une meilleure vision au réveil...
Elle se penchait vers moi, ses lèvres se rapprochant dangereusement des miennes. Je finis par me plaquer aux siennes, prenant son visage dans mes mains.
— Tu veux un petit-déjeuner en particulier ? me demanda-t-elle entre quelques souffles.
— Un simple café me suffira...
— Parfait, je vais te préparer ça.
Elle caressa délicatement ma joue avant de se lever du lit. Alors que j'étais sur le point de la suivre, elle m'arrêta en posant sa main sur mon épaule.
— Reste là, je reviendrai avec ton café...
Sa main glissa lentement sur mon épaule tout en passant sa langue sur sa lèvre inférieure. D'ici, elle me donnait une merveilleuse vue sur son décolleté. Je ne pus m'empêcher de glisser ma main sur sa taille. Elle hésita à quitter la chambre, appréciant un peu trop ce geste.
— N'essaie pas de me déconcentrer si tu veux ton café...
J'enlevai ma main de sa taille et elle la retint un instant en la prenant dans la sienne. Elle la malaxa lentement puis me délivra.
— Je reviens dans cinq minutes, me susurra-t-elle.
Elle m'adressa un rapide sourire en coin puis quitta la chambre. Dès son départ, je m'emparai de mon téléphone qui était dans ma veste — ou plutôt dans le tas de vêtements à côté du lit.
Je vérifiai rapidement si je n'avais pas reçu le moindre message. En réalité, comme toujours, je m'attendais juste à un mail professionnel qui me proposerait un travail de dernière minute ou une information intéressante. Mais rien... Et encore moins quelque chose qui n'aurait rien à voir avec le travail, ce qui était à peine étonnant.
Je fixai mon téléphone d'un air vide, puis le posai sur la table de chevet. De toute manière, je n'y verrai rien de plus.
Dire que ma meilleure occupation pour le moment était d'attendre Rey... C'était presque ridicule.
Rey finit par revenir dans la chambre, une petite tasse dans les mains qu'elle me tendit.
— Je ne t'ai pas demandé quel genre de café tu voulais, mais je me suis doutée qu'un espresso te suffirait.
— En effet.
Je soufflai dans la tasse en voyant la vapeur s'en échapper. Puis je pris une brève gorgée alors qu'elle s'installait à mes côtés dans le lit. Elle laissa échapper un bref rire nerveux.
— T'as vraiment dormi comme ça ? lâchai-je entre deux gorgées.
— Non... Enfin. Les sous-vêtements, oui, ils étaient déjà là. Mais ce petit peignoir... Clairement pas.
Son petit sourire en coin semblait être comme une invitation, mais tant que je n'aurais pas fini mon café, je ne pourrais pas le confirmer.
Elle posa sa main sur le drap qui recouvrait ma cuisse, l'air un peu pensif et perdu.
— Merci d'être là, dit-elle d'une voix à peine audible.
— Je vais me répéter par rapport à la veille, mais je n'allais clairement pas t'abandonner alors que tu étais dans... un tel état.
Un sincère sourire se dessina sur son visage. Un sourire empli de gratitude. Même si mon but premier pour me rapprocher d'elle avait été assez malhonnête, je n'avais pas envie de l'abandonner alors qu'elle était en pleine détresse.
Je pris mon café — légèrement brûlant — d'une traite en espérant passer rapidement à autre chose. Mon geste l'étonna un peu, juste un froncement de sourcil, puis elle reprit rapidement son sérieux. Mais ma seconde initiative la surprit de plus belle lorsque je quittai le drap pour la chevaucher. Je pris son visage entre mes mains et je sentis sa lourde respiration contre mon visage, plus qu'à quelques centimètres du sien.
— Tu croyais vraiment que j'allais partir aussi facilement ? lui lançai-je, un brin provocant.
— Tu aurais pu... Des tas de gens l'ont déjà fait.
— Je ne suis pas comme tes parents.
Je regrettai un bref instant ces paroles en voyant une légère expression de tristesse traverser son visage. Puis elle m'embrassa — peut-être juste pour me faire taire —, mais je n'allais pas me plaindre que ses lèvres scellent ainsi les miennes.
Elle retourna alors la situation pour me chevaucher à son tour. Ses mains se glissèrent sur mon torse nu tandis que les miennes se posèrent sur l'arrière de ses cuisses pour remonter jusqu'à sa culotte. Encore une fois, celle-ci était en fine dentelle et je pouvais facilement y sentir la douceur de sa peau.
— Je ne peux pas t'obliger à ne pas partir, mais il faut qu'on se mette d'accord sur quelques règles, m'annonça-t-elle, la voix tremblante.
— Tout ça doit rester entre nous, c'est ça ?
— C'est pas vraiment ça le problème... Je sens que tu ne connais pas vraiment mes habitudes dans le domaine sexuel, quand bien même tu les as suivies assez naturellement.
— C'est juste une question de consentement...
— Ben... On joue avec les limites de l'autre, l'un domine l'autre et inversement et notre manière d'alerter l'autre, c'est d'utiliser un joker.
— Certes, c'est un peu particulier... Mais où est le mal à ça ? On est tous les deux consentants.
Un petit rire lui échappa. Un doux rire, extrêmement mignon.
— Tu es vraiment si... innocent. Ben, ce qu'on a fait depuis le début, c'est du BDSM.
— Pardon ?
— Eh oui... On n'a pas besoin d'utiliser des accessoires pour que ça soit du BDSM. Et ce n'est pas non plus blesser l'autre. J'aime jouer avec tes limites et te dominer, mais je ne veux clairement pas te faire du mal. Je serais beaucoup plus heureuse que tu me demandes d'arrêter parce que c'est trop pour toi plutôt que de te faire souffrir.
Je l'écoutais attentivement, sans trop savoir quoi dire. Je n'avais jamais vu les choses sous cet angle. En même temps, je n'en avais pas la moindre idée.
— Et le BDSM, c'est aussi être à l'écoute de l'autre, prendre soin de l'autre si ça devient trop fort émotionnellement pour l'autre. Et tu l'as très bien fait à la soirée ou juste il y a deux jours... C'est juste l'aftercare et c'est tout aussi important.
— Mais comment j'ai pu aussi bien gérer ça alors que je n'y connais rien ? demandai-je, complètement perdu.
— Parce que le BDSM, c'est surtout du consentement, de la communication... Et c'est venu très naturellement entre nous. Tu as compris quand il fallait prendre soin de moi et inversement. On a rapidement trouvé un mot d'alerte. Certes, ce n'est pas parfait, mais c'était une manière extrêmement saine d'aborder ça.
Je me redressai légèrement face à ses révélations. Elle mettait enfin des mots sur nos échanges, mais je ne m'attendais clairement pas à de tels mots. Je m'attendais surtout à une question en suspens.
Je sentis alors l'inquiétude dans son regard et elle mordit sa lèvre inférieure, craignant ma réaction — probablement que je l'abandonne.
— Je suis désolée, j'aurais peut-être dû te le dire dès le début... Mais comment je fais pour faire savoir ça à quelqu'un dont j'ai envie et que je connais pas ? Bah... Je teste une manière atténuée en espérant que ça passe...
Elle se confondait en excuse en attendant que je prenne la parole. Mais j'ignorais quoi lui dire. Parce que, dans le fond, même si j'avais désormais des mots pour définir notre relation, ça ne changeait pas grand-chose.
— Ben... Ça va ? s'enquit-elle, à la limite de craquer.
— Oui... C'est juste que... je m'attendais pas à ça. Ça ne me choque pas et je ne pense pas que ça changerait quoi que ce soit. Mais je pensais pas que je pourrais me retrouver dans un rapport BDSM et que ça pourrait me plaire.
— Est-ce que ça te dit de continuer ainsi ? osa-t-elle demander.
Je me rapprochai d'elle, posant mes mains à sa taille alors que mes lèvres se rapprochaient dangereusement des siennes.
— Vu comment j'ai aimé ça jusqu'à maintenant, je ne vais clairement pas refuser.
— Par contre, il va falloir qu'on suive des règles bien plus précises pour les mots de sécurité, parce qu'utiliser des jokers, c'est bien trop vague.
— Très bien, que proposes-tu alors ?
Elle pencha sa tête un instant et ses bras vinrent se croiser derrière mon cou.
— Juste des couleurs, allant du jaune au rouge. Le jaune préviendrait qu'on rentre dans une zone sensible. L'orange, à la limite de craquer. Le rouge, on dépasse les limites et on s'arrête. Le noir, on a vraiment dépassé les limites et on a besoin de soutien pour supporter ça. On peut demander à n'importe quel moment de juger la couleur. Si on n'a aucune réponse, on considère que c'est du rouge.
— Ça me va... Simple et efficace.
Un sourire se dessina sur ses lèvres et ses yeux se mirent à pétiller. Elle ne s'attendait vraiment pas à ce que je sois aussi conciliant, mais dans le fond, pourquoi ne le serais-je pas ? Tout se passait plutôt bien entre nous et le seul problème était qu'on n'était pas assez clair sur ce genre de point. On était en train d'éliminer le seul point noir du tableau...
Enfin, il y avait toujours cette idée de mon côté : celle où je voulais faire un article à son sujet. J'y songeais encore, mais j'y tenais de moins en moins notamment au vu de cette discussion.
— D'ailleurs, à la soirée caritative, j'étais complètement dans le noir, ajouta-t-elle en baissant son regard. Même pour moi, avoir une position aussi dominatrice, c'était perturbant... Et je te remercie vraiment d'avoir été à l'écoute et d'avoir aussi bien réagi.
— C'était pourtant une réaction tout à fait normale... N'importe qui aurait dû faire ça.
Elle était extrêmement reconnaissante de mon comportement, et pourtant, ce n'était que la normalité à mes yeux. Elle n'avait pas détaillé son parcours par rapport à l'adoption, mais je savais désormais que ses limites avaient été brisées à de nombreuses reprises au cours de sa jeunesse.
— C'est vraiment du BDSM ça ? l'interrogeai-je maladroitement.
Elle rit à ma naïveté.
— Oui ! Totalement ! Il n'y a pas besoin d'avoir des tas d'accessoires et c'est aussi avant tout, beaucoup de communication et, surtout, respecter les limites de l'autre. Jamais on ne force l'autre à faire une pratique qui ne lui convient pas.
Elle mettait vraiment l'emphase sur le respect d'autrui et ses limites, et ça rejoignait ma réflexion précédente : on avait bafoué tous ses repères. Désormais, j'en venais à penser que ses parents avaient été violents avec elle, à plusieurs reprises.
— T'en as des accessoires ? m'enquis-je, l'air curieux.
— Bien évidemment... Par exemple, j'ai des menottes qui peuvent très bien remplacer la cravate que tu ne mettrais pas.
Elle rapprocha ses lèvres des miennes et me regarda longuement avant d'ajouter :
— Ce pourrait être ta punition quand tu n'en mettras pas.
— Tu sais très bien que m'attacher les mains ne sera pas efficace, la provoquai-je à mon tour.
Elle prit une poignée de cheveux dans sa main et l'utilisa pour tirer ma tête et embrasser mon cou.
— On verra ça une prochaine fois...
Elle relâcha mes cheveux et j'en profitai pour l'embrasser dans le cou. Elle laissa échapper un petit rire et me prit dans ses bras. Elle me serra contre elle, comme si j'étais ce qu'elle avait de plus précieux en ce moment même.
— Merci Ben, souffla-t-elle une énième fois.