Chapitre 18 - Meos - Le foyer brûlant d’une curiosité naissante

Notes de l’auteur : Nous revoilà sur le point de vue de Meos, qui se réveille au village frontière. Un cycle en arrière, quelque instants après l'arrivé de Iro au Croc.
Les points de vue s'alternent sur un rythme de un à deux cycles, qui peuvent représenter cinq à dix chapitres.

N'hésitez pas à relire les chapitres précédents s'il vous manque des wagons, j'ai mis le point de vue dans le titre pour faciliter la navigation.

Bonne lecture! Et comme d'hab n'hésitez pas à passer sur le forum, ou laisser un commentaire.

De la chaire émane l’expérience. Une récollection d’évènements passés ressurgit sur une toile de sentiments. Cristallisés. Maquillés. Des formes perturbées par le doute. La peur, l’imminence réalisation d’un danger. Sur le bourgeon d’un grain de folie, la rêverie se dévoile sur un champ de ruine.

À la frontière d’une forêt, tentes éventrées, chariots écrasés, métal plié, voiles sombres et tuniques communes déchirés. Accrochés à ce qu’il reste des cadavres frais, pavant le sol battu des sillons que laisse le clocher nomade, derrière lui, déjà loin du carnassier.

Une vision trouble se transpose dans la scène, rasant le sol pour ne pas être découvert. En l’absence de bosse sur une plaine, les débris lui servent de zone de confort, sous des grondements répétitifs. Sa main se referme sur le manche de sa rapière, à l’approche du cœur du conflit. Une créature chimérique, familière, piétine les carcasses. Animée d’une furie, elle rue en direction de deux solitaires silhouettes, embaumées par l’obscurité de leur voile sombre d’aventurier. Une vacillante lumière iridescente éclot à la taille de l’une des silhouettes, condamnant l’assaut de la créature, la pilant devant eux. Quelques sursauts de rage les surprennent, mais à chaque sonde, chaque caresse méticuleuse, chaque acclamation, l’orgueil grossit dans la réussite de leur méfait.

Un final éclat de la lanterne envoie la créature en cavale dans la forêt. Parti avec son vacarme, le silence s’invite, et réveil l’attention sur des pleurs, un enfant à proximité. La vision se déplace prestement vers le creux d’une caisse, à moitié éventrée. Elle saisit l’embaumé, écarte les draps pour révéler un visage s’éclaircissant. Ses petits doigts de bébé attitrés par le manche brillant de la rapière. Un sourire qui allume la scène. Une explosion de sentiments inédits. Le foyer brûlant d’une curiosité naissante. L’aspiration innée d’une passion envolée. Autour de la vision, des silhouettes sombres s’approchent, et crient d’une parole roque et résonnante.

 

***

 

« Aventurier Meos ! Meos ! MEOS ! »

 

La chair se réveille. Doucement, léchée par la lumière qui s’exfiltre des persiennes ouvertes. Le bruit monotone des chicanes des marchands enrobe la pièce.

 

« Meos ! Meos ? répète Sage, penchée sur son visage inexpressif, et ses yeux mi-ouvert. Enfin ! Vous m’avez fait une peur ! Un cauchemar ? Meos reste muet. C’est une bonne chose. C’est le signe que votre esprit commence à digérer les évènements, et dans ces moments-là, le meilleur remède est de multiplier les bons moments ! Jusqu’à faire basculer la balance, comme… m’aider à soigner vos confrères aventuriers ! D’un autre côté, je ne vous laisse pas le choix. Allez, en tenue ! »

 

Sage tire une cape sombre d’une caisse, la secoue, fait apparaître une neige de fine poussière sous les rayons de lumières, avant de la lever au niveau de ses épaules. À sa plus grande surprise, Meos se lève du lit, sans appuis. Les blanchâtres rayures cutanées ne se sont pas estompées. Il s’articule, tandis que Sage s’accommode pour lui faire enfiler le vêtement. Au contact, la cape épouse à sa peau, s’anime de vivantes vagues, fourmillantes, imitantes, loin de son regard.

 

« Parfait, dit Sage, en mettant la capuche. Mettez aussi ces sandales ! continue-t-elle en pointant une autre caisse ouverte, tandis qu’elle s’attelle sur un bureau, blottissant ses affaires dans un grand sac bandoulière. Meos attend debout, devant la sortie de la bâtisse, encapuchonné, chaussé, patient.

 

« Excusez-moi, on va faire une grande tournée, et je veux éviter d’avoir à repasser ici, grommelle-t-elle en fourrant le sac à sa capacité maximum. Tout en le portant avec aisance, elle se rapproche de la sortie, et regarde une dernière fois le désordre de la pièce. Caisses ouvertes, feuilles au sol, et une cape sombre, délaissée, couvrant des sandales. On verra ça à notre retour. Suivez-moi, le cycle va être court ! »

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