Mathurin eut un bref moment de recul.
- Je.. euh…
Mais le chien ne lui laissa pas le temps de finir et commença à lui tourner autour en marmonnant.
- C'est donc toi le candidat qu'ils ont envoyé cette année ? se demanda-t-il comme à lui-même avec une voix basse et inquiétante. Tu ne m'as pas l'air très dodu. Feras-tu vraiment l'affaire ? continua-t-il à marmonner.
Mathurin commença à être quelque peu effrayé. Il se rappela alors ses cours de communication non violente :
- Lorsque je vous entends me questionner en parlant de moi comme quelqu'un de pas très dodu, je me sens un peu effrayé, j'ai besoin d'être sûr que vous n'essayerez pas de me manger. Pourriez-vous me rassurer à ce sujet ?
Le chien éclata de rire.
- Moi, te manger, toi, un pingouin ? Ah ah ah ! Il n'y a que les chats qui en veulent à tes plumes mon ami.
- Ahhhhh… répondit le pingouin, pas plus rassuré pour un sous. Et vous en avez vu ?
- Regarde sur ta droite, à côté du banc.
Mathurin regarda de ce côté. Il y avait en effet un chat. Un petit chat noir qui le regardait fixement. Comment ne l'avait-il pas vu avant ?
- Maintenant, regarde à gauche, à côté du carrousel.
A nouveau, il y avait un chat, gris cette fois. Il le regardait, mais n'osait pas s'approcher, sans doute à cause du chien.
- Et devant, près de la corbeille à papier.
Là, il y avait un chat tigré qui les regardait fixement.
- Comment ai-je fait pour ne pas les voir ? S'inquiéta le pingouin.
- Les chats sont doués pour se fondre dans la foule. Tu as eu de la chance que je te trouve avant. Suis-moi.
A mesure que le chien et le pingouin avançaient, les chats se regroupèrent devant eux.
- Comment faire pour avancer ? s’enquit le pingouin.
- Monte sur mon dos, on va s'amuser un peu !
- Vous êtes sûr ? Répondit le pingouin, pas très rassuré.
- Oui ! Je suis Fier-croc, maître du Champ de Mars. Je suis là pour t'aider !
Le pingouin monta donc sur le dos du chien. Celui-ci prit une grande enjambée et fonça sur les trois chats. Ceux-ci s'écartèrent. Mais tandis que le chien continuait sa course en faisant le tour du Champs de Mars, les chats se mirent à la poursuite du chien. Bientôt d'autres chats les rejoignirent et se fut une dizaine de chats qui courraient après le chien et le pingouin.
- La situation s'est un peu empirée derrière nous, dit Mathurin
- Tiens, regarde dans mon petit sac à dos, répondit le chien. Prends une boule rose.
Mathurin regarda dans le sac. Les yeux du pingouin s'écarquillèrent d'émerveillement devant de jolies boules de couleur différentes. Il prit la rose
- Lance-là dans leur direction !
Mathurin leur envoya une boule rose. Aussitôt, les chats se jetèrent dessus.
- C’est une pelote de laine, ils ne peuvent pas s’empêcher de se jeter dessus. Cela les retiendra quelques minutes.
Le chien continua sa course bien loin des chats qui se disputaient entre eux pour savoir qui aurait la pelote de laine.
Parvenu à une petite rue, le chien s'arrêta.
- Ah ah, c'était bien rigolo, mais ce n'est plus de mon âge ! Cependant nous avons maintenant quelques minutes avant qu'ils ne reprennent leurs esprits.
- Je ne pensais pas qu'il y avait autant de chats, dit le pingouin, encore tout secoué.
- Et encore, il y en a beaucoup plus au nord de Paris.
- Oh non, s'inquiéta Mathurin
- Écoute-moi bien car nous avons peu de temps. Je vais devoir bientôt retourner près de mon maître qui a besoin de moi. Mais avant écoute bien ces conseils.
- Je vous écoute.
- Premièrement, reste toujours sur les grandes avenues, ne te laisse jamais embarquer dans les petites rues. Car c'est là que les chats sont.
- Les grandes avenues, d'accord.
- Deuxièmement, suit la route suivante : va d'abord jusqu'aux Champs des Invalides. Traverse le pont de la Concorde, puis dirige-toi vers l'Opéra Garnier, puis rue la Fayette jusqu'à la Gare du Nord, et enfin remonte la grande rue pour prendre les escaliers est. MAIS SURTOUT, ne t'approche pas du Moulin Rouge ! Il y a beaucoup trop de chats là-bas.
- Champs de Mars, Opéra, escalier est... pas le moulin Rouge, se répéta le pingouin qui en profita pour sortir sa carte de son propre petit sac à dos et à marquer le chemin dessus.
- Pour finir, méfie-toi des rats, ils sont manipulateurs et peu fiables. Et surtout, ne les suit pas dans les égouts, il y a des monstres horribles là-bas.
Le pingouin essaya de graver ces conseils dans sa mémoire.
- Tiens prends mes pelotes. Il n'y en a que cinq, utilise-les donc en dernier recours, pour t'enfuir. Si tu vois un chat, et qu'il ne t'a pas encore vu, le mieux c'est de te cacher.
- D'accord, très bien.
Le chien se redressa alors :
- Ta mission est essentielle. Cela fait 5 ans que nous n'avons pas eu de neige. Tous les enfants de la ville ont perdu leur joie de vivre. La magie de Noël disparaît. C'est devenu une fête sans âme. Si la neige ne revient pas, j'ai peur que dans quelques années, tout le monde ait oublié cette fête.
En disant cela, le chien avait pris un ton très sérieux. Il semblait sincèrement attristé de la disparition de la neige.
- Et moi j'aimerais tant que mon maître retrouve le sourire ! Un peu de neige et il se mettait à chanter et à rire !
- Je ferais de mon mieux, dit le pingouin.
- Merci ! Je vais aller distraire les chats du coin pendant que tu reprends ta route. Petit Pingouin, bonne chance !
Et le chien s'en alla en direction des chats. Mathurin prit son petit sac bien plus gros qu'avant car rempli de pelotes de laine et s'en alla le long d'une grande allée. Il espéra très fort que les chats ne le voient pas. Mais ce qu'il ne savait pas, c'est que les chats sont loin d'être les seuls animaux effrayant de Paris... et ça, il ne tarderait pas à le découvrir !
J'attendrais le prochain chapitre!