Ils étaient proches de leur but, mais le crépuscule teintait les cieux d’un mélange d’orange et de mauve. La température avait chuté depuis qu’ils étaient sur le versant ombré de la montagne, où nul rayon de soleil ne venait réchauffer l’atmosphère.
La pluie n’avait pas repris, l’air était pourtant encore chargé d’humidité. Le combat les avait réchauffés un bref instant, mais Lucas et Syrcail tremblaient de froid dans leurs habits trempés, couverts de boue. Après discussion avec le Messager Arcal, Sybil emporta la jeune fille dans ses bras pour franchir les dernières centaines de mètres.
L’Émissaire Matthias était déjà sur place, et un feu flambait à l’entrée de la grotte. Lucas sentait déjà l’odeur de la soupe qui mijotait. Syrcail et lui pressèrent le pas, motivés par la présence de ce repas chaud. L’entrée s’évasait sur une vaste pièce où ils tiendraient aisément pour la nuit. Les deux Envoyés enfilèrent un uniforme sec avec un soupir de soulagement, puis récupérèrent un bol de soupe auprès de Matthias en murmurant des remerciements.
Avec l’aisance de l’habitude, ils s’installèrent, et Arcal présenta Cérulis au reste des membres du groupe. Lucas s’aperçut que Satia le dévisageait avec attention ; qu’avait-il de si particulier ? Après le repas, Lucas se chargea d’apporter une tasse de tisane à la jeune fille. Elle s’était mise à l’écart du groupe, comme si elle se sentait lasse des péripéties de la journée. Satia prit la tasse et murmura un remerciement. Lucas nota qu’elle tremblait.
—Ça va ? Tu ne parais pas très bien.
—J’ai un peu chaud.
De la fièvre ? Ou du poison ? Lucas se tourna vers le Messager Arcal en quête d’assistance, mais c’est Cérulis qui s’approcha.
—Ton Messager ne peut rien pour elle. Comment t’appelles-tu, Envoyé ?
—Lucas.
Le Maitre des Vents haussa un sourcil.
—Seulement ?
—Pour le moment, répondit Lucas, circonspect.
Le regard de Cérulis s’attarda sur ses ailes, puis revint à son visage.
—Tu as les yeux de ton père.
Lucas se raidit.
—Et je comprends mieux la raison de ta présence ici. Mais toi et tes compagnons ne lui seraient d’aucune aide maintenant, peux-tu le comprendre ?
—Que lui arrive-t-il ? demanda Lucas, déconcerté. Pouvez-vous l’aider ?
—Je ferai ce que je peux, dit Cérulis.
Satia avait vaguement suivi leur discussion, curieuse et anxieuse à la fois.
—Vous savez ce qui m’arrive ?
—Oui, répondit posément le Maitre des Vents.
Elle tremblait de plus en plus, leva des yeux angoissés sur Lucas. Comme si elle se fiait à son avis, songea le jeune Envoyé, troublé.
—Si Cérulis dit qu’il peut t’aider, tu peux avoir confiance, dit Lucas. C’est un Massilien. Nous ne pouvons mentir, ne l’oublie pas.
—Vous… vous pouvez vraiment … commença-t-elle, hésitante.
—Je peux t’aider, oui, confirma Cérulis. Ton Don s’éveille.
—Son Don ? interrogea Lucas, perplexe.
—Ton père ne t’a donc rien expliqué ?
Mortifié, Lucas s’efforça d’ignorer le rouge qui colorait ses joues. Ce Maitre des Vents en savait bien plus sur lui qu’il ne l’aurait dû. S’était-il trahi d’une quelconque manière ?
Cérulis saisit les mains de Satia.
—J’ai senti ton énergie, c’est elle qui m’a attirée vers vous. Je suis du Vent, tu es du Feu. Ce n’est pas optimal mais ce n’est pas la plus mauvaise des combinaisons. Tu as chaud parce que le Feu s’éveille en toi.
—Que dois-je faire ? s’inquiéta Satia. Est-ce dangereux ?
—Non. Respire lentement, invita Cérulis. Concentre-toi sur l’intérieur de tes mains. Fais-le apparaitre.
—Et si…
—Je suis là, coupa-t-il. Tu ne blesseras personne. Ne crains rien.
Il y avait tant de conviction dans ses mots que Satia céda. Lucas se fit tout petit pour ne pas déranger ; il savait que Satia l’avait oublié et qu’il n’était présent que parce que Cérulis avait deviné qu’il était membre de la Seycam. Et que les Maitres des Vents semblaient bien au courant des affaires de la Seycam concernant la descendance de Félénor. Il devrait en parler à son père à son retour, au cas où.
Une timide flammèche naquit au creux des mains de Satia ; elle vacilla, diminua jusqu’à s’éteindre. Renaquit, toujours timide et vacillante ; et puis quelque chose la soutint, la renforça.
Satia leva des yeux émerveillés vers Cérulis, qui lui sourit en retour.
La flamme bondit vers le plafond et Lucas sursauta ; un vent doux dispersa les flammèches avant qu’elles ne retombent.
—C’était… whaouh !
L’excitation avait remplacé les tremblements chez la jeune fille et Lucas se sentit soulagé. Sans la présence du Maitre des Vents, il devinait que cette première tentative aurait pu se révéler dangereuse et il décida de profiter de sa prochaine permission pour se documenter sur ce sujet qu’il connaissait mal.
—Ce sera suffisant pour que tu dormes en sécurité cette nuit, dit Cérulis. Demain, je te donnerai des exercices à faire.
—Merci beaucoup, répondit Satia avec reconnaissance.
—Ce ne sera pas facile, avertit Cérulis. Mais pour ta propre sécurité, pour celle de tes proches, tu dois apprendre à maitriser ton élément. Tu n’as fait que le premier pas d’un long chemin.
Satia frissonna, et Lucas fut rassuré de voir qu’elle prenait les recommandations du Maitre des Vents au sérieux. On ne jouait pas avec les Dons
—Je dois parler à ton père. Si tu as des questions, réserve-les à demain. Dors, maintenant. Tu as dépensé beaucoup d’énergie. Il te faut récupérer si tu veux pouvoir suivre le rythme des prochains jours.
Ah, c'est biiien cette attaque de chapitre avec le cadre soigneusement posé, des sensations, des notations météo, des odeurs... On est déjà beaucoup plus dans l'ambiance ! Et vraiment, tu fais ça bien.
Remarques accessoires :
▪️ Deux paragraphes contigus dont la fin est redondante :
"puis récupérèrent un bol de soupe auprès de Matthias en murmurant des remerciements.
"Satia prit la tasse et murmura un remerciement."
▪️ "Lucas nota qu’elle tremblait." vu la position en fin de paragraphe (le truc qu'on loupe facilement), tu pourrais te permettre de la faire trembler de tous ses membres, ou équivalent, voire de rajouter d'autres manifestations physiques... peau rougie, brillante de sueur, etc. C'est un fait saillant, sinon, on a le droit de forcer un peu le trait.
▪️ "...il savait que Satia l’avait oublié et qu’il n’était présent que parce que Cérulis avait deviné qu’il était membre de la Seycam. Et que les Maitres des Vents semblaient bien au courant des affaires de la Seycam..."
Je ne saisis la raison de cause à effet introduite ici par "Et que" puisqu'elle se rapporte à "qu'il n'était présent que parce que..."
Ce serait plutôt une notion du genre : "d'autre part, du reste, en outre, par ailleurs, qui plus est...", non ? Ou alors, il manque une explication quelque part.
Bisou 🦉
Merci pour le début, c'est des choses que j'essaie d'intégrer de mieux en mieux ^^
Je note pour la fin des paragraphes, je modifierai, ça fait en effet bizarre (mais j'ai déjà eu 2 phrase identiques à 2 paragraphes d'intervalle, donc faut croire que mon cerveau efface des morceaux par moments :p)
Vrai que je pourrais en rajouter sur les tremblements, c'est quand même censé ne pas être anodin donc ça serait mieux.
Le "et que" serait plutôt une pensée à retardement, mais en effet c'est peu clair et/ou ça mériterait d'être dit autrement.
Bon, au moins je vois ce qu'il faudra travailler ^^ Encore une fois, merci tout plein pour tes retours, ça m'aide beaucoup :)