Relai des gardes, cité d'Alenvel – Brocéliande.
Elara et Lirion s'engouffrèrent dans le poste de garde, sous le regard tantôt émerveillé, tantôt suspicieux, voire haineux, ou encore terrifié des nombreuses fées peuplant la cité de la connaissance "Alenvel".
Lirion remit à un garde Terionnour le Chapalu encore endormi dans ses bras, tout en faisant son rapport à voix basse, expliquant la situation de la veille.
— Nous allons signaler ces anomalies à la reine Dahut, l’informa le garde à l’allure elfique.
— Quand est-ce que le prochain messager Pennel passera ? demanda Lirion en tenant la main d’Elara, qui écoutait attentivement leurs échanges.
— Il doit arriver aujourd’hui. C’est très agité en ce moment ; vous n’êtes pas le premier à me faire un rapport. Cette semaine, Garen est venu signaler l’apparition d’humains. Cela faisait une vingtaine d’années qu’aucun nouvel humain n’avait franchi la barrière.
— Justement, j’aimerais une pièce pour Elara. Elle est arrivée ici avec moi.
— Vous en êtes certain ? demanda le garde en dévisageant la jeune femme.
— Parfaitement, je me porte garant pour elle. Je reviendrai quand le messager sera là.
Le garde aux cheveux bruns profonds et aux yeux clairs s’inclina avec révérence, puis lui remit l’objet demandé sans poser davantage de questions.
Lirion tendit à Elara une sorte de médaillon de la taille d’une pièce et orné d’un blason inspiré de lianes et d’une main.
— Qu’est-ce que c’est ? Une sorte de passeport ? demanda-t-elle en l'examinant.
— Je ne vais pas te mentir, on voit rarement des humains en Brocéliande, surtout en dehors de la capitale. Cette pièce te permet de circuler librement dans le royaume, même si je ne suis pas avec toi, expliqua Lirion.
— C’est pour ça qu’une des fées de ton domaine me déconseillait de venir à Avendel. Qu’est-ce que je risque concrètement ? demanda-t-elle, la voix la plus neutre possible.
— C’est un peu long à expliquer, mais les frontières sont fermées depuis plusieurs siècles, et le peu d’étrangers qui arrivent ici ne sont pas toujours les bienvenus.
— Est-ce que tu sais pourquoi le royaume s’est isolé ? demanda Elara, intriguée.
— Ce n’est pas une bonne idée que j’aborde ce sujet ici, dit-il en jetant un regard autour d’eux.
— Dans ce cas, allons quelque part ailleurs ! proposa-t-elle, en tendant son bras dans sa direction.
Lirion sourit et s'empressa d'attraper son bras tendu, espérant que sa proximité le rendrait aussi indispensable pour elle qu'elle l'était pour lui.
— Je sais que tu veux des réponses avant tout, mais j'aimerai profiter du déplacement pour t'emmener au plus grand marché de la région. Nous irons à dos de troll, annonça Lirion.
— Qu...quoi ? Ça ne va pas les fâcher ?
— Non, ils aiment bien porter et il y en a plein à la sortie de la ville. C'est leur manière de participer à la vie du royaume.
— D'accord, mais j'espère que tu n'en profiteras pas pour éviter mes questions. Ces elfes que j'ai vus plus tôt, ou encore les Pennel...
Sa curiosité le faisait sourire, même s’il ne savait pas si c’était bon signe. Il ne voulait pas être juste un objet de curiosité professionnelle pour elle.
— Je te promets de répondre à tes questions, alors ne te défile pas non plus en ce qui me concerne, dit-il, les yeux brillants d’un espoir non dissimulé.
Elle savait très bien de quoi il parlait et se serra un peu plus contre son bras tandis qu’il la guidait en bordure de ville.
Elle s'était rendue compte qu’il n’avait rien de son ex, mais sachant qu'il n'envisageait pas leur relation à la légère, elle avait quelques réticences tant qu’elle n’était pas certaine de vouloir rester en Brocéliande. Comme il le disait, la situation était compliquée pour les humains, et elle ne se voyait pas vivre aux crochets de quelqu'un.
Ils partirent vers le marché en traversant la forêt bordant la cité. Le trajet était hilarant : les trolls étaient instables quand ils couraient, secouant les voyageurs comme sur un manège, mais juste à la bonne hauteur pour se prendre les branches dans la tête. Lirion, sous forme d'oiseau, les guidait pour limiter les dégâts, pendant qu'Elara admirait la civilisation qui s'intégrait harmonieusement dans la nature environnante. Les chemins de pierre ou de terre étaient soigneusement bordés d'arbres ou de buissons, dont les racines semblaient conscientes qu'il ne fallait pas pousser sur la « route » . Des petites maisons se trouvaient en bordure, dans des creux d'arbres, en hauteur ou parfois simplement nichées entre deux buissons.
Elle et Lirion cueillirent des paniers entiers de baies sauvages et d'avel, des sortes de pommes vertes qui n'apparaissaient qu'à la proximité des fées.
Avant même d'arriver au marché, un brouhaha plaisant se faisait entendre au loin. Au cœur d'un bois d'arbres ancestraux couverts de lianes colorées et de touffes de gui, s'ouvrait une clairière verdoyante avec son marché, « Farchnad an Dôl » . La scène était à couper le souffle. Des étals débordants de fruits et légumes aux couleurs éclatantes étaient disposés sous les ombrages des arbres immenses, des mousses aux formes bizarres parsemaient le sol, émettant une douce lueur bioluminescente. D'énormes champignons sculptés servaient de maisons aux korriganes qui y entraient et sortaient à allure régulière, les bras chargés de tissus et d'objets en tout genre pour remplir les étals qui se vidaient.
Des dryades dansaient gracieusement au milieu d'une place où de jeunes arbres frêles bougeaient au gré d'un vent qui ne soufflait que là. Les deux trolls qui étaient avec eux allèrent rejoindre un groupe de leurs congénères pour les saluer.
Elara se sentait comme une enfant, les yeux remplis d'étoiles. Lirion avait eu raison de l'emmener ici. Elle passait trop de temps à se soucier des sujets sérieux alors qu'elle avait besoin de cette énergie, cette découverte, quelque chose de vrai et foisonnant. Il donnait l'impression de deviner ce dont elle avait besoin dans son fort intérieur et pas ce que sa tête lui dictait.
Elle portait sa médaille autour du cou en évidence, et dès que les habitants la voyaient, ils lui offraient volontiers des choses à goûter sur leur étal. Lirion s'était installé sur un rocher pour jouer de la flûte. Elle le regardait distraitement, son attention étant absorbée par les étals regorgeant de produits.
La musique joyeuse de Lirion attira l'attention, créant un attroupement de fées et d'oiseaux, dont une nuée de Tylwyth Teg bariolés qui dansait en tourbillonnant. Elara rit en croquant dans une délicieuse pomme dorée donnée par un korrigan à moitié édenté, ses dents pointues témoignant d'une alimentation principalement carnée.
Elle éternua en soulevant le couvercle d'un stand d'épices et de condiments inconnus. Curieuse, elle prit un peu de tout ce qu'elle ne connaissait pas en échange d'un sac de biscuits et de baies violettes récoltées en chemin. Un troll réapparut bruyamment pour porter ses emplettes dans un énorme sac.
Alors qu'elle admirait des fruits et des noix aux couleurs étranges, Lirion l'arrêta et l'embrassa sans gêne.
— Ne mange pas ça, c'est pour les oiseaux. Ça te rendrait malade, dit-il alors qu'Elara s'apprêtait à goûter les aliments.
— Est-ce que je dois me méfier d'autre chose ? demanda-t-elle.
— Non, répondit-il en lançant un regard sec au vendeur qui souffla en ricanant.
Elara tira sur le bras de Lirion qui commençait à s'emporter contre le vendeur clairement malveillant. Ça ne valait pas la peine de faire un scandale pour un incident de ce type. Elle se doutait qu'elle ne pouvait pas être acceptée par tous, même avec une jolie médaille "titre de séjour".
Cette altercation refroidit son entrain, mais elle ne voulait pas que ça gâche son expérience du marché, d'autant que la plupart semblaient bienveillants à son égard.
Soudain, un grondement résonna, secouant le sol et captant l'attention de tous. Un géant massif et barbu émergea de la forêt, sa silhouette imposante se dessinant contre les arbres. Il mesurait au moins deux mètres de haut et avait une peau plus épaisse et rugueuse que celle d'un homme, avec d'énormes battoirs et des pieds. Sa longue barbe et ses cheveux arrivaient presque au sol, tressés par endroits.
Les yeux du géant, d'un bleu très pâle comme les eaux d'un lac scintillant, repérèrent Elara. En un instant, il se métamorphosa pour atteindre une taille gigantesque touchant de sa tête les branches des arbres les plus hauts, puis il la saisit avec précaution, la plaçant sur son épaule massive. Des cris de joie éclatèrent parmi les enfants trolls et korrigans qui grimpaient sur le géant, s'agrippant aux tresses de sa barbe, transformant sa carrure imposante en un manège vivant.
À peine posée sur l'épaule du géant, Elara ressentit une bouffée d'excitation mêlée à une lueur d'inquiétude. Il la regarda en souriant calmement, plissant des rides profondes qui, sous cette forme, ressemblaient à des sillons dans une écorce. Elle se cramponna à une mèche de sa barbe pour se stabiliser pendant que Lirion, désormais sous forme d'oiseau, atterrissait doucement sur la tête du géant.
— La vue d'ici est impressionnante ! s'exclama Elara, son sourire revenu.
— Je ne savais pas si le vieux Geraint serait là aujourd'hui, mais il vient souvent animer le marché, répondit Lirion.
— Tu veux dire servir de structure géante pour les enfants ? Elle entendit Lirion rire et aurait aimé le voir faire sous sa forme humaine.
— Ah ! Les fées et dryades sont motivées, regarde à gauche, ajouta-t-il.
Un groupe de fées aux ailes chatoyantes se rassembla autour d'Elara pour la faire descendre du géant, et elle tomba en apesanteur, soutenue par leurs ailes. Une élégante dryade aux cheveux couleur mousse fraîche s'avança, touchant le tronc d'un arbre voisin. Sous ses doigts, les branches bourgeonnèrent en une explosion de couleurs et de fleurs, formant une couronne spectaculaire. Les fées s'approchèrent en riant pour en saisir des poignées.
Une petite fée qui avait demandé des cheveux fit une sorte de sourire grimaçant adorable et saisit une grande mèche qu'elle sectionna. À peine furent-ils coupés qu'ils devinrent des cordelettes dorées qu'elle offrit à toutes les fées puis à elle. Ses propres cheveux repoussèrent d'un coup dès qu'elle fit une petite grimace de concentration.
— C'est incroyable ! s'extasia Elara en admirant les brins dorés dans ses mains.
— Illminya est une fée des liens. Elle peut produire toute sorte de cordes.
— Et ses cheveux sont des fils d'or ? Demanda-t-elle pensant au conte pour enfant « Rempelstilzchen le Lutin »
— Oui !
Elara profita de cette opportunité pour tresser les cheveux des fées et des dryades. Leurs rires cristallins résonnèrent tandis qu'elles se laissaient coiffer, enchantées par la douceur de l'humaine qui prenait soin d'elles. Puis, à leur tour, elles parèrent ses cheveux sombres de fleurs, tressant des liens dorés suivant ses ondulations naturelles pendant qu'un adorable couple de Tylwyth Teg rouge vif voletait autour d'elles, sifflant un chant mélodieux.
Après le départ du “ grand père ” géant, l'ambiance du marché retrouva un niveau sonore plus raisonnable. Les fées, désireuses d'embarquer Elara pour continuer à s'amuser, se firent chasser par Lirion et s'éparpillèrent aussi vite qu'elles étaient arrivées.
Lirion et Elara rentrèrent tranquillement à dos de Trolls. Ils emportèrent avec eux un sac de denrées et quelques vêtements brocéliandins que le Hoper offrit à Elara afin de mieux s'intégrer à la population.
Cité et non Citée
De plus, Relai et non Relaie; Tantôt et non Tanto, Voire et non Voir.
Je suis devenue ton réveil matin ? ;)
Merci pour ta remarque > corrections faites.
J'écris énormément sur mon téléphone pour garder le rythme, mais sans un passage dans le correcteur et relecture sur ordinateur voilà ce que ça donne : des fautes, des répétitions ou même pire, le téléphone qui remplace avec des mots qui n'ont rien à voir.
un café, une page, chaque matin
Le téléphone a l'avantage d'être disponible, léger et ça me permets de garder le rythme du minimum de 1000 mots par jour. Nous connaissons les désavantages.
Merci en tout cas, ton aide est la bienvenue. (même si je ne te garantie pas de faire des personnages clichés qui risqueraient de ma taper sur les nerfs).