– On a un miroir à atteindre, dans une pièce précise du château. énonça Aude solennellement. Il faut trouver un moyen de rentrer dans le bâtiment, d’aller jusqu’à cette pièce sans se faire repérer, puis d'activer un miroir magique pour qu’il nous ramène dans notre monde ?
– C’est à peu près ça. sourit Maï Rose avec nervosité.
– Tout en sachant que ce miroir ne s’active que par la magie, ce que nous n’avons pas.
– Oui...
Les quatre terriennes étaient assises par terre dans le chalet dont la lumière du soleil venait frapper les fenêtres agressivement, bien que la température n’était pas plus chaude. Maï Rose avait passé deux heures à leur expliquer en détail tout ce qui s’était passé, tandis qu’Ariane se contentait d’approuver ce qu’elle disait en silence. Bien sûr, elle dû raconter ce qui s’était passé lorsqu’elle était seule. Mais la jeune fille ne pouvait pas tout raconter non plus.
– Eleo s’est engagée hier soir pour nous aider à activer ce miroir.
– Donc il faut se rendre là bas avec lui... conclut Aude avec un air pensif. Infiltrer cinq personnes dans un château c’est... Impossible.
– Sofia est encore là bas ! intervint Maï Rose avec espoir.
– Mais il y a des gardes quasiment partout. compléta Ariane. Et le fait qu’on ai réussi à s’enfuir n’était qu’un coup de chance...
– Même si elle pouvait nous aider à nous enfuir, on ne sait quand même pas où se trouve la salle avec le miroir, et c’est risqué de le chercher nous même une fois sur place.
Maï Rose récupéra le sac d’Ariane pour fouiller à l’intérieur et en sortir la carte du château.
– J’ai entendu des gardes parler de l’aile sécurisée Est. expliqua Ariane en désignant un pan de la carte.
– Mais ils n’ont pas précisé quel étage ?
– Non.
Plus le temps passait, plus les quatre filles réalisaient à quel point leurs informations étaient ridicules comparé à l’immensité de ce qu’elles se préparaient à affronter. Maï Rose, se tournant vers la plus silencieuse du groupe, demanda avec espoir :
– Qu’est ce que tu en penses Liz ?
En moins d’une seconde, le regard des trois filles était rivé sur la plus jeune d’entre elles. La petite brune jouait nerveusement avec une mèche de ses cheveux courts, ses yeux à elle rivés sur le plancher.
– On devrait juste abandonner...
– Quoi ? s’étrangla Maï Rose. Liz ! Tu ne peux pas dire ça !
– A quoi bon essayer ? C’est une armée contre nous quatre. C’est facile de voir comment ça se finira...
– On sera cinq si Eleo nous accompagne, et six si Sofia nous aide sur place...
– C’est la même chose... Qu’on soit quatre ou dix, on est en sous nombre comparé à l’armée d’un château, c’est du suicide de vouloir s’y rendre, autant rester ici et abandonner.
Même si le caractère pessimiste et railleur de la plus jeune faisait grincer Ariane des dents, elle devait admettre que la petite n’avait pas tord. L’aide de l’ange ne changeait rien à leur situation, elles restaient inoffensives face aux nombreuses recrues du château. Elle n’osait même pas imaginer ce qui se passerait, si elles avaient à se battre contre ne serait ce qu’Octave. Il avait battu chacune d’entre elles avec une facilité qui la rendait nerveuse.
Est ce qu’elle serait capable de mourir pour rentrer chez elle ?
Non.
Serait elle capable de mourir pour que Maï Rose soit en sécurité ?
– Tu vas abandonner ? s’exclama la Vietnamienne. Ta famille, tes amis, ton monde ?
– Qu’est ce que tu veux qu’on y fasse ? On est des enfants. On n’est pas dans un conte où tout se termine bien, il y a des risques, et je ne veux pas les prendre.
– Mais... Qu’est ce que tu vas faire...?
– Je vais rester ici, faire ce qu’ils me disent et... C’est tout.
– Et ça te va ?
– Non, mais on ne peut rien faire d’autre.
La jeune fille se leva et retourna dans son lit, elle passait toute ses journées à dormir, rester ici renforcerait cette habitude, comme si elle ne vivait pas vraiment. Maï Rose fixa Liz avec insistance, s’attendant à ce qu’elle revienne avec elles, mais c’était peine perdue.
– Et toi, Aude. reprit Ariane pour revenir sur le sujet principal. Tu nous aiderais ?
La jeune fille prit un air pensif, et son regard se posa sur le visage rempli d’espoir de Maï Rose.
– Oui, mais uniquement si nous sommes sûres de la marche à suivre.
– On va faire de notre mieux !
Pendant l’heure qui suivit, les trois filles se mirent à construire un plan, Ariane fut envoyée dehors à la recherche d’Eleo pour qu’il puisse les aider, mais elle ne l’avait pas croisée. Nous aider ? Quel menteur. pesta Ariane intérieurement sur le chemin du retour. On ne peut faire confiance à personne ici. Elle n’allait pas s’attarder éternellement à le chercher, les quelques regards que les locaux lui adressaient semblaient loin d’être amicaux et ça faisait quinze minutes qu’elle tournait en rond dans le village. Ne reconnaissant aucun des visages, elle préférait s’échapper et retourner auprès des autres filles.
Au même moment, Ariane aperçut Théo qui lui faisait signe. Sans même lui accorder un regard, elle entreprit d’éviter le monstre qui eut l’air si choqué de sa traîtrise qu’il la coursa immédiatement.
– Eh oh !! La terrienne, tu réponds quand on t’appelle ! J’ai besoin de toi !
Dire directement qu’on ne veut pas aider c’était malpoli lui avait on répété. Et pourtant ce gosse malformé n’avait rien d’intéressant à lui dire.
– Qu’est ce que tu veux ?
– J’ai besoin de tester quelque chose sur quelqu’un qui n’est pas magique ! Vient avec moi !
Ariane sentit un pic de stress lui monter.
– Je ne ferais pas de test.
– Oh allez ! Ce n’est qu’un petit test ridicule, je t’assure, tu ne veux pas nous aider et rester dans ton coin ? Non ! Allez viens avec moi !
Le monstre s’empressa de lui montrer une cabane comme toutes les autres et de s’y précipiter, veillant à ce qu’elle la suive. Ariane devait retourner voir les filles, mais en même temps, elle pouvait trouver un moyen d’avoir des informations précieuses pour leur permettre de s’enfuir. Si elles ne peuvent pas avoir l’aide de Eleo, c’était toujours mieux d’avoir un autre être magique à disposition, pas vrai ? Avant même qu’elle ne le réalise, elle était déjà derrière le jeune, à l’observer ouvrir une trappe immense qu’il peinait à ouvrir avec sa petite taille. La trappe collait parfaitement avec l’allure de la maison, en bois, à peine dissimulée et le peu de meubles autours écartés pour ne pas être dans le passage, tout dans le chalet semblait à sa place, au millimètre près, avec deux lits d’un côté et de l’autre de la pièce parfaitement fait.
– Tu comptes rester plantée là-haut ? Descends ! lança Théo.
Un long soupire lui échappa, voilà qu’elle en venait à obéir à un monstre, après s’être assurée qu’il était bien le seul dans la demeure, elle entreprit de descendre prudemment les marches une par une. Les escaliers en bois grinçant menaient à une cave tout aussi rangée, avec des étagères contenant des multitudes de livres, contenant et autres fioles aux liquides colorés. Les murs sombres en pierre donnaient un air de prison qui menaçaient de se refermer sur eux et la pièce n’était illuminée que par des lampes incrustées dans le plafond. Ariane prit un instant pour se demander comment la pièce pouvait fonctionner à l’électricité alors qu’il n’y avait rien pour produire de l’énergie dans le village. Ce n’est pas comme si elle s’attendait à apercevoir des panneaux solaires ou des centrales nucléaires dans le coin.
Théo se précipita sur une étagère, en sortant une boite qui paraissait immense dans ses bras et la déposa avec grande précaution sur la grande table au centre de la pièce. Il l’ouvrit. Dans dix minutes, je retourne avec les filles... se dit Ariane en se rapprochant du garçon, observant le contenu de la boîte : dix sphères brillantes étaient soigneusement rangées à l’intérieur, entourées d’un matériel mou et sculpté à la forme sphérique empêchant leur dégradation. Certaines étaient bleues, d’autres jaunes et une était verte. Une vive douleur la prit au crâne, sans comprendre d’où elle venait avant de voir Théo avec un de ses cheveux, le posant sur la petite sphère.
– Si tu avais besoin de mes cheveux, il suffisait de le dire, ne fait pas ça !
Théo haussa les épaules et s’empressa de lui donner la petite sphère au creux de sa main.
– Alors ? dit-il en contenant à peine son excitation. Comment tu te sens ?
La surface de la sphère était étrangement lisse, agréable au toucher et légèrement chaude dans ses doigts. Ariane pourrait presque croire que le petit objet brillait, colorant sa paume bleue. Elle aurait pensé qu’il était clair et qu’elle pouvait voir à travers, mais elle n’apercevait même pas sa paume sur laquelle elle était posée.
– Bien ? Qu’est ce que c’est ?
– Du Crystal. marmonna le monstre en examinant sa paume. C’est un minéral qui permet aux personnes sans pouvoir d’ici, d’en utiliser. En toute logique, tu ne devrais pas être capable de l’utiliser, mais je n’ai jamais pu faire le test auparavant ! Essaie de l’utiliser !
– Comment je pourrais ? Tu as dit que ça ne marcherait pas.
– Essaie juste ! Imagine qu’il y a une énergie en toi venant de ton ventre, trace visuellement le chemin entre celui-ci et ta paume, et transfère cette énergie dans la sphère !
Ariane aurait voulu faire semblant de suivre ses consignes, après tout, tester ne servait à rien. Mais une partie d’elle, peu présente de nature, se réveilla, et sa curiosité prit le dessus. Peut être qu’une de ces billes pourrait lui conférer certains de leur pouvoir et elle pourra voler comme les anges ou manipuler les autres. Il n’y avait qu’un moyen de le savoir, et c’était maintenant. Si elles fonctionnent, elle sera bien plus à même de défendre Maï Rose de ce monde. Alors qu’elle prit une grande inspiration, elle se prit à cet exercice ridicule, pour leur bien. Ariane visualisa ainsi une vague d’énergie partant de son centre jusque dans ses extrémités.
Tic
Tac
Tic
Elle n’entendait plus que le bruit de son second cœur, tintant sur son poignet à son rythme familier. Trente secondes plus tard, elle ne sentait rien que ses doigts engourdies dans sa paume serrée contre la sphère brillante. Peut-être semblait-elle plus chaude pendant l’espace d’un instant, mais rien de particulier ne se passa. Ariane en fut presque déçue et tendit la bille pour la rendre au garçon, qui l’observait avec curiosité.
– Sans surprise, ça ne fonctionne pas ! Mais pour en être certain il faudrait que je teste sur tes amies également.
– Ce ne sont pas mes amies...
– C’est ce qui t’inquiète le plus dans la phrase ? s’éleva une voix rauque derrière elle.
Ariane fit volte face. Un grand homme mince descendit les escaliers, il avait l’air vieux, les cheveux grisonnant, la barbe dégarnie et l’air peu commode avec ses cicatrices qui barraient son visage. Sur le côté droit de son crâne poussait un unique bois de cerf. Il faisait froid dans le dos, surtout dans une situation où elle était bloquée dans une cave qui n’avait clairement pas assez d’espace pour permettre le moindre combat.
– Ah ! Brieg ! Je viens justement de faire le test que tu m’as demandé !
– Oui, je vois ça. marmonna l’homme en dévisageant Ariane qui restait sur ses gardes. J’aurais jamais cru voir un jour ces lumines de près un jour.
– Des lumines ?
– Des nées sans magie dans un monde sans intérêts tel que vous ! Vous êtes rares, vous savez ?
Le vieil homme se mit à rire sinistrement, faisant un pas pour s’approcher d’Ariane qui recula aussitôt.
– Oh, calme toi, je ne vais pas te manger : Je suis scientifique, pas candidien. Tu diras à tes camarades de venir passer ici, mm ? Comme ça on testera tout le monde, qui sait, on pourra peut être avoir des surprises.
Non, bien sûr que non. Personne ne viendra ici, que ce soit la paresseuse, la tête de classe ou Maï Rose. Ces personnes sont étranges et l’habit de scientifique fou qu’abordait “Brieg” elle ne laissera personne s’approcher de cet endroit, ni même en connaître l’existence.
– Je leur transmettrai le message. grinça Ariane, notant qu’elle ne précisait pas quand elle le ferait.
– Super, va ! rit l’homme en se mettant aux côtés de Théo qui rangeait avec attention les sphères.
Le chemin enfin dégagé, Ariane ne se fit pas prier pour remonter, et fila immédiatement en direction de leur chalet. Voilà quarante-deux minutes qu’elle traînait le pas, il ne faudrait pas que les filles commencent à la chercher.
Elle ouvrit la porte et tomba sur Eleo qui fut tout aussi surprise de la voir.
– Ariane ! s’exclama Maï Rose en souriant. Eleo est arrivé juste après que tu sois partie ! Il est d’accord pour qu’on établisse un plan.
Ariane soupira longuement, ravalant la frustration d’avoir cherché l’ange pendant trente et une minutes pour en demander plus sur leur plan.
– Nous avons deux salles qui peuvent correspondre à la salle du miroir.
– Deux ? Seulement deux vous êtes sûrs ?
– Sûrs, affirma Aude en lui montrant le plan. Nous avons éliminé toutes celles-ci car elles étaient bien trop petites pour y faire rentrer les camionnettes qui nous ont amenées jusqu’ici. Celle-ci est trop facilement accessible par la fenêtre, et ils n’auraient pas mis un objet si précieux si exposé. Il nous reste donc trois salles dont une qu’Eleo et Mike ont déjà visitée auparavant.
– Et aucun miroir ne s’y trouvait, compléta Eleo en hochant la tête tout du long de l’explication de la lycéenne.
– Le seul problème, poursuivit Aude calmement. C’est que ces deux salles sont loin l’une de l’autre... Elles ont l’air proche sur le plan, mais ça reste un château.
Ariane ne pouvait pas croire que ce soit si facile, ce château possédait un objet aussi précieux que ce miroir dimensionnel et une bande d'adolescents pouvaient deviner avec facilité de l’endroit où il se trouvait ? Il y a forcément quelque chose qui ne va pas. pesta-t-elle intérieurement.
– Ça veut dire qu’on est près du but ! s’exclama Maï Rose avec un grand sourire. Il faut qu’on y retourne et qu’on prévienne Sofia pour qu’elle vérifie les deux salles pour nous !
– Non, elle est sûrement dans leur radar parce qu’on est arrivées ensemble. soupira Ariane, encore debout.
– Il faut partir maintenant ! C’est le moment où ils s’y attendent le moins !
– Tu es complètement inconsciente ! pesta Ariane sans retenue, agacée. On vient de s’enfuir ! Ils s’attendent à nous voir revenir ! Ils sont sûrement en alerte !
– On est juste deux collégiennes qui se sont échappées d’un entraînement militaire ! Il n’y a rien d’étrange à ça !
– Juste après qu’on nous ait accusé de traîtrise ? Est ce que tu réfléchis un peu ! Cette fuite est la preuve de notre culpabilité !
Rien n’importait plus à ce moment que l’assurance que leur plan serait parfait et que peu importe les imprévus, elles seraient tout de même capables d’arriver à leur fin en sécurité. Si le plan n’avait ne serait ce qu’une part d’improvisation, elle ne laisserait pas Maï Rose s’y donner la mort.
– Eh bien ! Je partirais ! Et toi tu resteras là ! Comme ça on aura toutes les deux ce qu’on veut ! Et Aude viendra avec moi !
– Hum, voulut interrompre la concernée en levant la main. Je suis d’avis d’Ariane, il vaut mieux attendre d’être sûre à 100% avant de se lancer dans une quête aussi dangereuse.
– Hein ? Mais ils risquent de s’enfuir avec le miroir ! Et on ne pourra plus retourner chez nous !
– Je doute que le miroir soit facilement transportable en moins d’une semaine, intervint Eleo à son tour. Il est fragile, la moindre fissure pourrait dérégler son fonctionnement de façon permanente.
– D’accord ! J’ai compris ! Vous ne voulez juste pas partir maintenant ! Mais on peut partir la semaine prochaine !
– Ça ne suffit pas ! Une semaine pour infiltrer un bâtiment dont les gardes nous attendent de pied ferme.
– A force de tout retarder, on va finir par ne jamais pouvoir rentrer chez nous ! On n'a même pas pu ramener de documents importants quand on était au château !
– Peut être qu’on s’en serait mieux sorties si tu ne passais pas ton temps à prendre cet enlèvement comme des vacances et te mettre dans tous les dangers possibles sans réfléchir aux conséquences de tes actes ! J’en ai marre d’essayer de te sauver quand tu veux aussi clairement mourir !
Cette fois, pas de réponse.
Le silence.
Bien trop long.
Un..
Deux...
Trois...
Le visage de Maï Rose était blanc et se défigurait d’émotion en une grimace horrifiée. A mesure de l’ampleur des mots qu’elle venait de prononcer, Ariane sentit immédiatement le regret lui serrer la gorge, elle ne voulait pas lui dire ça :
– Maï, je suis désolée, ce n’est pas ce que je pensais.
Un second silence emplit le chalet. Aude regardait Maï Rose d’un air inquiet tandis qu’Eleo ne semblait pas vraiment prêter attention à la dispute :
– Je vous aiderais, mais on ne partira pas avant d’avoir établi un plan précis.
Mais personne ne semblait vraiment l’écouter, et Maï Rose baissa la tête :
– Je... Je vais prendre l’air...
La jeune fille sortit avec précipitation, ne prenant même pas le temps de refermer la porte. Ariane ne savait pas quoi faire, la suivre ? Rester ici et discuter du plan pour qu’ils partent au plus vite, au souhait de son amie ? Que pouvait-elle faire ? Elle n’avait jamais insulté son amie de la sorte, et elle devait s’excuser, elle savait que c’était la chose à faire.
– T’es vraiment qu’une connasse.
Liz s’était relevée de son lit, fixant Ariane avec ses yeux violets et froids.
– Tu pouvais pas lui expliquer calmement ? Il fallait que tu l’insultes pour prouver que tu avais raison ? T’es juste pathétique.
Cette fois, elle ne savait pas quoi lui répondre, cette petite peste avait raison, mais elle ne pouvait pas l’admettre, et ça ne lui donnait toujours pas ce qu’ils fallait faire pour arranger les choses. Le son de sa montre ne faisait que tiquer de plus en plus fort. Tic... Tac...
Tic...
Tac...
Tic...
Tac...
Tic...
– Tu devrais aller t’excuser, Ariane. murmura Aude l’air grave.
Ariane prit une grande inspiration, difficile avec son cœur serré. Plus elle s’excusait vite, moins elle en souffrira, mais elle ne pouvait pas se convaincre de partir à sa poursuite maintenant.
– Allez, bouge toi ! pesta Liz en haussant la voix. Fais un effort !
Irritante, si irritante... Si seulement je pouvais la faire taire... Mais elle ne s'arrêta pas, la jeune fille continuait de lui faire la morale, encore et encore, sans s’arrêter, sans se taire. Aude s’y mit également, elles poursuivaient leur charabia incessant qui ne l’aidait ni à réfléchir, ni à prendre une décision, ne prenant même pas la peine de les écouter. Ariane sortit dehors, refermant la porte dans un fracas.
Tic... Tac... Tic...
Après une grande inspiration, elle pouvait apercevoir Maï Rose près de la forêt, dos à elle. Elle n’avait pas été très loin, se rappelant sûrement de la fugue de Liz qui aurait pu très mal finir. Ariane sentait tout son corps la repousser et lui dire de fuir dans la direction inverse, mais elles sont amies, elle ne peut pas faire ce qui protège son égo indéfiniment.
– Maï Rose ? appela-t-elle calmement, se rapprochant de son amie.
Cette dernière se retourna dans un sursaut, essuyant ses yeux larmoyants.
– Ah ! Tu m’as fais peur... Je ne vais nulle part, ça va mieux maintenant...
Ariane prit une seconde inspiration, sentant un vent froid lui parcourir le corps alors qu’elle prenait le courage qu’il fallait pour s’excuser.
– Je suis désolée, j’ai été cruelle et injuste. Je ne pensais pas ce que je disais.
Son cœur battait la chamade alors qu’elle essayait de décrypter les émotions sur le visage de son amie, en vain. Maï Rose était triste par sa faute, c’est sûr, mais à quel point avait elle enfoncé le couteau ?
– Tu penses toujours ce que tu dis... murmura Maï Rose tout bas.
– Je suis trop fatiguée pour savoir ce que je pense en ce moment, d’accord ? Je suis vraiment désolée, c’est injuste de t’en vouloir dans une situation comme ça...
– Je sais, je sais, j’ai compris... C’est juste que... Peut être que tu as raison, que je prends la situation trop à la légère... Mais je n’ai pas créé de problèmes jusque là...
– Tu as... Fait confiance à une totale inconnue en ignorant des consignes... Si Nonita n’était pas partie dans cette forêt, rien de tout à ne serait arrivé...
Maï Rose détourna le regard l’espace d’un instant, Ariane se mordit la langue en réalisant qu’elle n’était pas censée la contredire alors qu’elles s’étaient disputées il y a si peu.
– Je suis désolée... Je voulais qu’on se fasse des alliés là bas...
– Par le mensonge ?
– C’est... Tu n’avais pas à m’insulter non plus...
– Non, c’est vrai... Je suis désolée pour ça... Mais, est ce que tu peux, juste, faire plus attention autour de toi ? Réfléchir aux dangers avant de te précipiter quelque part....
– Je.. Je peux faire ça...Est ce que... Tu es en colère ?
Ariane fut prise au dépourvue par l’affirmation, puis réalisa qu’elle lui avait crié dessus quelques minutes plus tôt.
– Non, non je ne le suis plus...
– Je suis désolée aussi... Si je t’ai stressé parce que je ne faisais pas assez attention...
– Moi aussi...
Maï Rose lui adressa un petit sourire, mettant visiblement derrière elle cette altercation.
– On devrait retourner avec les filles, notre plan ne va pas se faire tout seul.
Ariane sourit un peu à son tour, c’était la première fois qu’elle ne faisait pas pleurer Maï Rose davantage avec ses mots de réconfort. Elles avaient enfin pu s’accorder sur une faute partagée et les deux filles repartirent vers le chalet.
– Vous ?!
Les deux filles s’arrêtèrent net lorsque la voix familière retentit. Devant elle se tenait Octave, avec un air de mépris ancré sur son visage, une épée à la main. Un bruit strident et aigu leur perça les tympans.
– Traîtresses !