Mamita était tombée malade. Ce n'était malheureusement pas étonnant au vu de ses trop nombreux allés retours entre Lideirn et la maison. Que fabriquait-elle au village ? Autre chose inquiétait Colombe : le médecin restait trop vague sur son état, il n'osait pas en parler devant elle et puis l’ordonnance comportait un tas de noms qu’elle ne comprenait pas. L'homme devant elle, feuilletait une énième fois le dossier. Cette fois-ci il hocha gravement du chef. Sa blouse blanche le rendait presque surhumain, ses épaisses lunettes noires n’ajoutaient rien de bon. Il eut un silence avant de finalement planter ses yeux dans les siens :
- Colombe, tu peux retirer ta capuche. J’étais là à ton arrivée, il hésita, tu ne peux pas continuellement te cacher.
Elle eut un bref sursaut mais ne fit rien. Jusqu'au bout elle tiendrait. Le docteur fronça les sourcils et finalement abandonna la partie.
- J’ai d’autres patients tu sais, je ne pourrais pas chercher les médicaments à ta place. De toute façon ta grand-mère ne peut plus s’occuper de toi. Je vais appeler tes parents.
- Monsieur, je vous en prie, vous connaissez bien ma famille. Faites-moi confiance, je peux encore être utile ici.
- Et qui te gardera si…
Le médecin se tue, elle lui faisait de la peine. La solitude qu’elle était la seule à s’être imposée, commençait à la détruire de l’intérieur. Pour cela, aucun traitement n’était capable de la soigner. C’était à elle seule de faire le premier pas.
- Il ne se passera rien, murmura-t-elle enfin dans un souffle, j’irais à Lideirn et je m'occuperais du mieux possible de ma grand-mère.
La pendule tinta dans l’entrée. Le docteur devait s’en aller. Il la regarda une dernière fois, haussa les épaules et s’en alla, la mallette à la main. Colombe se frotta le visage avec angoisse. Que se passerait-il une fois chez elle ? Oh que du mal…
Son téléphone vibra dans sa poche. Non pas déjà ! C’était son frère, Jacques.
- Hello sœurette ! Je viens prendre de tes nouvelles !
Sa voix grave et enthousiaste la fit tressaillir. Depuis combien de temps ne l’avait elle est pas entendu, en vrai. Elle lui répondit le plus joyeusement possible. Mais ça sonnait faux. Elle lui dit qu’elle se portait à merveille, que sa chambre avait le mérite d’être calme et d’autres fadaises de ce genre. Qu’en saurait-il de toute manière ?
- Si je comprends bien tu vis dans un rêve ?
Elle bégaya : son ton était ironique. Avec plus de gentillesse il continua, presque triste :
- Tu aurais pu mieux me convaincre. De toute façon, je sais déjà pour Mamita. Elle a tenu à m’envoyer un message. La question piège maintenant : quand est-ce que je te ramène ? C’est qu’on se languit de toi, ici, ma chère !
- Jamais ! Cria-t-elle, les larmes aux yeux.
Le grésillement au téléphone disparut durant une longue minute avant de reprendre plein de compassion cette fois. Il ne fallait pas la brusquer.
- Tu es face au mur, je te comprends mais je ne t’appelais pas juste pour les nouvelles. Enfin si. Mais je n’aime pas, enfin, on n’aime pas te savoir morte d’ennui et toute seule dans la cambrousse.
- Y a moins de voitures ici…
- Ne me coupe pas, petit Colibri.
- Alors ne m’appelle pas comme ça!
De l’autre côté de l’écran, Jacques eut un sourire que peu de frères ont. Il était heureux, et malheureux aussi, de l’avoir pour sœur. Mais comment l’aider ?
- Je t’en prie, continua Colombe des sanglots dans la gorge, ne parle pas de ça aux parents. S'il te plaît, tu sais que c'est dur en ce moment...
- Je ne dirais rien pour l’instant. Mais si je le juge obligatoire je te ferai rapatrier.
Tout de suite les grands mots ! Mais la reconnaissance de Colombe était telle qu’elle ne releva pas. L’appel perdura encore quelques instants entre rire et larme. Enfin il fallut raccrocher et revenir au monde réel. Les paroles du docteur résonnaient toujours dans son esprit.
Posant son portable sur les genoux, elle se mit à réfléchir. Elle paniquait rien qu’à l’idée de sortir dans la rue. Comment irait-elle jusqu’à la Pharmacie ? Dans l’ombre comme toujours. Car l’invisible l’avait happé un de ces jours que la terre avait créés. Un maudit ne sort pas. Encore moins un maudit sans force ni courage. Avec un mouvement désespéré elle se releva, elle devait le faire pour Mamita, non pour elle.
Elle prit son manteau qu’elle posa sur ses frêles épaules puis elle monta prévenir sa grand-mère, mais la trouva endormie. En silence elle ferma tout à clé et posa son pied sur la pierre rude de la terrasse. Au-devant, l’herbe fleurie se courbait sous les rafales du vents. En bas la forêt se dressait fière et mystérieuse. Des ondes chatoyantes balayaient les branchages dorés. Une atmosphère étrange flottait sous le ciel, empli de pleur et de rire. Colombe se dépêcha d’emprunter l’allée. L’arbre moqueur qui lui avait fait si peur il y a une semaine, la narguait au coin de son œil. Elle n’en avait parlé à personne. Ce serait confirmer sa folie naissante…
Le portail fut ouvert et refermé. En face une longue route cabossée serpentait entre bois et champs. Prudente, elle la suivit jusqu’au village , là où un grand porche s’ouvrait sur l’unique avenue de Lideirn. Des maisons en pan de bois s’entassaient à droite comme à gauche. Colombe stoppa sa marche, prise d’un affreux doute. Où devait-elle aller ? Et surtout elle n’avait rien d’autre que sa capuche pour se cacher. Heureusement elle aperçut un homme âgé flânant à peine trois pas plus loin. Il devait être à moitié aveugle. Sans plus attendre Colombe se planta devant et tout à trac lui demanda l’adresse de la Pharmacie.
- Attendez jeune fille, que je me souvienne. C’est par là, au coin de la rue...
Il ne put finir, Colombe avait déjà détalé. Elle ne s’arrêta que pour respirer dans un endroit qu’elle jugeait abandonné, à quelques maisons de sa destination finale. Un instant plus tard elle franchissait la porte automatique. Aussitôt une odeur d’antibiotiques la prit au nez, l’obligeant à plisser son visage. Elle avait oublié ce désagrément. Une femme rangeait des étagère et plus loin un homme attendait à la caisse, à moitié endormie. Lorsqu’elle s’approcha un peu plus, le gars ouvrit un œil mais ne fit pas mine de bouger.
- Monsieur ? Finit-elle par demander
- Oui ?
- Je viens sur demande du docteur Faladier pour Madame Sarati.
Il réagit instantanément, le regard perplexe.
- Mais tu serais pas sa petite fille, tiens ? On t’a jamais vue ici, enfin y a longtemps. Toi et ton frère, deux vrais galopins.
- On a changé Monsieur, et puis je suis pressée, le coupa-t-elle avec hauteur.
- Je vois.
Il pianota sur l’ordinateur, l’air blasé. Un moteur, quelque part, vibra et des boites colorés sortir tout à coup d’un long tuyau collé aux murs. Colombe s’empressa de payer avec du liquide. Mais le Monsieur avait une dernière question, c’est qu’il devenait agaçant. Quel âge elle avait ? 17 ans, au revoir. Colombe quasi dehors eu le temps d’entendre la dernière phrase de l’étrange pharmacien.
- Ah ! Ça ne me rajeunit pas tout ça.
Si elle n’avait pas été si énervée et angoissée, elle en aurait sans doute ri.
Je suis d'accord avec ton commentaire de début de chapitre, on a effectivement plus de mal à se plonger dans ce chapitre, alors que je sens bien ce que tu voulais faire en toile de fond. Si tu veux bien, je vais te lister ce qui a coincé pour moi :
-D'abord, les fautes : elles ont pas mal alourdi ma lecture, peut-être laisse le chapitre se reposer un jour ou deux avant de le relire et de le poster ? Perso, force de lire et relire la même chose, je zappe des détails et des erreurs
-Ensuite, le plus gros problème selon moi est le ton. D'un côté, tu as cette espèce de légèreté enfantine qui convient à l'âge de Colombe mais qui n'ont pas forcément leur place dans les passages qui ne sont pas des dialogues ( "Mamita était tombée malade, quelle poisse" par exemple) et des tournures de phrases trop matures pour son âge et qui font un peu tache ("ne le faîtes pas !" et "Promets-le moi" par exemple). A la place, essaye de voir comment toi tu le dirais dans une vraie conversation. Pour reprendre la conversation avec le docteur, quand Colombe répond, j'aurais mis quelque chose comme : "Non, s'il vous plaît, ne faites pas ça !". Mais ce n'est qu'un exemple.
-Je sens aussi que tu veux poser les bases de l'histoire et c'est très bien, c'est ce qu'il faut faire dans les premiers chapitres - notamment le fait qu'elle "vive dans un rêve"- je ne sais pas ce que ça veut dire pour l'instant mais j'ai hâte d'en savoir plus :) En revanche, c'est super dramatique dès le début sans avoir vraiment préparé en amont et ça, ça m'a rendue un peu confuse, car ça s'ajoute aux points précédents.
-Dernier point : "- Ne me coupe pas, lolita." La référence à Lolita m'a vraiment surprise, surtout venant de la part de son frère ? Et pourquoi lui parle-t-il comme à une gamine si, et je viens de relire la fin du chapitre, elle a 17 ans ? Pour une enfant plus jeune pourquoi pas, et encore. On dirait plus l'attitude d'un parent. Après, peut-être que cette dynamique s'expliquera dans les chapitres à venir.
Surtout, j'espère que tu ne prendras pas mes commentaires trop durement, parce que j'ai toujours très envie de savoir la suite et que je pense vraiment que ton histoire a énormément de potentiel. Je reviendrai lire la suite :)
La phrase "tu ne vis que dans un rêve" est ironique de la part de son frère qui se doute bien qu'elle ne aille pas bien en réalité. Peut-être ne l'ai-je pas bien montré. Le surnom lolita n'est pour le coup pas une référence. C'est une blague entre eux. S'il le faut je le supprimerai, il n'a pas forcément sa place dans le récit.
Merci encore de ton intérêt pour mon humble histoire, cela m'aide vraiment et m'encourage beaucoup!