Chapitre 18 : Effraction

    Ça y est. Le jour J se présente enfin. Depuis deux semaines, nous avons fait du repérage. Nous en avons conclu que Coyne n'était pas du genre à rester dans ses appartements, qu'il préfère être en compagnie des autres. Nous allons passer à l'action ce soir, pendant le dîner. Pour ne pas paraître suspects, nous allons partir à tour de rôle, à plusieurs minutes d'écart. Il faudra vérifier que Coyne ne me voit pas partir du réfectoire sinon le plan tombe à l'eau. Une fois que nous serons tous sortis, ce sera un jeu d'enfant. Il suffira d'aller jusqu'aux chambres des invités et là, d'ouvrir la porte de celle du chef de brigade avec le double des clefs que nous avons volé dans le bureau de la principale il y a une dizaine de jours.

    La cloche sonne la fin des cours. Je me lève et sors de la salle avec précipitation. Illiam me rattrape bientôt.

- Ben alors ? Tu te remets à m'éviter ?!

- La ferme Illiam. On a autre chose à faire.

- T'es vraiment pas drôle.

Il lève les yeux au ciel et passe un bras sur mon épaule. Je frémis. Je n'aime pas les contacts. Surtout quand ils sont impromptus comme ça. Je me dégage brusquement. Trop peut-être vu le regard mi-surpris mi-vexé que me lançe Illiam.

- Ne me touche pas. je dis d'un ton sans appel.

Il soupire bruyament. Je n'ose plus croiser son regard jusqu'au réfectoire où nous retrouvons Yann et Erica. Nous entrons comme si de rien n'était et nous asseyons à une table de quatre. Bientôt, Coyne entre dans le réfectoire. Son regard balaie les alentours et se pose sur moi. Il sourit. Je lui rend son sourire avec une note de crispation et un regard noir. C'est à ce moment que le jeu commence. Illiam part le premier pour avoir le temps de forcer la serrure de la chambre du chef de l'équipe. J'écoute d'une oreille distraite la discussion que mènent Yann et Erica à propos du professeur  d'histoire. Je jette de réguliers coups d'oeil à Coyne.

Erica se lève et part. Nous continuons notre repas. Puis c'est à mon tour. Je jette un coup d'oeil rassurant à Yann, je prends mon plateau et je me lève. Soudain, je vois Coyne qui se lève à l'autre bout de la salle, il me regarde droit dans les yeux. Mon ami l'a vu lui aussi. Je lui adresse un regard. Nous allons devoir improviser. Yann se lève à son tour et nous commençons à partir. Après avoir posé nos plateaux, il m'adresse un clin d'oeil et fait demi-tour. Je le suis du regard. Il se dirige vers Coyne qui, lui aussi, s'est levé. Je comprend alors le plan de mon ami. Détourner l'attention de l'enquêteur pour que je puisse sortir du réfectoire ! Je me dirige vers la porte sans trop me hâter. Je retiens ma respiration. Quand je suis enfin dehors, je m'autorise à inspirer un grand coup goulée d'air. Je l'ai échappé belle ! Je file rejoindre Erica et Illiam.

    - T'arrives plus tard que prévu. me reproche Illiam lorsque j'arrive auprès d'eux.

- Où est Yann ? demande Erica.

- On a eu un problème, Coyne nous a suivis. On a dû improviser. On va devoir fair ça sans Yann.

Je sens une pointe d'agacement chez Illiam et d'angoisse chez Erica. Smith se déturne et ouvre la porte de la chambre. Nous entrons et refermons la porte derrière nous. A partir de là, nous avons exactement 1h 23 avant que Coyne ne revienne. Nous commençons notre travail. Nous retournons la pièce sans pour autant y mettre le bazard. Les minutes passent sans qu'on ne trouve le moindre indice.Soudain, j'entends un déclic puis une exclamation derrière moi. Je me retourne, Erica se tient devant le bureau.

- Venez voir ! nous intime-t-elle.

Je me précipite vers elle. Elle a ouvert un tiroir du meuble. Il est vide. Je hausse les sourcils.

- Oui ? Pourquoi tu nous as appelés si c'est pour nous montrer un tiroir vide ?

- C'est là que tu te trompes. répond-t-elle pleine d'assurance.

Elle insère une de ses épingles à cheveux dans un trou minuscule situé sous le tiroir. J'entends de nouveau un déclic puis le fond du tiroir se soulève légèrement, en révélant un deuxième.

- Un coffre secret ! s'exclame Illiam à côté de moi.

Mais quand est-ce qu'il s'est rapproché ce crétain ?! Il m'a fait peur ! Je lui adresse un regard assassin auquel il répond par un sourire malicieux. Je repporte mon attention sur le tiroir. Erica en sors des papiers et un dossier. Elle consulte rapidement les papiers.

- Ce sont des lettres. dit-elle : Une correspondance, précisément. Adressée à un certain P. Kruck. Qui est P. Kruck ?

- Je sais ! s'écrie Illiam en bondissant : Je sais qui c'est ! C'est Pawel Kruck ! Leader d'un gang, plutôt réputé parmis les criminels ! Mon père a fait affaire avec lui un jour ! Mais qu'est-ce que Kruck vient faire dans cette histoire ?

Entre temps, Erica a relu la lettre et le dossier plus en détail. Elle pâlit, ouvre des yeux brillants d'incompréhenssion puis lâche un juron avant de me les tendre. Je m'en saisis et commence à lire dans ma tête la lettre. Elle a été écrite par Pawel Kruck puis envoyée à Coyne :

De P. Kruck.

A : Agent Coyne

Objet : Paiement de dette

Bonjour,

Le délai de 4 ans est passé. Angélique Levrec n'ayant pas encore payé sa dette, nous devons donc aller la chercher nous mêmes.

Je vous charge, vous, Agent Coyne, de vous occuper de cette opération. N'intervenez pas directement, suivez la cible. Tentez de l'amadouer. Si ça ne marche pas, utilisez la force. Il nous faut la gamine, elle serait un très gros atout pour l'organisation. Ci-joint, le dossier cotenant l'ordre de mission. Je compte sur vous.

P. Kruck

    J'ai un mauvais pressentiment. Angélique Levrec est le nom de ma mère. Je m'empresse d'ouvrir le dossier et de le lire.

ORDRE DE MISSION

Objectif : Aller chercher la cible pour payer la dette.

Cible : Gwenaëlle Prevost (Anciennement : Gwenaëlle Levrec)

Âge : 12 ans

Atouts : Agile, Rapide, Efficace.

Attention : Plutôt intelligente et forte en combat, peut opposer une résistance.

   Mon coeur cogne contre ma poitrine. Qu'est-ce que ça veut dire ? Je suis... Une dette ? Je ne comprends pas. La tête me tourne. Je m'apprête à dire quelque chose quand j'entends une voix :

- J'avais donc raison de suivre ce petit qui m'a accosté au réfectoire...

Nous nous retournons. Coyne nous domine de toute sa taille. Il tient fermement Yann qui nous adresse un regard paniqué.