Je rentrai tard dans mon studio, et n’eus pas envie de voir qui que ce soit. Je parlerais de cette séance à Mélanie, ne serait-ce que parce qu’elle allait m’interroger et souhaiterait savoir comment cela s’était passé, mais pour le moment ça n’appartenait qu’à moi, et je ne me sentais pas capable d’en discuter. Il fallait d’abord que je laisse décanter les sentiments, les sensations et les impressions. Le sommeil vint, mais par à-coups. Je me réveillai régulièrement, non pas qu’une pensée forte ou un cauchemar s’en chargèrent, mais simplement mon sommeil était léger et mon cerveau avait du mal à laisser une deuxième fois les clés de la maison à mon corps. Vu ce que celui-ci en avait fait en fin d’après-midi, je pris acte de la situation en bouquinant à chaque fois que ma nuit s’interrompait, en attendant que mes yeux se ferment à nouveau.
Half past ten in the morning
There’s something humming in my head
Un appel d’Éric me les fit ouvrir peu avant dix heures du matin. Une pluie battante ruisselait sur les vitres. Mars avait envoyé ses premières giboulées en ce mardi triste et gris.
-Ça va m’dame ?
-Mouiihh…
-Oulah je te réveille ?
-Pas grave, je suis contente de t’entendre.
-T’as fait la fête hier soir ?
-Non, ma sœur m’avait épuisée, j’ai dormi.
-Ça s’est bien terminé avec elle ?
-Oui, le dernier film était hyper violent. Mais le séjour était très sympa.
-Tant mieux. T’as fait quoi de beau hier ?
-L’amour avec deux grands blacks culturistes.
-Ah je parlais de ça justement avec Blake Lively, pendant qu’on était sous la douche, que je devrais me mettre à la musculation.
-Me dis pas que tu regardes Gossip girl …
-Vaguement entendu parler, pourquoi ?
-Blake Lively.
-Je l’ai vue dans « Green Lantern » l’année dernière, j’en garde un souvenir… positif…
-Tu m’as fait peur. Bon sinon toi, ça va chez tes parents ?
-Moyen, ils n’arrêtent pas de s’engueuler, ça sent un peu la fin.
-Désolée pour toi. T’es coincé jusqu’à quand ?
-Je vais rentrer jeudi dans la journée. On peut se voir jeudi soir ?
-Génial !
-Ça me va. Ecoute j’y retourne. Je t’appelle quand je suis tranquille dans le train jeudi.
-On fait ça.
-Je t’embrasse.
-Moi aussi.
It may be shame that I’m feeling
But it makes me get out of my bed
Je trainassai une bonne heure entre mon canapé, mon lit, un énorme bol de café et quelques biscuits secs. Il fallait que je fasse des courses. Il fallait que je sorte. Il fallait que je me change les idées. Je repoussai à plus tard l’effort de faire vraiment le point sur la situation et ce qui s’était passé la veille. Je passai rapidement à la douche, posai mon rouge à lèvres devenu en moins d’un mois un signe distinctif personnel, enfilai des vêtements chauds ne craignant pas trop la pluie, mes Converse, et quittai mon studio un peu avant midi.
Move to the city move in there
And find myself in another place I swear
That among the reason for loosing confusion
I find the proper solution
Je commençai par me diriger vers le centre-ville, me protégeant de la pluie comme je le pouvais, le vent rendant par moment superflu le recours au parapluie. N’importe quelle boutique ferait l’affaire, il fallait juste que je trouve une échappatoire pour ne pas penser à « ça ». De fil en aiguille et de ruelle en ruelle, je finis par me retrouver nez à vitrine face à l’enseigne dans laquelle j’étais tombée amoureuse de cette robe-de-soirée-hors-de-prix-pour-une-étudiante. Mais je n’étais plus seulement étudiante, n’est-ce pas ? J’entrai. La vendeuse me reconnut.
-Bonjour mademoiselle.
-Bonjour.
-Vous n’êtes plus en galante compagnie aujourd’hui ?
-Et non.
-Je suis sûre que vous revenez pour la robe que vous avez essayée la semaine dernière.
-Vous devriez écrire des horoscopes.
-Vous faisiez quoi déjà ? 36 ?
-Oui.
-Nous l’avons encore.
-Et son prix a diminué de moitié, n’est-ce pas ?
-Hélas non mais si vous la prenez et que vous rajoutez une paire de chaussures, je saurai faire un geste. Il faut quand même des chaussures à la hauteur d’une telle robe, vous ne trouvez pas ?
-Ça n’irait pas, avec ça ? interrogeai-je en fixant mes Converse, sans attendre de réponse.
Je repassai la merveilleuse robe si courte, si originale, si moderne, si ajustée à ma morphologie, si flatteuse, si tentante. Ces pans verticaux en crêpe gris et blancs qui cassaient le côté usuel de la viscose noire étaient parfaits ! Ces deux ceintures donnaient l’impression qu’il suffirait d’empoigner une guitare électrique pour ressembler à une chanteuse de rock. A mi-cuisses, la robe assumait un a priori osé mais sans en rajouter grâce à un décolleté sage qui préférait mettre en valeur les épaules. Tout ce que j’aimais … Mais l’étiquette marquait invariablement deux-cent-quarante euros. Moins que le prix que m’avait payé Agnès, avant-même le complément de cent-cinquante euros. Je sortis de la cabine. La vendeuse en fit des tonnes sur le thème « elle est faite pour vous » tout en m’emmenant au fond de la boutique où quelques souliers étaient alignés. Il n’y avait pas un choix dithyrambique mais la qualité semblait au rendez-vous. Une paire d’escarpins à la forme très classique mais zébrés de bandes noires et blanches aiguisa ma curiosité. Ils étaient comme la robe : faussement standard, et en fait très originaux. Ils s’associeraient parfaitement avec elle. Je cherchai ma taille et trouvai un 41. Le talon était très fin, mais pas démesurément haut. Il devait culminer à huit ou neuf centimètres. Je fis quelques pas, et me sentis bien dans cette tenue qui changeait énormément mon allure.
-Ah vous n’êtes plus la même, confirma la vendeuse à l’affût.
-Ils sont à combien ?
-Cent trente euros.
-Et donc le geste promis consiste à remplacer trois-cent-soixante-dix euros par … ?
-Pour trois cents je vous laisse le tout.
C’était plus qu’il n’en fallait pour que je cède. Une fois rhabillée, je me dirigeai vers le comptoir où la vendeuse emballait ma folie. Je sortis six des billets de cinquante euros qui, hier encore à cette heure-ci, stagnaient dans le portefeuille d’une femme fantasmant sur les mains d’une autre femme.
Satisfaite de cet achat qui n’avait de compulsif que l’apparence, j’abrégeai ma tournée des vitrines et, après avoir repris un tram, me dirigeai vers le supermarché le plus proche de mon immeuble. Je fis le nécessaire pour avoir de quoi manger toute la semaine et rentrai chez moi. Sur le trajet, je vis que Mélanie avait essayé de m’appeler. Je lui laissai un sms pour l’informer que je rentrai chargée comme un mulet. Elle vint gentiment m’aider à monter mes nombreux sachets, puis nous nous installâmes chez moi, elle sur mon canapé, moi en train de ranger mes courses.
-Tu as faim ?
-Non, ça va, merci.
-Faut que je déjeune, moi.
-Il est quatre heures.
-Ah bon ?
-T’as l’air à l’ouest.
-J’y suis.
Je m’ouvris un pot de fromage blanc, en versai trois généreuses cuillers à soupe dans un bol et rajoutai des quartiers de mandarine ainsi qu’un kiwi épluché et coupé en morceaux à la va-vite. Pour faire diversion encore quelques minutes avant l’inévitable discussion, je lançai à Mélanie le sac contenant la robe et les escarpins. Elle sortit les deux achats et les observa attentivement.
-C’est carrément magnifique !
-Je suis bien d’accord, commentai-je en boulotant ma mixture.
-Tu te souviens de ce que je t’ai dit à propos des massages qui ne sont pas censés financer des Louboutins ?
-Des Louboutins ça coûte deux fois le prix qu’on m’a fait pour l’ensemble.
-Vas-y, réponds à côté…
-Je ne dis pas que je vais faire ça toutes les deux semaines. Là, j’ai eu envie.
-Rapport au montant exorbitant qu’on t’a versé hier soir ?
-Montant qui a été revu à la hausse, figure-toi.
-En quel honneur ?
-Parait que je suis attachante.
-Ça c’est vrai, je trouve aussi, ma poulette, mais c’est pas pour autant que je vais te filer du pognon à chaque fois que je vois ta jolie frimousse.
-Ouais mais toi je t’ai pas fait jouir.
-Sans déconner ?
-T’es sûre, tu veux pas un bol ? C’est super bon, avec des fruits !
-Et avec un abricot, c’est comment ?
-T’es conne.
-Sérieusement, Léa, tu lui as fait une finition ?
-Bah je suppose que ça s’appelle comme ça pour une femme aussi, oui.
-Elle t’a dit que c’était deux-cent-cinquante pour un orgasme ou rien ?
-Non elle m’a dit qu’elle avait envie de se faire jouir elle-même. Elle a d’ailleurs commencé. Elle était à deux doigts. C’est le cas de le dire.
-Tu me fais trop rire.
-Moi aussi, je me fais trop rire, répondis-je en terminant la deux-cent-dix-neuvième bouteille d’Orangina de Charlotte, qui trainait encore dans mon réfrigérateur.
-Fais ton rot et raconte.
-Pendant une demi-heure c’était un massage normal.
-Entre deux nanas à poil, tu trouves ça normal, toi ?
-Oui alors tu sais, le concept de normal, question massage, a pas mal évolué dans mon esprit depuis trois semaines…
-J’admets.
-Donc après, tu vois, bon, tu fais les trucs plus sensuels, et la mayonnaise prend.
-Elle venait pour ça d’accord, mais de là à … ?
-Bah elle venait pour ça aussi, hein.
-Pas pour que TOI tu t’en charges, m’avais-tu dit.
-En effet, d’où le début de masturbation à la fin.
-Elle aurait pu attendre d’être sous la douche.
-Je ne crois pas que notre salle de bains faisait partie de son fantasme.
-Bon mais Léa, explique-moi un truc. Comment est-on passé de ses doigts dans sa chatte, à tes doigts dans sa chatte ?
-Amis de la poésie bonsoir…
-…
-Déjà, c’était un seul doigt.
-Putain mais tu l’as vraiment fait !
-Mais ça fait un quart d’heure que je te le dis.
-Et sans qu’elle te le demande ?
-C’est ça.
-Donc elle se touche… et … ?
-Et j’ai pété un plomb. Je ne sais pas. Le contexte. L’ambiance. Le sens des responsabilités. Je l’ai remplacée et je l’ai faite jouir.
-Le sens des responsabilités ?
-Bah tu sais, pour cinquante euros, on branle les mecs… pour deux-cent-cinquante, ça me faisait bizarre de la laisser faire.
-C’est pas ça, la raison.
-Ah non ?
-Non puisqu’elle t’avait rien demandé et avait été claire sur le fait qu’elle n’attendait pas un truc comme ça de toi. En plus tu m’as dit qu’elle était à deux doigts de jouir. T’attendais trente secondes et c’était bon.
-Bah alors c’est quoi la raison ?
-A toi de me le dire, ma poulette.
-Ecoute, j’arrive pas moi-même à me l’expliquer. Et puis c’est compliqué, le contexte était quand même très particulier.
-Ça t’a excitée ?
-Euh…
-Ok je vois. Ça m’est arrivé aussi, de réagir, je te l’avais dit.
-Pas avec des nanas.
-J’en ai jamais massé, ça risquait pas. Qu’est ce qui t’a excitée ?
-C’était … comme si je me caressais moi-même. Un truc en miroir. Super étrange.
-Elle t’a touchée, pendant le massage ?
-Très peu. Juste à la fin, mais pas énorme, et rien de méchant.
-Mais concrètement qu’est ce qui t’a donné envie de la faire jouir toi-même alors qu’elle s’en chargeait ?
-Mais j’en sais rien. Sincèrement. C’était plus vraiment moi. Si j’y avais réfléchi ne serait-ce que deux secondes, je ne le faisais pas. Mais j’ai pas réfléchi. Un truc complètement impulsif.
-Elle était contente ?
-A ton avis ?
-Ok question conne. Vous avez débriefé ?
-Oui bien sûr, on s’est organisé une séance de brainstorming après sa douche.
-Non mais tu vois ce que je veux dire.
-Il y a eu un truc bizarre.
-Quoi ?
-Elle a répété quatre fois une phrase. Dont une par écrit !
-Quelle phrase ?
Je cherchai dans mon sac à mains le carton blanc de la taille d’une carte de visite sur lequel Agnès avait écrit « Prenez soin de vous », et le tendis à Mélanie.
-Celle-là. Elle me l’a dit trois fois, très sérieusement. Puis m’a laissé ça sur le paillasson.
-Elle est amoureuse de toi ?
-Non, elle n’a pas écrit « je vous aime ».
-On dirait qu’elle a peur pour toi.
-Oui, c’est ce que ça évoque. Mais peur de quoi ?
-Que tu veuilles abuser des Louboutins, ma poulette.
Mélanie avait le chic pour appuyer au bon endroit. Elle quitta mon studio quelques instants plus tard. J’eus le temps de lui suggérer d’installer une machine à café, ce à quoi elle me répondit que si seules les clientes féminines en demandaient un, ça ne valait peut-être pas le coup d’investir, à moins que j’envisage une spécialisation dans les lesbiennes refoulées. Que voulez-vous répondre à ça ?
It’s nice to see you again
Woooooo
Je terminai l’après-midi en passant quelques disques. Sur l’hypnotique « Nightcall » de Kavinsky, mon esprit divagua en direction de Ryan Gosling, dont la vision me confirma que non, je n’étais pas subitement devenue homosexuelle. Non pas que c’eût été dramatique, mais enfin je pensais quand même que je m’en serais aperçue avant. Bon, mais alors quoi ? Avais-je simplement ressenti une bouffée de désir pour une femme, et trouvé dans le contexte intensément glissant, la pulsion nécessaire pour le passage à l’acte ? Et puis n’exagérons pas ! Je n’avais pas davantage « fait l’amour » avec Agnès qu’avec les hommes que j’avais déjà massés avant elle. Prestation érotique, ok, mais c’est tout ! Rassurée par ma rhétorique, je revins mentalement à cette mise en garde que ma cliente avait jugé bon de réitérer trois fois. Selon ma Sicilienne préférée, cette crainte était de la même nature que les rappels qu’elle m’avait soulignés une fois ou deux, en particulier devant mes achats de l’après-midi. Peut-être … Mais quel mal y avait-il à s’acheter de jolies choses puisque j’en avais enfin les moyens ? Et puis, peut-être Agnès avait-elle voulu dire autre chose. Peut-être avait-elle pensé à tous les clients qui allaient se succéder sur la table où elle venait de jouir, et cette image sordide l’avait-elle inquiétée pour moi. Au fond, ça revenait au même… En l’absence de réponse claire, je laissai cette énigme de côté et terminai la journée en musique, feuilletant quelques revues, avant de me laisser entrainer par un film et de me coucher en oubliant de dîner.
Mercredi, je réinvestis mon quotidien pour tenter de passer à autre chose, profitant de mon cours particulier, qui avait été maintenu pendant les vacances scolaires, puis de mon après-midi à la danse. La cicatrisation de mon piercing étant achevée, je pus de nouveau participer aux répétitions en exécutant tous les mouvements. La prof avait pour projet de monter un spectacle que nous réaliserions pendant l’été. Selon la date il se pourrait même que mon piercing définitif soit posé à ce moment-là, et je m’en réjouissais. Toutes les filles de cette association, dans laquelle nous étions une douzaine de danseuses de niveaux variés, m’avaient complimentée sur cette initiative et sur le résultat qui, bien que provisoire, apportait une touche très sexy à mon ventre. Cumulé aux tenues colorées, fluides et sensuelles, je me sentais lumineuse et féminine.
Une fois de retour chez moi, je travaillai pour mon master tout en allumant le portable de Lola. Il fallait bien que j’y revienne ! J’avais deux messages. Le premier était sans intérêt et je l’effaçai avant même d’en avoir achevé l’écoute. Le deuxième était d’Agnès et avait été enregistré ce matin.
« Bonjour Lola c’est Agnès. Je suis contente de tomber sur votre répondeur, car je voulais juste vous laisser un petit message, mais je n’ai ni demande ni question particulière. Voilà je tenais à vous remercier à nouveau pour le bonheur que vous m’avez apporté avant-hier. J’ai vraiment été charmée par votre massage, par votre gentillesse, par votre beauté, aussi. » Elle marqua une pause puis reprit. « Je voulais vous dire aussi que vous avez réveillé des choses en moi qui s’étaient perdues depuis mon divorce. Je fréquente un homme de temps en temps et hier soir, vingt-quatre heures après votre massage, j’ai passé une nuit assez exceptionnelle avec lui. Ma libido et le plaisir ressenti n’avaient plus rien à voir… Bon je n’entre pas dans les détails, vous m’avez comprise, mais sachez en tout cas que vous êtes une bienfaitrice qui continue d’agir après qu’on l’a quittée. Je vous souhaite une très belle vie, Lola. Aurevoir et encore merci. »
Le moins que l’on pouvait dire était que cette femme m’était reconnaissante. C’en était presque trop. Trop de responsabilités, trop de compliments pour moi toute seule. J’étais heureuse de cette initiative, mais me sentais embarrassée par l’ampleur que cela prenait, alors que mon souhait était de tourner cette page ambigüe et de retourner à mes chers clients possesseurs de pénis, dont quatre m’attendaient le lendemain, Nicolas fermant la marche. J’effaçai le message en espérant que l’épisode Agnès fût terminé.
Après une demi-heure de relecture attentive de mes cours, le téléphone sonna.
-Allo oui bonjour ?
-Bonjour mademoiselle, je m’appelle Vincent, je suis un client d’Alessia, je comptais prendre un rendez-vous avec elle et je viens de constater que l’annonce a changé et que vous êtes désormais deux masseuses, alors je me suis permis de vous appeler.
-Et vous voulez faire une infidélité à Alessia, c’est bien ça ?
-Je dois dire que c’est très tentant. Vous pratiquez les mêmes massages, dans les mêmes conditions, aux mêmes tarifs qu’elle ?
-C’est tout pareil, oui !
-Je faisais de temps en temps un petit extra avec elle, elle appelait ça un « body body ».
-Oui mais vous comprendrez que j’attends d’avoir déjà vu une personne pour proposer ce genre de choses.
-Oui je peux le comprendre. Dans ce cas pourrions-nous fixer un rendez-vous d’une heure topless ?
-Mais bien sûr. Lundi prochain à partir de 13 heures ?
-Juste entre midi et deux ce serait l’idéal pour moi.
Je vérifiai rapidement, en basculant sur l’appli de l’agenda partagé, que Mélanie n’avait rien fixé. Il me semblait que le lundi, qui était notre après-midi commune, elle ne commençait qu’à 14 heures. En effet elle avait inscrit deux massages à 15 heures puis 15h45. J’ajoutai Vincent pour sceller le rendez-vous.
-Eh bien c’est noté, Vincent. Vous avez quel âge ?
-J’ai quarante-deux ans.
-Parfait, alors je vous dis à lundi
-On parle bien du 12 mars, lundi prochain ?
-Oui, dans cinq jours.
-Parfait, merci Lola.
-Aurevoir Vincent.
Quelques sms apparurent, sans même que je n’y prête attention. Un peu avant 18 heures, ça sonna à nouveau.
-Oui allo ?
-T’es une grosse pute, toi, hein ?
La routine… blacklisté.
Quelques minutes plus tard, nouvel appel.
-Allo oui ?
-Oui bonjour c’est au sujet de l’annonce.
-Oui, vous avez des questions ?
-Ce sont des massages, vraiment ? Je veux dire vous êtes vraiment masseuse ?
-Oui, massages et rien d’autre, c’est bien ça.
-Avec une finition ?
-Manuelle, oui. Quel est votre prénom ?
-Ah oui pardon, je suis Rémi.
-Vous voulez savoir autre chose, Rémi ?
-En fait, j’aimerais venir avec ma femme.
-Ah non, Rémi, non, ça je ne fais pas.
-Non, non, mais attendez, c’est pas pour la masser elle. Ce serait juste pour qu’elle regarde.
-C’est quoi ce plan bizarre ?
-Bah elle me mate pendant que …
-Votre intérêt à vous, je vois bien, mais le sien … ?
-Mais elle sera forcément contente que je sois content.
-Excusez-moi, Rémi, elle est au-courant de votre petit projet ?
-Non, non, c’est une surprise.
-Ce sera sans moi, Rémi.
-Bon tant pis je vais essayer l’autre fille de l’annonce.
-C’est ça, essayez, aurevoir Rémi.
« Tu vas être bien reçu », m’amusai-je en raccrochant. On trouve de tout parmi les fantasmes, qui ne sont pas forcément choquants, mais qu’un mec puisse avoir envie de se faire masturber par une fille sous les yeux de sa femme sans l’avertir de ce qui va se passer, en prétextant que « ce qui est bon pour moi est nécessairement bon pour elle », je n’en revenais pas. J’ignorais si c’était de l’inconscience, du sexisme ordinaire ou une pulsion sexuelle aveuglante, mais j’étais contente de ne pas être sa femme, à celui-là. Quelques secondes plus tard mon téléphone sonnait à nouveau. C’était Mélanie. Rémi avait réussi à énerver la femme du Parrain.
-C’est qui ce con ?
-Un mec qui croit que sa femme est une poupée qui fait oui.
-Ah ouais, bien dit. Il m’a raconté que tu lui avais conseillé de m’appeler moi, car moi je fais ce genre de choses. Il va de soi que je ne l’ai pas cru, il en a pris pour son grade, ce connard.
-Il a osé dire ça ? Dis-donc il était prêt à tout ! Merci de ne pas l’avoir cru, en tout cas.
-Bah quand même, ma poulette, je sais que t’es un peu folle mais je sais qui tu es.
-Ouais.
-T’as eu un rencard avec mon Vincent ?
-Ah oui en effet, il voulait un body, on fera un classique pour commencer. Il a l’air sympa.
-Oui, c’est un rigolo tu verras.
-Ah oui ?
-Oui le genre de mec qui te met l’animation dans une soirée. Il est capable d’éjaculer en racontant une blague.
-Allons bon.
-J’exagère un peu, mais c’est un boute-en-train. Enfin ce sont des séances qui passent vite.
-Ok je verrai ça. Mais dis-moi, tu ne sortais pas avec un Vincent, samedi dernier ? C’est pas le même, rassure-moi ?
-Mais t’es folle, bien sûr que non c’est pas le même !
-Bon ça va alors. Et avec le tien ça s’est bien passé ? Tu l’avais rencontré récemment ?
-C’est un type qui a fait un remplacement au secrétariat de mon école d’esthéticienne, il avait de beaux yeux alors je l’ai un peu dragué avant qu’il ne termine son remplacement.
-Et y’a autre chose de beau à part les yeux ?
-Cochonne ! Oui ça va mais il faudrait qu’il apprenne à s’en servir.
-T’es dure, là !
-Contrairement à lui, justement.
-Sérieux ?
-Bah faire l’amour avec uniquement une demi-gaule c’est pas facile.
-Tu lui plaisais pas ?
-D’après lui je l’intimidais, le pauvre garçon.
-Bah oui mais mets-toi à sa place, il saute la Mama et après il a la trouille de voir débarquer Al Pacino ou Marlon Brando…
-Oui ben moi j’aurais aimé voir débarquer Rocco Siffredi !
Mon mercredi réparateur touchait à sa fin. Je reçus un appel d’une copine de mon amphi. Quelques étudiants du groupe de TD auquel j’appartenais faisaient une soirée en ville et elle m’y conviait. Ravie de me changer les idées, je sortis passer une partie de la nuit dehors et rentrai au petit matin, n’ayant plus que quelques heures de sommeil devant moi pour être prête pour les quatre massages qui m’attendaient, dont le body avec Nicolas, puis pour mes retrouvailles avec Éric.
It's better, better than nothing
Take off your golden chains
Wooooooo
It’s something you can give in
Je poursuis ma lecture toujours aussi agréable, avec deux chapitres riches en surprises ! Le rapport de Léa à cette expérience est très intéressant, et tu réussis à bien faire ressentir ses incertitudes, ses doutes face à ses propres actions. Le “dérapage” de Lola était vraiment inattendu !
Quelques petites remarques...
Chapitre 17 :
“-Alors à très bientôt. Aurevoir Nicolas.
-Aurevoir Lola.”
→ J'ai remarqué que tu as fait à plusieurs reprises cette petite erreur, également dans les chapitres suivants : “au revoir” s'écrit avec un espace ;))
Chapitre 21 :
“Je sentis des frémissements envahir à nouveau le corps que je contorsionnai.”
→ contorsionnais ?
“Je ne jugeai pas nécessaire de répéter les précautions d’usage que j’énumérai en général aux hommes.”
→ énumérais ?
“-Ce que vous voulez. Aurevoir peut-être.”
→ Au revoir
Chapitre 22 :
“Je lui laissai un sms pour l’informer que je rentrai chargée comme un mulet.”
→ rentrais ? rentrerais ?
“Je vous souhaite une très belle vie, Lola. Aurevoir et encore merci.”
→ Au revoir
“C’est ça, essayez, aurevoir Rémi.”
→ au revoir
Je suis tout de même rassurée que Mélanie lui fasse une remarque quant à ses achats tout de même passablement compulsifs... Tout de même, elle dit qu'elle ne le fera pas toutes les deux semaines, mais cela fait trois semaines quelle a commencé avec ces massages, et elle a déjà cédé à plusieurs envies subites, face aux vitrines des magasins...
Je me demande comment la situation va évoluer, Léa est vraiment un personnage dont il est très intéressant de suivre les sentiments, les états d'âme et les expériences !^^
À tout vite ! :)
Pour le reste oui, les allers et retours entre passé simple et imparfait, quelle galère...
Oui, aussi sympathique et attachante soit-elle, Léa a de la chance d'être si bien entourée.
La suite arrive !
Je m'en vais de ce pas lire ce nouveau chapitre^^