Lorsque nous fûmes assez proches de l'académie pour pouvoir la distinguer, mon estomac se tordit d'appréhension mais je fis tout mon possible pour ne rien laisser transparaître. Cela ne trompa pas visiblement pas Mason qui, hésitant, posa sa main sur la mienne.
— Ça va aller, souffla-t-il en gardant son regard rivé sur la route.
Je ne saurais l'expliquer, mais je sentis qu'il y'avait autre chose qu'il ne me disait pas. Non pas que cela se voyait dans son attitude, mais c'était comme une... sensation. Je n'appeler au pas ça une intuition. Mais plutôt comme un sentiment, c'est comme si je sentais au fond de moi qu'il y'avait quelque chose qu'il me cachait mais qu'il s'empêchait de me dire. Je me faisais peut-être —sûrement— des idées, mais avec tout ce qui m'arrivait je préférai quand même demander.
— Est-ce qu'il y'a autre chose que tu me caches ? (sa main se crispa sur la mienne) Parce qu'au point où on en est, mieux vaut retirer le pansement d'un coup.
Il déglutit en réfléchissant mais finit tout de même par me répondre.
— C'est mon frère.
Je le regardai, attendant qu'il poursuive, ce qu'il ne fit pas.
Lorsque nous fûmes enfin arrivés devant l'établissement, il retira les clés du contact et je me retournai pour regarder Beth.
— On a le choix entre la laisser sur le seuil de la porte comme Harry Potter ou rentrer et regarder la mort dans les yeux.
— On ne peut pas juste la laisser à un gardien ?
Il secoua la tête.
— Mon... Jess est sûrement au courant. Il fera en sorte qu'on entre qu'on s'approche d'eux. Et puis, on est sensés être en cours.
— Je parie que tu n'avais pas pensé à ça tout à l'heure.
Il émit un rire fatigué.
— Non, en effet. Je voulais juste quitter l'endroit où on était.
— Bon alors qu'est-ce qu'on...
J'entendis le froissement du cuir de la banquette arrière et nous nous tournâmes vers Beth qui retrouvait doucement ses esprits.
Elle se redressa sur ses coudes avant de tourner la tête vers nous.
— Qu'est-ce que... Qu'est-ce qui se passe ? dit-elle d'une voix ensommeillée.
— Je t'ai trouvée près de la rivière, Rachel est arrivée quelques instants plus tard. Nous sommes maintenant arrivés à l'académie, lui expliqua Mason.
Beth se frotta les yeux et poussa un cri avant de se mettre à tâter ses poches et se tourna d'un coup vers moi s'exclamant d'une voix suraiguë.
— Les autres, tu les as trouvés ? Ils vont bien ? Où est mon téléphone ? Je dois les appeler.
Mason grimaça et se frotta la lèvre.
— Je crois que je l'ai laissé là-bas... désolé.
Beth balaya son excuse d'un revers de main.
— Aucune importance, tu ne m'as pas oubliée. C'est déjà ça (elle soupira avant de se laisser tomber sur le siège) On s'est déjà vus ?
— Euhm... peut-être déjà croisés. On est dans la même classe.
— Ah, fit-elle tandis que je pouffais. Ce n'est pas de cette façon que j'imaginais rencontrer le petit-ami de Rachel, mais je suis enchantée.
Je piquai un fard tandis que les yeux de Mason s'arrondirent comme des soucoupes.
— C-Ce n'est pas mon petit... quoique ce soit !
— OK.
— Je suis sérieuse !
— D'accord ! fit-elle en levant les mains. Mais admets que ce serait chouette, ajouta-t-elle en haussant les sourcils.
— N-Non !
— Quoi ? Tu ne le trouves pas canon ?
— S-Si mais...
— Il n'est pas drôle ?
— I-Il...
— Ou ce n'est peut-être pas ton genre ? Ça ne m'étonnerait pas de toi de toute façon. T'es aussi rigide qu'un balais.
Je m'offusquai.
— Tu dis n'importe quoi !
Mason gigota à côté de moi et Beth reporta son attention sur lui.
— Tu as remarqué ça toi aussi ?
Il fronça les sourcils.
— Remarqué quoi ?
— Eh bien... (Elle me pointa de doigt avant de de tapoter sa tête) Qu'elle était... bizarre.
Je couinai tandis que Mason se mit à réfléchir.
— J'aime bien les filles bizarres, répondit-il en me faisant un clin d'œil.
Beth soupira.
— Qui se ressemble s'assemble...
Puis, comme si elle revenait à la réalité, elle se releva et son visage se décomposa.
— Nous sommes à l'académie ?
Nous acquiesçâmes.
— Les autres ils...
— Sont sûrement à l'intérieur, répondit Mason. Je suis sûr qu'ils...
Beth ouvrit brusquement la portière et nous la suivîmes du regard tandis qu'elle trottinait difficilement en titubant vers l'entrée, je posai ma main sur la portière pour sortir l'aider quand Mason m'en empêcha.
— Laisse faire. Elle ne risque plus rien regarde, me dit-il en m'indiquant de la tête un gardien qui allait à sa rencontre.
— Bon et bien... un problème en moins.
— Et un autre qu'on n'a pas eu à avoir. Heureusement qu'elle s'est réveillée. Et qu'elle nous a remercié.
Je levai les yeux au ciel avant de reporter mon attention sur sa silhouette qui s'estompait.
— Beth était vraiment paniquée lorsqu'elle m'a appelée. Je ne sais pas ce qu'elle a dû vivre mais ça l'a traumatisée.
Mason se frotta une nouvelle fois la lèvre en plissant les yeux.
— J'en suis pas sûr mais... Beliath crée de plus en plus de loups-garous ces derniers temps. Il a dû apprendre d'une façon ou d'une autre que tes amis se rendraient... là où ils étaient.
— Je ne te suis pas...
Il inspira avant de se tourner vers moi.
— Il enlève des humains dans le but d'agrandir sa meute, dans l'éventualité d'une guerre contre les vampires. C'est pour cette raison qu'il veut t'éliminer : ça leur donnerait un avantage considérable.
— D'accord mais quel rapport avec Beth et les autres ?
Il haussa les épaules.
— Il a des yeux et des oreilles partout (il croisa mon regard suspicieux) je ne fais pas référence à Jess ou à moi. Nous ne sommes que des pions pour lui, même si Jess voit ça comme un honneur (il secoua la tête) Bref, il a dû apprendre que tes amis sortiraient, et que tu les rejoindrais ou... j'en sais rien. Il a dû s'arranger. Heureusement que je suis arrivé avant toi.
Je fus prise de nausée.
— Tu veux dire que ce qui s'est passé est de ma faute ?
Mason croisa mon regard et secoua frénétiquement la tête.
— Non, non. Absolument pas. Rien n'est de ta faute (comme je ne répondis pas, il ajouta :) Comme je te l'ai dit il enlève n'importe quel humain. Alors même sans avoir de lien avec toi il...
— Attends, lui dis-je en sentant ma gorge s'assécher et mon cœur cogner dans ma poitrine. I-Il les a enlevés ?
Il me regarda, comme s'il voulait m'assurer que non, mais qu'il ne voulait pas mentir.
— Je ne sais pas... (il se frotta la nuque) tu avais disparue et c'est Jess qui m'a dit de ne pas m'inquiéter parce que l'Alpha avait une piste pour te retrouver (il détourna le regard et ajouta plus doucement) je ne... m'inquiétais pas pour la raison qu'il croyait ( il s'éclaircit la voix) Alors... j'ai voulu m'assurer que tu allais bien. Jess croyait que je donnerais un coup de main à Beliath mais... Ça ne s'est pas passé comme prévu (il haussa les épaules) de toute façon, que ce soit toi ou quelqu'un d'autre je n'aurais jamais pu. À part ton amie, Beth, je n'ai trouvé personne, je n'ai flairé aucun congénère non plus, Beliath n'était donc pas accompagné. Alors je ne crois pas qu'il les ait emmenés.
Je ne répondis rien et tournai la tête vers l'académie. J'espérais de tout mon cœur qu'ils soient à l'intérieur sains et saufs. Au quel cas je ne pourrais m'empêcher de penser que tout est de ma faute.
— Eh, m'interpella doucement Mason qui avait dû lire dans mes pensées. Je suis sûr qu'ils vont bien.
— Presque sûr tu veux dire.
Il ricana.
— C'est déjà ça non ?
J'acquiesçai.
— Bon, fit-il. Tu veux que je te dépose directement là où tu étais ou on récupère ta voiture d'abord ?
Je me tortillai, mal à l'aise.
— Ce n'est... pas ma voiture.
— Bon et bien, la voiture avec laquelle tu es venue.
— J'espère qu'ils ne se rendront pas compte que je l'ai prise...
Mason éclata de rire et je me fâchai.
— Ce n'est pas drôle !
— Oh que si ça l'est ! T'as volé une voiture ? C'est mortel !
— Je ne l'ai pas volée, je l'ai empruntée !
— Oh, crayon à papier, crayon de bois...
Je grommelai en lui lançant un regard.
— Très bien ! Allons sauver la voiture égarée. J'espère que la fourrière ne l'a pas prise, ajouta-t-il doucement avant de croiser mon regard paniqué. Je plaisante ! (il ajouta doucement) à moitié.
Je poussai un cri de frustration auquel il répondit par un geste de capitulation avant de redémarrer la voiture en riant.